GENÈSE, XLII, 29-fin.

« Toutes ces choses sont contre moi. »

 

Voilà une parole de murmure et de désespoir qu'on hésite à croire de Jacob, tant les sentiments qu'elle exprime sont peu compatibles avec ceux d'un enfant de Dieu. Et pourtant elle est de Jacob; de Jacob si béni, si privilégié, qui a contemplé la vision de l'échelle, qui a lutté avec Dieu et a été le plus fort, qui a été ramené dans son pays après une vie si agitée, qui a dit : « 0 Éternel ! je suis trop petit au prix de ta faveur et de ta fidélité ! » Comment a-t-il pu de si haut tomber si bas ? C'est que Jacob voulait marcher par la vue, et oubliait que Dieu nous appelle à marcher par la foi. Jusque-là il avait vu comme à l'oeil dans sa prospérité la bénédiction de Dieu sur lui ; mais le moment de l'épreuve arrivé, le voilà qui s'égare, qui perd pied, qui tombe dans le découragement et dans l'incrédulité, presque dans le blasphème Toutes ces choses sont contre moi !»

Qui ne doit s'avouer qu'il a plus d'une fois succombé comme Jacob? Qui n'a trouvé facile de suivre Jésus aussi longtemps qu'il ne s'agissait que de se laisser porter sur les ailes de la joie, et puis, la joie disparue, n'est lourdement retombé sur la terre et ne s'est replié sur lui-même et sa tristesse, oubliant les grâces déjà reçues et se laissant peut-être aller au murmure ? Eh bien, la meilleure leçon que nous puissions recevoir, c'est encore l'histoire de Jacob qui nous la fournit. Contre lui! Contre lui que Dieu lui ait enlevé son fils Joseph pour l'élever en Égypte au plus haut point de la puissance, et pour lui donner de préserver un jour son père et ses frères de la famine?

Jacob ne le savait pas, ne le voyait pas, ne le croyait pas; mais parce qu'il avait l'esprit obscurci, la vue courte, la foi faille, fallait-il que Dieu hésitât à lui donner, au prix de quelques larmes, toute la félicité qu'il tenait en réserve pour lui ? Pauvre, Jacob, quand un peu après s'être humilié et avoir dit : « S'il faut que je sois privé d'enfants, que j'en sois privé, » il pressa dans ses bras son fils Joseph et s'écria : « C'est assez. . . Que je meure à présent, puisque j'ai vu son visage, » quel repentir dut être le sien! Avait-il réellement pu croire que toutes ces choses étaient contre lui!

Apprenons à nous abandonner au Seigneur, et marchons par la foi. Quand vient le moment du trouble et de l'épreuve, déposons au pied de la croix nos murmures et nos regrets; répétons-nous le mot du Seigneur à Pierre: « Tu ne sais pas maintenant ce que je fais, tu le sauras dans la suite, » et disons à Jésus à notre tour : Fais ce que tu veux, non ce qui me plaît. S'il faut que je sois affligé, brisé, déchiré, que je le sois en effet ; je sais que tu m'aimes, et je sais aussi que toutes choses concourent ensemble au bien de ceux qui t'aiment. »

 

PRIERE.

Seigneur, si nous perdons si souvent de vue cette précieuse assurance et cette précieuse promesse de ta part, c'est que nous manquons de foi. Nous croyons, mais combien nous avons besoin que tu subviennes à notre incrédulité! Tu sais combien il nous est plus facile de rendre témoignage à ta bonté, à ton amour, à ta fidélité, d'être au fond convaincus que toutes choses concourent à notre bien, que de faire passer cette conviction dans les détails de notre vie, pour rester fermes dans la foi et dans la paix quand viennent les moments difficiles. Seigneur notre Dieu, pardonne-nous ces défaillances qui viennent de notre incrédulité, et augmente-nous la foi. Apprends-nous réellement à marcher sous ton regard par la foi et non par la vue, heureux et satisfaits de l'assurance que tu nous vois, et que tu vois pour nous. Nous t'en prions au nom de Jésus. Amen.


Table des matières