À propos du ministère pastoral féminin (MPF)

dans les Églises Réformées Évangéliques indépendantes (EREI)

 

Après une réunion de conseillers presbytéraux dans notre région, les réflexions suivantes se sont imposées à mon esprit.

Je les crois susceptibles d'intéresser plusieurs.

l.Il me semble, tout d'abord, que des raisons sentimentales et /ou l'influence culturelle ambiante pèsent d'un grand poids dans le souhait exprimé par beaucoup de voir reconnu le MPF. Est-ce un bien étant donné la recommandation biblique de maintenir une distance critique par rapport au siècle présent?

2.Jusqu'à une période récente, la pratique de toutes les Eglises a été celle de ne reconnaître que le Ministère masculin, consacré ou non. Ceci pour des raisons bibliques et aussi, il est bien vrai, en accord avec les usages du temps. Ces usages ont évolué. Il importe donc d'évaluer les raisons bibliques et de montrer, si l'on souhaite le changement, en quoi elles correspondent à une erreur d'interprétation de l'Ecriture. En d'autres termes, il convient d'avoir une réflexion théologique profonde avant de gommer, sans autre, 2 000 ans de tradition chrétienne.

3.Assurément personne ne veut s'inscrire en opposition avec l'Écriture. Tel est, en effet, notre commun désir. Il ne faut ni prendre quelques textes et leur donner une importance excessive (ce dont sont parfois soupçonnés les opposants au MPF), ni considérer que la Bible nous laisse sans principes directeurs en cette matière, comme si le rapport homme-femme et l'analogie famille-Église n'existait pas. Dans l'Ancien Testament, les chefs de famille sont anciens et les prêtres sont des hommes.

Jésus n'a appelé aucune des femmes de son entourage à la fonction d'apôtre, pas même sa mère. Les apôtres ont fait de même, alors que leurs positions féministes ne contribuaient pas peu à donner au christianisme un visage non conformiste, voire révolutionnaire, en leur temps.

4.Utiliser le texte de Galates 3, «ni homme, ni femme», à propos du MPF est-il légitime? Ce texte dans son contexte ne concerne pas l'exercice du ministère, mais la régénération chrétienne. Paul l'affirme très fort: l'âme de la femme a le même prix devant Dieu que celle de l'homme. Et le même Paul déclare pourtant que la femme ne peut pas exercer l'autorité sur l'homme. Se contredit-il? Assurément pas. Autrement on serait en droit de s'interroger sur d'autres points de sa doctrine: la justification, par exemple.

5.Les noms de Marie, Debora, Marie-Madeleine, etc., sont souvent évoqués pour montrer les dons et les qualités des femmes. Qui les conteste? Mais le problème du MPF est-il réellement un problème de compétence et de capacité?

Non, car il est certain que bien des femmes sont beaucoup plus capables d'enseigner, par exemple, que des hommes.

6.Notre Dieu est un Dieu d'ordre qui a institué des structures pour la vie sociale de son peuple; celui-ci devrait aimer les respecter. Mais il est tentant de faire comme les autres et de chercher, en plus, à se donner bonne conscience. Avoir l'air «rétro» n'est guère plaisant.

Qu'importe, si nous avons le souci de respecter le grand mouvement de tout l'enseignement biblique puisque l'unité, la cohérence et la validité pour nous de celui-ci sont certaines.

Le débat ouvert dans l'Union Nationale me semble finalement avoir moins pour objet le MPF qu'une diversité d'attitudes par rapport à la Bible elle-même. Si tel est bien le cas, n'allons pas plus loin. Reconnaissons-le simplement. Et surtout, ne prenons pas en synode une décision que les partisans du MPF jugent opportune et juste mais pas fondamentale, et que les autres ne peuvent envisager - à tort pour les premiers, mais à raison selon eux - sans objection de conscience.

Paul Wells

Professeur à la Faculté Libre de Théologie Réformée d'Aix-en-Provence

(publié avec l'autorisation de l'auteur)

 

La Bonne Nouvelle 2/94

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