Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

XII.

L'Église.

  Où il y a deux ou trois personnes assemblées en mon nom, je suis au milieu d'elles. Matth., XVIII, 20.



 Il règne dans le monde une grande confusion sur l'application du mot Église. Aller à l'Église signifie pour tous se rendre dans l'édifice consacré au culte du Seigneur. La puissance de l'Église signifie, pour quelques-uns, la puissance des prêtres.
Dans son sens évangélique, le mot Église signifie assemblée.
La véritable Église n'est donc ni le temple de pierre, élevé par la main des hommes, ni le clergé ou le prêtre, mais l'assemblée des chrétiens ou des disciples de Jésus-Christ, le peuple de Dieu tout entier. Ainsi le mot France, dans son sens le plus élevé, indique non seulement le territoire peuplé par les Français, non seulement le monarque et les magistrats, mais l'ensemble de la nation, distinguée par la puissance, l'intelligence et le caractère qui lui sont propres.

Les protestants distinguent l'Église visible et l'Église invisible.
L'Église visible est composée de tous ceux qui professent par leur naissance, par leur position, par leur adhésion tacite ou ouverte, croire en Jésus-Christ. L'Église invisible est composée de tous ceux qui ne se contentent pas d'une profession extérieure, mais qui croient réellement dans le Rédempteur des hommes.
Si croire et professer étaient une même chose sur la terre, la distinction entre l'Église visible et l'Église invisible disparaîtrait. C'est ce qui arrivera dans le ciel, patrie glorieuse de l'Église triomphante.

Le Seigneur lui-même établit cette distinction dans sa parabole de l'ivraie et du bon grain (Matth., XIII, 24-30.).
« Le royaume des cieux est semblable à un homme qui avait semé de bonne semence en son champ. Mais pendant que les hommes dormaient, son ennemi vint, qui sema de l'ivraie parmi le blé et s'en alla. Et après que la semence eut poussé et qu'elle eut produit du fruit, l'ivraie parut aussi. Alors les serviteurs du père de famille lui vinrent dire : Seigneur, n'as-tu pas semé de bonne semence dans ton champ ? D'où vient donc qu'il y a de l'ivraie ? Et il leur dit : C'est un ennemi qui a fait cela. Et les serviteurs lui répondirent : Veux-tu donc que nous allions le cueillir ? Et il leur dit : Non, de peur qu'il n'arrive qu'en cueillant l'ivraie vous n'arrachiez le froment en même temps. Laissez-les croître tous deux ensemble jusqu'à la moisson ; et, au temps des moissonneurs, cueillez premièrement l'ivraie, et liez-la en faisceaux pour la brûler ; mais assemblez le froment dans mon grenier. »

La même pensée est présentée plus loin sous une autre forme.
« Le royaume des cieux est encore semblable à un filet qui, étant jeté dans la mer, ramasse toutes sortes de choses ; quand il est rempli, les pêcheurs le tirent sur le rivage, et s'étant assis, ils mettent ce qu'il y a de bon à part dans leurs vaisseaux, et ils jettent ce qui ne vaut rien. Il en sera de même à la fin du monde ; les anges viendront et sépareront les méchants du milieu des justes. »

Le filet rempli de toutes sortes de choses, le champ rempli de toutes sortes d'herbes représentent les Églises visibles. Le bon grain confondu pour un temps avec l'ivraie dans le champ, les poissons confondus avec les algues et le limon dans le filet, représentent les vrais croyants, l'Église invisible, Église mêlée et confondue pour un temps avec le monde.
Le jour de la moisson, le moment où les pêcheurs s'assoient sur le bord du rivage, représente le jour du jugement, qui est le moment solennel où l'Église véritable, étant séparée de l'Église mélangée, deviendra elle-même visible, c'est-à-dire parfaitement pure et glorieuse, prête et parée pour le céleste époux.

Allez à Rome, vous verrez une Église catholique romaine ; allez à Genève, vous trouverez une Église protestante ; allez à Saint-Pétersbourg, vous trouverez une Église grecque dite orthodoxe. Tous les catholiques de Rome sont-ils de bons et vrais catholiques romains ? Tous les protestants de Genève sont-ils de bons et vrais protestants ; tous les orthodoxes de Saint-Pétersbourg - sont-ils de bons et vrais orthodoxes ?
Tous ces différents membres de trois Églises chrétiennes sont-ils de bons et vrais chrétiens ? Hélas non ! comment discerner les fidèles des infidèles ?
Dieu seul le peut ; pour nous, pauvres humains à courte vue, ce discernement est impossible ; l'établir au delà de certaines limites serait un acte de présomption.

Ce que nous voyons c'est une Église apparente ; ce qui échappe à nos regards, c'est l'Église de Dieu. « II y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus, » disait Jésus-Christ (Matth., XXII, 14.) ; les appelés sont les chrétiens appelés par la naissance, par la prédication, par les sacrements ; les élus se trouvent au milieu des appelés, mais ils ne seront révélés au monde qu'au jour où l'épreuve et le combat auront cessé pour faire place au repos et à la gloire.

Toutefois, quand nous disons de l'Église de Jésus-Christ qu'elle est invisible, nous ne le disons pas d'une manière absolue. Car bien que les vrais chrétiens ne soient pas encore complètement manifestés au monde, ils font néanmoins « luire leur lumière devant les hommes (Matth., V, 16.) ; » ils se séparent de l'iniquité qui est dans le monde, ils saisissent toutes les occasions qui leur sont offertes de glorifier Dieu à la face de ceux qui le renient.
Ainsi nul ne peut nier leur existence et leur foi, mais comme Église, comme assemblée, ils sont mêlés et souvent confondus avec le monde, et tant qu'on ne pourra pas produire une assemblée toute composée de vrais chrétiens, nous serons contraints de dire que la véritable Église est invisible.

Quelle doit donc être notre conduite dans cet état d'imperfection ?...
Nous devons nous unir à celle des Églises visibles qui se rapproche le plus de ce que la Parole de Dieu nous représente comme l'Église véritable. Nous devons chérir l'Église de notre naissance si elle possède ces précieux caractères ; nous devons nous en séparer si elle ne les possède pas. Ces caractères distinctifs et essentiels, il importe de les signaler.




XIII.

L'Église invisible.


  Je me suis réservé sept mille hommes de reste en Israël, qui n'ont point fléchi leurs genoux devant Baal. I Rois, XIX, 18.



 Le symbole apostolique nous fournit une exposition suffisante et complète de la véritable Église, par cette profession de foi :


JE CROIS À LA SAINTE ÉGLISE UNIVERSELLE, LA COMMUNION DES SAINTS.

 Ici, l'Église est distinguée par deux caractères principaux : elle est universelle ; elle est sainte.

 Universelle ou catholique (1), c'est-à-dire qu'elle n'est point circonscrite par les limites d'un pays, par la prépondérance d'une cité, par l'influence d'un gouvernement. Elle échappe à toute distinction de secte, à toute institution d'homme, à toute discipline temporaire, à toute restriction politique. « En toute nation, dit la Bible, celui qui craint Dieu et s'adonne à la justice, lui est agréable. »
Tous ceux qui se réclament du nom de notre glorieux Maître, tous ceux qui, en toute sincérité de coeur, l'adorent et le servent, tous ceux qui le prient avec foi et s'attendent à lui pour leur salut, tous ceux qui, le prenant pour modèle, animés de son esprit, marchent sur ses traces et imitent son exemple de charité et de dévouement, quels que soient, d'ailleurs, les jugements que les chefs des Églises visibles peuvent porter sur eux, sont membres de l'Église invisible, marqués du sceau de Dieu, désignés pour le glorifier ici-bas et pour partager sa gloire dans le ciel.

La terre elle-même ne limite point l'étendue de l'Église ; elle mérite doublement encore le titre d'universelle, en ce que non seulement elle peut s'étendre sur toutes les familles des hommes, par la répartition du don de la grâce, pendant leur vie de combats et d'épreuves ici-bas, mais encore parce qu'elle compte des membres nombreux dans les demeures célestes où les enfants de Dieu se reposent de leurs travaux dans la gloire ineffable du Chef glorieux de l'Église. Il en résulte que celui-ci, seul capable de dominer l'univers par son regard immense, peut seul voir et compter les membres de son Église, toujours présente à la vue du Seigneur, qui l'a fondée et la soutient pour sa gloire.

L'Église invisible doit aussi être sainte. L'Église est la famille de Dieu parmi ses créatures morales, et Dieu ne se plaît que dans la sainteté ; toute souillure se dissipe en sa présence comme devant un feu dévorant. « Christ, est-il écrit, a aimé l'Église ; il s'est donné lui-même pour elle, afin qu'il la sanctifiât, après l'avoir nettoyée dans le baptême d'eau et par sa parole, afin qu'il se la rendît une Église glorieuse, sans tache, ni ride, ni aucune autre chose semblable, mais afin qu'elle fût saine et irrépréhensible (Ephés., V, 25.). »

Cette sainteté peut être incomplète et gênée pendant les combats de la vie ; mais l'Église au moins la possède virtuellement, et, dans son sein, elle possède tous les éléments féconds de la vraie sainteté.
Elle suppose d'abord la possession et la profession de la vérité, et la vérité en religion ne se trouve que dans l'Évangile, parole inspirée de Dieu, révélation seule destinée à nous montrer la route du ciel. Il s'ensuit que toute Église où la Parole de Dieu est mise en évidence, présentée aux fidèles comme seule règle de leur conduite, seule source de leurs espérances et seule base de leur foi, possède en cela un des caractères distinctifs de l'Église dont Jésus-Christ est le chef adorable.

La sainteté dans l'Église suppose aussi l'amour fraternel. Ce qui ne signifie pas seulement les actes de la bienfaisance et de l'aumône, mais l'affection mutuelle et l'union intime des âmes.
Hors de cette disposition, on ne saurait se flatter d'avoir les moindres rapports avec Jésus-Christ ; il l'a dit lui-même : « C'est à ceci que l'on connaîtra que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres. »
Ce n'est pas sans raison que les auteurs du symbole apostolique proposent à notre foi la communion des saints, c'est-à-dire l'union qui doit exister parmi les chrétiens, immédiatement après avoir parlé de l'Église sainte et universelle.

L'Église est un corps dont les membres sont si dépendants les uns des autres, qu'il est impossible qu'un seul des membres souffre sans que le corps entier en soit affecté. Là où se rencontrent les divisions, les querelles, les discussions, les zizanies, l'intolérance, les persécutions, les haines et l'envie, dites : là n'est pas l'Église de Jésus-Christ, là n'est pas sa famille de choix.

La sainteté dans l'Église se manifeste encore par la séparation complète du monde. Visiblement elle est au milieu du monde, et se mêle avec ses enfants ; mais aux yeux de l'esprit elle s'en sépare et tend chaque jour à s'en séparer davantage. C'est ce que saint Pierre demandait, lorsque, dès sa première prédication, suivie des premiers triomphes de l'Évangile, il disait à ses nouveaux frères : « Séparez-vous de cette génération incrédule et perverse ! »

L'Église est un principe vivant : que deviendrait ce principe, si ceux qui le professent le prostituaient à un monde qui marche chaque jour à sa ruine ? Chaque pas que le chrétien fait dans la vie est un progrès, chaque battement de son coeur correspond à une bonne pensée, chaque idée dans son intelligence est une vérité que le monde ne soupçonnait pas même, et dont il ne voudrait sûrement pas, s'il la comprenait clairement. Il n'y a donc point de rapport ni de sympathie réelle entre le chrétien et celui qui ne l'est pas, entre l'Église et le monde. Nul ne peut servir deux maîtres, et celui qui l'oublie s'expose à servir fort mal l'un et l'autre. Et c'est aussi pour l'avoir méconnu que l'on a vu plusieurs Églises donner au monde le scandale de l'ambition terrestre, de la cupidité, des envahissements, des désordres de tous genres ; et là certainement n'était ni l'Église de Jésus-Christ, ni son influence bénie.

Enfin, la sainteté dans l'Église se manifeste dans sa soumission entière et exclusive à son chef, Jésus-Christ.
Jésus-Christ ! voilà l'objet de notre foi, de notre confiance et de nos adorations ! Notre nom de chrétien nous rappelle celui du Crucifié, nos enfants sont baptisés en son nom ; nos communions nous appellent à entourer sa table ; nos fêtes nous retracent les circonstances solennelles de sa vie de douleurs et de triomphes ; nos chaires retentissent de son nom : Christ est le chemin, Christ est la vérité, Christ est la vie. Toutes les fois que ce nom saint est méconnu, oublié, partout où il n'est pas mis en évidence, et son salut proclamé dans toute sa simplicité comme dans toute sa gloire, dites encore : là n'est point son Église, là son regard ne distingue point les véritables membres de sa famille chrétienne.




XIV.

L'Église visible.


  Pour moi et ma maison, nous servirons l'Éternel. Josué, XXIV, 15.



 Nous avons défini l'Église visible : la réunion des appelés ; mais comme les élus sont au nombre des appelés, il s'ensuit que l'Église visible renferme aussi toute l'Église invisible. Elle est visible, parce qu'en effet, on peut voir ceux qui la composent, les compter, les nommer, et, jusqu'à un certain point, les classer et juger de leur foi par leurs oeuvres.
Elle a son influence politique et ses forces statistiques, sa position géographique et son caractère national ; elle a ses jours de prospérité et ses revers ; elle est tour à tour oppressive ou opprimée ; tantôt elle se laisse dominer, acheter, affaiblir, dénaturer par la puissance de César ; tantôt elle saisit les rênes, dirige les peuples et fait trembler les dominations.
L'Église visible est une école où Dieu instruit ses enfants, et où il fait entendre ses appels à ses élus. Par l'Église, il y a un appel comme nous l'avons déjà dit, dans la naissance, dans les sacrements, dans les instructions religieuses, dans la prédication de l'Évangile, dans la possession de la Bible, dans le commerce des chrétiens.

Il y a donc dans l'Église visible des éléments très divers : on y trouve des enfants et des hommes faits, des forts et des faibles, des ignorants et des sages, des croyants, des indifférents, des formalistes et même des impies. Le filet est jeté sur la vaste mer, et il amène au rivage toutes sortes de choses bonnes ou mauvaises ; mais le moment de les tirer n'est pas encore venu.

La Parole de Dieu, qui détermine d'une manière parfaitement satisfaisante les caractères de l'Église invisible, admet une si grande liberté dans sa direction humaine, que l'on doit s'attendre à rencontrer dans les différentes communautés qui la composent la plus grande variété, surtout en ce qui concerne leur administration temporelle et leur gouvernement humain ; de là l'existence des sectes.
Nous touchons ici à un sujet aussi délicat qu'important, auquel il convient de consacrer un chapitre tout entier.




XV.

Les sectes.


  Dans les choses importantes, unité ; dans les choses douteuses, diversité ; en toutes choses, charité. Saint Augustin.

 On fait grand bruit des sectes qui caractérisent le protestantisme. On en exagère le nombre, les divergences, les inconvénients. Il est sage de ramener ces faits à leur exacte portée.

L'Église invisible est une ; c'est-à-dire que tous les vrais chrétiens, quels que puissent être leur apparence extérieure, le nom qu'ils portent, la société à laquelle ils appartiennent, les formes de leur culte, reçoivent dans leur coeur et dans leur vie les mêmes principes fondamentaux qui sont à la base de l'Évangile, et sans lesquels le christianisme cesserait d'être le christianisme. C'est cette unité que Jésus-Christ prophétisait dans cette belle prière : « O Père, qu'ils soient un, comme nous sommes un (Jean, XVII, 22.). »

L'Église visible, institution qui a son côté humain, terrestre, et par conséquent imparfait, est divisée. Elle est divisée quand on la considère dans l'ensemble de la chrétienté. La chrétienté se compose des chrétiens catholiques romains, des chrétiens protestants, des chrétiens grecs, des chrétiens arméniens, des chrétiens coptes, des chrétiens abyssins, etc.

Si l'on prend chacune de ces branches de la chrétienté, on les trouve subdivisées, même celles qui prétendent le plus à une unité rigoureuse. L'Église grecque est divisée, comme on le voit surtout dans la Russie méridionale et dans l'empire ottoman. L'Église romaine est divisée, sinon dans la forme de son culte, du moins dans le principe même de l'autorité infaillible, que les uns placent dans le pape seul, d'autres dans les conciles, d'autres dans le pape présidant les conciles, etc. Les protestants sont divisés en diverses dénominations qui font le sujet spécial de ce présent chapitre.

Les sectes sont un état de transition inévitable entre l'unité par l'autorité et l'unité par la liberté. Dans cet état, les esprits sont en travail, les âmes sont éprouvées, la foi se forme et s'épure, et le formalisme disparaît.

Les sectes sont presque toujours un signe évident d'un grand réveil religieux. L'harmonie est plus facile dans le sommeil que dans l'activité, et le silence plus complet parmi les morts que parmi les vivants.

Il faut de deux choses l'une : ou imposer l'unité de la foi par l'autorité, alors vous aurez l'unité dans le silence et la mort ; ou donner la liberté en supportant la diversité, et alors vous aurez des âmes actives, sincères et vivantes.

Patience ! les sectes ne sont que pour un temps ; laissez donc les hommes chercher la vérité à leur manière ; quand ils l'auront trouvée ainsi, ils n'en seront que plus consciencieux et sincères. Permettez donc ce que Dieu permet et ne maudissez pas ceux qu'il n'a pas maudits ; qui sait s'il ne permet pas ces divergences transitoires pour prouver qu'on peut être un chrétien pieux, un homme saint, un élu du ciel, hors de telle ou telle institution humaine ?

J'ai souvent trouvé dans des ouvrages hostiles au protestantisme des listes des sectes que l'on donnait comme produites par la Réforme ; ces listes étaient empreintes d'une insigne mauvaise foi dont le résultat était de donner à nos diversités des proportions et un caractère qu'elles sont bien loin de présenter en réalité.
C'est ainsi, par exemple, que quelques auteurs s'obstinent à nous rendre responsables de l'existence des mormons, tandis que ceux qui connaissent cette communauté savent bien qu'elle s'est mise complètement en dehors de la chrétienté, ayant substitué une Bible de son invention à la sainte Parole de Dieu, et que nous ne voulons pas plus accepter comme protestants ces hommes égarés que nous ne voudrions rendre l'Église romaine solidaire des flagellants des anciens temps et des saint-simoniens des temps modernes.
Les listes auxquelles nous faisons allusion trompent encore les gens peu éclairés en faisant autant de sectes des noms qui servent à en désigner une seule. Ainsi j'ai remarqué les noms suivants : protestants, réformés, évangéliques, bibliques, calvinistes.
En additionnant, nous avons cinq sectes ; or, celui qui écrit ces pages est tout cela à la fois, bien qu'il n'ait la prétention d'appartenir qu'à une seule Église, savoir : l'Église réformée de France. Que dirait-on de celui qui prétendrait que les mots catholiques, romains, papistes, ultramontains indiquent quatre Églises séparées, tandis qu'ils peuvent être revendiqués par une seule personne ?

Enfin on calomnie les sectes protestantes quand on les représente toujours comme prêtes à s'anathématiser les unes les autres, tandis que leurs divergences ne les empêchent point de s'unir fraternellement, soit pour travailler en commun à des oeuvres de piété et de bienfaisance, soit dans l'intimité plus étroite encore de la prière et de la communion. L'Église réformée de France, en particulier, est heureuse d'offrir ses chaires aux prédicateurs fidèles de toutes les dénominations protestantes ; et la grande réunion oecuménique de l'Alliance évangélique a pour objet spécial de rapprocher les chrétiens de toutes sectes sur le terrain commun de l'orthodoxie évangélique, mettant ainsi en lumière le grand principe de « l'unité de l'Esprit par le lien de la paix. »

Du reste, ce fait apparaîtra d'autant moins surprenant que l'on saura mieux apprécier l'histoire des sectes et leur caractère distinctif. Une étude approfondie de ce sujet important montrera que les différences qui existent entre les protestants tiennent soit à des origines historiques, aux caractères nationaux divers, soit à des divergences relatives au gouvernement ecclésiastique ou à la célébration extérieure du culte, éléments que les protestants considèrent comme étant d'un ordre secondaire quand on les compare aux grands principes fondamentaux de la foi chrétienne qui concernent directement la vie de l'Église.
Les protestants d'Angleterre sont gouvernés par des évêques, ceux de France le sont par des presbytères ; les premiers se mettent à genoux quand ils communient, tandis que les protestants de France se tiennent debout ; les uns ont de longues liturgies, d'autres en ont de courtes, d'autres n'en ont pas du tout.

De bonne foi, écartez ces différences, qui sont peu importantes quand il s'agit du salut et de la vie, et les divergences qui existent entre les Églises protestantes se réduiront à bien peu de chose, comme le prouve d'ailleurs le rapprochement chaque jour progressant qui fait de l'ensemble de ces familles protestantes une grande et compacte unité, que le réveil religieux, l'instruction, le développement de la charité et la bénédiction de Dieu rendent chaque jour plus éclatante et plus féconde.


(1) Entendons-nous bien : catholique, et non catholique romaine.
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