Ces quelques pages voulaient nous aider
à sortir de nous-mêmes pour aller
à la rencontre de ce peuple, de cette
Église et de ces missionnaires du
Laos.
Et maintenant, riches de cette
présence, de cet appel, quelle sera notre
réponse ? Impossible de conclure,
c'est-à-dire de clore ! Mais, comme
nous sommes entrés dans cette tâche
missionnaire en la considérant comme
« notre tâche », nous ne
pouvons maintenant que poursuivre dans une vocation
missionnaire vécue. Nous nous retrouvons
ainsi en face de nous-mêmes, au coeur du
thème qui nous a introduit à cette
« Découverte du Champ
Missionnaire ». Nous sentons bien en
effet que, en Jésus-Christ, la seule
conclusion possible, c'est nous-mêmes, la
décision renouvelée de notre propre
engagement où l'on paie de sa personne,
où l'on se « donne d'abord
soi-même ».
VOUS SEREZ
MES
TÉMOINS
« Vous recevrez la puissance
du Saint-Esprit et vous serez mes témoins,
à Jérusalem, ... et jusqu'aux
extrémités de la terre »
(Actes
1. 8). Tel est l'ordre de
« mission » transmis par le
Seigneur à Son Église
naissante ; telle est la véritable
vocation de celle-ci, vocation missionnaire par
excellence : « Comme tu m'as
envoyé dans le monde, je les ai aussi
envoyés dans le monde ».
(Jean
17.18.)
Elle n'est pas réservée
à une élite, à quelques
spécialistes, cette mission du Seigneur,
mais à tous les croyants, tant il est vrai
que tous reçurent et reçoivent le
Saint-Esprit.
Elle n'est pas non plus limitée
à la seule prédication orale de
l'Évangile, mais elle participe certainement
aux multiples expressions d'un témoignage
orienté vers le service et la glorification
de Dieu : bienfaisance, éducation,
arts, culture, travail, cité, peuvent
connaître une telle orientation. Ainsi
Ambroise Paré, Cyrus, J. S. Bach ou Souphine se
trouvent
également dans la vocation du
témoignage au sens divin et illimité
du mot.
L'accomplissement de la promesse,
l'effusion du Saint-Esprit engendrera alors
l'Eglise, l'Eglise dont il crée
l'unité, « l'unité de
l'Esprit » et la diversité, la
diversité des « dons et des
ministères qu'il distribue à
chacun ». Oui, « vous
êtes le Corps de Christ, vous êtes
Christ », va jusqu'à affirmer le
grand missionnaire Paul saisi par la
révélation lumineuse et irradiante de
l'Eglise, de l'Eglise qui se manifeste et prend ce
visage bien visible et bien incarné dans la
communauté chrétienne, telle celle de
Corinthe
(1
Cor. 12).
(1)
Ainsi, ce témoignage auquel tous
participent comme à un « sacerdoce
universel », loin de conduire à un
individualisme désordonné et superbe,
semble s'inscrire tout entier dans la perspective
d'une communauté chrétienne
constituée et vivante. C'est tous ensemble
que nous sommes le Corps de Christ, sa
présence visible et agissante dans ce monde
et pour ce monde, tous ensemble dans cette
harmonieuse mise en commun de
révélations, de dons, de charges et
de fonctions « confiés à
chacun en vue de l'utilité.
commune »
(1
Cor. 12). Écarter un membre
du corps comme le laisser se manifester lui seul
exclusivement, c'est amputer ou défigurer
l'expression accomplie de la Personne de Christ
dans l'Eglise, dans la communauté.
Par son indissoluble unité, elle
est de son Seigneur l'irrésistible
présence capable d'appeler le monde à
la foi : « Qu'ils soient
parfaitement un, insiste Jésus, afin que le
monde croie »
(Jean
17).
Par son infinie diversité,
Jésus-Christ se manifeste, et dans la
communauté, et dans le monde : les
évangélistes, les envoyés...
ne le font-ils pas connaître au monde, et les
prophètes, docteurs, pasteurs... à
l'église ? « ...
Jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus
à l'unité de la foi et de la
connaissance du Fils de Dieu »
(Eph.
4).
Affirmer que l'Eglise est, par
définition, missionnaire,
c'est-à-dire la présence agissante de
Christ dans ce monde, n'est donc pas une
manière de parler ; c'est là sa
vocation essentielle. Or cette vocation s'impose
à chacun de nous, irrésistible, car
c'est Dieu qui nous l'adresse en
Jésus-Christ, tel est son dessein. La fuir,
c'est perdre notre raison d'être. Ne
serait-ce pas cesser d'être Son
Église ?
VOCATION
MISSIONNAIRE
DE LA COMMUNAUTÉ
CHRÉTIENNE
Nous désirons l'entendre dans
l'assemblée locale, cette vocation de
l'Eglise, relative à sa
responsabilité missionnaire en terre
païenne. Nous limiterons maintenant nos
réflexions à ce seul aspect de son
témoignage, celui qu'évoque pour nous
le mot de « mission », celui
que nous avons vécu dans cette
découverte du champ missionnaire. Il va sans
dire que cet aspect particulier du ministère
d'une communauté ne saurait voiler ou
exclure les autres manifestations également
importantes de son témoignage :
adoration, enseignement,
évangélisation, bonnes oeuvres,
etc.
Pour répondre vraiment à
notre vocation missionnaire, comme église,
ne serait-il pas nécessaire de
réviser une conception par trop
individualiste de la
« mission » ? Nous nous
surprenons à considérer la
tâche missionnaire comme relevant des
missionnaires eux seuls : Après tout,
ils accomplissent leur travail, pour lequel Dieu
les a choisis et envoyés ;
évidemment, il est nécessaire de les
aider... Et les plus engagés prieront
régulièrement pour eux et
consentiront à de réels sacrifices
financiers en leur faveur. Ces gestes
d'intérêt fidèle ne
s'éclairent-ils pas d'une signification plus
haute encore ?
En effet, il ne s'agit pas tellement
d'aider les missionnaires ou d'être
spirituellement avancé en priant pour
eux ; mais, étant un même corps
avec eux, il s'agit plutôt de nous aider
mutuellement, chacun pour sa part de
responsabilité et de service, à
accomplir ensemble en témoignage de Christ.
Ainsi, c'est au travers de la communauté que
le missionnaire devient réellement
l'envoyé du Saint-Esprit pour accomplir avec
nous et de notre part le même ordre de
mission, mais plus loin ; son travail nous
appartient, comme ses joies, ses peines ; nos
combats et nos prières se rejoignent et se
confondent. Il est, très
concrètement, dans ce corps de
l'assemblée et de l'Eglise, la main tendue
jusqu'aux extrémités de la terre pour
son salut.
NOTRE
COMMUNAUTÉ
SERA MISSIONNAIRE MAIS EN FAVEUR DE QUELS
CHAMPS ?
Nous sommes tous convaincus que la
responsabilité d'apporter le nom de
Jésus-Christ dans le monde entier appartient
à l'Eglise, et à l'Eglise tout
entière. Tous aussi, nous croyons à
une vocation individuelle qui s'oriente vers tel
champ missionnaire. Ce jeune homme, ou cette jeune
fille, saisi d'un tel appel, sera pris au
sérieux par toute la communauté et il
se verra finalement envoyé dans une
région bien déterminée du
monde. Ainsi, nous croyons à la vocation
missionnaire, et de l'Eglise universelle pour le
monde entier, et de l'individu pour tel champ dans
ce monde.
Mais l'assemblée, l'église
locale, quelle sera son rôle ?
Sera-t-elle missionnaire, responsable pour sa part
de porter le témoignage de
l'Évangile dans le monde ? Certainement
puisqu'elle est une manifestation partielle et
agissante de l'Eglise universelle. Si donc elle est
missionnaire, sera-ce pour le monde entier en
général, ou pour tels champs dans ce
monde ? Et nous éprouvons alors une
insurmontable difficulté à
définir concrètement les
responsabilités missionnaires de notre
communauté locale. Et pourtant, il le faut
si elle veut répondre, outre les services
qui lui incombent, à celui de sa mission en
terre païenne.
Comment y répondre ?
Devra-t-elle disperser ses forces spirituelles et
financières dans le monde entier ? Ou
bien se limiter exclusivement et jalousement
à un champ, à une oeuvre ? Ou
bien s'intéresser occasionnellement à
une tâche ou à une autre, au
gré d'un sentiment, d'une sympathie, d'un
enthousiasme, ou sous l'émotion du passage
d'une brillante personnalité ? Ou bien
suivre un service, puis un autre, libre de le
lâcher pour un autre encore ? Combien
est louable cette recherche qui n'attend pas la
pleine lumière pour agir. Mais il semble
pourtant qu'une voie plus stable, plus logique et
spirituelle aussi doit s'ouvrir devant une
communauté désireuse de
réaliser pleinement sa
vocation :
Si Dieu appelle une assemblée
à des responsabilités missionnaires
en terre païenne, il paraîtrait
étonnant que cette vocation ne l'engage pas
dans des tâches précises.
Il semble tout d'abord que le
Saint-Esprit entraîne l'intérêt
et l'intercession de toute la communauté
dans le service de chacun de ses membres ;
elle suivra donc le missionnaire sorti de son
sein.
De plus, si la vocation d'un membre se
découvre et se confirme dans la
prière, jusqu'à ce que le
Saint-Esprit comble cette recherche de
lumière et de certitude, en serait-il
autrement pour la vocation de l'assemblée
comme telle ? Ne serait-ce pas dans la
prière commune et dans une attentive
recherche que son Seigneur lui montrera en faveur
de quelles tâches et de quels champs Il
l'appelle à servir et à être
missionnaire ?
Nous constatons en outre que toute
vocation impose à l'individu le sacrifice
des autres services : impossible d'être
simultanément et pleinement
« pasteurs, docteurs,
évangélistes... », de
servir en Suisse et en Indochine, d'assurer
à la fois la marche d'une école
biblique, d'une imprimerie et d'un hôpital.
L'obéissance réside, non dans la
dispersion, mais dans la concentration de
l'effort : « Archippe, remplis bien
le ministère que tu as
reçu » et toi, Timothée
« occupe-toi de ces choses, donne-toi
tout entier à elles » (cf. Col.
4. 17 ; I
Tim. 4. 15 ; Rom.
12. 6-8). Or si les membres
sont ainsi limités dans l'espace et dans le
temps, la communauté qu'ils constituent le
sera également. Comme eux, elle devra
accepter ses limitations, comme eux, juger toute
dispersion inconsidérée comme une
infidélité. Pour elle aussi, c'est
une tentation de vouloir tout faire pour ne faire
finalement rien, de se
dissoudre dans une action tellement
générale et imprécise qu'elle
n'engage souvent en rien et permet parfois d'y
noyer son infidélité et de se
soustraire à des tâches
concrètes. La communauté aussi devra
inévitablement sortir de l'anonymat
« d'Eglise missionnaire pour le monde
entier » pour recevoir enfin de son
Seigneur les services précis à
travers lesquels Il peut l'appeler à
être missionnaire.
Découvrir, comme
assemblée, en faveur de quels champs son
Seigneur l'appelle à vivre sa vocation
missionnaire, semble être de la plus haute
importance pour elle.
COMMENT
NOTRE
COMMUNAUTÉ SERA-T-ELLE
MISSIONNAIRE ?
Dans ce premier contact avec elle, la
mission au Laos m'a beaucoup
impressionné : vous restez comme
écrasés par l'envergure et la
diversité de la tâche, par
l'entreprise énorme que représente un
témoignage complet et efficace de
l'Évangile dans un monde non
christianisé. La conviction vous gagne, et
vous saisit :
À cette vraie mesure, la vocation
missionnaire de l'assemblée et de l'Eglise
est d'une nécessité vitale ;
seuls, ces missionnaires ne peuvent soutenir un
pareil combat ; pour nous comme pour eux,
cette vocation ne laisse plus de place à une
action occasionnelle et superficielle. Et nous
réalisons alors qu'il n'y aurait pas deux
manières d'appartenir à Dieu, une
totale et permanente pour ceux qui sont partis, et
une relative et occasionnelle pour ceux qui restent
au pays ; non, nous sommes tous et au
même titre « achetés pour
Dieu par le sang de Christ » pour servir
ensemble. La joie du service et la grâce du
sacrifice nous sont accordées comme à
eux. Il s'agit bien d'un engagement total et
très coûteux pour une tâche,
glorieuse en vérité. Sommes-nous
prêts à notre tour, à tout
perdre pour tout retrouver ? Si oui, en
dépit de nos doutes et de nos
défaillances, ceux qu'ont
éprouvés les disciples et tant
d'autres après eux, répondons, comme
assemblée et comme Église à la
tâche demandée ; mettons toute
notre intelligence, tout notre amour, toute notre
prière pour prendre conscience de la nature
et de l'ampleur de ce ministère.
En faveur de champs missionnaires
auxquels elle se sait ainsi liée, la
communauté chrétienne semble
engagée dans trois services distincts :
la prière, les vocations et la
libéralité.
La prière
En elle réside le secret d'une
action missionnaire solide et
conquérante ; tous les hommes de Dieu
en terre de mission s'accordent pour en
témoigner avec insistance.
En prenant conscience des obstacles
presque insurmontables que rencontre la
pénétration de l'Évangile au
Laos, vous êtes parfois envahis par une
profonde détresse, qui se change finalement
en une profonde conviction : seule la
prière pourra ! Elle pourra ce que tous
les efforts, toutes les prédications, toutes
les visites, toutes les tournées, toutes les
méthodes, toutes les larmes, tous les
sacrifices même ne peuvent pas ; elle
pourra ouvrir la brèche dans ce mur
d'indifférence laotienne, elle pourra
illuminer les coeurs
enténébrés par le
péché, asservis à la crainte
des esprits ; elle pourra recréer les
besoins spirituels annihilés par le
bouddhisme ; parce que, « tout ce
que vous demanderez au Père en mon nom, je
le ferai », nous dit Jésus.
(Jean
14.13.) Mais, cette
prière personnelle et collective, il la faut
constante et engagée, il la faut nourrie
d'une information non moins continuelle et
complète. Il faut même qu'elle
connaisse l'ardeur d'un véritable combat
à genoux, et même parfois
l'austérité du jeûne.
Les vocations
« Priez le Seigneur de pousser
des ouvriers dans Sa moisson. »
Devons-nous attendre du Saint-Esprit
seul ou de l'église aussi l'envoi de
nouveaux ouvriers ? Question délicate
entre toutes où les deux réponses
extrêmes sont également
incomplètes, voire dangereuses. Là
aussi, l'humain et le divin se rencontrent et
communient. En Actes
13. 1-2, le Saint-Esprit
ordonne et l'assemblée exécute ;
en fait le Saint-Esprit envoie par
l'intermédiaire de la communauté, par
le service de « prophètes et de
docteurs », précise le texte.
Est-ce trop d'affirmer que si l'église est
véritablement missionnaire, ce sera toujours
dans son sein et en communion avec les
frères qu'un nouvel
« envoyé » sera
trouvé et qu'il partira ? En effet, le
Saint-Esprit ne semble pas agir en marge ou en
dépit de l'ensemble de la communauté,
pour en isoler un individu libre ensuite d'agir
à sa guise.
Plusieurs années encore
après un appel bien personnel et combien
indispensable, Paul, sans y avoir encore
effectivement répondu, sert avec ses
frères dans l'église d'Antioche.
C'est dans cette communauté, à ses
membres alors en train de servir et de
jeûner, que le Saint-Esprit manifeste et
confie son ordre : « Mettez-moi
à part Saul et Barnabas »
... ; cet ordre, tous l'entendent et le
reconnaissent pour y obéir alors et les
laisser aller.
Le jeûne, la prière,
l'imposition des mains, par lesquels ils sont
« recommandés à la
grâce de Dieu », revêtent une
signification des plus joyeuses et des plus
solennelles. Nous sommes tentés d'oublier le
sens, voire la nécessité d'un tel
service lors d'un départ missionnaire. Il
exprime et consacre manifestement les liens
internes et vivants attachant la communauté
à ses envoyés, les envoyés
à la communauté.
Ceci est si vrai que c'est à elle qu'ils
reviendront, ces premiers missionnaires, pour
« convoquer l'église et raconter
tout « que Dieu avait fait par
eux », car leur service
l'intéresse et même lui appartient.
(Actes
14. 26-28). Leur second
départ, pour Jérusalem alors, semble
marqué par une plus grande solidarité
encore avec l'église d'Antioche. Cette fois,
ce sont les frères qui en
« décident », et
l'église, entraînée sur les
traces de ses envoyés sort de ses portes
pour les accompagner : signe combien
émouvant et concret de son engagement
communautaire avec eux. Le troisième
départ avec son lamentable échec,
montre à quel point la règle ne
semble pas supporter d'exceptions ; Paul et
Barnabas paraissent agir en marge de
l'assemblée, sans la consulter ; mais,
c'est très vite l'impasse, la
dissension ; il faudra s'arrêter,
revenir à la communauté pour vivre un
véritable départ
« recommandés par les
frères à la grâce de
Dieu »
(Actes
15. 36-41).
Il peut arriver qu'une église,
quoique vivante, et peut-être parce qu'elle
est vivante, n'entende pas et ne puisse
reconnaître un appel présumé
d'un de ses membres. Il peut arriver qu'un
« appelé », sans cesser
de « servir », doive attendre
l'éveil de l'assemblée à la
responsabilité missionnaire qui l'a saisi,
lui, depuis fort longtemps. Serait-ce le cas de
Saul à Antioche ? C'est alors qu'il
faudra vivre humblement cette
« soumission mutuelle dans la crainte de
Christ »
(Eph.
4. 17), et continuer à
« servir ensemble le Seigneur »
dans l'assemblée, sans cesser d'être
disponibles, à l'écoute du
Saint-Esprit.
Oui, c'est vrai, le Saint-Esprit parle
dans la communauté chrétienne :
servons, écoutons, obéissons.
Et la communauté a certainement
une lourde et nécessaire
responsabilité envers la vocation d'un de
ses membres : son contrôle sera une
sauvegarde.
La
libéralité
Dans le travail et l'usage des
richesses, y a-t-il une plus grande
sécurité, un plus grand repos que de
reconnaître notre véritable condition
en Jésus-Christ, celle de gérants
laborieux et fidèles de biens qui lui
appartiennent ; qui lui appartiennent au
même titre que nous-mêmes et que toute
la création ?
Ne craignons donc pas de tout lui
confier, de lui dire
« Seigneur », aussi sur nos
champs, sur notre industrie, sur notre commerce,
à mon bureau, à mon atelier, à
ma cuisine ; Dieu est sage, Il connaît,
mieux que moi encore, le capital nécessaire
à la bonne marche de l'entreprise qu'Il me
confie ; Il me demande également
d'assurer, par mon travail, l'éducation de
mes enfants. Oui, je saurai découvrir, dans
la joie et la liberté, ce que librement Dieu
attend de moi.
Le travail matériel peut donc
également participer à une
véritable vocation missionnaire :
« Il faut travailler, déclare
l'apôtre Paul, afin de pouvoir donner. Donner
en faveur des pauvres ; donner en faveur des
serviteurs et des envoyés »
(cf.
Actes 20.35 ; Gal.
6.6 ; 2
Cor.11.8-9). Tous, sont alors
gérants des biens du Seigneur, soit au pays
afin de donner pour Son service, soit en mission
pour l'employer à Son service. La
« fidélité de
l'économe » est pour tous la
grande joie de cette discipline. Il faut pourtant
connaître l'aspect difficile et la souffrance
morale du « recevoir » pour
mieux croire à la parole du Seigneur
« il y a plus de bonheur encore à
donner ».
Information :
Ces trois fonctions de la
communauté comme de l'Eglise relatives
à la prière, aux vocations
missionnaires et à la
libéralité mettent en évidence
la nécessité pour chaque
assemblée d'un ministère semblable
à celui de Tychique en faveur des
églises de Colosses, d'Éphèse
et de Laodicée. (Cf. Eph.
6 ; Col.
4). L'apôtre Paul
l'envoie exprès dans ces églises pour
les informer de tout ce qui concernait la petite
équipe missionnaire et pour les mettre au
fait de leur véritable situation. Cette
communion effective entre les membres
envoyés et l'église implique
nécessairement cette information attentive
et complète. Des prières
précises, des vocations
éclairées, une
libéralité intelligente, tel en sera
le résultat sous l'action de
l'Esprit.
Ces trois fonctions ainsi
manifestées et renouvelées semblent
bien appartenir au service demandé à
une église missionnaire.
VICTOIRE DE
LA
FOI
« La marche par la
foi » : beaucoup ont défini
ainsi la ligne de conduite par excellence de tout
serviteur de Dieu. Mais, il faut le
reconnaître, cette définition est
sujette à diverses interprétations
plus ou moins différentes, parfois
divergentes. Toutes contiennent leur valeur et sont
dignes d'être pleinement respectées
comme des convictions. Il ne nous appartient pas
ici de définir ce qu'est cette marche par la
foi individuelle, mais de nous demander si cette
attitude de foi n'est pas proposée aussi
à toute la communauté
chrétienne.
En effet, ce privilège d'une
marche dans l'entière dépendance d'un
Dieu d'amour, qui sait et qui peut tout,
appartient-il uniquement à quelques-uns ou
à tous, à un membre isolé de
l'assemblée ou au corps tout entier qu'elle
représente ? Tous n'ont-ils pas
abandonné des idoles pour servir le Dieu
vivant et vrai ? (Cf. I
Thess. 1. 9). La norme et les
conditions de ce service ne seraient-elles donc pas
les mêmes pour tous, pour la
communauté comme pour l'envoyé ?
Ne serait-ce pas pour vivre ce partage
intégral d'un même service et d'une
marche ensemble que l'apôtre Paul
réclame les prières des
églises et a soin de les informer de tout ce
qui le concernait, lui et ses compagnons
d'oeuvre ?
Missionnaires, envoyés du
Seigneur par nous, mon Église !
Dites-nous, à votre tour, tout ce qui vous
concerne. Il nous appartient de porter avec vous
ces fardeaux trop lourds. Le Seigneur nous appelle
à partager vos angoisses spirituelles dans
l'intercession, comme vos joies dans l'action de
grâces. Le Seigneur nous appelle à
partager votre situation financière
réelle et vos humaines détresses. Le
Seigneur nous appelle à supplier avec vous
le Maître de la moisson pour de nouveaux
ouvriers, par la prière et la
disponibilité de nos personnes. À
cette vie de service, il nous appelle avec vous.
Aussi, votre angoisse devient la nôtre,
devant les besoins spirituels illimités, les
exigences matérielles sans cesse
croissantes.... et il faut encore de nouveaux
ouvriers pour la relève et pour de nouveaux
et impérieux services. Oui, notre trouble
est grand, et vous n'êtes plus seuls à
être débordés de toutes parts,
parfois écrasés.
Mais, la foi, la foi en un Seigneur
tout-puissant et fidèle, cette foi qui vous
tient debout, sera pour nous aussi le seul
refuge ; nos prières et nos
supplications, et nos actions de grâces, se
mêleront enfin aux vôtres.
Au service du Dieu vivant et vrai, nous
partagerons ainsi avec vous une consécration
entière, pour marcher ensemble par la
foi.
« Sur les rives du
Mékong, nous confie un missionnaire, j'ai
vécu un moment de profonde détresse
intérieure. C'était la saison chaude,
et la maladie visitait encore notre foyer. Autour
de moi, la présence dense et
impénétrable du paganisme laotien
m'enveloppait, et sous cette impression troublante,
je prenais conscience de l'accomplissement
décidément irréalisable d'une
tâche déjà cinquantenaire
et..., à peine
commencée ! » Moment
redoutable de dépression et de
découragement.
L'ampleur matérielle de
l'entreprise vous écrase, mais bien plus
encore, l'intense et vaste combat spirituel qu'elle
représente : de la traduction à
la prédication, de la prédication
à la naissance d'une Église, de -sa
naissance à sa majorité spirituelle,
et puis, il ne s'agit là que d'une
poignée de Laotiens d'une classe sociale
modeste et fort restreinte.... et c'est toutes les
couches de la population que l'Evangile doit encore
pénétrer... Alors se dresse à
vos yeux le spectre troublant du paganisme :
ce visage muet et impénétrable du
bouddhisme, cet animisme inextirpable, tissé
à l'âme du peuple.... et vous
êtes saisis, submergés par cette
atmosphère stagnante d'indifférence
et d'idolâtrie.
Tout cela vous impressionne, vous
terrasse même s'il était
possible ; et vous restez troublé par
le doute, devant l'apparente impuissance de
l'Evangile... « Qui es-tu, grande
montagne, devant
Jésus-Christ ? »
s'écrie soudain la foi dans de telles
extrémités...
Oui, Seigneur, nous prenons courage, car
toi, tu as vaincu ce monde, et notre victoire,
celle par laquelle il est vaincu, c'est notre foi,
notre foi en ta victoire, ô Christ ! ...
Et alors, le doute et le découragement sont
constamment surmontés ; et alors, la
conquête se poursuit inlassablement, la lente
et glorieuse conquête du Laos pour
Jésus-Christ.
Dans ce combat titanesque contre la
puissance des ténèbres, ce combat
terrible où nous ne sommes grands que de la
grandeur de Jésus-Christ, le Seigneur nous
honore en nous confiant un champ aussi ingrat et
difficile, non, aussi attachant et magnifique, car,
les victoires n'en sont que plus glorieuses, de la
gloire même de Dieu.
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