MATTHIEU, V, 4.

Les affligés.

(Lire Ps. CXXVI.)

 

« Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés.» Douce et bienfaisante parole ! Que de douleurs elle a calmées, que de plaies elle a bandées, que de coeurs elle a soutenus et fortifiés depuis qu'elle est sortie des lèvres de Jésus ! Saint Jacques nous dit : « Voici, nous tenons pour bienheureux ceux qui ont souffert;,, mais Jésus dit plus encore: Heureux ceux qui souffrent, «ceux qui pleurent,» ceux qui sont sous le coup d'une affliction présente, heureux même lorsqu'ils se croient le plus éloignés du bonheur! Mais que doit donc être cette douleur à laquelle sont faites de si précieuses promesses?

Évidemment, Jésus n'a pas voulu dire que le fait seul de souffrir donnât droit aux consolations divines, puisque la souffrance, qui est une suite du péché, est sur la terre le partage des méchants comme des élus de Dieu, et que beaucoup, hélas! n'échangeront une vie misérable que contre une éternité plus misérable encore. Non; mais ce passage nous en rappelle un autre qui l'explique : « La tristesse qui « est selon Dieu produit une repentance à salut dont on ne « se repent point, tandis que la tristesse du monde produit « la mort (1) ».

La tristesse que Dieu bénit, c'est donc la tristesse selon Dieu; et les affligés qui seront consolés, ce sont ceux qui pleurent sous la croix. Or, les larmes qui s'abritent sous la croix sont bien différentes de celles que le monde répand sur des affections perdues pour jamais, sur des illusions détruites, sur des projets terrestres renversés ou des ambitions personnelles déçues. Pleurer sous la croix, c'est tout d'abord pleurer sur ses péchés, qui ont élevé cette croix sanglante et y ont cloué le Sauveur; c'est pleurer sur sa misère spirituelle, sur ses infidélités, son indifférence, son incrédulité; sur ses chutes, sur son peu de progrès dans la sainteté.

Ces larmes-là n'excluent pas la sainte joie du salut; elles sont bénies parce qu'elles humilient le coeur et le disposent pour l'oeuvre de Dieu, et Jésus promet qu'elles seront essuyées. Ce qui console le chrétien dans cette salutaire tristesse, c'est le sentiment de la miséricorde, du patient amour de son Dieu; c'est « la paix et la joie dans la foi, » qui le font « abonder en espérance par la puissance du Saint-Esprit (2) ; » c'est sa confiance paisible et absolue dans toutes les promesses de Dieu, qui lui garantissent que celui qui a commencé cette bonne oeuvre en lui, la perfectionnera jusqu'au jour de Jésus-Christ (3) » . Mais cette douleur spirituelle n'est pourtant pas la seule que Jésus s'engage à consoler.

Les épreuves que Dieu dispense à ses enfants, quand elles sont reçues avec amour et soumission, «produisent en nous le poids éternel d'une gloire souverainement excellente; » elles font avancer le règne de Dieu dans notre coeur en nous détachant des choses visibles, en nous aidant à nous affectionner à celles « qui sont en haut; » et lorsque nous avons obtenu ce a fruit paisible de justice, » ne sommes-nous pas vraiment consolés? « Il m'est bon d'avoir été affligé... tu m'as affligé selon ta fidélité (4). » « Je suis affligé et misérable, mais le Seigneur a soin de moi (5). » « Ceux qui sèment avec larmes moissonneront avec chant de triomphe (6). »

 

PRIERE.

Seigneur, tu es le Dieu compatissant, fidèle et tendre qui nous console dans toutes nos afflictions; tu daignes nous dire pour notre paix et notre encouragement, que celui qui porte la semence ira en pleurant, mais qu'il reviendra avec un cri de joie quand il portera ses gerbes. 0 notre Dieu, s'il entre dans tes saintes vues à notre égard de nous faire passer par des épreuves, quelque douloureuses qu'elles soient, enseigne-nous à dire du fond de notre coeur, comme Jésus, notre modèle : Non ce que je veux, mais ce que tu veux. Daigne seulement sanctifier pour nous, et faire servir à notre bien spirituel, toutes tes dispensations à notre égard, joies et douleurs, difficultés comme bénédictions; daigne faire avancer ton oeuvre dans notre âme pour l'amour de notre bon Sauveur. Amen.


Table des matières
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1. Il Cor., VII, 10.

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2. Rom., XV, 13.

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3. Phil. 1, 6.

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4. Ps. CXIX, 71, 75.

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5. Ps. XL, 18.

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6. Ps. CXXVI, 5.