MATTHIEU, V, 43-fin.

L'amour du prochain.

(Lire 1 Jean, IV, 7-fin.)

 

Voici maintenant le résumé de tous les préceptes que cet admirable chapitre V de saint Matthieu nous donne à l'égard de notre prochain : l'amour; l'amour poussé jusqu'à un point dont les hommes ne se faisaient aucune idée avant la venue de Jésus, l'amour même des ennemis, même de ceux qui maudissent, même de ceux qui outragent et persécutent.

Ce n'est pas ainsi que les Juifs entendaient et appliquaient le commandement d'aimer le prochain; ils le faisaient suivre, d'un précepte qui en était comme la contre-partie, mais qui ne se trouve nulle part dans l'Ancien Testament: «Tu haïras ton ennemi; » et cette addition, en les laissant libres d'appeler prochain ou ennemi qui bon leur semblait, leur permettait d'aimer, en fin de compte, seulement ceux qui leur plaisaient ou leur étaient utiles. Or, c'est là ce dont le coeur naturel est très capable, parce que cela revient à aimer dans les autres ce qui répond à ses propres convenances, c'est-à-dire à s'aimer soi-même.

Mais les chrétiens ne peuvent s'en tenir là. Ils ont des lumières, des privilèges et des promesses bien au-dessus de ce dont le monde peut se faire une idée; ils ont pour mobile l'amour du Sauveur qui les a tant aimés le premier; pour secours, celui du Saint-Esprit; pour but, la gloire de Dieu et la vie éternelle : il faut clone qu'ils répondent à cette vocation magnifique et extraordinaire par une sainteté extraordinaire aussi.

Voilà pourquoi Jésus leur dit : « Soyez parfaits, » et veut qu'ils arrivent aux choses les plus difficiles : ä vouloir du bien, dans toute la sincérité de leur Coeur à coeur qui leur témoignent du mépris, de l'ingratitude ou de la haine; à les bénir, c'est-à-dire à parler d'eux d'une manière conforme à « la loi de bonté; » à leur rendre des services quand l'occasion s'en présente, et enfin à prier pour eux. Ce trait est le dernier, parce qu'il faut vraiment avoir surmonté tout mauvais sentiment pour être capable, en la seule présence du Dieu « qui sonde les coeurs et les reins, » d'appeler sa bénédiction sur ceux dont on a à se plaindre.

Hélas! il est difficile d'aimer ainsi quand vient le moment où le coeur se sent blessé, froissé, disposé à la colère et à la rancune; mais puisque nous pouvons toujours compter sur la sagesse que Dieu donne à qui la lui demande, ne perdons pas courage et persévérons dans la prière. Disons-nous que le Seigneur nous donne lui-même l'exemple de cet amour qu'il nous commande, puisqu'il répand ses bienfaits sur les plus grands pécheurs comme sur ses enfants, puisqu'il « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et pleuvoir sur les justes et sur les injustes. » N'est-il pas vrai que chaque rayon de soleil, chaque goutte de pluie, peut nous donner de sa part une leçon de miséricorde?

 

PRIÈRE.

Seigneur notre Dieu! ô toi qui es amour et charité! nous nous présentons devant toi dans le sentiment de notre misère et du besoin que nous avons de la grâce et de ton secours; car cette portion de ta Parole est bien une de celles qui nous montrent le plus clairement qu'en dehors de Jésus nous ne pouvons rien. Tu connais de quoi nous sommes faits; tu sais combien il nous est peu naturel d'aimer notre prochain assez réellement pour lui pardonner tous ses torts, pour tout supporter, tout espérer, tout croire, et pour te prier en faveur de ceux qui ne nous aiment pas comme en faveur de ceux qui sont bons pour nous. Puisque tu as usé envers nous (le la miséricorde la plus immense, puisque tu nous as aimés lorsque nous étions tes ennemis, nous adorons ta charité, et nous reconnaissons qu'elle nous engage à nous aimer les Lins les autres. Rends-nous-en capables, en touchant nos coeurs et en les remplissant de ton Esprit. Nous te le demandons au nom de Jésus. Amen.


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