Sermons et
Méditations
Le Tout-Puissant.
POUR LE JOUR DE L'ASCENSION
Toute puissance m'est
donnée dans le ciel et sur la
terre.
Matth.
28, 18.
Précieux encouragement, grande
consolation pour le chrétien, que cette
parole : Toute puissance m'est donnée
dans le ciel et sur la terre. Le Maître qu'il
est appelé à suivre, à
confesser, celui qui réclame son
obéissance, sa soumission, son coeur, n'est
pas le premier venu ou quelqu'un qui n'ait rien
à offrir en retour de ce qu'il exige de
l'homme. Bien au contraire, ce Maître occupe
la place la plus élevée, il dispose
de tout, et tout doit se soumettre à ses
lois. Insigne honneur que celui d'être le
messager, le témoin d'un tel Seigneur, dont
la gloire fait pâlir l'éclat de toutes
les couronnes de ce monde ! Et que pourraient
craindre ceux auxquels il ordonne de s'associer
à son oeuvre ? Se trouverait-il sur
leur chemin quelque embarras, quelque complication,
quelque affliction, quelque douleur où le
Tout-puissant ne pût leur tendre une main
secourable ? Y aurait-il en eux quelque
faiblesse qui ne pût par un
effet de sa parole et de son Esprit, se transformer
en force ? Le serviteur du Tout-puissant
possède un protecteur sans égal, un
appui tel que le monde n'en connaît pas, un
Maître merveilleux en moyens, admirable en
conseil, un Dieu auquel rien ne résiste et
qui, pour le monde, pour l'Eglise, ou pour
n'importe lequel de ses rachetés, saura
achever ce qu'il s'est proposé de
faire ? Mes frères, rappelons-nous
à cette heure que Jésus-Christ nous
place sur ses traces et que son premier comme son
dernier ordre n'est autre que celui-ci :
Suis-moi ! Fortifions nos coeurs en regardant
à Celui qui a dit : Toute puissance
m'est donnée dans le ciel et sur la terre.
I
Le monde, nous le savons tous, ne voit
aujourd'hui encore en Jésus que le Rabbi de
Nazareth qui mourut sur la croix. Ce qu'il ne veut
pas savoir, ce qu'il nie, c'est que le
Crucifié, à peine rendu à la
vie et avant même de remonter dans les cieux
qui l'avaient donné à la terre, a
été revêtu de la
toute-puissance de Dieu. Ce fait est cependant hors
de doute pour la foi chrétienne. Celle-ci
contemple, avec les premiers disciples et les
témoins de la vérité de tous
les âges, le saisissant contraste que
présentent, dans la vie du
Sauveur, d'une part, le jour
de
la grande humiliation, de la suprême
défaite, le jour de Golgotha ; de
l'autre, le jour où il prononce cette
parole : Toute puissance m'est donnée
dans le ciel et sur la terre. Elle s'arrête,
étonnée, mais avec un tressaillement
de joie, devant le chemin qu'a parcouru
Jésus-Christ : Existant en forme de
Dieu, il n'a point regardé comme une proie
l'égalité avec Dieu, mais il s'est
dépouillé lui-même, en prenant
une forme de serviteur, en devenant semblable aux
hommes, et en se montrant, sous l'apparence d'un
homme ; il s'est humilié se rendant
obéissant jusqu'à la mort, même
jusqu'à la mort de la croix. C'est pourquoi
aussi Dieu l'a souverainement élevé
et lui a donné un nom qui est au-dessus de
tout autre nom, afin qu'au nom de Jésus,
tout genou fléchisse dans les cieux, sur la
terre et sous la terre, et que toute langue
confesse que Jésus-Christ est le Seigneur,
à la gloire de Dieu le Père.
Mes frères, nous aimons à
parler du règne de la grâce. Ce que
nous confessons et publions par là, c'est
que la grâce de Dieu est rattachée
à la personne du Sauveur qu'il nous a
donné, qu'elle est inséparable de
Jésus-Christ, abondante autant que gratuite
en lui. N'oublions pas que le règne de notre
Maître est non moins certainement le
règne de la toute-puissance. Il a plu
à notre Dieu de mettre, soit sur la terre,
soit dans les cieux, toutes choses sous les pieds
de notre Sauveur. Il domine, aussi loin que
s'étend la création. Il n'y a rien
qui échappe à son
pouvoir. Ce que cela
signifie, ce
que c'est qu'un empire absolu, ne connaissant aucun
ennemi qui ne soit vaincu d'avance ; notre
raison humaine, faible et bornée, ne saurait
le saisir, comme elle ne saisit pas non plus les
immenses richesses de la grâce de Dieu en
Jésus-Christ. Nous ne voyons, nous ne
touchons que le pan de la robe de ce Roi glorieux
qui, hier couronné d'épines, est
aujourd'hui élevé sur le trône
dans les cieux. Mais ce que nous savons, ce que
nous contemplons confusément, et comme dans
un miroir, ne suffira-t-il pas pour nous remplir de
courage ? Le monde, qui a haï
Jésus-Christ, nous hait, nous aussi, ou nous
regarde avec commisération, comme on regarde
les arriérés, les faibles, les
ignorants. Il nous accorde à peine la
dernière place. Nous ne valons pas mieux
pour lui que ne valaient, aux yeux des chefs en
Israël, les foules qu'ils disaient sans
intelligence, parce qu'elles suivaient
Jésus. Qui n'en aurait jamais fait
l'expérience ? Quel chrétien
n'aurait pas senti reposer sur lui un regard de
dédaigneuse pitié ?
Où est le disciple du Sauveur qui
n'ait pas eu à accepter l'humiliation
inséparable, encore à l'heure
présente, de la confession du nom de
Jésus-Christ et de la fidélité
à le servir ? Mais qu'importe !
Nous acceptons l'opprobre, nous ne demandons qu'une
chose, c'est qu'il nous frappe à cause du
seul nom de Jésus et non pas, en même
temps, à cause d'une conduite indigne de
Christ. Nous levons la tête, non pas comme
l'orgueilleux enfant de ce siècle, mais
comme ceux dans le coeur desquels
Dieu a mis une sainte et grande assurance. Nous, la
petite minorité, nous, les faibles, les
écrasés, nous soutenons que le
règne nous appartient, parce qu'il
appartient à Jésus-Christ. Nous
publions et nous transmettons de
génération en
génération cette prophétie,
c'est qu'un jour tout oeil verra celui qu'ils ont
percé. Nous affirmons qu'alors on donnerait,
sans hésiter, tout ce que le monde renferme
de trésors, pour obtenir de la bouche du
Tout-puissant, ne fût-ce qu'un mot de
miséricorde et de grâce. Nous croyons
qu'aujourd'hui déjà, la
toute-puissance est entre les mains de notre
Sauveur et qu'il fait ce qu'il veut sur la terre et
dans les cieux. C'est dans cette conviction aussi,
que nous nous mettons, sans crainte, à sa
disposition pour qu'il se serve de nous comme il le
voudra. Il fait beau s'enrôler, travailler et
lutter sous un drapeau auquel est assuré la
victoire.
II
Jésus, le Tout-puissant a trouvé
bon, en effet, de confier aux siens une oeuvre
à faire dans ce monde.
À peine leur a-t-il dit à
quelle place le Père l'a
élevé, qu'il ordonne à ses
disciples de parcourir la terre et
d'évangéliser les nations. C'est le
Tout-puissant qui ordonne l'oeuvre des missions.
Pour quelle raison lui a-t-il plu
de compter, pour la faire, sur des instruments
aussi faibles que nous ? Nous ne le savons. Le
fait est qu'il a bien voulu se servir de ceux qui
ont cru en son nom, pour rendre évident, aux
yeux de tous, son empire sur les âmes.
Avez-vous remarqué à quel
point l'idée de la toute-puissance de
Jésus est à la base de ce qu'on a
appelé l'ordre missionnaire ? C'est
comme ses témoins que partiront ceux qu'il
envoie ; la force nécessaire ne leur
viendra que de Celui dont ils sont les
représentants. Ce sont ses instructions
qu'ils transmettront aux peuples ; c'est sous
son sceptre qu'ils courberont toutes les nations.
C'est jusqu'au bout de la terre qu'ils porteront
leurs pas, parce qu'il n'y a, ici-bas, aucun
royaume, aucun lieu qui ne soit donné
à Jésus-Christ. Et si c'est au nom du
Père qu'ils baptiseront, c'est aussi au nom
du Fils et au nom de cet Esprit que le Fils avait
promis, afin que le monde sache que Dieu partage le
trône avec le Crucifié et qu'il lui a
tout remis entre les mains.
Quelle grâce demanderons-nous donc
pour nos missionnaires, nos
évangélistes, nos pasteurs, pour
nous-mêmes, appelés, sans exception,
à parler au monde de Jésus-Christ, le
Sauveur, et à annoncer ses vertus ?
C'est que nous nous laissions toujours diriger,
inspirer, corriger, par Celui auquel seul
appartient la puissance. Pauvres,
misérables, incapables d'aucun bien aussi
longtemps que nous nous flatterons d'être
quelque chose nous-mêmes, nous serons
puissants, dès que nous ne
voudrons servir que Jésus-Christ et ne rien
recevoir que de lui seul. Quel mauvais ouvrage
n'ont-ils pas fait, ces chrétiens qui ont
voulu maintenir, à côté de
Jésus-Christ, leur autorité, leur
influence, leur règne à eux !
Quelles défaites ne se sont-ils pas
préparées à eux-mêmes
sur ce chemin-là ! De quelle honte
n'ont-ils pas couvert le nom du Seigneur ! Le
Seigneur ne peut donner sa gloire à aucun
autre, et voilà pourquoi il a dû
laisser tomber ceux qui, grossièrement ou
subtilement, lui disputaient le privilège
d'être le seul puissant.
Mais à côté de ceux qui
se sont égarés de la sorte, ah !
qu'ils ont été bénis dans
leurs paroles, leurs travaux, leurs luttes, leurs
douleurs, leur mort même, ceux qui,
humblement soumis, n'ont voulu connaître
d'autre force et d'autre sagesse que celles de
Jésus-Christ ! C'est d'eux que le
Tout-puissant a fait couler des fleuves d'eau vive.
C'est par eux qu'a afflué dans le corps
malade et mourant de ce pauvre monde une
sève nouvelle et vigoureuse. On les a
repoussés, persécutés, on a
jeté aux vents les cendres des bûchers
dont la flamme avait dévoré leurs
corps. Chose étrange! Par tous ces moyens,
on n'a pas réussi à étouffer
leur pensée, leur témoignage. Quoique
morts, ils ont continué à vivre et
à propager le règne de Christ, le
Tout-Puissant.
Un jour, sur les bords du lac de
Génézareth, à Capernaüm,
au moment où plusieurs, scandalisés
des doctrines de Jésus, venaient de lui
tourner le dos, Pierre
s'écria : Seigneur, à qui
irions-nous ? Tu as les paroles de la vie
éternelle. Et nous avons cru et nous avons
connu que tu es le Christ, le Fils du Pieu
vivant.
Aurait-on cru possible que, peu
d'années plus tard déjà, sur
une montagne de la Galilée, cinq cents
frères se prosterneraient devant le
Crucifié ? Que trois mille
confesseraient son nom le jour de la
Pentecôte ?
Qu'à la fin du premier siècle,
au milieu de toutes les fureurs
déchaînées contre eux, cinq
cent mille chrétiens se réclameraient
du nom de Christ ? Qu'aujourd'hui plus de
quatre cent millions de créatures humaines
l'appelleraient leur Seigneur ? Et dans
l'histoire de l'Eglise chrétienne, quels
miracles de la puissance de ce Jésus !
Quelle victoire sur le mensonge, le coeur humain,
le Prince des ténèbres! Ne
désespérons donc plus quand on nous
parle des violences dont usent les enfants du
siècle présent, de leurs efforts pour
enchaîner les consciences, pour
étouffer la vérité, pour lier
la parole de Dieu. Ne perdons jamais courage,
même dans les situations les plus
désespérées. La parole du
Tout-puissant ne peut être liée. Rien
n'est impossible à Celui auquel a
été donnée la toute-puissance
dans le ciel et sur la terre. Il résoudra
les problèmes qui nous agitent ;
remettons-lui toutes les questions ouvertes. Il a
promis le royaume au petit troupeau : et c'est
au petit troupeau que le royaume a
déjà
III
Ai-je besoin d'ajouter que, si le céleste
Berger, revêtu de la toute-puissance divine,
veille de la sorte sur l'Eglise que sa
volonté a fait naître dans ce monde
pour qu'elle y soit la colonne et l'appui de la
vérité et la maison de Dieu, il
veille aussi, et non moins puissamment, sur chacun
de ceux qui ont cru, individuellement ? Voici,
Je suis avec vous, jusqu'à la fin du monde,
a-t-il dit à ses premiers disciples. Voici,
je suis avec vous, redit-il, par sa parole
écrite, à chacun de nous aujourd'hui
encore.
Avez-vous assez réfléchi
à ce qu'il nous a donné par cette
promesse ? Le Tout-puissant avec nous,
connaissant nos fardeaux, nos douleurs, nos
perplexités, n'ignorant aucune de ces
difficultés que nous rencontrons et qui,
parfois, nous paraissent si grandes ! Mais
pourquoi nous laissons-nous abattre si
facilement ? Pourquoi nous
inquiétons-nous ? Pourquoi parlons-nous
d'impossibilités ? C'est la foi qui
nous fait défaut, c'est la simplicité
du coeur qui nous manque. Après tant de
preuves que Jésus nous a données,
dans nos vies, de sa toute-puissance et de son
amour, n'avons-nous encore rien appris ?
Quelle humiliation ! Et comme ils nous
confondent par leur exemple, ce centenier qui
s'écrie : Dis seulement une parole, et
mon serviteur sera guéri ! - cette
femme malade, se disant : Si
je touche seulement le bord de son vêtement,
je serai guérie ? - ces
misérables de tous les âges, de toutes
les conditions qui ne connaissaient pas le
doute ?
Dans le domaine de la vie spirituelle aussi,
quelles craintes dans les coeurs des
meilleurs ! Ils ont compris qu'il est
difficile d'être sauvé ; ils
connaissent les redoutables ennemis rangés
en ordre de bataille contre l'âme des
croyants ; le péché, le monde et
le Prince de ce monde les effrayent, et ils se
savent si impuissants pour la lutte !
Frères qui nourrissez de telles
pensées, je vous comprends, mais je vous
conjure en même temps de ne pas oublier quel
Sauveur Dieu vous a donné. Le Tout-puissant,
ne serait-il pas assez puissant pour garder votre
dépôt jusqu'à son jour ?
Pas assez puissant pour vous sauver dans son
éternel royaume ? À lui, avec
tous vos doutes ! À lui, pour lui
confier les affaires de votre âme !
À lui, pour qu'il accomplisse ce qui serait
impossible à l'homme ! À lui,
toujours à lui, ici-bas, afin qu'un jour
vous soyez auprès de lui à
jamais !
Et maintenant, mes frères que
Jésus-Christ s'est présenté
à nous avec sa toute-puissance, laissez-le
nous redire la parole qu'il a dite tant de fois
durant les jours de sa chair, la parole par
laquelle il a ouvert et terminé son
ministère : Toi, suis-moi ! Suivre
le Tout-puissant, voilà notre règle
de conduite.
Son chemin pourra nous paraître
étrange, difficile, douloureux,
impossible ; ne craignons pas ! Il saura
nous donner l'issue que nous attendons. Amen.
La vertu d'En-Haut.
POUR LA FÊTE DE PENTECÔTE.
Demeurez dans la ville de
Jérusalem, jusqu'à ce que vous soyez
revêtus de la vertu d'En-Haut.
Luc XXIV, 49.
Mes frères,
L'effusion du Saint-Esprit n'a
été autre chose que la suprême
réalisation de la volonté de Dieu
pour notre salut. Vous aurez remarqué cette
parole du Christ, prenant congé des
siens : Je vais vous envoyer ce que mon
Père vous a promis. Tout ce que, dans le
passé, Dieu avait fait pour
l'humanité déchue, toutes les
miséricordes dont il avait usé envers
le peuple de l'ancienne alliance, l'envoi et
l'oeuvre de Jésus même, sont autant de
dons préparatoires, destinés à
rendre possible ce don de l'Esprit, dans lequel Je
salue la communion rétablie entre le ciel et
la terre.
Au nom de ce Sauveur qui nous a
réconciliés avec Dieu, j'ai le
privilège de vous annoncer cette vertu
d'En-Haut toute prête à agir pour
nous. C'est elle qui
opérera en vous comme en moi, le miracle qui
se nomme la régénération et
qui nous arrachera moralement au siècle
présent ; elle qui fera naître en
nous le besoin de grâce ; elle qui nous
amènera à Jésus-Christ ;
elle qui fera vivre Jésus dans nos
coeurs ; elle qui nous groupera en
Église chrétienne et qui nous
garantit la création de ce monde nouveau
où habitera la justice.
I
Nous sommes-ici sur une pauvre terre. Autour de
nous, au dedans de nous, que de misères, que
de péchés, que de chaînes, que
de soupirs, que d'angoisses ! Pourquoi vouloir
nous cacher cet état de choses que tant
d'hommes se refusent à voir, essayant de
mille moyens pour échapper, cherchant la
distraction qui, pour un instant, leur fera oublier
leur malheur ? Mieux vaut tout avouer,
convenir de notre situation, avoir le courage de
dire : Cela va mal, et regarder en haut.
Faites-le aujourd'hui, vous qui savez qu'au jour de
la première Pentecôte, le ciel s'est
ouvert pour livrer passage à une vertu,
destinée à venir en aide à la
faiblesse du pécheur. Ouvrez-vous à
l'Esprit de Dieu, appelez-le, demandez-le, lui dont
rien ne saurait remplacer l'activité. Seul,
il pourra faire naître ou renouveler, sur nos
lèvres, cette parole qui est pour le
pécheur comme un premier
pas vers le bonheur et la paix : Hommes
frères, que ferons-nous ? Il agira de
la sorte en s'emparant de nos circonstances. en
nous parlant par nos souvenirs humiliants, par nos
chutes, par nos tristesses, ou bien aussi en nous
instruisant par la Bible et le ministère
évangélique, Tous les moyens sont
à sa disposition. Il saura en profiter avec
autant de puissance que de sagesse. Pourvu que,
dans notre folie, nous ne lui fermions pas notre
oreille, il se fera comprendre comme, à
Jérusalem, il se fit comprendre aux trois
mille.
Hommes frères, que
ferons-nous ? oh ! la belle oeuvre de
l'esprit ! C'est la parole par laquelle le
pécheur, désespérant de se
sauver lui-même, heurte à la porte du
ciel et au coeur de Dieu. À
côté de ces quelques mots, je vois
pâlir et tomber dans le néant telle
parole d'adhésion à des formules
chrétiennes. d'attachement à une
Église, d'admiration pour l'éloquence
humaine, d'enthousiaste promesse et de solennel
engagement. Oeuvre de l'homme, oeuvre vaine, fort
souvent, oeuvre qui périra que tout
cela !
Mais si vous voulez voir un jour nouveau
se lever sur nos associations religieuses, sur nos
maisons, sur nos familles, sur nos coeurs et sur
nos âmes, permettez à l'Esprit de
faire son travail, et que l'on entende cette
question : Hommes frères, que
ferons-nous ?
Pourquoi donc cette demande, partie, le
jour de la première Pentecôte, de tant
de poitrines. est-elle encore si rare au milieu de
nous? Pourquoi le grand Ennemi de
nos âmes a-t-il si habilement su
détourner notre attention de ce qui ferait
notre bonheur, pour la fixer sur ce qui nous
retiendra à jamais dans notre
misère ? Nous pouvons nous passer de
beaucoup de choses : belles traditions, belles
habitudes, beaux exercices de piété
même ; mais ce qui nous est
nécessaire, c'est ce cri du coeur
tourmenté, premier don de l'Esprit Saint,
première manifestation de la vertu d'En-Haut
opérant dans le pécheur,
première victoire de Dieu sur l'homme :
Hommes frères, que
ferons-nous ?
Je le sais, l'incrédulité
non seulement, mais aussi l'indifférence
religieuse au sein de nos Églises, le
formalisme qui a envahi plus d'un milieu
chrétien, déclareront ne pas avoir
besoin de la vertu divine qui remue la conscience,
qui trouble la paix factice du coeur naturel et qui
presse le pécheur de chercher autre chose.
Serait-ce parce que le monde redoute de se livrer
à l'Esprit de Dieu et de se laisser conduire
par lui à Jésus-Christ ? Il est
si commode d'être chrétien sans
Jésus-Christ, de se contenter d'une religion
où il n'occupe pas de place avec son
sacrifice et ses exigences. Le coeur
irrégénéré, qui se
retrouve encore chez plus d'un chrétien de
nom, craint de se rapprocher de la croix du
Sauveur. Aucun nom, plus que celui de Jésus,
n'a été haï ici-bas, ouvertement
ou secrètement. Et pourtant seul, ce
Jésus sauve, lui qu'on cherche à
éviter. C'est lui qui est le chemin, la
vérité et la vie. Nul ne vient au
Père que par lui.
II
Aussi, voyez où tendent les constants
efforts de la vertu d'En-haut : voyez le
second pas, le pas décisif cette fois, que
le Saint-Esprit voudrait faire faire au
pécheur ; voyez une seconde oeuvre que,
seul, cet agent divin accomplira, parce que, seul,
il est assez puissant pour briser la
résistance de l'homme. À ceux
auxquels il aura arraché cette parole :
Hommes frères, que ferons-nous ? il
répondra, aujourd'hui encore : Allez
à Jésus-Christ ; c'est lui qu'il
vous faut ! lui que les Juifs ont
crucifié et que le Père a
ressuscité par sa puissance ; lui que
Dieu vous a donné pour unique Sauveur !
Soyons-en bien sûrs : jamais
la lumière ne se répandra, pour un
pauvre pécheur, sur la sainte personne, le
sacrifice, les vertus de Jésus-Christ, si le
Saint-Esprit ne se charge pas de ce travail. Nul
autre n'inclinera mon coeur à accepter des
mains de Jésus un salut aussi gratuit que
complet, à m'avouer perdu et à
confesser, en même temps, que je suis
sauvé ! Seul, il me fera comprendre
que, pour l'amour des souffrances de Christ, ma
dette est acquittée et que, journellement,
il y a pour moi, en Jésus-Christ, abondance
de rémission de péché. Seul,
il me donnera la paix. Seul, il me dira, avec une
autorité à laquelle je ne
résisterai pas, que, pour l'amour de
Jésus, je ne suis plus un serviteur
tremblant devant son divin Maître, mais un
ami, mais un enfant de Dieu,
et
que j'ai droit de bourgeoisie dans la cité
du ciel. Seul, il établira, entre moi et
Jésus Christ, cette communion de vie dans
laquelle changeront mes habitudes, mes
pensées ; dans laquelle je me
soumettrai à la discipline de
l'Évangile, à la croix même
dont il pourra plaire à Dieu de charger mes
épaules, et dans laquelle, enfin,
éclateront en moi les vertus de Celui qui
m'a sauvé. Seul, il transformera mon orgueil
en humilité, ma souillure en justice, mon
égoïsme en amour et en
dévouement. Seul, il me donnera de me
réjouir en Dieu qui a été mon
Sauveur, et de reposer avec assurance sur le rocher
de mon salut.
Vous étonneriez-vous que, pour
opérer toutes ces choses, il faille une
vertu, la vertu d'En-Haut ? Je vous le demande
à vous, qui avez appris à vous
connaître vous-mêmes :
Jésus serait-il devenu votre Sauveur si,
pour le chercher, pour le trouver et pour vous
approprier son salut, vous n'aviez disposé
que de vos propres forces et de votre propre
raison ? Non, sans le fidèle et
constant travail du Saint-Esprit, sans la vertu
d'En-Haut qui a été en vous la plus
forte, vous ne seriez jamais parvenus au but que
vous avait marqué la volonté de Dieu.
Ce que nous sommes spirituellement, ce qu'il y a en
nous de convictions chrétiennes, de foi,
d'amour et d'espérance, tout cela est le
fruit de l'Esprit. Avec l'Eglise de Christ tout
entière, nous bénissons le donateur
céleste dont nous avons
éprouvé la vertu.
III
Avec l'Eglise, ai-je dit. Grâce à
l'action de l'Esprit sur les coeurs, il existe en
effet une Église chrétienne, l'Eglise
de Jésus-Christ. Ne la confondons pas avec
telle Église particulière dont on
devient membre par la naissance, qu'on adopte par
libre choix on par fidélité à
la tradition. Je ne dis pas que nos Églises
visiblement groupées n'aient pas chacune sa
valeur. Elles ont du bon sans doute ; le bien
qu'elles feront dépendra du nombre de
chrétiens convaincus, aussi humbles que
fervents, qui se trouveront dans leurs rangs, comme
aussi de leur fidélité à
annoncer au monde le pur Évangile. Il n'en
est pas une, parmi elles, où l'on ne
constate, ici ou là, l'influence
bénie de la vertu d'En-Haut, pas une,
surtout, qui ne doive au Saint-Esprit ce qu'il y a
en elle de vrai et de bon. Toutefois, la vertu
divine a créé quelque chose de mieux
que ces organisations, ces édifices qui nous
abritent. Son chef-d'oeuvre, c'est la sainte
Église universelle, la communion des saints.
Au milieu de ce monde qui périt, de ces
générations malheureuses au sein
même de leurs joies bruyantes, de ces cris de
détresse qui s'élèvent de
toutes parts, du trouble où est
plongée cette terre, elle s'édifie
pour l'éternité, elle croit, elle
aime, elle travaille, elle espère, elle
attend avec persévérance d'être
manifestée dans la gloire, la sainte
Église de
Jésus-Christ. C'est elle
qui possède les immuables promesses de Dieu.
C'est elle que nous nommons l'Épouse de
l'Agneau. C'est elle qui est ce petit troupeau
contre lequel les portes même de l'enfer ne
prévaudront pas. C'est elle qui
régnera avec Christ. 0 réalisation
merveilleuse de la bonne volonté de
Dieu ! 0 miracle de puissance et
d'amour !
Cependant la vertu divine accomplira des
choses plus grandes encore. Cette Église,
oeuvre de l'Esprit, n'est que les prémices
de ces cieux nouveaux et de cette terre nouvelle
dont ont parlé les prophètes. Un
jour, on dira parmi les nations que la vertu
d'En-Haut a achevé ses triomphes, et que la
terre tout entière a été
ramenée à Dieu. Ce sera la grande
fête de Pentecôte ; ce sera
là le dernier accomplissement des promesses
divines. Ce sera là l'impossible selon les
hommes, réalisé par Dieu. À
nous d'appeler, chacun pour sa part, cette heure
sans pareille. À nous de nous mettre,
dès maintenant et de plus en plus, sous
l'influence de l'Esprit et de le bénir de
son activité. À nous aussi de croire
à sa suprême victoire. Amen.
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