Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



LE VEILLEUR SUR LA TOUR



LE VEILLEUR SUR LA TOUR.

De Séir, on me crie : - Veilleur, où en est la nuit ? Qu'en est-il de la nuit, veilleur ? Le veilleur dit : - Le matin vient.
(Esaïe 21 : 11-12.)

 Le voyant est sur une tour, d'où il domine l'histoire. C'est à lui qu'il appartient d'annoncer la venue du jour à la multitude des hommes, plongée dans la nuit.
On l'interroge, de façon toujours plus pressante : « Veilleur, où en est la nuit ? Qu'en est-il de la nuit, veilleur ? » Dans cette répétition, comme on sent l'angoisse d'un peuple opprimé ! Quand luira-t-elle, l'aurore de la délivrance ?
Et le veilleur dit : « Le matin vient. »
Sans doute, il y a des brumes au ciel. La lumière et l'obscurité se combattent. Il faut encore attendre pour que le jour vienne en sa plénitude. N'importe, le matin est là. Et la parole du prophète évoque en un raccourci sublime l'espérance qui, pendant tant de siècles, a soutenu son peuple.

Dans les temps de crise où nous sommes, il semble que tout craque à la fois : les vieilles religions du monde non chrétien, la morale traditionnelle, les cadres de la société. Parmi l'inquiétude qui grandit de toute part, n'entendez-vous pas la multitude des âmes crier à cette chrétienté dont vous faites partie, et qui, faisant profession de croire aux choses éternelles, doit être capable de donner à ses frères des raisons d'espérer : « Veilleur, où en est la nuit ? »

Ce que je vous demande aujourd'hui, c'est si vous êtes en état de répondre, aux approches de Noël : « Le matin vient. »

Que le monde soit encore dans la nuit, ceci ne fait doute pour personne. Il y a de la lumière, toujours plus de lumière dans l'ordre des connaissances scientifiques et de leurs applications. Toutes ces découvertes nous sont une raison de bénir Dieu. Mais dans l'ordre de la vie morale, on n'a pas avancé depuis les siècles d'autrefois ; même, il faut noter aujourd'hui de douloureux reculs. Quand la sagesse laïque cherche des succédanés pour remplacer la morale chrétienne, elle les demande à l'antiquité. Pythagore et Marc-Aurèle sont pour elle des maîtres de choix. Elle apprend l'optimisme en lisant les réflexions pleines de bon sens et parfois plus chrétiennes qu'on ne croirait, d'un Montaigne ; et il paraît que cette lecture exerce une influence heureuse sur la longueur de la vie, en développant une confiance souriante, faite d'acceptation de la destinée, et d'une modération inspirée du rien de trop des anciens.

En tout ceci, rien qui ressemble au jour que nous attendons. Sans doute, nous avons bien autre chose que Montaigne, puisque nous avons l'Évangile. Mais, tout en regardant avec joie du côté de ce passé merveilleux que Noël va nous inviter à célébrer une fois de plus, n'oublions pas que l'Évangile est une promesse qui n'est pas encore accomplie. L'humanité, même chrétienne, est encore dans la nuit.
Pourtant, elle a fini par comprendre qu'elle ne devait pas prendre son parti de la misère humaine ; elle aurait pu s'en douter plus tôt, car c'étaient les premiers rudiments de l'Évangile. Le veilleur peut dire : « Le matin vient », quand il regarde aux révélations de Dieu. Quand il considère la façon dont le monde accueille ces révélations, il doit répondre comme le prophète jadis : « Le matin vient, mais la nuit aussi. » Car Noël est une promesse de transformation du monde, qui n'est pas encore réalisée.
Mais c'est une promesse de transformation des coeurs qui se réalise sans cesse à nouveau, et c'est sur quoi je voudrais insister.
« Être optimiste, disait un prédicateur contemporain, c'est être un sot. Être pessimiste, c'est être un lâche. »

Nous n'avons pas à être optimistes, ni pessimistes. Nous avons à être ceux qui espèrent.

Et voici, en ce qui concerne les âmes, notre raison d'espérer.
Une fête de Noël qui revient, ce n'est pas seulement un anniversaire, et de tous le plus aimé. C'est, chaque fois, une nativité du Christ dans certaines âmes. Car Celui dont nous allons fêter la naissance est vivant, et à chaque instant il continue de se réincarner par son Esprit dans des êtres qui, sous l'influence de sa grâce, deviennent de nouvelles créatures, faisant déjà partie de ce monde supérieur qui se révélera un jour dans sa magnificence.
Nous attendons la venue glorieuse de Celui qui n'est encore, en apparence, que l'Homme de douleur ; mais en attendant son triomphe, la chrétienté s'élève constamment sur le plan supérieur. Il y a des âmes qui s'éveillent à la vie éternelle, sous l'action du Sauveur ; et ces âmes peuvent dire : « Le matin est venu ».

Quand nous lisons le compte-rendu des missions entreprises par les jeunes pasteurs de la Drôme dans nos provinces, nous y trouvons des raisons nouvelles d'espérer.

Il y a là des régions dont le vieux sol huguenot a été arrosé du sang des martyrs. Puis, il a durci étrangement. Pendant un temps, les souffles du Réveil y avaient passé, et le désert avait fleuri. Mais les fleurs du Réveil s'étaient peu à peu desséchées. Et aujourd'hui, ceux qui voulaient tenter de raviver la foi dans les coeurs n'espéraient plus les résultats de jadis. Quand on sait la puissance d'avarice et d'égoïsme qu'il y a maintenant dans l'âme des descendants des persécutés, et qu'exagère encore chez les jeunes la soif de bien-être et de plaisir, on ne comprend pas comment tel de ces trop vastes temples de là-bas, où règne le froid de la solitude, a pu se remplir progressivement, et enfin, après une semaine d'appels, déborder d'une foule que remuait la parole inspirée de ces jeunes hommes qui apportent tout uniment, sans aucune recherche littéraire, l'Évangile du Salut.
On comprend que leur journal s'intitule Le Matin vient.

Quand verra-t-on les mêmes résultats dans nos milieux parisiens, où tant de bons esprits ont fait, ou croient avoir fait le tour de toutes choses, y compris les choses éternelles !

Pourtant, même ici, il y a des symptômes encourageants. Il y a la popularité de l'Armée du Salut, dont on ne songe plus à sourire, et dont les esprits les plus détachés, voire les plus malveillants, admirent l'inlassable charité. N'est-il pas significatif que la Maréchale ait trouvé dans notre capitale, ces dernières années, un accueil autrement enthousiaste que celui qu'elle y avait reçu aux jours de sa jeunesse ? Quand les réalités spirituelles se manifestent dans la prédication de l'amour du Sauveur, ces histoires d'âmes mortes, que la grâce a transformées, ont le don d'imposer silence à l'ironie, et le sourire du sceptique fait place aux larmes de celui qui voudrait être croyant. L'âme à qui on parle de la guérison des autres entrevoit sa propre guérison. Le matin vient.

Mes frères, vous avez le droit d'espérer ; et c'est à cette condition seulement que vous pouvez vous réjouir de Noël. À quoi bon, je vous le demande, fêter Noël, si vous ne pouvez pas faire autre chose que d'apporter le bilan de vos ruines et d'évoquer l'être que vous étiez autrefois, en ces « temps de jeunesse et d'aurore » dont parle le poète, lorsque la conscience « était joyeuse encore », temps où la vie n'avait inscrit sur l'âme aucun de ces caractères de faiblesse et peut-être de honte que, rien, hélas, n'a pu effacer !

Noël, c'est la fête de l'espérance : après s'être retrempé l'âme dans le charme mélancolique du passé, il faut l'emplir de la vision de l'avenir. L'espérance est un devoir. Et ce devoir n'est pas très facile à remplir. Péguy l'a dit admirablement, dans le Porche du mystère de la deuxième Vertu : « L'espérance ne va pas de soi. L'espérance ne va pas toute seule. Pour espérer, mon enfant, il faut être bien heureux. Il faut avoir obtenu une grande grâce.
« C'est la foi qui est facile, et de ne pas croire qui serait impossible. C'est la charité qui est facile, et de ne pas aimer qui serait impossible. Mais c'est d'espérer qui est difficile. »
Puis il ajoute :
« Et le facile et la pente est de désespérer, et c'est la grande tentation. »

Oui, mes frères, c'est la grande tentation, et qu'il faut exorciser à la veille de Noël. Noël, c'est la fête des cieux ouverts, a-t-on dit. Quand on voit les cieux ouverts, comment désespérer de la vie ?
Mais l'espérance ne va pas de soi, oh non !

Pour espérer, suffit-il d'avoir reçu une grâce ? Suffit-il d'être heureux ? je ne puis pas le croire : ce n'est pas parmi les heureux du monde que se recrutent, en général, ceux qui espèrent. Pour nous, espérer, c'est attendre la venue du jour ; donc, le triomphe de Dieu. Pour espérer, il faut avoir souffert ; mais surtout, il faut avoir lutté. On ne peut espérer qu'au prix d'un sacrifice : il n'est logique de croire au triomphe de l'Esprit que si l'on a commencé de vivre la vie de l'Esprit.

L'espérance n'est pas le complément de joies futures qu'une âme égoïste et calculatrice essaye d'ajouter aux joies du monde. On voit des gens au coeur sec professer sur l'au-delà et la survie des théories merveilleuses. Je doute que cette espérance-là puisse soutenir, à leur heure dernière, ceux qui n'ont jamais su faire de sacrifice à leur idéal. Celui-là seul peut goûter la douceur de l'espérance, qui croit assez à son idéal pour en vivre et lui subordonner ses intérêts, ses caprices, ses convoitises. Il n'y a d'espérance que pour l'âme qui se repent et se consacre. Celle-là peut s'écrier : « Le Matin vient. » Car il lui est donné, à l'heure de la lutte et de la victoire, de discerner en elle-même les signes précurseurs de la grande aurore.
Mais pourquoi le jour est-il si lent à venir sur la terre ? Il y a une cause à ce retard, que nous n'avons pas à chercher bien loin. Certains font état des objections de l'incrédulité. Celles-ci ne doivent pas nous faire peur. Mais il y a les chrétiens. C'est là qu'est l'obstacle à la conversion du monde.

Les chrétiens qui s'accrochent désespérément à la terre, et qui y ont situé leurs trésors. Les chrétiens qui ont une âme de pharisien, ceux qui jugent et qui repoussent. Les chrétiens qui font passer, dans l'ordonnance de leur vie, le devoir religieux après tous les autres. Les chrétiens qui ne savent pas résister aux tentations de la route, et dont le laisser-aller inflige à leurs convictions sacrées de constants démentis. Les chrétiens qui, pour le devenir, n'ont rien changé à leur vie. Enfin, les chrétiens qui s'adaptent, et qui donnent le plus singulier exemple de mimétisme, prenant la livrée de leur entourage mondain, comme certains insectes prennent l'aspect et la couleur des feuilles mortes qui les environnent, pour n'être pas dévorés. L'obstacle, le voilà.

Il est étonnant que le christianisme subsiste et que, malgré tout, il grandisse, alors que tant de chrétiens font tout ce qu'il faut pour le tuer. Mais il ne nous suffit pas que le christianisme se maintienne, ni même qu'il grandisse : il faut que le jour vienne. Et ce que vous pouvez faire pour que le jour vienne, c'est de faire disparaître l'obstacle que créent vos infidélités.

Dans deux jours, ce sera Noël. Dites-vous que ce temps est un temps sacré. Vous avez écouté, dans les semaines de l'Avent, l'appel de la justice divine, annonçant à un monde frivole et sans volonté les nécessaires repentances. Maintenant, c'est Noël qui approche : l'heure où le message de l'amour de Dieu trouve pour émouvoir les âmes ses plus tendres accents. Le matin vient. Ne vous bornez pas à interroger les veilleurs, sur la tour ; ne vous contentez pas de regarder à l'horizon. Regardez en vous : c'est là que le matin doit venir d'abord.

Accueillez dans votre âme l'Hôte pour lequel il n'y avait pas de place dans l'hôtellerie de l'humanité égoïste ; accueillez-Le comme vous ne l'avez jamais accueilli, en mettant en Lui, et en Lui seul, votre espérance ; et, dans votre coeur, le matin viendra.


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