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 Après le spectacle

La conférence de paix entre dans sa deuxième phase: Israéliens et Arabes entament des discussions bilatérales

Ce qu'aucun chef d'Etat ni aucune autre instance internationale n'a réussi à faire, James Baker l'a réalisé en public et en direct dans la capitale espagnole: rassembler autour d'une même table une délégation israélienne et 3 délégations arabes (Syrie, Liban et Jordanie-Palestine) dans la langue desquelles le vocable même d'Israël est tabou, imprononçable. On connaît une partie des tours de passe-passe qui ont introduit les participants récalcitrants dans la «cage de la paix», selon les termes d'un diplomate arabe: promesses contradictoires, démenties, réaffirmées, contredites, parfois tout simplement violées, le tout accompagné de quelques torsions de bras mesurées mais fermes. Il a bien fallu se rendre à Madrid. Avec quelques poignets endoloris.

Les Syriens ont dû s'asseoir en compagnie de l'ennemi sioniste, sans avoir obtenu d'abord l'assurance que le Golan leur serait rendu. Les Libanais ont dû faire de même, sans que l'évacuation des troupes israéliennes du sud de leur pays leur ait été promise. Les Palestiniens ont dû siéger dans le cadre d'une délégation commune jordano-palestinienne, contraints de taire leur identification avec l'OLP et de renoncer, pour un temps, à réclamer un État indépendant. Quant aux israéliens, ils ont dû s'asseoir en face de Syriens et de Libanais qui refusaient de leur tendre la main et de les regarder, en face d'une délégation palestinienne dont chaque membre avait été choisi avec le consentement de la centrale de l'OLP à Tunis. Ils ont dû endurer les discours virulents des représentants syriens et palestiniens. Contrairement aux assurances données, ils ont été mis devant un fait accompli pénible: la délégation palestinienne a tenu son propre discours, indépendamment de la délégation jordanienne. Et pour consolider la cage - ou le piège ? - de la paix, Américains et Soviétiques ont rappelé à Israël, en termes divers, le contenu des Résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l'ONU: abandon des territoires en échange de la paix.

Les allocutions des délégations arabes ont déçu les moins optimistes par leur manque d'ouverture et leur dureté: le réquisitoire syrien fut en particulier difficilement supportable. Le premier ministre Shamir, fatigué et mélancolique, a résumé ainsi ses sentiments, le deuxième soir de la Conférence, à la télévision israélienne: «on nous avait bien dit que ce ne serait pas un jardin de roses... mais aujourd'hui ce n'était qu'un champ de ronces». Quant à l'intervention clownesque, le dernier jour de la première phase de la conférence, du ministre syrien des Affaires étrangères, Farouk El Charah, brandissant une vieille photographie de Shamir «terroriste recherché par les Anglais», elle dépassa tout ce que l'on pouvait imaginer comme provocation.

Mais, diront les optimistes, le simple fait qu'Arabes et Israéliens se soient assis autour de la même table, d'abord dans le cadre d'une conférence d'ouverture puis dans celui, plus restreint et plus intime, de négociations bilatérales sans présence de tiers, n'est-il pas révolutionnaire? Il est vrai que l'on croyait rêver en voyant délégués arabes et israéliens à la même table, dans la même pièce. Et bien des politiciens israéliens se sont félicités de voir s'effriter le tabou arabe du non-dialogue avec Israël. Le mortier américain a pressé dans une même masse médiatique des éléments jusqu'alors irréductibles. Et, ajouteront les optimistes à propos des Arabes, ne sommes-nous pas au Proche-Orient, où un long marchandage décide du prix final? Les déclarations dures et rigides des délégués arabes ne constituent-elles pas que des positions de départ, augurant de longues tractations?

Il est vrai que nous sommes au Proche-Orient et que, dans les souks des villes, un acheteur patient peut faire baisser le prix d'un objet de 60 à 25 dollars. Mais le marchandage a ses limites: on ne peut faire descendre un prix beaucoup plus bas que 40% de la proposition initiale; inversement, un acheteur sérieux ne peut proposer comme prix initial une somme ridiculement basse. J'ai vu de mes yeux des touristes éconduits dans les échoppes des bazars pour n'avoir pas saisi les règles du jeu du marchandage levantin. Et quand les Syriens demandent d'abord la restitution intégrale du Golan et la démilitarisation d'une partie de la Galilée, avant même d'envisager les pourparlers de paix, tout habitant de la région comprend qu'ils ne sont pas sérieux. Cette impression a été confirmée le dimanche 3 novembre, avec toutes les opérations de diversion de la délégation syrienne et l'entretien nocturne qu'elle n'a pu éviter avec la délégation israélienne. Eliyahou Ben Elissar, un des représentants israéliens, à Madrid, déclara le lendemain, à la radio Kol Israël: «il est évident que les Syriens ne veulent pas la paix: ils ont été forcés de venir à cette conférence et ils cherchent tous les prétextes possibles pour en sortir et pour faire éclater les négociations directes».

La délégation jordano-palestinienne, en revanche, a surpris les Israéliens par son désir d'arriver à un accord avec eux, même au risque de déplaire aux Syriens. Il y a eu, certes, les déclarations dures des discours officiels, exprimant les exigences bien connues: retrait israélien total de la bande de Gaza, de la Samarie et de la Judée, y compris de Jérusalem-est, démantèlement des implantations, instauration d'une autonomie régionale aboutissant, après une période donnée, à la création d'un État palestinien. Mais, dans la pratique, la délégation jordano-palestinienne a observé les règles du jeu et s'en est tenue à vouloir négocier seulement les modalités d'une autonomie palestinienne dans les territoires. Quant à la Jordanie proprement dite, elle se contente de demander à Israël de déterminer avec elle le contour d'une frontière plus précise dans la zone désertique de l'Arava.

On a souligné que les premières négociations directes se sont déroulées dans une atmosphère détendue, où les plaisanteries et l'humour n'étaient pas exclus. Que s'est-il passé avec les Palestiniens? Ces pires ennemis d'hier, ces supporters de Saddam Hussein et du coup d'Etat avorté d'août en URSS ont-ils subi une brusque mutation génétique? Il convient de rappeler ici quelques éléments qui échappent souvent aux observateurs étrangers, dont la pensée est souvent manichéenne: les opprimés (palestiniens) s'opposant aux oppresseurs (israéliens).

Il y a un contact quotidien à bien des niveaux entre Arabes et Juifs. Beaucoup d'Israéliens parlent l'arabe et plus de Palestiniens encore parlent l'hébreu. Malgré «la guerre des pierres», les interventions de l'armée israélienne dans les territoires et la méfiance réciproque, les deux populations ont des champs d'activité communs et la vie «normale» continue. Les «Palestiniens», à savoir les Arabes des territoires contestés et leurs frères dispersés à l'étranger, sont ceux qui ont le plus souffert de l'intifada, des grèves incessantes, de la baisse dramatique du tourisme et des tueries commises par les militants des groupes terroristes divers. A cela s'est ajoutée la guerre du Golfe, catastrophique avec l'exil forcé de centaines de milliers de Palestiniens du Koweït et la chute du dinar jordanien.

La politique israélienne d'implantation dans les territoires, et la vague d'immigrants juifs de Russie ont amené les dirigeants palestiniens à conclure que le temps ne travaillait pas forcément pour eux. La disparition de l'URSS comme patronne automatique des mouvements révolutionnaires a également contribué à orienter les attitudes vers la recherche d'un «modus vivendi» avec Israël.

Les Israéliens se réjouissent, évidemment, de tout signe d'espoir perceptible dans l'attitude des dirigeants palestiniens et jordaniens. Dans l'ensemble, cependant, le doute demeure. La conférence de Madrid, avec toute sa solennité, ses poignées de mains, les sourires palestino-israéliens, n'a pas changé d'un millimètre les données du contentieux: à qui appartiennent (ou à qui doivent revenir) la Judée, la Samarie, la bande de Gaza, Jérusalem? Quel bâtiment doit se trouver sur la place du Temple et pour quel culte? Le culte d'Allah dans les deux mosquées existantes, ou le service du Dieu d'Israël dans un Temple reconstruit? Les musulmans sont convaincus que la Terre sainte tout entière fait partie du domaine de l'Islam et que seul l'Islam doit y régner. Les Juifs qui ne renient pas leur foi sont tout aussi convaincus que Dieu leur a donné, par promesse, toute la terre d'Israël et que Jérusalem est la ville du Grand Roi, du Messie.

De Jérusalem, Henri-Léon Vaucher

AVÈNEMENT Décembre 1991 No 35 / P 7

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