Les cloches sonnent de nouveau au Liban

 

Solitaire, je flâne dans les rues de Ras el Damour, autrefois ville chrétienne située à 12 km environ de Beyrouth; c'est aujourd'hui une ville fantôme. Seul, le vent fait grincer, mystérieusement, les portes et les fenêtres. Des posters «héroïques» de l'OLP sont encore collés sur les murs des maisons. Des peintures murales annoncent: «Nous tuerons les Juifs le jour du sabbat et les chrétiens le dimanche!»

En 1976, cette ville côtière fut occupée par l'OLP, tous les chrétiens furent chassés. Celui qui ne partait pas devenait la proie des tueries bestiales de l'OLP. La bande d'un film, tourné par des membres mêmes de l'OLP, montre comment de jeunes terroristes, munis du foulard palestinien, lançaient en l'air des nourrissons et tiraient sur eux au moment où ils retombaient. Une équipe de la télévision australienne avait mis la main sur une telle bande d'horreur et l'avait projetée une fois . . . depuis lors, elle a disparu. Libanais et Israéliens s'efforcent de la retrouver.

J'entre dans une église maronite et je m'arrête.

Il m'est difficile d'aller plus loin. C'est dans cette église que 108 chrétiens ont été exécutés, femmes et enfants - par les terroristes de I'OLP_ Une simple croix de bois et des fleurs fraîchement coupées et déposées par les survivants, qui, aujourd'hui, peuvent revenir dans leur ancienne patrie, font de cette église un mémorial. La croix au-dessus de l'autel ayant servi de cible, a gardé les traces de projectiles. En outre, cette église avait été transformée par l'OLP en un garage de réparation à la façon communiste.

Non loin de là, on rencontre les vestiges d'une autre église. La croix est arrachée et remplacée par l'insigne de l'OLP. Dans le maître autel, où se trouvaient autrefois les images des saints, on aperçoit aujourd'hui encore les cercles des cibles. Je descends dans la crypte: Le tombeau du saint est forcé et ses ossements éparpillés - comme au cimetière avoisinant. Toutes les tombes sont ouvertes et détruites. Partout, on voit des ossements éparpillés.

Soudainement, trois Libanais portant des fleurs apparaissent au milieu des ruines. Je les suis et j'arrive vers une grande église vieille de 300 ans. Ses fresques d'une grande valeur ont été recouvertes de peinture, ou grattées. Selon les dires de ces Libanais, cette église était l'une des plus belles de la région. Les terroristes avaient fondu à peu près 20 kg d'or, des croix et des images. Dans cette église, les Israéliens avaient trouvé un immense stock d'armes de l'OLP. Il a fallu 16 ( ! ) camions légers pour emporter la munition.

J'en ai assez et je me dirige vers les montagnes. Je voudrais m'en débarrasser comme d'un mauvais rêve. En roulant le long des rivières merveilleusement limpides, j'atteins les hauteurs boisées. Un joyeux vacarme, typiquement oriental, attire mon attention. Je m'arrête et j'aperçois les habitants du village d'Aaichiye en fête, qui dansent dans les rues.

Les cloches sonnent de nouveau, et, bien que leur son ne soit qu'un cliquetis, les chrétiens ne s'en émeuvent pas. Ils sont tellement heureux de les entendre à nouveau. Une femme âgée m'entraîne à l'écart, me montrant l'ancien presbytère, transformé en état-major par l'OLP, et me raconte comment son frère, le prêtre de ce lieu, avait été tué parce qu'il avait refusé d'abandonner son troupeau.

Un jeune s'approche timidement - jamais peut-être, un journaliste n'était venu jusqu'ici et me raconte comment les terroristes de l'OLP avaient massacré son fils de 8 ans avec des couteaux de cuisine, sous les yeux de sa soeur. Depuis lors, sa soeur est devenue folle. Nous allons ensuite ensemble à l'église du village, dont les cloches sonnent toujours. Près de l'autel se trouve une peinture de la vierge qui a été souillée, et l'on voit encore les traces d'obscénités des terroristes de l'OLP.

Le crucifix aussi a été cassé.

Ma route continue sur la «Via Dolorosa» du Liban et me conduit plus loin, à travers d'étroites gorges. Subitement, je m'arrête. Un cadavre gît au bord du chemin. Avec mon ami israélien Isaak, je quitte la voiture pour faire des photos. Nous constatons alors qu'il s'agit d'un terroriste de l'OLP. Isaak commence à le couvrir de terre en disant: «Qu'il repose; lui aussi avait une mère. . .»

Actuellement, les chrétiens fêtent Pâques, le renouveau de la vie. Après les terreurs de la guerre civile (98 500 morts) et la terrible torture par les hordes de l'OLP, les chrétiens, ignorés des nations chrétiennes, reprennent haleine. «Par considération pour les chrétiens des pays arabes», le Vatican refusa jusqu'à présent de reconnaître l'Etat d'Israël. Mais où donc était resté le secours chrétien, lorsque leurs frères du Liban périrent sous l'OLP? La vérité, n'était-ce pas plutôt la diplomatie de l'opportunisme pétrolier? Au Liban, on parle du «symbole de Caïn des nations chrétiennes»:

«Suis-je le gardien de mon frère?» Le fait que mère Thérésa fut finalement envoyée dans la ville de Beyrouth détruite par les bombes, n'était guère apprécié des Libanais. Personne n'était venu vers eux lorsqu'ils vivaient pendant 8 ans sous un régime d'extrême persécution, et qu'à tous leurs cris au secours, on faisait, diplomatiquement, la sourde oreille.

Le chef des ordres maronites (environ un million de maronites), Boulus Naaman (traduit: Paul le Fidèle), déclara publiquement:

«... après 6 ans de terreur de l'OLP, le salut nous vient des Juifs!» ... mais le monde a encore porté son choix sur Barrabas.

Ludwig Schneider

Nouvelles d'Israël 12 / 1982

© Nouvelles d'Israël