JEAN, IV, 43-fin.

Le seigneur de la cour.

 

Il paraîtrait qu'une certaine curiosité, un vague désir de voir Jésus accomplir un miracle analogue à ceux dont les Galiléens qui revenaient de Jérusalem avaient été vivement frappés, se mêlait chez le père de l'enfant malade à l'espoir d'être assisté par le Sauveur dans sa détresse. C'est ce qui ressort évidemment de la réponse de Jésus, ou plutôt de sa réflexion qui n'était pas une réponse à la prière du seigneur de la cour: , Si vous ne voyez des signes et des miracles, vous ne croyez point. » Or, ce n'est pas toujours avoir la vraie foi que de se sentir ému par des manifestations extraordinaires de la puissance de Dieu, non plus que d'aller à Jésus seulement à l'heure de l'épreuve, pour recevoir de lui le secours qu'il peut seul donner.

Aussi la remarque de Jésus avait-elle le même sens que la question que nous le verrons plus tard adresser aux deux aveugles : « Croyez-vous que je puisse faire cela?» «Croyez-vous : » il y avait certainement de la foi dans le coeur de ce père; comme il insiste pour que le Sauveur vienne guérir son fils! mais cette foi était encore obscure; il jugeait indispensable que Jésus se rendît chez lui et même se hâtât de le faire: « Descends avant que mon fils meure!»

Ce n'est pas là le langage de la foi ferme et confiante; celle-ci dit toujours : Seigneur, exauce-moi comme tu voudras, quand tu voudras, et seulement si tu le vois bon; mais nous étonnerons-nous que celle de cet homme fût mélangée d'erreur et même de doute? Rappelons-nous combien, dans les jours d'angoisse, nous avons peine à nous persuader que le temps et la distance ne changent rien au pouvoir de Jésus; combien il nous est difficile de sentir le malade bien-aimé que nous présentons au Sauveur par nos prières, aussi réellement devant lui, sous « son regard qui est la délivrance même, » dans ses bras qui sont le plus sûr refuge, que si, voyant Jésus des yeux de notre corps et tenant ses mains dans les nôtres, nous pouvions lui dire : Délivre-nous de nos angoisses selon ta puissance et ton amour.

Jésus avait pitié de ce père affligé, aussi ne lui adressa-t-il aucun reproche; il exauça sa prière, mais en éprouvant sa foi pour la fortifier. « Va, ton fils se porte bien. » Jésus ne s'est pas rendu auprès de l'enfant malade, il n'a rien fait, n'a même rien dit, et pourtant l'enfant est guéri; Jésus ne refuse jamais une grâce qu'on lui demande, si ce n'est pour en accorder une autre plus grande ou plus salutaire. Quelle leçon pour le père, et quel fruit cette leçon porta dans son âme ! Le voilà tout à coup rendu capable de croire Jésus sur parole : « Cet homme crut à la parole que Jésus lui avait dite et s'en alla.,) « Juda, et vous habitants de Jérusalem, écoutez-moi: Croyez en l'Éternel votre Men. et vous serez en sûreté (1). »

 

PRIÈRE.

Tu as accordé une grâce immense à ce père, Seigneur Jésus; que cet exemple fortifie notre foi et nous fasse toujours plus absolument compter sur toi, sur ton amour, sur ta pitié, sur ta toute-puissance. Nous avons besoin que tu subviennes à notre incrédulité; car même en croyant que tu peux tout, nous nous inquiétons ou nous agitons trop souvent comme si nous n'étions pas persuadés qu'une parole de toi suffit pour nous délivrer. Dis seulement une parole, Seigneur Jésus, et nous serons guéris de nos langueurs, de nos craintes, de notre incrédulité qui te déshonore, et nous marcherons à la clarté de ta face même dans les circonstances les plus difficiles. Apprends-nous à renoncer à notre volonté propre comme à notre sagesse propre, pour nous laisser guider absolument par toi et nous décharger sur toi de tous nos soucis; trop heureux sommes-nous que tu nous invites à le faire, que tu veuilles toi-même achever de pourvoir à tout ce qui nous concerne ! Amen.


Table des matières

1. Il. Chron. XX, 20.