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Le sordide petit secret de l'ONU, l'Organisation internationale refuse de condamner l'antisémitisme
NDLR: Traduction française par Menahem Macina pour upjf.org. Original anglais : http://www.opinionjournal.com/edito...ml?id=110004398
La semaine dernière, l'ONU s'est montrée, une fois de plus, incapable de se mesurer aux défis éthiques contenus dans sa charte fondatrice: "tolérance", "dignité et valeur de la personne humaine", et "égalité de droits". Un projet de résolution sur l'antisémitisme - qui eût été une première dans les 58 ans de l'histoire des Nations unies - a dû être retiré face à l'opposition arabe et musulmane.
Des incidents quotidiens de violence antisémite en tous lieux de la planète sont signalés dans les médias. Pourtant, alors que les dirigeants du monde libre condamnent les explosions devant une synagogue en Turquie, l'incendie d'écoles juives en France, et le discours de haine du président de Malaisie - qui est maintenant à la tête de l'Organisation de la Conférence Islamique -, l'ONU va à rebours et encourage la prolifération de cette haine multiséculaire.
En contraste flagrant avec cet état de choses, d'autres formes d'intolérance continuent à mobiliser l'attention de l'ONU et de ses ressources. Un rapporteur spécial, commis par la Commission des Droits de l'Homme, fait régulièrement rapport à l'ONU de "discrimination à l'égard des Musulmans et des peuples arabes dans diverses régions du monde", y compris de toutes les "agressions corporelles et les attaques contre leurs lieux de culte, centres culturels, entreprises et propriétés". La totalité d'une résolution de 2003 "combattant la diffamation envers les religions" mentionne uniquement les préjudices causés à des Musulmans, à des Arabes et à l'Islam.
La condamnation de l'antisémitisme - qui devrait aller de soi - engendre polémique et intransigeance à l'ONU. À l'Assemblée générale de cette année, l'Irlande a assumé le rôle du 'videur', claquant la porte devant une résolution visant à protéger les victimes juives. Durant près de 20 ans, l'Irlande a amené un flot de résolutions concernant l'intolérance religieuse devant les instances de l'ONU, sans faire mention de l'antisémitisme. A la mi-novembre [2003], les événements actuels ont motivé des interpellations au Parlement irlandais demandant au ministre des Affaires étrangères, Brian Cowen, une explication pour cette omission. L'excuse minable alors invoquée a été [qu'il avait fallu] sacrifier les droits juifs sur l'autel onusien d'un "consensus et d'un co-patronage à large niveau".
En clair, pour l'Irlande, l'opposition arabe et musulmane à la condamnation de l'antisémitisme s'est résumé à se défiler à toute vitesse! La réticence, ou l'incapacité irlandaises à rester ferme sur les principes au moment où elle assumait la présidence de l'Union européenne, ne contribue guère à améliorer la crédibilité de l'ONU et de l'UE comme médiateurs honnêtes dans le processus de paix au Moyen-Orient.
Les coulisses de l'histoire de cette intrigue machiavélique ont consisté en une violation irlandaise d'une transaction, conclue entre le ministre des Affaires étrangères Cowen et son homologue israélien, Silvan Shalom, il y a juste deux semaines. Israël acceptait de cesser ses efforts pour qu'on inclue l'"antisémitisme" dans la résolution sur l'intolérance religieuse, en contrepartie d'une promesse irlandaise de présenter une nouvelle résolution spécifique sur l'antisémitisme. Mais, après l'adoption par l'Assemblée générale de la Troisième Commission, de la résolution concernant l'intolérance religieuse, sans aucune référence à l'antisémitisme, l'Irlande refusa d'honorer sa part de la transaction.
De l'ère chrétienne à l'époque moderne, la persécution génocidaire des Juifs a été justifiée par toute formule susceptible de servir les intérêts des perpétrateurs: la religion, la race, l'origine ethnique, ou la nationalité, ont toutes servi, à un moment ou à un autre, de prétextes à l'antisémitisme. Par une cruelle ironie, aujourd'hui, l'ONU ne parvient à trouver suffisantes aucune de ces raisons pour lancer la campagne vitale nécessaire à la prévention des atrocités que cette haine inspire. Au lieu de cela, les diplomates de l'ONU se servent de la multiplicité des prétendus crimes juifs pour mettre l'antisémitisme entre deux chaises. Quand les Nations unies ont approuvé un important traité sur la discrimination raciale, en 1965, elles ont omis l'"antisémitisme" parce qu'il "était hors sujet". Par contre, un traité consacré à l'intolérance religieuse, promis par l'Assemblée générale, en 1962, n'a jamais été mis en oeuvre.
Maintenant, M. Cowen et Cie prétendent que l'antisémitisme est, en fait, un problème de discrimination raciale qui le rend impropre à figurer dans une résolution sur l'intolérance religieuse. Cette inversion, à des fins personnelles, a été justifiée, de manière perverse, au nom de l'infâme conférence de l'ONU sur le racisme, à Durban, en 2001, qui, en réalité a servi de tremplin à l'antisémitisme.
La déclaration de Durban a, de fait, exclu toutes les références à l'antisémitisme et à l'Holocauste quand elle en est venue aux modalités d'action, et, un pacte avec le diable, scellé entre les Etats européens et les Etats arabes, a permis une référence minimale à l'antisémitisme, en échange de l'inclusion d'une condamnation d'un prétendu racisme israélien. La semaine dernière, l'Assemblée générale de l'ONU a permis une référence à l'antisémitisme dans une résolution sur les suites de la conférence de Durban, sachant que les Etats-Unis et Israël seraient contraints de voter contre.
Au coeur du problème de l'ONU avec l'antisémitisme gît le rejet de l'idée même du statut de victime pour le Juif. Au lieu de s'assurer que le statut de victime n'entraîne pas de discrimination, il n'a pas été possible, de présenter devant l'Assemblée générale du 26 novembre, une résolution condamnant les attentats terroristes contre des enfants israéliens, alors qu'une autre, concernant les enfants palestiniens, était adoptée, quatre Etats seulement s'y étant opposés. Israël a été forcé de retirer sa résolution, parce que des amendements égyptiens, supprimant "israéliens" après chaque mention du mot "enfants", étaient assurés d'une majorité automatique à l'ONU.
Le Secrétaire général, Kofi Annan - qui, de temps en temps, a évoqué, de bouche seulement, le problème de l'antisémitisme -, a ignoré les demandes que lui faisaient tant des ONG que des Etats qui parrainaient la résolution sur l'antisémitisme, d'insister auprès des membres de l'ONU sur l'importance de la question et de mettre les choses au point avec l'Organisation de la Conférence Islamique ; en outre, il n'a jamais organisé une conférence, ni rédigé un rapport consacrés à l'antisémitisme. La réticence des principaux organes de l'ONU et de son Secrétaire général à faire face à ce fléau et à prendre contre lui une mesure significative, y compris à l'égard de ses sources musulmanes et arabes, n'est pas un simple péché d'omission.
L'ONU est une organisation fondée sur les cendres du peuple juif, et dont les principes fondamentaux des droits de l'homme ont été rédigés à partir des leçons de l'Holocauste. L'incapacité de cette organisation à prendre sérieusement en compte l'un des maux mêmes qu'il est de sa mission d'éviter est un scandale de dimensions mondiales. En 1948, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme affirmait : la "négligence et le mépris des droits de l'homme ont eu pour conséquence les actes barbares qui ont scandalisé la conscience de l'humanité". Cinquante-cinq ans plus tard, le scandale s'est dissipé, le silence de l'ONU, en ce qui concerne l'antisémitisme, est assourdissant, et les seuls à en tirer avantage sont ceux qui projettent de commettre partout, dans le futur, des actes barbares contre les Juifs.
Anne Bayefsky *
© The Wall Street Journal pour l'original anglais et upjf.org pour la traduction française
Mme Bayefsky, professeur-adjoint à la Faculté de Droit de l'Université de Colombia, et professeur de sciences politiques à l'Université d'York, à Toronto, est membre du Comité directeur de UN Watch.
[Texte anglais aimablement signalé par Posy McMillen, Fort Worth (USAà.]
(Upjf.org) ajouté le 11-12-2003 dans Antisémitisme