Christ a donné les uns pour être apôtres, les autres pour être prophètes, les autres pour être évangélistes, et les autres pour être pasteurs et docteurs. Ephés., IV, 11.
Un pasteur est un homme qui, lui-même
converti au Seigneur, connaissant et croyant la
vérité de l'Évangile et
animé d'un profond amour pour les âmes
humaines, se dévoue à leur service,
soit pour convertir celles qui son encore dans le
péché et l'erreur, soit pour
réveiller celles qui vivent dans
l'indifférence, soit pour diriger,
édifier et nourrir celles qui sont
déjà entrées dans les sentiers
de la vie chrétienne.
Le pasteur est un ministre, c'est-à-dire un serviteur de
Dieu ;
dans l'Église c'est un
frère au milieu de ses frères. Sa consécration est la
reconnaissance
par l'Église, c'est-à-dire
par l'assemblée des
fidèles, des dons qu'il a reçus pour
la prédication de l'Évangile et pour
le soin qu'il devra donner aux âmes.
L'autorité pastorale est tout
intérieure et morale ; elle s'exerce
par la puissance seule de la Parole de Dieu, dont
le pasteur est le simple messager.
« Paissez le troupeau de Dieu qui vous
est confié, » disait saint Pierre
(1
Pierre, V, 2,3.) aux
pasteurs ; « veillant sur lui, non
par contrainte, mais volontairement ; non pour
un gain déshonnête, mais par
affection ; non comme ayant domination sur les
héritages du Seigneur, mais en vous rendant
les modèles du troupeau. »
Les pasteurs protestants ne font point corps
à part dans l'État et dans la
société. Tout entiers à leur
ministère ils s'éloignent des folies
du siècle, ils s'abstiennent de tout travail
étranger à leur vocation, mais ils se
rattachent à la famille humaine par leur
caractère de citoyen dans l'État et
de père de famille dans la
société.
L'Évangile leur permet et même leur
recommande le mariage. « II
faut, » disait saint Paul,
« que l'évêque (le
surveillant ou pasteur) soit mari d'une seule femme
et qu'il gouverne bien sa propre famille, tenant
ses enfants dans la soumission
et en toute sorte d'honnêteté
(1
Tim., III, 2, 4.). » Et
ailleurs il écrit aux
Corinthiens : » N'avons-nous pas le
pouvoir de mener partout avec nous une femme
d'entre nos soeurs, comme font les autres
apôtres, et les frères du Seigneur, et
Céphas (saint Pierre)
(1
Cor., IX,
5.) ? »
Le pasteur doit se distinguer par la pureté
de ses moeurs, l'élévation de son
caractère, la profondeur de sa science
chrétienne.
Dans ce but, il doit avoir dirigé,
dès ses jeunes années, toutes ses
études et toute son attention vers la
connaissance des saintes lettres et de la
théologie évangélique, sans
toutefois négliger aucune des sciences qui
peuvent servir au développement de son
intelligence, et rendre son ministère
acceptable dans un siècle de progrès
et d'instruction.
Deux facultés de théologie sont
ouvertes à ceux de nos jeunes gens qui se
destinent au saint ministère en France.
L'une est située à Montauban, l'autre
à Strasbourg.
Montauban, qui avait possédé une
école de théologie dès 1560,
doit à Napoléon 1er le
rétablissement de cette illustre
académie. Mon vénéré
père fut appelé, en 1809, à
jeter les premiers fondements de la nouvelle
institution et à en
présider le conseil pendant de nombreuses et
orageuses années.
La faculté de Strasbourg est plus
spécialement destinée à
l'instruction de nos frères de la confession
d'Augsbourg. Un auditoire français y est
cependant annexé ; nos jeunes
étudiants y sont convenablement
placés pour se familiariser avec la langue
et la littérature religieuse de
l'Allemagne.
Les jeunes gens qui se destinent au saint
ministère, après avoir reçu,
chez eux ou dans les collèges publics, les
connaissances nécessaires pour l'obtention
du grade de bachelier es lettres, sont admis dans
l'auditoire de philosophie annexé aux
facultés de théologie. Là ils
se livrent à de nouveaux travaux
préparatoires, à l'aide desquels ils
approfondissent les études de la philosophie
naturelle et rationnelle, les mathématiques,
la haute latinité, la littérature
grecque, et l'hébreu.
On exige, d'ordinaire, la prolongation des
études préliminaires pendant deux
ans. L'examen qui les termine, s'il est jugé
satisfaisant, admet l'étudiant dans
l'auditoire de théologie. Ici, il
reçoit pendant trois ou quatre ans des
leçons de théologie dogmatique, de
morale évangélique, de critique
sacrée, d'apologétique,
d'exégèse, d'histoire
ecclésiastique et d'hébreu.
À la fin de chaque
semestre, l'étudiant subit des examens qui
décident de sa promotion ou de son retard,
et, dans le cours de ses études, il s'exerce
à la prédication par la composition et la récitation de six
sermons sur
des textes de l'Écriture, qui
reçoivent la critique de ses condisciples et
de ses professeurs.
À la fin de la troisième
année, l'étudiant est admis à
subir ses dernières épreuves :
elles se terminent par l'obtention du grade de
bachelier en théologie. Pour y parvenir,
l'étudiant compose et fait imprimer une
thèse qu'il soutient en discussion publique
contre les attaques des étudiants de sa volée, de ses
professeurs, et
même de tout étranger qui
désirerait prendre part à ces
débats.
L'étudiant doit aussi composer et
réciter un sermon en quatre jours. Ces
épreuves terminées, l'étudiant
devient candidat au saint ministère. Lorsqu'il a atteint
l'âge de vingt-cinq
ans, et s'il continue à présenter
toutes les garanties morales convenables, il peut
se faire consacrer par une cérémonie
dont nous donnerons ailleurs une description
détaillée.
La consécration confère au candidat
le titre de ministre du saint Évangile, le droit de prêcher
l'Évangile
partout où le Seigneur l'appellera, et
d'administrer les sacrements selon les croyances et
les coutumes de l'Église
réformée.
Le ministre devient pasteur quand il a
été appelé dans une
Église et chargé de la conduite d'un
troupeau ; cet appel, ou vocation, est
proposé au nom de l'Église par le
conseil presbytéral, et l'élection
est faite par le consistoire, selon les formes
fixées par la loi. L'élection
achevée, le résultat en est soumis
à l'approbation du gouvernement, qui la
sanctionne par un décret. Une
cérémonie d'installation solennelle présente
définitivement le pasteur à son
troupeau.
Le reste est une vie de travaux, de
dévouement, d'épreuves et d'amour
dont Dieu seul connaît tout le secret...
Plût à Dieu que tout Israël fût prophète ! Nom., XI, 29.
La sacrificature, considérée comme
intercession efficace, autorité
suprême, est toute concentrée en
Jésus-Christ. Il l'exerce constamment et
directement par l'influence et l'opération
du Saint-Esprit qui agit dans les fidèles.
Si on la considère comme un
ministère, une
administration de la
vérité de l'Évangile et une
influence pastorale, bien qu'elle soit
spécialement confiée à des
hommes choisis et mis à part sous les titres
de ministres, pasteurs et docteurs, elle ne leur
est pas exclusivement dévolue, et sous
l'économie de l'Évangile, tous, c'est-à-dire tous les
croyants, grands
et petits, jeunes et vieux, pasteurs et
laïques, sont sacrificateurs et rois (1
Pierre, II, 9.).
Saint Paul compare l'Église à un
corps
(1
Cor., XII.) composé de
divers organes qui tous doivent, par leur action,
contribuer au bien général.
Une Église ne mérite ce titre
(assemblée) qu'autant que la vie et
l'activité se manifestent dans tous ses
membres. Toutefois Dieu ne veut pas qu'il y ait
confusion dans son oeuvre excellente, et s'il y a
des institutions qui règlent les
études et les fonctions des ministres, il
peut, il doit y avoir une discipline qui
règle aussi l'activité des
fidèles.
Le ministère laïque prend des formes
diverses selon les circonstances où il
s'exerce ; et nous trouvons des ministres de
Dieu dans les membres des consistoires, dans les
conseillers presbytéraux, qui maintiennent
l'ordre dans l'Église ; dans les
évangélistes, qui vont de lieu en
lieu porter le bon message de la Parole ; dans
les colporteurs de la Bible,
humbles et actifs chrétiens qui, sous le
regard protecteur de la loi,
pénètrent dans les derniers hameaux
de l'Empire pour y offrir le saint livre de
Dieu ; dans les instituteurs et les
institutrices des écoles ; dans les
directeurs des écoles du dimanche ;
dans les diacres et les diaconesses, qui offrent
des soins affectueux aux pauvres et aux
malades ; dans les écrivains qui
consacrent leur talent à la défense
de la vérité ; dans les hommes
distingués, qui composent et dirigent les
comités administrateurs de nos asiles et de
nos sociétés
chrétiennes ; dans les chefs de
famille, qui célèbrent chaque jour le
culte dans leur famille ; dans chaque
chrétien et dans chaque chrétienne,
qui « en temps et hors de
temps » exercent autour d'eux une
influence bénie pour étendre le
règne de Dieu dans les âmes.
Dans une Église bien réglée,
ce précieux ministère, exercé
par les laïques, ne vient point se substituer
au ministère régulier des
pasteurs ; il en devient l'auxiliaire et le
complément, chacun restant dans la position
spéciale que lui a assignée la
Providence.
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