MATTHIEU, V, 33-37.

Le troisième commandement.

(Lire Ps. CXLI.)

 

Nous avons ici un exemple de la manière dont les docteurs juifs interprétaient la loi de Moïse pour l'accommoder à leurs convenances. Sous l'ancienne alliance, Dieu avait établi et réglé lui-même l'usage du serment; mais les Juifs poussaient cet usage jusqu'à l'abus. Ils juraient à tout propos, mauvaise habitude condamnée par le troisième commandement: « Tu ne prendras point le nom de l'Éternel ton Dieu en vain.»

Pour n'être, point gènés par ce commandement, ils affirmaient que Dieu n'interdisait le parjure que dans le cas où le serment avait été fait en son nom, tandis qu'on n'était pas obligé de le tenir s'il avait été fait au nom d'une créature. C'est cette idée fausse, en même temps que cet usage léger et profane du serment, que Jésus combat ici; ce ne peut être, ainsi que le croient quelques chrétiens, le serment en général, puisque nous trouvons dans le Nouveau Testament plus d'un exemple prouvant qu'on peut sans péché, dans une occasion importante, affirmer solennellement une chose devant le Seigneur et en son nom (1).

Mais ce qui est un péché, c'est la manière dont on prend le nom de Dieu en vain de nos jours, en le faisant intervenir dans des circonstances frivoles et jusque dans les conversations les plus étrangères à la piété, Il est peu d'habitudes qui fassent aussi réellement toucher du doigt la profonde indifférence du coeur naturel pour le Seigneur. Être capable de prononcer cent fois par jour le saint nom de Dieu sans même penser qu'on le prononce, sans que ce nom, qui fait tressaillir de crainte et d'amour les anges dans le ciel, éveille le moindre écho de ces sentiments dans le coeur, ah! n'est-ce pas montrer que ce coeur est complètement étranger au Seigneur et à sa grâce?

Et que penser de l'inconséquence des chrétiens chez lesquels cette habitude se retrouve encore? Elle « vient du Malin, » comme aussi celle qu'ont tant de personnes de mettre sans cesse en avant, de la manière la plus irréfléchie, leur parole, leur conscience, leur foi, etc. Tandis que les autres péchés ont sinon une excuse., du moins une explication dans la satisfaction qu'ils procurent à nos mauvais penchants, celui-ci n'a pas même ce triste résultat; nous n'y sommes donc poussés que par l'influence directe de Satan. « Que votre parole soit oui., oui, non, non,» dit le Sauveur. Nous ne devons pas avoir besoin dans la vie habituelle d'appuyer par des affirmations de ce genre la vérité de ce que nous disons. Il faut que nous soyons tellement connus pour être disciples de Celui qui est « la Vérité » même, qu'un oui ou un non sortant de notre bouche aient dans leur simplicité autant de valeur qu'un serment.

 

PRIÈRE.

Seigneur notre Dieu, daigne nous rendre attentifs à ces péchés de la langue si faciles à commettre et qui si souvent passent inaperçus de ceux qui les commettent. 0 Éternel! garde notre bouche, garde l'entrée de nos lèvres, afin que tous nos discours soient accompagnés de sel et communiquent la grâce à ceux qui les écoutent. Seigneur, qu'il soit facile de reconnaître à notre langage que nous sommes des disciples de Jésus; fais-nous parler habituellement sous l'influence de cette solennelle pensée, que les hommes rendront compte au jour du jugement de toutes les paroles vaines qu'ils auront dites, et que nos paroles serviront à nous justifier ou à nous condamner. Nous t'en supplions au nom de celui dont les paroles comme les oeuvres ont toujours été la sainteté même, et qui est en toute chose notre modèle, notre espérance, notre sagesse et notre force. Amen.


Table des matières
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1. Matth., XXVI, 63, 61; Rom., IX, 1 ; Il Cor.,1, 23,