Vous êtes sauvée par grâce. Éph., II, 8.
Le premier homme, Adam, chef de la race humaine, placé sur une
terre enrichie de tous les bienfaits de Dieu, a péché contre son
bienfaiteur suprême et a entraîné dans sa disgrâce toute sa
descendance.
Les hommes de toutes les races et de tous les temps apportent avec eux
en naissant des penchants à l'égoïsme, à la sensualité, à la ruse, au
mensonge, à la révolte, à l'orgueil.
Tous pèchent contre Dieu, c'est-à-dire qu'ils
suivent leurs propres penchants, de préférence à la volonté suprême du
Seigneur.
Le péché est une transgression de la loi (I
Jean, III, 4.), » soit que cette transgression se manifeste
dans les actions, dans les paroles, soit qu'elle se manifeste dans la
pensée et dans les désirs.
Dieu, qui est saint et juste, ne peut traiter le péché avec
indifférence. Il n'y a point de petits péchés. Tout péché est
détestable à ses yeux. Sa volonté est que nous soyons saints, car
lui-même est saint.
Dieu réserve un salaire au péché ; ce « salaire, c'est la
mort (Rom.,
VI, 23.). »
La mort, ce n'est pas seulement la destruction plus ou moins rapide et
douloureuse de notre corps : c'est le tourment et la dégradation
de l'âme (Ezéch.,
XVIII, 4.). L'âme qui pèche ne saurait être heureuse (Esaïe,
LVII, 21.) ; elle porte en elle-même un ver rongeur, et,
pour comble de maux, elle s'associe au péché, elle en fait son
aliment, elle en devient l'esclave (Jean,
VIII, 34.) ; elle avance de chute en chute jusqu'à ce
qu'elle tombe pour toujours entre les mains du Dieu vivant, qui la
juge et la condamne selon ses mérites (Apoc.,
XXII, 11.).
Tous les hommes ont péché (Rom.
III, 23.), tous se sont montrés ingrats envers
le Père et rebelles à sa volonté, toussent condamnés par la justice,
tous souffrent en attendant qu'ils meurent.
La sentence est déjà prononcée et n'attend plus que l'exécution.
Dieu aurait pu abandonner les hommes à cet état de misère et à cette
chute fatale ; mais il ne l'a pas fait. Il est Amour. Il a écouté
la voix de sa compassion, le conseil de sa tendresse paternelle.
Ce dessein de miséricorde s'appelle l'Évangile (1).
Il a été accompli par Jésus-Christ : Jésus-Christ, conçu du
Saint-Esprit dans le sein de Marie, vierge née à Bethléem, de la race
royale de David.
Jésus-Christ a été au milieu des hommes la marque empreinte de la
Divinité. Il en possédait toute la plénitude ; il a été déclaré,
par la révélation, Dieu sur toutes choses, béni éternellement (Rom.,
IX, 5. Jean,
I, 1.). En lui la Divinité était unie à l'humanité parfaite,
ayant été capable de partager toutes nos souffrances et nos
infirmités, excepté la souillure et le péché.
II est parfaitement homme et parfaitement Dieu.
Le but suprême de la venue de Christ a été sa mort sur la croix.
Sa mort est représentée dans l'Écriture non seulement comme l'exemple
du plus sublime dévouement, mais comme une expiation. « Jésus-Christ
est
l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde (Jean,
1, 29.). Il a porté nos péchés en son corps sur la croix (Gal.,
III, 13. Tite,
II,
14.) ; il est mort, lui juste, pour nous injustes (1
Pierre, III, 18.). » C'est pourquoi il a été appelé Jésus,
ce qui signifie Sauveur.
Nous avons un témoignage que le Sauveur devient notre Sauveur,
lorsque nous croyons en lui (Actes,
XVI, 31.).
Croire en Jésus-Christ ou avoir la foi en Jésus-Christ c'est
reconnaître notre propre misère morale ; c'est sentir que,
quelque valeur relative que nous puissions avoir vis-à-vis des hommes,
devant Dieu, qui connaît le fond de nos coeurs, nous ne valons rien et
nous ne pouvons rien. C'est ensuite lever nos regards vers
Jésus-Christ comme on le fait vers un libérateur tout-puissant,
accepter sans détour et sans réserve le salut gratuit (Ephés.,
II, 5.) qu'il nous a mérité par son obéissance
et par sa mort. C'est enfin désirer, en retour de tant d'amour que le
Père nous a manifesté, de lui donner notre coeur, de lui consacrer
notre vie, de nous conduire d'une manière qui lui soit agréable en le
glorifiant dans notre corps et dans notre esprit qui lui
appartiennent.
Si nous avons une telle foi, nous sommes disciples de Jésus-Christ et
nous avons un signe certain que nous sommes enfants de Dieu (Rom.,
VIII, 16,17.), non enfants déshérités comme ce fils prodigue qui
avait abandonné sa famille, mais enfants rétablis dans la faveur du
Père, enfants adoptés de Dieu, héritiers de Dieu, héritiers avec
Jésus-Christ de la vie éternelle.
Pour nous préparer à la gloire à venir, pour nous rendre capables de
la désirer, de la comprendre et de la goûter, Dieu envoie à ses
disciples son Saint-Esprit (Luc
XI, 13.). Les enfants de Dieu sont de la race de Dieu ;
l'Esprit de leur Père est désormais en eux.
C'est le Saint-Esprit qui, agissant sur leur coeur, les éclaire sur
leur état spirituel et leur fait désirer un Sauveur. C'est le
Saint-Esprit qui ouvre leurs yeux pour leur faire trouver en
Jésus-Christ un libérateur tout-puissant (1
Cor., XII, 3,4, 6.). C'est le même Esprit qui
leur donne l'assurance qu'ils sont du nombre des disciples de
Jésus-Christ et des enfants chéris du Père (Rom.,
VIII, 15, 16. ).
C'est le Saint-Esprit qui incline leur coeur à la vraie piété,
c'est-à-dire à l'amour de Dieu et à la soumission à sa suprême volonté
(1 Jean. III,
9,10.).
C'est le Saint-Esprit qui chasse de nos coeurs l'égoïsme, la
sensualité, l'avarice, l'orgueil, l'incrédulité.
C'est le Saint-Esprit qui inspire aux chrétiens. la patience, la
douceur, la charité, le renoncement, la pureté, le courage, la
persévérance (Gal.,
V, 17, 22,
23.).
C'est le Saint-Esprit qui les rend capables d'accomplir les oeuvres de
justice et de miséricorde que le Seigneur demande de ses enfants, non
comme cause méritante de leur salut, ce qui serait détrôner
Jésus-Christ et lui dérober sa gloire, mais comme une preuve que nous
sommes à lui, un témoignage de la présence de son Esprit dans nos
coeurs, et un moyen puissant de glorifier le Père céleste à la face du
monde (1 Jean,
III, 9,10.).
Enfin, c'est le Saint-Esprit qui nous donne l'assurance (Ephés.,
1,13,14.) de notre pardon et de toutes les grâces qui en
découlent : grave question à l'égard de laquelle nous ne saurions
demeurer dans le vague et l'incertitude, et pour
laquelle nous trouvons dans l'Écriture inspirée du Saint-Esprit une
réponse directe, positive, complète, une absolution certaine,
satisfaisante, divine, devant laquelle toutes les absolutions et
toutes les condamnations prononcées par les hommes perdent leur
puissance et leur valeur (2).
Lecteur ! pénètre-toi des principes exprimés dans ces cinq pages.
Tu en trouveras la pleine confirmation et le développement dans la
Parole de Dieu, notre seule autorité souveraine. Reçois-les donc dans
ton coeur, et tu vivras.
Comment échapperons-nous si nous négligeons un si grand salut ?
Je vous donnerai un nouveau coeur et un esprit nouveau. Ézéch., XXXVI, 26.
La morale ne précède pas la doctrine chrétienne : elle en
est la conséquence et la confirmation. Lorsque le coeur est sous
l'influence d'une forte conviction, il devient
capable de grandes choses. « Faites l'arbre bon, disait le
Sauveur, et le fruit sera bon. »
Dans le chapitre précédent, qui nous montre que dans l'oeuvre de notre
rédemption ou de notre salut tout est grâce de la part de Dieu, nous
avons un témoignage éclatant de l'amour de Dieu envers nous.
« Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin
que tous ceux qui croiront en lui ne périssent point mais qu'ils aient
la vie éternelle (Jean,
III, 16.). » « Nous aimons Dieu, parce qu'il nous a
aimés le premier (1
Jean, IV, 19.). »
Le principe de la morale n'est donc pas l'intérêt ni la crainte, qui
ne produisent rien de bon, mais c'est l'amour. Aussi le premier et le
plus grand commandement, celui qui fait la base de tous les autres,
est ainsi conçu : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton
coeur, de toute ton âme et de toute ta pensée (Matth.,
XXII,
37.). Le second commandement, qui n'en est qu'une conséquence
toute naturelle, est : Tu aimeras ton prochain comme
toi-même. Tous nos devoirs trouvent leur principe dans ces deux
commandements.
À l'école de l'Évangile, le fidèle apprend à craindre Dieu ;
car il est écrit : Dieu est miséricordieux,
afin qu'il soit craint (Ps.
CXXX, 4.) ; - à se confier en lui, car il est
écrit : Déchargez-vous sur lui de tout ce qui peut vous
inquiéter, car lui-même prendra soin de vous (1
Pierre, V, 7. ) ; - à lui obéir, car il est
écrit : Si vous m'aimez, gardez mes commandements (Jean,
XIV, 15.) ; - à respecter son nom, car il est
écrit : Son nom est saint et terrible (Ps.
CXI, 9.) ; - à travailler à sa gloire, car il est
écrit : Faites tout pour la gloire de Dieu (1
Cor., X, 31.) ; - à l'adorer, car il est
écrit : Servez l'Éternel avec allégresse, venez devant lui avec
un chant de triomphe, car il est Dieu (Ps.
C, 2, 3.) ; - à le prier, car il est écrit :
Demandez, et il vous sera donné ; cherchez, et vous
trouverez ; frappez, et on vous ouvrira (Matth.,
VII, 7. ) ; - à s'humilier profondément devant
lui, car il est écrit : Quand vous aurez fait tout ce qui vous
avait été commandé, dites encore : Nous sommes des serviteurs
inutiles (Luc,
XVII, 10.) ; - à se soumettre en tout à la
direction que Dieu imprime au monde et à dire comme David : Je me
suis tu, ô Éternel ! et je n'ai point ouvert la bouche, parce que
c'est toi qui l'as fait (Ps.
XXXIX, 9.) ; - à se dévouer à son service en
imitant Jésus-Christ, qui disait : Ma nourriture
consiste à faire la volonté du Père qui m'a envoyé (Jean,
IV, 34.).
Mais la loi nouvelle, qui est celle de l'amour et qui nous
unit à Dieu par la reconnaissance et le dévouement, comprend aussi
tous les hommes dans ses bienfaisants effets, et l'Évangile fait
découler de ce principe une foule de devoirs que la charité rend
faciles et que l'humilité orne d'une beauté céleste.
Les paroles suivantes de saint Paul devraient être imprimées en
lettres d'or, ou plutôt gravées pour jamais dans nos coeurs :
« Quand je parlerais toutes les langues des hommes et même celles
des anges, si je n'ai pas la charité, je suis comme l'airain qui
résonne ou comme une cymbale retentissante.
Quand même j'aurais le don de prophétie, quand je connaîtrais tous les
mystères et toutes sortes de sciences, et quand j'aurais assez de foi
pour transporter les montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis
rien.
Quand même je distribuerais tout mon bien pour la nourriture des
pauvres et que je livrerais mon corps pour être brûlé, si je n'ai pas
la charité, cela ne me sert de rien.
La charité est patiente ; elle est douce ; la charité n'est
point envieuse ; la charité n'est point insolente ; elle ne
s'enfle point d'orgueil ; elle ne se conduit pas
malhonnêtement ; elle ne cherche point son propre profit ;
elle ne s'aigrit point ; elle ne soupçonne point le mal ;
elle ne se réjouit point de l'injustice, mais elle se réjouit de la
vérité ; elle endure tout, elle croit tout, elle espère tout,
elle supporte tout. La charité ne périt jamais ; maintenant trois
choses demeurent : la foi, l'espérance et la charité ; mais
la plus excellente est la charité... Recherchez donc la charité (1
Cor., XIII.). »
Sous l'influence de ce principe, le chrétien fuit soigneusement
l'injustice sous toutes les formes, même les plus
insignifiantes ; il surveille toutes ses actions, de peur que sa
probité ne reçoive la moindre atteinte ; il est généreux,
expansif, bienveillant, dévoué ; il embrasse avec une sainte
ardeur les grands intérêts de l'humanité ; il n'est point
étranger au bien qui se fait dans le monde ; il y prend une part
active selon la mesure de sa fortune, de son influence ou de ses
talents ; et quand il n'a plus la pite de la veuve à donner pour
les malheureux, il lui reste toujours des larmes de
compassion et les prières d'un coeur sympathique.
Une foule de devoirs relatifs découlent de ces devoirs généraux.
Le chrétien est attaché à son pays, et il le sert fidèlement en
faisant régner autour de lui le bon ordre et la paix.
Il se soumet aux puissances établies pour gouverner l'État, soigneux
de rendre à César ce qui appartient à César, comme il veut rendre à
Dieu ce qui appartient à Dieu.
Dans la famille, il est fils respectueux, comme il est écrit :
Honore ton père et ta mère (Exode,
XX, 12.) ; il est époux fidèle, comme il est écrit :
Le mari aime sa femme, comme Jésus-Christ a aimé l'Église (Ephés.,
V, 25.). Il est père prudent et affectueux, instruisant ses
enfants dans la vérité, dans la piété et dans la droiture.
Dans la société, il est indulgent, sensible, diligent, honnête,
tolérant, clément, conformant sa conduite, autant qu'il est possible à
la nature humaine de le faire, à l'exemple et aux préceptes de
Jésus-Christ.
En se repliant sur lui-même, le chrétien reconnaît enfin plusieurs
devoirs qui concernent plus particulièrement l'état, les progrès, la
paix de sa propre âme. À l'école de Jésus-Christ, il apprend à
supporter les persécutions auxquelles il est exposé
de la part des méchants, et les maux qui lui sont dispensés par la
Providence, avec courage et résignation ; il vit dans le monde
sans permettre que la folie ou l'iniquité du monde le détournent de sa
céleste destinée ; mais se conformant aux règles de la sobriété,
de la pureté, de la piété pratique, recherchant tout ce qui est
véritable, tout ce qui est digne de respect, juste, saint, aimable et
de bonne renommée (Philip.,
IV,
8.) ; offrant à Dieu son corps et son esprit en sacrifice
vivant, libre et saint.
Au milieu de ces efforts incessants et de cette lutte souvent si
douloureuse contre le mal, il ne présume pas de lui-même, comme s'il
avait atteint au but : au contraire il cherche constamment en
Dieu de nouveaux secours ; il recommence chaque jour le travail
et la lutte, et, à l'imitation de saint Paul, il dit avec un mélange
d'humilité et de courage : « Pour moi, je ne me persuade pas
d'être parvenu à la perfection, mais voici ce que je fais :
j'oublie les choses qui sont derrière moi, et, m'avançant vers celles
qui sont devant moi, je cours vers le but, savoir, le prix de la
céleste vocation que Dieu me propose en Jésus-Christ (Philip.
III, 13,14.). »
La mort ne sera plus ! Apoc., XXI, 4.
La vie présente est un premier état qui précède et prépare une
vie nouvelle.
Les plus simples données d'une saine philosophie le faisaient
pressentir ; le christianisme place ce grand fait en lumière et
l'entoure d'une pleine confirmation. Pour le croyant, l'attente de la
vie à venir acquiert une entière certitude ; il combat, il
souffre, il agit en vue de cette glorieuse perspective. Il a pour
garant de cette attente les promesses de Dieu et le témoignage que le
ciel lui a donné dans la résurrection de Jésus-Christ.
Jésus-Christ s'est abaissé jusqu'à notre nature infirme, afin d'élever
cette nature à la hauteur de sa gloire.
Vivant en lui, travaillant pour lui, souffrant et mourant avec lui,
nous ressusciterons comme lui pour être à jamais glorifiés en lui et
par lui.
La mort est un accident commun à tous, « au juste et à
l'injuste, à celui qui sacrifie et à celui qui ne
sacrifie pas. » Mais elle ne peut être envisagée par tous de la
même manière.
Pour ceux qui vivent sans Dieu dans le monde, présumant
orgueilleusement d'eux-mêmes, s'adonnant au péché, vivant selon la
chair, plaçant leur affection dans les biens d'ici-bas, repoussant
l'appel de Dieu et la voix de la conscience, la mort est le roi des
épouvantements, l'avenir est une mer ténébreuse et sans rivages ;
d'ordinaire ils ne savent où ils vont ; et lorsqu'ils pensent
sérieusement, et avec quelque intelligence, de leur état moral et des
droits de Dieu, l'horreur les prend ; ils imposent silence à la
voix importune de la religion ; ils ne veulent pas mourir, parce
que, dans le fond de leur coeur, il y a un retentissement de la voix
de Dieu qui leur dit qu'un abîme conduit à un autre abîme, que le
péché ne peut conduire qu'à la disgrâce et au malheur, et que c'est
une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant (Héb.,
X, 31. Marc,
IX, 4-6.).
Pour les justes, je veux dire pour ceux qui, de pécheurs qu'ils
étaient comme le reste des hommes, sont devenus justes par la foi, la
mort revêt un tout autre aspect. Elle peut être encore environnée de
terreurs, car elle peut être accompagnée d'un
cortège de douleurs physiques et de cruelles séparations ; mais,
au point de vue de la vie de l'âme, elle est dépouillée de tout ce qui
en fait pour l'incrédule un objet d'effroi.
Job peut s'écrier au milieu des étreintes d'une affreuse
maladie : « Je sais que mon Rédempteur est
vivant ! »
Saint Pierre, en présence des cruelles persécutions qui affligent
l'Église, peut dire : « Nous attendons, Seigneur, selon ta
promesse, de nouveaux cieux et une nouvelle terre où la justice
habite. »
Saint Paul, dépassant, par un élan de sa foi, l'horizon si borné de
notre vue humaine, contemple les triomphes du Rédempteur et peut
dire : « 0 mort ! où est ton aiguillon ? O
sépulcre ! où est ta victoire ? Gloire à Jésus-Christ par
qui nous avons la victoire ! »
Mais que dis-je ? pour le croyant, à proprement parler, la mort
n'est plus. Dès le moment qu'il croit, il entre dans la vie. Celui qui
croit au Fils, dit l'Écriture, a la vie. Remarquez cette
expression : II a la vie (1
Jean, V, 10-12.). Il entre, par la foi, dans un nouvel élément
impérissable de vie, d'activité, de félicité ; état encore
imparfait ici-bas, mais qui prendra son glorieux développement lorsque
le Seigneur reviendra ressusciter notre chair,
enlever ses élus loin de la vue du mal, régner glorieusement au milieu
d'eux et les introduire dans une éternité de bonheur indicible...
« Après la mort, le jugement ( Héb.,
IX, 21.). »
Cet état d'éternel bonheur ou d'éternel malheur sera déterminé par le
jugement. Ce n'est point une affaire de hasard, de caprice, d'autorité
arbitraire, mais de justice, justice infaillible et irrécusable de
Celui qui connaît les secrets des coeurs, qui apprécie nos intentions
autant que nos actions, qui ne dépassera pas la mesure ni en deçà ni
au delà, mais qui rendra à chacun ce qui lui est dû.
Il y a un ciel et il y a un enfer, non comme les hommes nous les
dépeignent, selon les couleurs que leur prodigue leur imagination
féconde et désordonnée, mais tels que l'Écriture nous les dépeint, en
nous disant et la beauté ravissante de la foi, de l'espérance et de la
charité, et la hideuse laideur de la désobéissance, de l'ingratitude,
du péché.
Il y a un ciel et un enfer. Il n'est donné ni à la sagesse ni à
l'autorité humaine, en dehors de la sagesse et de l'autorité du
Seigneur, de nous les ouvrir ou de nous les fermer. Celui
qui se tient à la porte est Jésus-Christ. « II ouvre, et personne
ne ferme ; il ferme, et personne n'ouvre (Apoc.,
III, 7.) ; » et, annonçant à chacun les conséquences
naturelles, inévitables et fatales de ce qu'il est et de ce qu'il peut
attendre, il dit : « Que celui qui est souillé se souille
davantage, et que celui qui est juste le devienne encore plus (Apoc.,
XXII, 11.). »
Oui, il y a un ciel et un enfer. Il n'y a point d'état intermédiaire
qui ne soit ni le bien, ni le mal, ni la vérité, ni l'erreur, ni le
bonheur, ni le malheur, ni le ciel, ni l'enfer. Il y a une route large
et facile qui conduit à la désobéissance et à l'abîme ; il y a
une route difficile et étroite qui conduit au bien et à la félicité.
Il n'y a pas une troisième route que nous nous choisirions pour y
trouver à la fois les gloires de la piété et les délices du péché.
« J'ai placé devant vous, disait Moïse, la vie et la mort, la
bénédiction et la malédiction. Choisissez donc la vie, afin que vous
viviez à toujours (Deut.,
XXX, 19.). »
Après la mort... le jugement ; non le purgatoire. Le
purgatoire que l'on place après la mort est une pure invention dont on
sait bien aujourd'hui quel étrange profit on peut tirer ;
doctrine qui n'a pas pour elle un seul mot de la
Parole de Dieu et que nous repoussons, nous protestants, comme
antichrétienne, puisque toute la révélation confirme la pensée que le
jugement suit la mort et précède l'éternité.
Le vrai purgatoire, en prenant ce mot dans son sens le plus élevé,
s'accomplit sur la terre.
C'est sur la terre qu'a lieu la régénération, la conversion, et son
fruit béni, la sanctification. « Le sang de Christ nous purifie
de tout péché (1
Jean, 1, 7.). Bienheureux, dès à présent, ceux qui meurent au
Seigneur (Apoc.,
XIV, 13.). La mort est engloutie par la vie (2
Cor., V, 4.). Étant justifiés par la foi, nous avons la paix
avec Dieu, par Jésus-Christ (Rom.,
V, 1.). »
Donc, pas de purgatoire après la mort. Travaillons donc pendant qu'il
fait jour, et n'attendons pas la nuit pendant laquelle nul ne pourra
travailler. Et que chacun de nous dise du fond de son coeur :
« Que je meure de la mort du juste et que ma fin soit semblable à
la sienne (Nomb.,
XXIII, 10.) ! »
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