LA
CRÉATION ou LA PREMIÈRE PAGE DE LA
BIBLE
CHAPITRE I
LE COMMENCEMENT
« Au
commencement Dieu créa les cieux et
la terre. »
(Gen. I, 1).
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De toutes les questions scientifiques,
politiques, sociales ou religieuses qui agitent
l'humanité et les individus, il n'y en a pas
de plus grande et de plus sérieuse que
celle-ci : D'où venons-nous et
où allons-nous ? C'est en vain que nous
en demanderions la réponse à la
raison ou à la science humaine. Elles ne
l'ont pas encore trouvée. Demandez à
ces disciples des lumières d'où nous
venons, ils vous répondront : de la
nuit éternelle ! « Notre
Père, le néant », a dit
Renan. Demandez-leur où nous allons, ils
répondront : À la nuit
éternelle! Mais Dieu, qui a
créé le coeur humain et qui
connaît toutes les questions, les doutes et
les craintes qui l'agitent, nous a donné
dans sa bonté un livre, une
révélation plus consolante qui nous
dit d'où nous venons : de Dieu !
et où nous allons : à
Dieu !
J'ouvre ce livre et le premier mot que
j'y trouve est la grande
parole : « Au commencement Dieu
créa les cieux et la terre ».
J'entends bien aujourd'hui des voix discordantes
qui me crient : « Ce n'est pas
vrai ! ce n'est pas Dieu qui a
créé le monde ; nous ne
descendons pas de lui, mais du singe ; il n'y
a point de Dieu ! » Mais les efforts
que font ces matérialistes ou
« monistes » modernes, pour
éliminer de sa création le
Créateur qu'ils craignent et qu'ils
haïssent, sont vains. Quand ils vont
répétant bien haut et sans l'ombre
d'une preuve que la mort a produit la vie, et la
matière l'esprit ; que des atomes
d'hydrogène, d'oxygène et de carbone
ont par hasard enfanté les organismes, et
que la pensée et la conscience sont des
produits chimiques, ce sont là des
hypothèses absurdes, même au point de
vue scientifique, puisque ni la pensée, ni
la conscience n'ont une seule des
propriétés de la matière,
qu'elles n'exercent sur cette dernière
aucune influence, pas plus physique que chimique.
Quand ils affirment que l'idée du bien et du
mal et celle de Dieu proviennent du
mécanisme des atomes, et que l'infinie
beauté et la sagesse de la création
ne prouvent pas qu'il y ait un Créateur, ce
n'est pas là de la science, ni de la
logique, ni de la raison ; ce sont les
assertions insensées et arbitraires d'une
incrédulité qui ne recule devant
aucune absurdité, quand il s'agit de nier
Dieu.
Posons la question nettement. Ou bien
l'univers existe de toute éternité,
ou il s'est créé lui-même, ou
enfin il a été créé.
Son évolution actuelle prouve qu'il
n'est pas éternel ;
il tend à l'équilibre de toutes les
forces, et, s'il était éternel, il
aurait dû y arriver depuis des
éternités ; aussi les
physiciens, les astronomes, les savants comme
Herschel, Secchi, Dubois-Reymond, le Dr Klein, Lord
Kelvin et bien d'autres proclament-ils
hautement : L'étude de l'univers
prouve que le monde a eu un commencement et qu'il
aura une fin. L'hypothèse de son
éternité est absolument
réfutée par son évolution
même et par la science. Si donc le monde
n'est pas éternel, s'est-il
créé lui-même ? - Non.
Qu'un jour le néant, sans force et sans
matière pour cela, ait résolu de
devenir quelque chose, ou le soit devenu sans le
vouloir, voilà bien la plus grande
absurdité que l'esprit humain puisse
imaginer. Le simple bon sens nous dit qu'une chose
ne peut pas agir avant d'être, et se
créer elle-même avant d'exister.
« Nul effet sans cause », tel
est le principe fondamental des sciences
naturelles ; et ici nous aurions des effets
immenses, d'une variété prodigieuse,
engendrés sans cause aucune ! De quel
oeil me regarderait un athée auquel je
dirais qu'un caillou ou une pièce d'or sur
ma table se sont faits de rien cette nuit ! Il
me citerait les lois éternelles de la nature
qui s'y opposent. Mais qu'une fois, dans la nuit
des siècles, et malgré ces lois
éternelles, un monde tout entier se soit
fait de rien, se soit engendré du
néant, il le croit, parce qu'il
espère pouvoir ainsi se passer du
Créateur dans la création.
Si donc le monde n'est pas
éternel et s'il n'a pu se
créer lui-même, il ne reste plus
qu'à dire avec l'astronome allemand, le Dr
Klein : « L'arrangement du monde
prouve qu'il a été fait par la plus
haute intelligence, disposant en même temps
d'une force créatrice sans bornes. Les plus
grands savants, les fondateurs de nos sciences
naturelles, ont reconnu l'existence de cette
intelligence. Elle ressort aussi
nécessairement de tout l'ensemble des
phénomènes naturels, que l'existence
d'une force attractive dans le soleil ressort du
mouvement des planètes autour de lui dans
des orbites fermées ».
(Kosmologische Briefe, p. 28).
« L'étude de la
nature », disait dernièrement le
professeur Reinke, de Kiel, « mène
inévitablement à l'idée de
Dieu », et Lord Kelvin, peut-être
le premier physicien de notre temps,
écrivait au Times (4 mai 1903) :
« La pensée scientifique est
obligée d'admettre l'idée du
Créateur ».
Nous ne discuterons pas ici avec les
adversaires de la Bible, quand ils vont
répétant que ce livre suranné,
qu'ils n'ont jamais lu avec attention, est
définitivement réfuté par la
science. Nous ne voulons pas non plus convaincre
ceux qui, trompés par une fausse et
superficielle théologie moderne, n'y voient
que des mythes empruntés à l'Inde on
à Babylone. Ceux-là ne veulent pas
croire à la Bible. Ils lui
préfèrent des théories qui
flattent leurs penchants et leurs idées
préconçues, et seraient bien
fâchés que la Bible fût vraie,
car ils pressentent que les conséquences en
seraient effrayantes pour eux.
Nous nous proposons dans cet ouvrage
d'exposer simplement aux âmes droites qui
aiment la Bible et cherchent la
vérité, que le récit que nous
fait cette Parole divine des origines du monde
s'accorde avec les résultats principaux de
la science qui les étudie dans les couches
de l'écorce terrestre. Nous disons les
principaux résultats ; car y a-t-il une
science, philosophie ou théologie,
médecine, jurisprudence ou autre qui soit
sur tous les points d'accord avec
elle-même ? De même dans la
géologie. Les plutonistes, les neptunistes,
les quiétistes, les partisans du feu central
et ses adversaires se disputeront longtemps encore.
Il serait donc bien injuste de reprocher à
la Bible de ne pas tenir compte de tous les
systèmes ou de ne pas citer tous les faits.
Moïse, inspiré par l'Esprit divin, n'a
pas voulu nous donner en une page un manuel de
géologie ou de paléontologie (science
qui traite des pétrifications) ; mais
bien esquisser à grands traits les faits
principaux de la création et leur
enchaînement, et l'exactitude de son
récit a été admirée par
des savants comme Cuvier, le fondateur de
l'anatomie comparée, Guyot, dans son
livre : la Création à la
lumière de la science moderne, et encore
récemment par le savant professeur
Quenstedt, lequel appelle Moïse « un
grand géologue ».
Dieu créa ! La
création révèle le
Créateur. Car Dieu a manifesté aux
hommes « depuis la fondation du monde, ce
qui ne peut se voir de lui, savoir sa puissance
éternelle et sa divinité, qui se
discernent par le moyen de
l'intelligence dans ses oeuvres. »
(Rom. I, 19-20). Et tous les peuples
l'ont senti. Tous reconnaissent, au plus profond de
leur âme, qu'il y a un Dieu ;
mais « quoiqu'ayant connu
Dieu », dit l'apôtre,
« ils ne l'ont point glorifié
comme Dieu, mais ont changé la gloire du
Dieu incorruptible en la ressemblance de l'image
d'un homme corruptible et d'oiseaux et de
quadrupèdes et de reptiles ».
(Rom. I, 21-23).
Le monothéisme, l'adoration d'un
seul Dieu élevé au-dessus de tous les
autres, est la première forme de toutes les
religions. C'est ce que reconnaissent les
écrivains impartiaux, par exemple le
célèbre F.-Max Müller d'Oxford,
dans son Histoire des Religions. Dieu n'a
jamais entièrement abandonné aucun
peuple ; « en toute nation, celui
qui le craint et qui pratique la justice, lui est
agréable ».
(Actes X, 35.) Comme nous le voyons
par l'exemple de Melchisédek, de Balaam, de
Job et de ses amis, par les mages d'Orient à
qui il s'est révélé d'une
manière à nous inconnue, il a de tout
temps et en tous lieux exaucé des milliers
de prières qui Lui étaient
adressées sous différents noms.
« Tu exauces la prière ;
aussi toute chair vient à
toi ! »
(Ps. LXV, 3.) Où y a-t-il un
peuple, une nation, une race qui n'ait pas
prié et adoré ?
Toutes ces nations ont à
l'origine connu un seul Dieu suprême; le
polythéisme, l'adoration de plusieurs dieux
intérieurs et, tout au bas de
l'échelle, le fétichisme, ont
été partout le résultat de la
crainte instinctive qu'éprouve l'âme
coupable devant un Dieu saint,
qu'elle sent être pour le pécheur
« un feu dévorant ». Les
dieux, que des voyageurs superficiels et souvent
incrédules ont appelé les seules
divinités des peuples sauvages,
n'étaient le plus souvent que les
intermédiaires, les médiateurs entre
Dieu et l'homme. Ainsi en est-il des peuples
catholiques, par exemple, qui, bien qu'ils sachent
qu'il n'y a qu'un Dieu, invoquent la Vierge et les
Saints. Ainsi le Romain Procope dit des Slaves
d'au-delà des Carpathes :
« Ils adorent, à la
vérité, les fleuves, les nymphes et
de nombreuses divinités ; mais Ils
croient en même temps à un unique Dieu
des dieux, seul Maître de tout, qui laisse
aux dieux inférieurs qu'il a
créés, l'administration du
monde ». Ainsi encore, tandis qu'en
Égypte le peuple adorait le boeuf Apis,
comme symbole de la génération, le
crocodile, comme image du Dieu du mal, Typhon, et
le phénix comme celle de
l'immortalité de l'âme, les
prêtres célébraient dans les
belles hymnes du livre des morts Atoum,
l'Inaccessible, la Loi de la loi, le Père
des pères des Dieux. De même les
Polynésiens chantaient, avant que nous les
connussions, le grand Tararoa ou Tangaroa
« le Créateur du Tout, dont le
monde est l'ombre » ; les Indiens de
l'Amérique adoraient Gitsche Manitou, le
Grand Esprit ; et les Bouriates, les Iakoutes
dans leurs solitudes glacées, leur Dieu
Tagarra ou Num ou Turum, « qui habite une
lumière plus brillante que les
nôtres » (
1 Tim. VI, 16) et laisse les
affaires terrestres aux dieux inférieurs
auxquels il faut s'adresser.
Les antiques légendes des peuples
offrent parfois des accords frappants avec le texte
biblique. Un livre sacré de l'Inde, les
Rig-Vedas, que le professeur Garbe estime de 3000
ans antérieur à J.-C. dit :
« Celui qui existait de toute
éternité créa d'abord l'eau
par un mouvement de son esprit ; c'est
pourquoi Il est appelé Nara, celui
qui se meut sur les eaux ». (v.
Gen. I, 2.) Et plus loin :
« Après que Celui dont la
puissance est incompréhensible eut
achevé de créer l'univers, il
échangea l'activité contre le
repos ». (v.
Gen. II, 2.) Les livres saints des
Parses (ou Perses) racontent que le monde visible,
ciel et terre, fut créé en six
périodes. Ormuzd, le Dieu du bien,
créa d'abord la lumière, ensuite
l'eau, qui couvrit la terre entière, puis la
terre ferme, puis les arbres de toute
espèce, puis les animaux. Enfin Il
créa le premier homme, Kaiomorts, dont le
visage lumineux regardait en haut. Mais Ahriman, le
mauvais esprit, créé bon autrefois,
introduisit les ténèbres dans le
royaume de la lumière et gâta toute la
création. Partout on trouve l'idée,
la croyance traditionnelle que l'homme a
été créé bon et
heureux, que son habitation primitive était
un jardin de délices, mais qu'ayant
succombé à une tentation ou fait du
mal, il dut quitter son paradis terrestre pour
porter désormais le châtiment de sa
chute. Nulle part ne se rencontre la croyance que
peu à peu, grâce à des
réformes, à des progrès
successifs, la terre avec ses habitants se
transformera, s'améliorera au point de
devenir un nouveau paradis ; mais partout
l'attente de grandes luttes
finales, d'un jugement universel suivi d'une
éternité de bonheur et de
félicité. Et partout aussi on
retrouve la tradition d'un couple primitif :
Deucalion et Pyrrha chez les Grecs ; Askr et
Embla chez les Scandinaves, etc.
C'est surtout au sujet du déluge
que l'unanimité dans les traditions de
presque tous les peuples de la terre est frappante.
C'est toujours et partout, avec des détails
plus ou moins en harmonie avec la narration
biblique, le récit de grandes eaux qui
couvrirent la terre entière et ses plus
hauts sommets, et sur lesquelles vogua, solitaire,
un grand navire, monté par quatre ou huit
êtres humains, les parents de
l'humanité future. Ainsi des missionnaires
trouvèrent dans l'Amérique du Nord
des Indiens qui considéraient le pigeon
sauvage comme un animal sacré ; et
lorsqu'on leur demanda pourquoi ils le nommaient
ainsi, ils répondirent que c'était
l'oiseau qui, lors de la grande inondation, avait
apporté à leur père dans le
grand navire, une feuille de saule. Or cette
feuille a la forme, la grandeur et la couleur de
celle de l'olivier. Et les Toltèques
racontaient, à propos de la grande pyramide
de Choluta, que sept géants l'avaient
construite pour s'y réfugier pendant
l'inondation, mais qu'un Dieu irrité les
avait dispersés par ses foudres. Ces
traditions universelles prouvent que
« Dieu a fait d'un seul sang toutes les
races des hommes, pour habiter sur toute la face de
la terre, ayant déterminé les temps
ordonnés et les bornes de leur
habitation. »
(Actes XVII, 26.)
Considérons maintenant le premier
verset du texte biblique, sublime dans sa
simplicité : « Au
commencement Dieu créèrent les cieux
et la terre. » Aucune conception
humaine n'ira jamais au delà.
Il ressort des recherches des savants
sur les origines de la terre, que ce que nous
appelons la vie organique n'a pas existé sur
notre planète dès le commencement.
Alors, d'où cette vie a-t-elle surgi tout
à coup ? Voilà ce que personne
n'a pu encore expliquer. Mais nous savons, nous
chrétiens, parce que Dieu nous le dit dans
sa Parole, qu'au commencement un Dieu vivant et
tout-puissant de la plénitude de sa vie
surabondante a fait naître la vie sur notre
planète.
Certes, ce Dieu Lui-même est un
miracle inexplicable, un Dieu caché ;
mais serait-Il encore un Dieu, si nous pouvions le
comprendre entièrement ? La vie
procédant d'un Dieu vivant,
voilà une idée que nous pouvons
saisir, tandis que notre intelligence, notre raison
se refuse à faire dériver la vie de
la mort et l'esprit de la matière. Nous
disons donc que le fini procède de l'infini,
le temporel de l'éternel, les choses
visibles des choses invisibles, en sorte que, selon
le texte biblique, « les choses qui se
voient n'ont pas été faites de choses
qui parussent. »
(Hébr. XI, 3.) Alors aussi
nous comprenons la cause, l'origine de ces
désirs ardents, de cette soif de l'infini,
de ces aspirations irrépressibles vers les
hauteurs et les profondeurs éternelles, qui
se retrouvent, conscientes ou inconscientes, au
fond de chaque âme humaine. Ces
aspirations ne constituent-elles
pas ce que nous appelons la vie ? Toute
chose tend à retourner à son origine.
Or tout ce qui existe tend à l'infini, et
l'infini n'est-ce pas Dieu ? Oui, les besoins,
les désirs si intenses de lumière, de
vie, de force et de connaissance que nous
éprouvons, démontrent assez que nous
ne sommes point issus d'une matière inerte,
autrement ce serait à la mort et non
à la vie que tendraient toutes nos
aspirations.
« Au commencement Dieu
créa les cieux et la terre. » Par
cette déclaration, la Bible nous fait
connaître dès le début le point
de vue où elle se place. Comme un
écrivain de valeur fait d'abord savoir
à son public quel but il poursuit, ainsi
Dieu dans sa Parole nous dit d'emblée de
quoi elle traitera, c'est-à-dire d'un
« en haut » et d'un
« en bas », de choses
célestes et de choses terrestres. Ces deux
idées sont le texte de ce qu'elle nous
révélera du commencement
jusqu'à la fin.
Elle nous dira d'abord l'harmonie
parfaite entre le ciel et la terre, Dieu estimant
que toutes choses étaient très
bonnes ; puis l'entrée du
péché dans le monde, entraînant
une rupture, une séparation bien
tranchée entre les choses d'en haut et
celles d'en bas. Ensuite elle nous fera assister
à l'évolution du plan divin
composé de dispensations successives ayant
pour but de réunir de nouveau ce que le
péché avait séparé, et
qui aboutissent à la venue en chair de
Jésus-Christ, l'Homme-Dieu, le grand
Réparateur. Enfin, dans le
dernier chapitre de la Bible, nous trouvons
l'harmonie parfaite rétablie, la nouvelle
Jérusalem descendant sur la terre et
l'unissant au ciel, afin que Dieu soit tout en
tous, pour l'éternité.
Nous retrouvons dans toute la
création le grand contraste entre les choses
éternelles et les choses temporelles, entre
ce qui est d'en haut et ce qui est d'en bas, entre
l'esprit et la matière, ces deux
éléments de toutes choses.
Considérez l'homme : sa tête,
siège de la pensée, est
dirigée en haut, tandis que les membres
inférieurs, qui ne servent qu'à des
buts plus physiques, touchent la terre. Mais
l'animal qui ne connaît qu'une vie terrestre,
vit la tête penchée vers la terre
où il cherche sa nourriture, et se
traîne ou rampe sur elle. De même les
végétaux élèvent vers
le soleil leurs branches, leurs fleurs, tandis que
leurs racines plongent en bas dans le sol
nourricier. Ainsi l'existence humaine se compose de
la double vie de l'esprit et de la matière,
et de leur combat incessant.
« Au commencement Dieu
créa les cieux et la terre. »
Cette parole majestueuse se dresse à
l'entrée de la Bible comme un rocher de
granit. C'est la porte qui mène de
l'insondable éternité à la
période terrestre que nous appelons le
temps. Alors ce qui n'avait pas encore
été, fut : une création.
Ce fondement posé, la Bible remet à
des temps futurs - et l'éternité est
assez longue pour cela - l'étude et la
contemplation des autres corps célestes,
pour s'occuper de celui qui forme le domaine de
l'homme, de notre globe : la
terre. Et, s'adressant à des
créatures de la terre, elle emploie un
langage terrestre aussi et intelligible pour tous,
en parlant par exemple, comme du reste l'astronome
le plus instruit, d'un soleil qui se lève et
qui se couche, bien que ce soit la terre qui tourne
autour du soleil. Remercions Dieu de ce que comme
un père il nous parle à nous, ses
enfants, le langage de l'enfance ; car pour
lui l'humanité, ce n'est pas quelques
milliers de savants ou quelques cent mille hommes
instruits ; ce sont les millions qui,
courbés vers la terre, mangent leur pain
à la sueur de leur front. Ce sont les
cultivateurs et les ouvriers, les peuples à
moitié civilisés de l'Asie et de
l'Afrique, et partout l'enfant, la femme, le
vieillard, le faible, l'ignorant, l'infirme et le
malade, le pauvre et le souffrant, tous ceux qui
soupirent après un monde meilleur.
Ils n'ont presque aucune notion de
sciences naturelles ou d'astronomie, mais leurs
âmes n'en sont pas moins précieuses au
Dieu de l'univers, « au vrai Père
de toute famille dans les cieux et sur la
terre. » (Eph. IlI, 15.) Tous
ceux-là, que feraient-ils d'une Bible
scientifique ? Et ne croyons pas que les
savants la comprendraient mieux ! Un ouvrage
de chimie avec ses formules reste inintelligible
aux mathématiciens, et les formules de haute
mathématique sont incompréhensibles
au chimiste ; tout savant qui découvre
ou invente est obligé de se faire des mots
nouveaux pour exprimer ses idées ou les
faits, et il n'y réussit jamais d'une
manière exacte. Plus une chose est
simple : temps, espace,
matière, force, mouvement,
vie, plus sa définition devient difficile ou
impossible à notre langage imparfait, qui
peut décrire, mais non définir ;
et même pour décrire exactement le
moindre phénomène, il nous faudrait
connaître à fond la matière et
l'esprit. Ainsi, quand nous disons que la lune
tourne autour de la terre et la terre autour du
soleil, ce n'est que relativement vrai. En
réalité, la lune décrit chaque
année dans l'espace non un cercle ou une
ellipse, mais une ligne sinueuse jamais
fermée, composée de douze petites et
de douze plus grandes courbes, et qui se complique
encore « des spirales dans lesquelles la
terre tombe dans l'espace. »
(Flammarion, Astron. pop., p. 65.) Aucun
savant ne saurait tracer le vrai chemin que suivent
la terre et le soleil à travers le monde
étoilé. Si Dieu ne condescendait donc
pas à s'abaisser jusqu'à nous,
à se servir de notre langage imparfait pour
se faire entendre, et si des cimes augustes de sa
divinité et de ses attributs éternels
Il nous adressait des paroles divines et absolument
vraies sur sa Création, les hommes,
même les plus savants ne pourraient pas le
suivre. Qu'on cesse donc de reprocher à la
Bible son manque apparent d'érudition ou son
langage peu scientifique. Elle ne nous offre pas
des nomenclatures stériles, ou des
systèmes artificiels de la nature, mais bien
les principes fondamentaux de la création,
une physique plus haute que celle de
l'université, et une vraie
métaphysique donnant le trait d'union entre
l'esprit et la matière.
« Au
commencement ! » À quelle
époque ? Quand Dieu
commença-t-il à créer les
cieux et les chérubins ? Quel est
l'âge des anges ? Furent-ils tous
créés ensemble ? Satan
resta-t-il des éternités Lucifer,
prince de la lumière, étoile du matin
(Es. XIV, 12, 14.), toujours plus
brillante, avant de tomber de ces hauteurs ?
Les anges déchus habitaient-ils la terre
avant que par suite de leur chute, elle
devînt un chaos ? Nous ne le savons pas,
et ne pouvons pas le savoir ; car la Bible ne
nous le dit pas. Toutes les spéculations,
même de chrétiens éminents, sur
les origines et le pourquoi du mal, la
prédestination et le libre arbitre, n'ont
jamais rien expliqué, ni rien prouvé.
« Les choses cachées sont à
l'Éternel, notre Dieu, mais les choses
révélées sont à nous et
à nos enfants. »
(Deut. XXIX, 29.) Ne cherchons pas
à savoir ce que Dieu ne nous a pas
révélé, afin de ne pas devoir
répondre un jour comme Job :
« J'ai parlé sans comprendre de
choses trop merveilleuses pour moi. Je me repens
dans la poussière et dans la
cendre. »
(Job XLII, 3, 6.)
La Bible dit : « Barah
Elohim », les Elohim créa.
Comment ? Pourquoi les Dieux au pluriel et
leur action au singulier ? Parce que les trois
personnes de la Sainte Trinité (
« de qui », du Père,
« par qui », par le Fils, et
« en qui », en l'Esprit Saint,
« sont toutes choses »,
Rom. XI, 36, ) ont
créé, réunies en une, d'un
accord et d'une volonté, les cieux et la
terre. Ce mystère redoutable,
déjà indiqué dans le premier
verset de la Bible, se retrouve, les Juifs pieux le
savaient bien, dans le
Tabernacle, copié du modèle
céleste que Moïse vit sur le
Sinaï, sous les images de la table aux douze
pains, symbole du Père, qui nourrit
journellement les douze tribus, de l'autel des
parfums, d'où s'élèvent les
prières des saints offertes par le Fils, et
du chandelier d'or à sept branches
représentant les sept Esprits qui sont
devant Dieu
(Apoc. I, 4.). Jésus a
annoncé aux hommes le Père, le Fils
et le Saint-Esprit, et l'Apocalypse montre dans le
ciel le Père, l'Agneau et les sept Esprits
qui envoient grâce et paix aux sept
Églises.
Le nombre trois est une loi fondamentale
de l'oeuvre divine ; et comment le serait-il,
s'il n'avait son origine en Dieu. Dieu a
donné à tout esprit
créé, comme moyens de
révélation, la matière, le
temps et l'espace. Nous connaissons l'espace comme
ligne, surface et volume ; le temps comme
passé, présent et avenir ; la
matière sous la forme solide, liquide et
gazeuse. Les trois manifestations de l'âme,
qui y correspondent, sont l'action, la parole et la
pensée. Sur la terre nous voyons le
continent, la mer et l'atmosphère ; le
règne minéral, le règne
végétal et le règne
animal ; dans l'homme une trinité
mystérieuse aussi : le corps,
l'âme et l'esprit
(1 Thess. V, 23.) ; la famille
composée du père, de la mère
et de l'enfant, et l'humanité
organisée en famille, état et
église. Sans parler d'autres analogies aussi
profondes et aussi peu comprises, remarquons enfin
que les trois grandes idées de la
divinité sont : le bien, le vrai et le
beau ; car c'est à
Toi qu'appartiennent le « royaume du
bien », « la puissance du
vrai » et « la gloire du
beau » aux éternités des
éternités. Amen.
Et, dans les cieux, les chérubins
ne cessent de s'écrier :
Saint ! Saint ! Saint ! et
les vingt-quatre vieillards jettent leurs couronnes
devant le trône, disant : «Tu es
digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la
gloire et l'honneur et la puissance ; car
c'est toi qui as créé toutes
choses : et c'est à cause de ta
volonté qu'elles sont devenues et qu'elles
furent créées. »
(Apoc. IV, 8, 11.)
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