En fête à Fribourg avec la bénédiction de Ruth Freifuss
Près de 6000 homosexuel(le)s ont défilé sur une quinzaine de chars à travers la ville. Les spectateurs et Curieux étaient également très nombreux tout au long du parcours. Il y avait ainsi de 15.000 à 20.000 personnes, selon la police. C'est plus que n'en espéraient les organisateurs pour cette fête étalée cette année sur trois jours.
Avec des fleurs
Le cortège ressemblait à une techno-parade. Derrière les tambours et la fanfare qui ouvraient le cortège, les participants étaient équipés de sifflets, de ballons ou portaient des feuilles de palmier. Certains portaient la toge ou des ailes d'ange, tandis qu'une «sexion» de «gayrriers» était habillée de tenues d'assaut. Il y avait cependant peu de dragqueens.
En tête du défilé, le groupe fribourgeois distribuait des roses aux spectateurs. «Rendez-nous le paradis, on vous rend Adam» ou «Pour vivre heureuses, ne vivons surtout pas cachées», pouvait-on lire sur quelques pancartes brandies par des lesbiennes.
Parmi les slogans, d'autres affichaient «Tous unis pour le respect des autres» tandis que certains plaidaient également pour la bisexualité.
Avant le départ,la conseillère d'Etat Ruth Luethi avait apporté son soutien, espérant «que cela aidera à sensibiliser la population aux préoccupations qui sont les vôtres».La fête s'est ensuite poursuivie toute la nuit au Forum Fribourg, où avaient également lieu différentes animations et débats.
A l'occasion de la Gay Pride de Fribourg, la présidente de la Confédération a adressé samedi pour la première fois un message aux homosexuels et lesbiennes de Suisse.Ruth Dreifuss voit dans cette réunion une volonté d'intégration et de «participer à la vie citoyenne», tout en soulignant que «l'intégration, c'est avant tout une bataille contre la discrimination».La présidente de la Confédération a mis l'accent sur la discrimination «,qui frappe les lesbiennes sur deux plans: elles doivent lutter pour l'égalité en tant que femmes et pour la liberté d'aimer des personnes du même sexe».
Ruth Dreifuss a également rappelé que «l'intégration, c'est encore la lutte pour obtenir une reconnaissance légale du partenariat chez les couples de même sexe». Un rapport du Département fédéral de justice et police est actuellement en procédure de consultation.
L'an prochain à Berne
Les organisations homosexuelles des cantons romands étaient présentes à Fribourg par l'intermédiaire de chars. Le cortège est passé devant la cathédrale Saint-Nicolas pour se rendre au Forum Fribourg.
L'organisation suisse Pink Cross, association faîtière du mouvement homosexuel, et l'Organisation suisse des lesbiennes prévoient d'organiser la Gay Pride de l'an prochain à Berne; elle sera nationale./ats
Impartial du 5 juillet 1999
Opinion Populisme sexuel
Dans «Cités et Pays suisses» Gonzague de Reynold assure que «le charme fribourgeois est celui des choses composites,». Le gentilhomme de Cressier-sur-Morat ne croyait pas, mais alors pas du tout, si bien dire. Une semaine après Bern, Paris, Zurich et autres métropoles, Fribourg s'est offert une de ces parades homosexuelles qui saluent dans un joyeux mélange les premières chaleurs estivales.
Fichtre! Les organisateurs de la Gay Pride fribourgeoise avaient vu grand. Ils ont fait dans l'eurocompatible. Et le lieu, emblématique d'un catholicisme conservateur en voie de marginalisation, se prêtait admirablement à la provocation sociale.
Le Conseil fédéral, auquel rien de ce qui compte ne saurait échapper, ne pouvait manquer ça. Dans un message lu par son collaborateur personnel, Ruth Dreifuss n'a donc pas raté l'occasion de manifester sa «solidarité» avec les homosexuels et lesbiennes, qui seraient exposés à une «discrimination». Des termes généralement appliqués aux minorités opprimées.
Or, concurremment à un esprit festif et volontiers outrancier, la Gay Pride déploie tout un arsenal militant où prédomine une dialectique à forte consonance communautariste. C'est bien là le danger, celui d'une ghettoïsation insidieuse. Alors que, paradoxalement, les homosexuels revendiquent leur intégration dans une société prétendument homophobe.
Une telle discrimination existe-t-elle encore vraiment après tant de tabous piétinés et de libertinages assumés? Sans doute pas. Ce serait plutôt l'indifférence que rencontreraient les comportements jugés naguère déviants. Aussi bien n'est-ce pas pour secouer cette atonie que les militants homosexuels s'offrent chaque été en spectacle. C'est pour faire cheminer l'idée d'une reconnaissance légale particulière. Mais alors, d'autres singularités comportementales pourraient y prétendre.
Le droit à la différence est légitime dès lors qu'il s'exerce sans agressivité ni prosélytisme. Des correctifs législatifs sont peut-être souhaitables. Encore faudrait-il que les politiques ne cèdent pas à un populisme de la transgression.
Guy C. Menusier - Impartial du 5 juillet 1999
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