L'Évangile est d'une admirable
simplicité. « Crois, nous dit-il,
et tu vivras ! Crois au Seigneur
Jésus-Christ ! Envisage-le comme ton
Sauveur ! Confie-toi en lui, qui a
porté tes péchés, qui te donne
une vie Immortelle ! Regarde à lui,
place-le devant tes yeux comme un divin
modèle ! Écoute sa voix et le
suis ! Remets-toi chaque jour à son
école en toutes choses ! »
Voilà tout ce que l'Évangile te
demande.
Que cela est simple, n'est-il pas vrai ? Oui,
cela est simple, et même trop pour nous.
Cette simplicité nous est suspecte. N'est-il
pas incroyable que ce qu'il y a de plus grandiose
au monde et de plus enviable, la béatitude
et la gloire à venir soient
réservées à la foi. Il nous
semble, dans notre courte vue, que Dieu devrait
exiger de nous, pour nous accorder de tels biens,
quelque énorme effort, une oeuvre difficile
entre toutes... Nous nous refusons à penser
que les plus hautes grâces puissent
être le prix d'un simple mouvement de
foi.
Vous connaissez sans aucun doute, lecteur,
l'histoire d'un capitaine syrien dont le nom est
enseigné dans nos écoles du dimanche.
Il s'appelait Naaman. Il vint au prophète
Élisée pour trouver la
guérison de sa lèpre. Le
prophète lui fit dire, sans se donner la
peine de le recevoir, de se plonger sept fois dans
les eaux du Jourdain. Quoi ! Rien que cela.
Naaman prit mal le message. Il
s'en alla plein de colère, tournant le dos
au Jourdain. Il s'était attendu à ce
que l'homme de Dieu viendrait à lui,
à ce qu'il murmurerait quelques paroles
magiques, étendrait sa main sur ses plaies
pour agir par une sorte de magnétisme,
à ce qu'il accomplirait des signes
mystérieux. Et tout ce qu'on lui demande,
c'est de se plonger dans le Jourdain !
« Folie ! à ce
compte-là n'eût-il pas mieux valu se
plonger dans la l'Amana, le fleuve de Damas, dont
l'eau est plus limpide, ce qui d'ailleurs eût
évité un
voyage ? »
Heureusement pour lui, le personnage avait des gens
qui ne méprisaient pas au même
degré les moyens simples, qui le
persuadèrent de descendre de son grand
cheval, c'est-à-dire de renoncer à
ses prétentions, et de se plonger dans le
Jourdain, Et ainsi Naaman fut guéri.
Toutefois il eût voulu avoir quelque chose de
plus difficile à accomplir. Il demeure qu'il
avait été d'abord scandalisé
de l'absence de tout appareil solennel, de toute
cérémonie, de toutes formes et de
toute formule dans son cas.
Les hommes sont ainsi faits. Le simple les
déconcerte ou les irrite. Lorsque
j'étais enfant, j'ai entendu plus d'une fois
mon père, qui était médecin,
engager ses malades à user des
médicaments naturels que Dieu a mis à
la portée de chacun : air, eau,
lumière et soleil. Bien peu se contentaient
de cette ordonnance. Dans la règle, à
l'ouïe de ce propos, ils prenaient un visage
déçu. Et ils se hâtaient de
dire : « Mais, monsieur le docteur,
l'ordonnance ? » « Mais je
viens de vous la donner, » telle
était la réponse. Que faisaient nos
bonnes gens ? Ils allaient naturellement
consulter un autre docteur, lequel leur
écrivait une ordonnance coûtant cher.
Et les voilà ravis. Une ordonnance
tracée en termes énigmatiques, une
ordonnance ensuite de laquelle le pharmacien leur
présentait un mystérieux flacon,
songez-y, quel réconfort ! Devant la
petite bouteille leur imagination se mettait en
campagne. Ils se demandaient si le breuvage qu'ils
allaient avaler n'était pas composé
du suc d'une plante ayant crû dans un autre
hémisphère... Et cette pensée
leur plaisait. Mais leur prescrire de l'air, du
soleil, l'usage de l'eau, quelle
plaisanterie !
L'Eglise catholique romaine a su fort bien utiliser
notre faible pour ce qui est difficile,
compliqué. Les offices catholiques sont
remplis d'actes symboliques, dont un laïque
à peine sur mille comprend la signification.
On y prie en latin, on y chante en latin, la
fumée de l'encens s'élève en
tournoyant, les prêtres changent de costumes
et d'attitude. À quoi tout cela
sert-il ? À rien. Mais dans ces rites
multipliés gît pour le vulgaire le
charme. Le catholicisme a d'ailleurs soin de
demander aux fidèles eux-mêmes toute
une série d'oeuvres nullement aisées
à accomplir, si l'on n'en veut omettre
aucune : agenouillements, signes de croix,
aspersions, pèlerinages, processions,
baisers des reliques, etc, etc. Ah ! que le
catholicisme connaît bien notre
coeur !
Et beaucoup de protestants suivent d'un oeil
envieux ce
cérémonial. En comparaison, le
thème évangélique :
« Crois, et tu vivras ! »
leur parait singulièrement maigre. Aussi
s'efforce-t-on en pays protestant, ici et
là, de rendre un peu plus
étoffé le moyen de salut offert par
l'Évangile. Une fraction de l'Eglise
anglicane cherche à naturaliser les rites de
l'Eglise romaine. Ailleurs on a tellement
caché sous des déductions
théologiques et dogmatiques la simple parole
évangélique qu'un pauvre homme n'y
comprend goutte. Le suprême, à l'heure
présente, est de coudre à
l'Évangile une couverture faite de
socialisme. On espère attirer les masses en
leur promettant tous les biens temporels. Ces
promesses se formulent aux dépens des
classes riches. Qu'importe,
réplique-t-on ! Il faudrait pourtant
savoir si l'on pourra tenir tout ce que l'on
promet.
Oh ! si nous parvenions à croire,
à croire tout simplement au pur
Évangile ! Bien peu d'entre ceux qui
prennent le titre d'évangéliques ont
cette foi. Ils ne veulent pas admettre que le salut
soit de croire en Jésus, ou, pour employer
une autre expression, qu'il suffise de donner son
coeur au Sauveur. Et pourtant l'histoire de
l'Eglise est là, pour prouver que la vie
découle de la foi. Les compassions de Dieu
en Christ sont la grande raison de la durée
de l'humanité. Il n'est rien de plus haut
que cette miséricorde, il ne sera jamais
rien de plus élevé. Toutes les
espérances de l'humanité, toutes vos
espérances individuelles ont pour condition
de leur réalisation les compassions de Dieu en
Christ.
Enlevez-les, tout devient sombre sur votre route.
Embrassez-les d'un coeur confiant, la
lumière et la grandeur, la beauté et
la bonté vont descendre en vous.
Il y a dix-huit siècles, dans la prison de
Philippes, pendant une nuit où un
tremblement de terre avait jeté partout
l'effroi, Paul criait à son
geôlier : « Crois au Seigneur
Jésus, et tu seras sauvé, toi et
toute ta maison. » Ce mot renferme
à toujours le secret de la véritable
force. Quiconque voudra se conformer à cette
parole saura par expérience que la foi fait
toutes choses nouvelles. D'abord dans l'esprit,
dans les sentiments et les dispositions de celui
qui croit et ensuite dans la vie extérieure.
Du point de vue de la foi, on considère tout
autrement que ne le font la plupart et les hommes
et les choses ; on apprend à tout
supporter. On accepte paisiblement ce qui
auparavant vous aurait mis hors de vous. Voici une
famille qui a l'esprit de Christ, elle
démontre à chacun, par son union et
la paix dont elle jouit, que la piété
est utile à toutes choses, qu'elle a les
promesses de la vie présente. Une famille
chrétienne vous fait vraiment toucher du
doigt ces vérités.
Les hommes ressemblent à cet
ingénieur qui avait tracé sur le
papier un superbe plan de canalisation avec
réservoirs, tuyaux, bouches à eau, et
qui avait oublié de s'enquérir d'une
source. Enquérez-vous d'abord de la source
de la force et de la vie. Découvrez-la.
Captez-la. Et après vous pourrez songer
à introduire l'eau dans
les canaux, pour la conduire dans les
différentes branches de votre
activité. Mais n'oubliez pas la source,
l'importante source qui est une simple foi au
simple Évangile.
Au fond de chaque coeur d'homme se trouve un
sanctuaire caché, consacré et saint.
Il est si caché qu'aucun oeil
étranger ne l'aperçoit. Le microscope
du naturaliste n'y a jamais
pénétré et la sonde du plus
habile chirurgien ne l'a jamais rencontré.
Pourtant cette retraite austère existe au
fond de notre âme. Quiconque se connaît
sait ce qu'est la conscience.
Dans ce sanctuaire intime, voilé aux regards
du dehors, retentit à chaque instant la
question : « Quelle est ta position
vis-à-vis de Dieu, de Celui qui a
créé le monde, qui t'a
créé ? Comment te
considère cet Être dont dépend
ton existence, de minute en minute, de seconde en
seconde, ton avenir éternel ? T'est-il
ou non favorable ? » Et la question
angoissante se résout dans cet ardent
soupir : « Oh, s'il était
possible que cet Être si grand
m'aimât ! Si je pouvais participer
à sa vie et à son amour ! En ce
cas, mais seulement alors, je me consolerais de
toutes mes tristesses, je perdrais sans murmurer
les affections humaines qui doivent me laisser un
jour ou que je laisserai.
La perspective de me séparer de ce qui m'est
cher me jette actuellement dans le
désespoir. Mais si je me savais
sûrement aimé de Dieu, je sentirais
qu'en perdant tout je ne perdrai rien, que je
regagnerai tout ce que j'ai perdu, et par dessus la
vie éternelle.
La réponse à la question des
questions : « Dieu m'est-il
favorable ou défavorable ? »,
elle nous est donnée par l'Évangile.
Écoutez Jésus-Christ :
« Dieu a tant aimé le monde qu'il
a donné son Fils unique, afin que quiconque
croit en lui ne périsse point, mais qu'il
ait la vie éternelle »
(Jean
III, 16.) Dans le psaume 42e,
le chantre sacré s'est
écrié :
- Ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu
- Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant
- Quand irai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu (Ps. XLII, 2, 3.).
Quelle impression de bonheur n'aurait pas
éprouvée le psalmiste, si une voix
céleste était venue lui glisser dans
l'oreille le passage transcrit tout à
l'heure - « Dieu a tant aimé le
monde... » Si vous avez jamais, comme le
poète sacré, soupiré des lieux
profonds, vous imaginerez son ravissement.
Il y a trente ans j'étais devant le lit de
mort d'un jeune garçon de 10 ans.
Malgré la défense de ses parents, il
avait grimpé sur un noyer pour y
dénicher des corneilles. Il était
tombé et s'était brisé
l'épine dorsale.
Maintenant il était étendu sur sa
couche, les yeux fermés, poussant de sourds
gémissements, torturé par la douleur.
Ses parents, en le voyant rapporter terriblement
puni de sa faute, n'avaient pas craint de
l'accabler de reproches. Je pris une autre voie. Et
de mon accent le plus tendre je dis au petit
villageois que je savais ombrageux, facilement
effarouché « Mon cher enfant, je
n'ai qu'une chose à te répéter
C'est que Dieu t'a aimé, qu'il t'aime et
t'aimera pour
l'éternité. »
Là-dessus, mon pauvre Pierre, ouvrit de
grands yeux interrogateurs et demanda :
« Est-ce bien vrai ? Mais j'ai
été
désobéissant... » -
« Si tu le regrettes de tout ton coeur,
continuai-je, Dieu t'a pardonné, et tes
parents te pardonnent aussi. » - Alors il
se tourna avec une expression de bonheur vers sa
mère et murmura : « Je
mourrai volontiers, puisque Dieu
m'aime. » Il souffrit en silence pendant
plusieurs heures, se bornant à redire de
temps en temps d'un ton
pénétré :
« Dieu m'aime. » Et il mourut
en paix. Il avait saisi avec une foi toute simple
le simple Évangile ; il avait
reçu le royaume des cieux comme un petit
enfant.
Si le mourant avait été un illustre
philosophe au lieu d'être un petit paysan, je
ne lui aurais pas parlé autrement. Le
message de l'amour de Dieu inonde de joie le savant
comme l'ignorant, et jusque dans les profondeurs de
l'être, à condition que le savant ait
gardé le sens du simple et du vrai.
La bonne nouvelle de l'Évangile, c'est que
Dieu nous a aimés. La
croix, le tombeau vide de Joseph d'Arimathée
sont les manifestations de la réalité
de cet amour. Et quand quelqu'un posséderait
tous les secrets de la science, toute la
connaissance de la nature, s'il ne possède
pas la bonne nouvelle de l'amour de Dieu en Christ,
il est pauvre, il s'agite dans une sombre nuit.
Lecteur, êtes-vous un
prolétaire ? Êtes-vous un grand
de ce monde ? Je l'ignore. Quoi qu'il en soit,
demandez au Saint-Esprit de vous
pénétrer de cette bienheureuse
réalité : Dieu m'a
aimé ! Ne vous laissez pas
arrêter par votre indignité, votre
manque de sainteté. Là où
brille le soleil, il fait bientôt sentir son
influence.
Une dame m'adressait naguère une lettre
dont j'extrais les lignes suivantes -
« Une gaie société de
jeunes messieurs et de jeunes dames était
réunie dans le salon de ma tante. J'en
faisais partie. Nous nous amusions très
convenablement, attendu que nous n'aurions pas
voulu offenser Dieu. Nous avions chanté des
airs patriotiques. On en vint aux énigmes.
Finalement deux messieurs récitèrent
des poésies de Goethe. Alors un vieux
monsieur, qui se tenait dans son coin, se leva
soudain, laissant son journal ou son livre, ou la
méditation dans laquelle il était
absorbé, je ne sais... Il
s'avança avec un visage sévère
au milieu de notre cercle et prononça ces
paroles : « Vanité, pure
vanité que vos chants, vos énigmes et
vos poésies. Pour moi je ne veux savoir
autre chose que ceci :
« Jésus est mon
assurance ! » Il sembla qu'un coup
de tonnerre eût retenti au milieu de notre
cercle scandalisé. Nous ne pouvions contenir
notre indignation intérieure contre ce
fanatique. Et cependant personne ne trouva un mot
à lui répondre. Et maintenant je vous
prie, mon cher pasteur Funcke, de me dire ce que
vous pensez d'une telle sortie. »
Tel était le contenu de la lettre de cette
jeune dame, qui signait d'un nom aristocratique, de
la meilleure noblesse. J'aurais dû lui
répondre aussitôt, comme j'en ai
l'habitude. Étais-je malade ou avais-je un
voyage à faire ? Je ne me souviens pas.
Je tardai à répondre et la
réponse me revint avec ces mots de la
poste : « Partie, domicile
inconnu. »
Je me demande pourquoi je ne jetai pas cette
réponse au feu. Le fait est que je viens de
la retrouver dans un vieux portefeuille. Ma
conviction est que rien n'arrive par hasard. Je
crois donc devoir communiquer cette réponse
à mes lecteurs ; il se peut que par ce
moyen elle arrive aux mains de celle à qui
elle était destinée :
« Ma chère Mademoiselle !
Quoique j'aie à vous remercier de votre
confiance, je suis obligé de commencer par
une impolitesse.
Je ne doute point que le vieux monsieur, dont vous
m'entretenez, n'ait dit ce que vous lui faites
dire. Je suppose toutefois qu'il avait
débuté par une entrée en
matière un peu différente ou qu'il a
ajouté quelque chose à sa
déclaration. Il ne faut jamais
détacher une phrase de celles qui
l'expliquent.
J'admettrai toutefois que le vieux monsieur s'est
borné à ce que vous lui faites dire.
En ce cas je ne saurais me ranger de son
côté. Notre Père Céleste
ne s'est pas limité à ce don des dons
qui est Jésus-Christ. Il a enrichi notre vie
terrestre de biens de toutes sortes.
L'Évangile n'a rien de commun avec ceux qui
ont le culte de l'idéal monacal, condamnable
même quand l'éloquence et l'art
s'emploient à nous le vanter. Les personnes
qui travestissent l'enseignement de Jésus de
façon à faire de celui-ci l'ennemi de
toutes les joies de la vie présente, nuisent
grandement au christianisme. Le Seigneur
Jésus ne veut point apparaître comme
un épouvantail au milieu de nos
récréations, de nos distractions et
même de nos fêtes. Tout est pur pour
ceux qui sont purs, qui savent user avec actions de
grâces. Souvenez-vous du mot :
« Toutes choses sont à
vous » Il est sans doute une limite dans
nos jouissances. Il faut s'arrêter à
l'endroit où elles nous séparent de
Christ, où elles diminuent notre communion
intérieure avec lui.
Bénis soient les rayons de soleil qui
viennent de temps en temps illuminer ce triste
monde ! Béni soit celui dont les gais
propos ont réussi à dérider un visage contracté par
la
douleur ! Béni soit celui qui a un jour
transformé les larmes de l'affliction en
larmes de joie ! À jamais béni
soit l'homme qui, selon l'expression de Newton,
sait de l'immense gerbe de nos chagrins retirer
quelques épis, pour les joindre à la
petite gerbe de nos bonheurs. Béni soit
celui qui sèche les pleurs d'un gamin, en
lui rendant le sou qu'il a perdu !
J'appellerai bonnes toutes les
récréations qui nous procurent de
saines joies. Chantez, vous tous qui avez une belle
voix, mais que celui qui chante faux chante
également. Il vaut toujours mieux chanter
faux que de ne pas chanter du tout. Et la voix
défectueuse deviendra juste dans le
ciel ! Le poète, qui a composé
une pièce de vers destinés à
voler de bouche en bouche, est sans contredit un
bienfaiteur de l'humanité. Quiconque a le
don de l'humour a également reçu un
talent de Dieu et doit le faire valoir. Ce que je
viens de dire s'applique à tous les
artistes. À eux de nous élever
au-dessus de la médiocrité de
l'existence de tous les jours. Je range parmi nos
bienfaiteurs le jardinier qui charme nos regards
par l'éclat des fleurs qu'il cultive. La
Bible ne dit-elle pas que le vin réjouit le
coeur de l'homme ? Ne nous parle-t-elle pas
des cantiques des anges et des
rachetés ? Ne nous montre-t-elle pas
dans le ciel un lieu où la musique, l'art
par conséquent a sa place ?
J'irai plus loin : je dirai que nous honorons
Dieu en nous livrant à des joies saines,
infiniment mieux qu'en prenant un visage sombre.
Dieu a créé le beau et l'aimable en
ce monde pour que nous en usions. Mais..., voici le
terrible mais ! Mais nous abusons de la
façon la plus grave de ces biens quand nous
allons leur demander la vie.
Drummond a dit : « À la Bible
appartient le monopole des
consolations. » Et il arrive
malheureusement dans chaque existence d'homme une
heure où le monde entier, avec tous ses
biens, ne vous apporte aucune consolation. Vous
avez traversé l'une de ces heures, si jamais
vous avez crié de toute votre âme
à Dieu en lui demandant grâce, si
jamais vous avez vu en face de vous avec angoisse
la mort, si jamais vous avez soutenu des luttes
pénibles et prolongées, si jamais le
souvenir de vos péchés vous a
troublée profondément, si la question
du salut d'une âme chère s'est
présentée parfois à vous avec
force, si dans un moment qui ne s'oublie point vous
avez senti le prix inestimable de votre
réconciliation avec Dieu.
En de telles circonstances le monde n'a plus rien
à offrir. Ce sera le temps de recourir au
mot de votre
« fanatique » :
« Jésus, mon
assurance ! » Dans les sombres jours
de l'existence, la main seule de Jésus peut
nous relever.
Voici donc mon conseil : Souriez de
l'étroitesse d'esprit du
« fanatique » lequel n'a pas
compris qu'il est un temps pour chanter, rire et
réciter des vers. Jouissez, dans la saison
de la vie où vous êtes, des biens de
ce monde. Mais placez au-dessus de tous les biens
que la terre vous offre, le bien suprême de
la confiance en Jésus.
Alors vous comprendrez que la parole du sage :
« Tout est vanité, » a
son heure de vérité, et vous ne
craindrez plus ni de voir sonner cette heure
redoutable ni de rencontrer la mort.
Je suis, Mademoiselle, votre bien dévoué, etc. »
« Tous les grands esprits exercent une
action prolongée dans l'histoire de
l'humanité. Toutefois nul d'entre eux n'est
entré aussi profondément dans le
mouvement de l'histoire et n'y a eu une influence
aussi bienfaisante que Jésus de
Nazareth. » Je lisais récemment
ces mots dans un journal américain. Je me
permets de les examiner à la loupe, car
nombre d'hommes et de femmes s'expriment ainsi
aujourd'hui à l'égard de
Jésus-Christ. Cette parole est certainement
respectueuse, et c'est respectueusement que nous
allons la scruter.
La première affirmation qu'elle contient est
juste. Il est certain que les grands esprits
exercent une action prolongée sur
l'humanité. L'impulsion donnée par
exemple par Alexandre le Grand se perpétue
encore aujourd'hui, bien que le grand
Macédonien ait vécu il y a plus de
deux mille ans. Le sculpteur athénien
Praxitèle, disparu de la scène de ce
monde dans le siècle d'Alexandre, inspire
encore nos artistes à
Rome, à Berlin, à Paris et à
Londres, qu'ils s'en rendent compte ou qu'ils
l'ignorent. Les lois promulguées par
l'empereur Justinien, il y a 1400 ans, marquent
aujourd'hui de leur empreinte, bonne ou mauvaise,
en quelques points les législations
modernes.
Arrivons au présent. Il viendra
peut-être prochainement un temps où la
machine à vapeur vieillie sera
reléguée dans les musées
d'antiquités. Cependant le nom de
l'inventeur de cette machine ne perdra jamais son
lustre. L'électricité aura beau
remplacer la vapeur, il reste que celui qui le
premier a mis la vapeur au service de
l'humanité, a frayé la voie à
de nouvelles découvertes qui ne passeront
point.
Le noble médecin anglais Simpson
était tourmenté à la
pensée des souffrances causées par
les opérations chirurgicales. Il n'eut point
de repos jusqu'à ce qu'il eût
trouvé dans le chloroforme un moyen de
suspendre la sensibilité. Il est sans doute
un des grands bienfaiteurs de l'humanité, et
l'on parlera de lui avec reconnaissance même
dans 4000 ans. Nota bene : à supposer
que l'humanité vive encore dans 4000
ans ! Peut-être toutefois dans quelques
années le chloroforme sera-t-il
délaissé par les chirurgiens à
cause des dangers qu'offre son emploi ;
peut-être aura-t-il cédé la
place à d'autres anesthésiques
complètement inoffensifs. Néanmoins
le nom de Simpson sera toujours respecté
parce que l'homme qui le porta à
soulagé d'infinies souffrances.
J'arrête cette énumération,
qu'il serait aisé de prolonger
indéfiniment.
Ne diminuons point la grandeur du génie
humain. Mais faisons une remarque : L'oeuvre
de tous ces grands esprits est une oeuvre
terrestre, améliorant la position de l'homme
on lui ouvrant ici-bas de nouveaux horizons. Et
seul l'incrédule ou l'impie se laissera
entraîner à soutenir que les
personnages dont nous avons parlé ont
résolu la grande question : Comment
nous approcher de Dieu ? Celle-ci n'est pas
une question de bonheur terrestre, une question de
plus ou de moins, et relative à des
jouissances temporelles. C'est la question
d'être ou de ne pas être. Il s'agit ici
de la vie qui seule est véritable. N'appelez
pas vie dans le sens élevé de ce mot
notre vie naturelle, fût-elle ennoblie par
l'art ou par la science. Car la vie naturelle de
l'homme, qui se distingue de l'animal par la
supériorité de ses facultés,
est comme celle de l'animal soumise à la loi
terrible de la vanité.
Est-il au monde une puissance capable de
neutraliser le pouvoir de cette terrible loi de
vanité ; est-il une source à
laquelle nous puissions puiser une éternelle
vie ; est-il pour les pauvres mortels, pour
les pauvres pécheurs que nous sommes un
chemin menant à la communion de Dieu ?
La réponse à ces demandes a nom
Jésus. Jésus est l'unique
réponse aux questions que nous venons de
poser. Connaissez-vous Jésus, vous
connaissez quelqu'un qui n'a pas prononcé de
belles paroles sur la tolérance et
l'humanité, quelqu'un qui ne s'est pas
exprimé avec éloquence sur la
paternité de Dieu, mais le héros qui
a comblé l'abîme
béant de notre culpabilité et de la
mort, par lequel nous étions
séparés de Dieu, le héros qui
nous a ouvert l'accès de la présence
de Dieu. Depuis Jésus une étoile
consolatrice brille au firmament sur la tête
des hommes. « Celui qui est venu du ciel
est au-dessus de tous, » nous dit
l'Évangile
(Jean
Ill, 31.). Christ est donc
au-dessus de tous. Il n'est point le chef du groupe
des grands esprits. Pas un d'eux n'a ajouté
le plus petit rayon à l'éclat de
l'étoile consolatrice. Je ne leur en fais
pas le moindre reproche. Nul ne donne au
delà de ce qu'il a. Et les plus grands
esprits dans le passé, les plus grands dans
le présent, les plus grands dans l'avenir
vous diront que leur plus belle heure a
été celle où ils ont connu
Jésus comme la source de la lumière
éternelle, comme le Sauveur dans la vie et
dans la mort.
C'est donc tenir un langage frivole,
involontairement frivole je le veux bien, que de
placer Jésus dans le groupe des grands
esprits, même de le mettre à leur
tête. La vraie place de Jésus est par
delà les grandeurs passagères de la
terre. Hésitez-vous à la lui
accorder ? Vous montrez que Jésus n'est
pas pour vous ce qu'il est dans nos
évangiles. Quiconque nie la divinité
du Fils de l'homme nie son oeuvre de salut, se
prive de la force et de la joie dont le soleil de
justice est la source.
Assurément le soleil n'en brillera pas moins
au firmament. Mais l'on peut fermer les yeux
à ses rayons. J'ai
ouï dire que d'un petit morceau d'or de la
grosseur d'une noix on arrive, en l'étendant
au laminoir, en l'allongeant indéfiniment,
à tirer un fil capable d'entourer la terre.
Est-ce vrai ? Ne l'est-ce pas ? Je dis
qu'en tous cas le fil sera si ténu, si
faible qu'il se rompra au contact de l'aile d'une
mouche. Eh bien, le petit enfant de l'étable
de Bethléem, tout petit qu'il soit, contient
en lui une puissance capable d'unir le ciel et la
terre. Toute lumière a été
projetée par Jésus. C'est ce qu'a
voulu dire le Cortège par son magistral
tableau de La Sainte Nuit.
Je vais encore parler d'un lit de mort. Je me
tenais auprès de lui il n'y a pas longtemps.
J'assistais un croyant. Les parents étaient
là et laissaient couler leurs larmes. Le
mourant éleva une dernière fois ses
yeux en haut ; il éleva une
dernière fois la voix et dit :
« Ne pleurez pas, le ciel est
ouvert ! » Là-dessus il
s'endormit du dernier sommeil. Sans nul doute ce
chrétien fournissait aux siens, par cet
adieu, la meilleure des consolations, une
consolation qu'il avait savourée
lui-même, une consolation capable de soutenir
les survivants à l'heure où ils le
suivraient.
Croyez-vous que ce mourant eût trouvé
dans le commerce des grands esprits de
l'humanité la même
espérance ? C'est grâce à
Jésus que le ciel est ouvert. Jésus
seul pouvait nous en donner la certitude. Et celui
qui voit le ciel ouvert sur sa tête voit
aussi une douce clarté baigner cette terre.
C'est donc singulièrement diminuer
Jésus que de l'élever au rang des grands esprits.
Le placer un
peu
au-dessus de Socrate et de Confucius, c'est
confesser clairement qu'on ne sait pas qui il est.
« Celui qui est venu du ciel est
au-dessus de tous. » Il est proprement
l'Incomparable. Un prophète n'a-t-il pas
dit : « On l'appellera Admirable
(Es.
IX, 5.). »
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