Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

III

Les peines éternelles


Texte: Matthieu. XXX. 41.

Ensuite il dira à ceux qui seront à sa gauche: retirez-vous de moi, maudits, et allez dans le feu éternel, qui est préparé au Diable et à ses anges.


M. F. B. A.

Dieu n'a point cessé de donner des témoignages de ce qu'il est, en nous faisant du bien, en nous envoyant les pluies du ciel, et les saisons fertiles, et en remplissant nos cœurs de joie (Actes 14: 17). Il s'est révélé dans la Création et dans la Providence. Il s'y montre comme un père plein de bonté, qui a tout préparé pour ses enfants, qui a pensé et à leurs besoins et à leurs jouissances, qui les a prévenus, qui conserve, soutient et bénit l'ouvrage de ses mains. «Dieu est bon»: voilà la première voix que ce monde nous adresse.
Mais à mesure que nous étudions ses œuvres et ses voies, nous apercevons aussi autre chose derrière le premier plan. Ce ne sont pas toujours des bénédictions. Celui qui nous envoie des pluies bienfaisantes, est le même qui quelquefois occasionne une affreuse sécheresse. Celui qui nous envoie les beaux jours, les saisons fertiles, sait aussi revêtir les cieux de noirceur, faire entendre sa voix menaçante, lancer la foudre, et faisant des vents ses anges et des flammes de feu ses ministres (Hébreux 1: 4), c'est lui qui renverse ce qu'il a planté, et qui ravage ce qu'il a fait fleurir. Il étend sa main sur la terre: à côté de l'abondance il a placé la disette, à côté du calme, l'orage, à côté de la paix, la guerre, à côté de la santé, la maladie; et il ne se laisse pas plus sans témoignage par ses avertissements et par les coups de sa verge, que par ses bienfaits. Une autre voix s'élève donc de ce monde invisible, pour nous dire: «Dieu est sévère».

L'Écriture nous parle plus clair; elle nous dit plus positivement ce que la considération des œuvres et des voies de Dieu nous fait entendre. Qu'est-ce qui nous entretient d'une manière plus saisissante de sa bonté, de sa longue attente, de ses grandes compassions? Dieu est amour. L'amour de Dieu envers nous a paru en ceci, c'est que Dieu a envoyé son fils Unique dans le monde, afin que nous ayons la vie par lui. C'est en ceci que consiste cet amour, que ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais que c'est lui qui nous a aimés, et qui a envoyé son Fils pour faire la propitiation de nos péchés (Jean 4: 8-10).
Voyez quel amour le Père nous a témoigné, que nous soyons appelés enfants de Dieu
(1 Jean 3: 1).
Et avant notre texte:
Venez les bénis de mon Père; possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde.

Mais à côté de ces consolations, à côté des plus belles promesses, à côté des témoignages les plus éclatants de la bonté divine, se trouvent des paroles sévères, des menaces effrayantes, des sentences redoutables: Considérez donc, dit St Paul, la bonté et la sévérité de Dieu (Romains 11: 22): l’Éternel pitoyable, miséricordieux, tardif à colère, ne tient point le coupable pour innocent (Exode 34: 6-7). Notre Dieu est aussi un feu consumant (Hébreux 12: 29). C'est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant (Hébreux 10: 31).
Et au milieu de toutes les déclarations propres à faire frémir tout homme attentif, celles de notre texte paraissent les plus effrayantes. Jésus, le Sauveur, mais qui est aussi le Juge du monde, donne à ses disciples une idée du dernier jugement, et après avoir proclamé le bonheur
des bénis du Père, il ajoute, parlant de lui-même sous le nom de Roi. Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche: Retirez-vous de moi, maudits, et allez dans le feu éternel qui est préparé au Diable et à ses anges.

O Dieu! il nous est nécessaire de devenir comme des enfants, pour méditer tes menaces aussi bien que tes promesses. Rabaisse nos prétentions! fais parler nos consciences! ébranle nos âmes! afin qu'en toute simplicité, et pour échapper à la colère à venir, chacun de nous se réfugie dans les bras du Sauveur! Amen!


***


Un jour donc le Fils de l'homme viendra dans sa gloire avec tous les saints Anges; alors il s'assiéra sur le trône de sa gloire. Et toutes les nations seront assemblées devant Lui, et il séparera les uns d'avec les autres, comme un berger sépare les brebis d'avec les boucs, et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche (Matthieu 25: 31-33), et après avoir fait entrer les bénis du Père dans leur héritage, il dira à ceux qui seront à sa gauche: «Retirez-vous de moi.»

C'est là, M. F., une première indication du malheur des infidèles, L'éloignement de Christ.
L'homme créé à l'image de Dieu, est fait pour vivre en communion avec Dieu. Jugez en vous-mêmes, et dites-nous si les moments les plus heureux de votre vie n'ont pas été, dans le fond, ceux où votre âme avait cherché et trouvé le Seigneur, où vous éprouviez sa paix, où il remplissait votre âme?
Cette communion, cette paix avec Dieu, ne peut avoir lieu que par Jésus-Christ. Or le malheur des damnés consistera d'abord à être bannis de la présence de celui
qui est l'image du Dieu invisible, la marque empreinte de sa personne (2 Corinthiens 4: 4; Hébreux 1: 2); de celui dont le regard, dont la voix ranime, encourage, rassure, réjouit, transporte le fidèle; de celui par lequel seul nous pouvons avoir cette douce communion avec le Père.
Non seulement ils n'auront point cette paix qui a si souvent triomphé des souffrances, des angoisses, de la mort même; cette charité qui fait de l'obéissance un bonheur, de la prière un privilège, et qui rend le joug du Seigneur léger; mais encore la source de cette paix et de cette charité leur sera fermée: Jésus, qui est
la porte (Jean 10: 9), les repousse: Retirez-vous de moi. II faut dorénavant souffrir sans paix, vivre sans Dieu et sans espérance (Éphésiens 2: 12).

Maudits! ajoute le Sauveur. Quelle parole! M. B. A. F... C'est Jésus, la charité même, qui l'a prononcée.
Vous savez ce que c'est que bénir; c'est souhaiter du bien, souhaiter du bonheur.
Maudire est précisément le contraire, c'est souhaiter du mal, souhaiter du malheur.

Ces termes ont déjà beaucoup de force dans la bouche de l'homme. L'un exprime de la manière la plus douce, la plus religieuse, tout ce qu'un père peut souhaiter à ses enfants, un ami à son ami; et l'autre est l'expression la plus effrayante de l'inimitié. Mais que sont les vœux de l'homme, s'ils ne sont appuyés du Ciel?
Ce sont des paroles, et rien de plus. Faites des vœux pour la guérison de ce malade, vos vœux équivaudront-ils à cette parole: emporte ton lit et marche (Marc 2: 9)? Vous pouvez maudire votre semblable: votre malédiction ne le tue, ni ne le dépouille de ses biens. Mais il n'en est pas ainsi des bénédictions et des malédictions du Seigneur. Il ouvre et personne ne ferme, il ferme et personne n'ouvre (Apocalypse 3: 7).

Souhaiter et effectuer est pour lui une seule et même chose. Bénir, c'est non seulement souhaiter le bonheur, mais le donner.
Maudire, c'est non seulement déclarer le malheur, mais le dispenser par une volonté souveraine; c'est une exécution.
Et si la malédiction sortie de la bouche de l'homme, quoique sans effet, et semblable, selon l'expression du Sage, à
l'oiseau qui vole çà et là (Proverbes 26: 2), nous fait quelquefois frémir d'horreur, que sera-ce, je vous prie, de la malédiction sortie de la bouche de Jésus?

Allez dans le Feu éternel. Le feu est celui des éléments qui peut produire sur les organes de notre corps l'impression la plus douloureuse. En sorte que l'idée de vives souffrances se trouve nécessairement liée à cette image. L'Écriture désigne en d'autres endroits ce malheur par d'autres images. Elle parle d'un ver rongeur, de liens éternels (Jude 6) et de ténèbres, de la mort seconde, de la perdition éternelle (2 Thessaloniciens 1: 9).

L'homme devant reparaître au jour du jugement en corps et en âme, il est naturel d'abord de conjecturer que le damné souffrira dans ces deux parties de lui-même. Il est parlé de la fournaise de feu, de l'étang ardent de feu et de soufre, de pleurs et de grincements de dents (Matthieu 13: 42), tout cela semble indiquer des souffrances du corps; mais c'est surtout la parabole du riche infidèle qui confirme cette pensée. Il est représenté dans le monde invisible, au milieu des tourments; et le terme employé pour les désigner, s'applique aux maladies aiguës, à la torture, aux douleurs de l'enfantement. Il s'écrie: Père Abraham , aie pitié de moi et envoie Lazare , afin qu'il trempe dans l'eau le bout de son doigt, pour me rafraîchir la langue, car je suis extrêmement tourmenté dans cette flamme (Luc 16: 23).

Si par la direction de Dieu, l'expérience vous a appris ce que c'est que de souffrir; si vous connaissez les ardeurs et les transports de la fièvre; si vous avez senti le feu ou le fer; si vous avez éprouvé quelque déchirement intérieur ou extérieur; si vos nerfs ont été violemment ébranlés et irrités: faites - vous une idée de ces souffrances.
Et lors même que la Parole de Dieu ne les annoncerait pas, lors même que ce feu et ce ver ne représenteraient que les douleurs de l'âme; on pourrait en conclure les souffrances du corps. Lorsque l'âme est agitée, éperdue, angoissée, par l'effet d'un lien mystérieux, ce corps grossier qui la renferme en éprouve le contrecoup: que sera-ce, M. F., dans un
corps spirituel (1 Corinthiens 15: 44)? Combien cette terrible harmonie de souffrances sera plus étroite et plus intime!

Les LIENS indiquent l'assujettissement à ces maux, la captivité sous l'empire du mal, la langueur, l'oppression.
Les TÉNÈBRES sont une image de la tristesse, des terreurs, du désespoir. Le maudit sera au milieu de ses peines sans force pour les soutenir, sans vue de Dieu, sans paix, sans joie, sans espérance.
Daniel nous apprend qu'il
ressuscitera pour un OPPROBRE et une infamie éternelle (Daniel 12: 2).

Il est une espèce de honte qui tient à la charité; celle-là sera inconnue dans les ténèbres du dehors. Mais il est une honte qui tient à l'égoïsme; c'est ainsi qu'on est honteux de n'être pas trouvé conséquent, honteux d'être dégradé, honteux d'être méprisé, et de l'être à juste titre: c'est celle qu'on y trouvera. Alors les infamies seront manifestées, alors les péchés divers paraîtront en plein jour, dans toute leur noirceur, avec toutes les circonstances qui les ont aggravés; alors les motifs impurs, les vertus hypocrites seront démasqués; alors les damnés, rebut de la Création, objets d'horreur pour tout être qui sera en communion avec Dieu, diront aux montagnes: tombez sur nous, et aux coteaux: couvrez-nous (Apocalypse 6: 16).

À cela se joindra, non la vraie repentance, car l'Écriture nous donne à entendre qu'il sera impossible que ces malheureuses créatures soient renouvelées à repentance (Hébreux 6: 6) mais le REPENTIR. Ce seront, non des David, non des St Pierre, pleurant amèrement leurs infidélités, mais des Judas prêts à s'étrangler, si c'était possible.

Ce ver qui les rongera indique aussi les regrets, les remords de la conscience.
Dans la vie présente le pécheur est distrait, oublieux, passionné. Une foule de choses lui font oublier, ou lui aident à oublier son iniquité. Il se flatte en lui-même, il se promet du bonheur, et les choses visibles favorisent très souvent ses funestes illusions. - Ce n'est que quand il a consommé quelque crime, quand il a fait quelque chute grave, lorsque le feu de la passion est tombé, qu'il crie quelquefois au-dedans de lui avec angoisse:» J'ai péché!

«Mais, M. F., dans l’étang ardent de feu et de soufre, que sera-ce?

Qu'est-ce qui pourra lui faire oublier ses forfaits?
Où seront les richesses?

Ou seront les honneurs?

Où seront les plaisirs et les affaires?

Où seront les jouissances de famille?

Où seront les consolateurs?

Ramené toujours sur lui-même, n'apercevant autour de lui que la fumée des tourments, et loin de lui que le bonheur dont il sera privé, toujours il retrouvera son péché. Vous savez, M. F., et quelques-uns de nous le savent peut-être par expérience, combien sont amers déjà dans ce monde les regrets que nous occasionnent quelquefois les suites de nos péchés. Quelle douleur profonde que celle d'une personne qui, en suite de quelque accès de passion, de quelque faiblesse, de quelque timidité, de quelque négligence, se voit privée ou de sa santé, ou de sa fortune, ou de son honneur, ou de quelqu'un des objets qui lui sont chers!
Plus les conséquences en sont affreuses, plus les regrets sont cuisants. On se dit alors: «O si j'avais été plus attentif! «O si j'avais pensé aux conséquences! O si j'avais écouté les «conseils! O si j'avais pris des précautions!»...
Que sera-ce donc au milieu des angoisses de l'âme dans
la géhenne du feu?
Ne vous semble-t-il pas, M. F., voir ouvrir, et entendre lire ce rouleau, dont parle un prophète, qui était écrit
dedans et dehors, et où il y avait des lamentations, des gémissements et des malédictions (Ézéchiel 2: 9-10)?
«O si j'avais pensé à mon âme, à la
seule chose nécessaire (Luc 10: 42)! 

O si j'avais fait ma paix avec Dieu!
O si j'avais voulu écouter et comprendre ce qu'on me disait!
O si j'avais lu la Parole de vie!
Si j'avais été vigilant!
Si j'avais cru mon père, ma mère, mon frère, mon enfant, mon pasteur!
Si j'avais suivi les bons exemples!
Si j'avais aperçu la vanité du monde!
Je me suis perdu moi-même, quand tout était prêt pour me sauver!»...
Quelle mort que cette
mort seconde (Apocalypse 20: 14) !..

C'est dans le feu préparé au DIABLE et à ses anges que Jésus envoie les maudits. C'est à celui avec lequel ils ont été en communion qu'il les adresse. Leur malheur consistera donc non seulement à être éloignés, privés de Dieu, séparés de Christ, mais encore à se trouver dans la compagnie de l'ennemi de Dieu, de l'adversaire et de ses anges. Satan, les anges rebelles, et les maudits eux-mêmes qui, dans le fond, auront été ses ministres et ses enfants (Jean 8: 44), formeront cette horrible société.
Dans ce monde la société des méchants peut plaire, on va jusqu'à se trouver bien de la communion de Satan. Il y a des hommes qui s'associent pour voler, pour opprimer. Il en est qui s'entendent pour tromper et pour médire. Mais cette association ne peut satisfaire chacun de ses membres qu'autant qu'il est respecté des autres, et lorsqu'une fois le désordre à cet égard s'y introduit, elle ne présente que mécomptes.
Faibles images, M. F., de l'état de ceux qui auront toujours
été en empirant, séduisant les autres, et étant séduits eux-mêmes (2 Timothée 3: 13), et qui enfin se retrouveront les uns les autres dans une misère sans déguisement. La haine, la méchanceté, les reproches, la vue insupportable les uns des autres, seront le plus affreux supplice.

Ici on pourrait oublier les antécédents, oublier toutes les horreurs de ce séjour; l'idée d'une telle société serait par elle-même épouvantable. Supposez-les ensemble sans crainte de Dieu, sans principes, sans espoir, en un mot n'ayant rien à attendre d'autre et rien de plus à craindre: éteignez le feu, dissipez les ténèbres, chassez même les démons et ressuscitez l'infidèle tel qu'il est mort, revêtu de son propre caractère: que la beauté reparaisse avec ses attraits que la mort avait effacés, l'esprit avec ses saillies, la science avec toutes ses facultés, la politique avec toutes ses finesses: que tout cela reparaisse et revive sans Dieu, ce serait un enfer que ni souffre, ni ver rongeur, ni flammes ne sauraient surpasser (1). La convoitise, l'intérêt, la cruauté, les rivalités, la haine, la jalousie, la rage, la fraude, la perfidie, seraient, sans même que Dieu y intervint par sa puissance, le plus douloureux supplice. Mais ne retranchez rien, M. F., additionnez au contraire tout ce que vous venez de voir, avec tout ce que vous pouvez connaître de la misère, vous n'approcherez pas plus de l'idée des peines éternelles, que l'idée d'un festin avec tout ce qu'il pourrait offrir de délicieux n'approche du bonheur de la vie éternelle.

Enfin le dernier trait que nous considérerons dans les paroles de Jésus, c'est le plus terrible, c'est celui dont l'idée seule fait frémir. Allez au feu éternel.
Ces peines seront éternelles!
On dit que nous ne saurions nous faire une idée de l'éternité. Cela est vrai, M. F., à quelques égards; cependant il faut convenir que ces mots, point de fin, nous communiquent une idée claire. Sur ce sujet, M. F., tout a été dit (
2).

Représentez-vous une nuit d'insomnie ou de fièvre brûlante; représentez-vous une longue maladie, de longues privations, au milieu de longues difficultés; supposez que les mois, que les années s'écoulent sans en amener le terme; supposez que ce terme se recule sans cesse; combien ce fardeau qu'il faut porter si loin, nous pèse!
Mais qu'est-ce que cela en comparaison des souffrances du damné?
Les maux de ce monde ont un terme; la maladie se termine par la convalescence; les privations, les difficultés ne durent pas toujours; dans tous les cas, le moment vient où toutes ces choses ont passé; le sommeil de la mort y met fin. Mais ici c'est «
toujours, toujours! jamais, jamais!»
C'est un voyageur blessé, accablé d'un pesant fardeau, harcelé par les larrons, qui marche, marche vers le but de son voyage, mais en vain, car la route avance avec lui. Si dans les premiers âges du monde, avant Jésus, avant David, avant Abraham, avant Noé et le déluge, Caïn ou l'un de ses fils eût été lié de chaînes, livré à d'affreuses tortures, et tourmenté sans relâche jusqu'à ce jour où je vous parle, ce ne serait rien, absolument rien, en rapport avec l'éternité.
Calculs, additions, multiplications, milliers et milliers, millions et millions de siècles entassés, accumulés, redoublés, rien n'en approche. Ici, M. F., la pensée humaine se perd, et le cœur succombe sous le poids de cette sentence:
Allez au feu éternel!


***


M. F.! C'est le cœur du croyant qui succombe de la sorte sous le poids de la sentence de Christ; mais il est des cœurs qui se soulèvent, qui se révoltent contre cette pensée; il est des esprits qui voudraient trouver dans la raison la sanction de ce que Dieu déclare; et il faut avouer que cette incrédulité est souvent réunie à des sentiments vrais, charitables dans leur intention, mais qui ne sont pas réglés par la Parole.

Quoi qu'il en soit, un des mouvements des âmes qui résistent à cette doctrine, c'est de la repousser comme une doctrine barbare.
Il semble à les entendre que c'est cette doctrine qui va les rendre malheureux; il semblerait qu'elle n'est pas une instruction ou un avertissement dans la bouche de celui
qui la prononce, mais un vœu cruel dont on est offensé.
On oublie que c'est Jésus-Christ, modèle de douceur, de patience, de miséricorde, qui a prononcé le plus clairement, le plus distinctement cette vérité atterrante.
On oublie qu'il y a deux espèces de charité et deux espèces de barbarie, une vraie et une fausse.

Le monde s'y trompe, il appelle souvent l'amour cruauté, et la cruauté amour. Lequel serait barbare de celui qui connaissant un de ses semblables atteint d'une redoutable contagion, chercherait à le lui déguiser, à le lui faire oublier, ou de celui qui lui déclarerait son mal en lui disant: «Vous êtes mortellement atteint! «hâtez-vous; si vous n'employez pas tel ou tel remède, vous «êtes perdu!»...
Le ministre du Seigneur qui, venant préparer le condamné dans sa prison, lui parle de la sentence prononcée contre lui, serait-il donc cruel de le faire? Cette condamnation est un fait qu'il ne crée point par ses paroles, mais auquel il voudrait l'arracher.


Or, M. F., voici cette prison: Le Juge est à la porte (Jacques 5: 9) , il attend pour faire grâce; mais le jugement est prêt.
Ne confondez point la cruauté de ces prophètes, qui disaient
paix, paix, où il n'y avait point de paix (Ézéchiel 13: 10), avec la charité d'Ézéchiel lorsqu'il disait au nom de l'Éternel: Je répandrai sur eux mon indignation, et je les consumerai par le feu de ma colère (Ézéchiel 22: 31). Et pourquoi ces menaces, pourquoi ces appels à la conscience, si ce n'est afin que pendant qu'il en est temps encore, les âmes échappent à ce grand malheur?
Insistera-t-on? Dira-t-on que l'idée de ces peines éternelles ne
s'accorde pas avec la bonté de Dieu?

Nulle part, M. F., les châtiments éternels ne sont présentés dans l'Écriture comme un effet de la bonté de Dieu, mais ils sont présentés comme un effet de sa justice, qui est si hautement proclamée et par notre conscience et par l'Écriture.
Ni le déluge, ni la destruction des quatre villes de la plaine, ni la destruction des Cananéens, ni les malheurs d'Israël, ni les fléaux qui ont dès lors frappé tant de peuples et tant de générations, ne peuvent mieux s'accorder à tous égards avec la bonté de Dieu: ce sont là des effets de sa justice. D'ailleurs, si le fait était incompatible avec la bonté de Dieu; la déclaration de ce fait, la sentence même ne le serait pas moins. Que ferez-vous 
donc?
Rejetterez-vous la sainte Écriture?
Direz-vous des mensonges pour plaider la cause du Dieu fort (Job 13: 7-8)?
Voudrez-vous être meilleurs que Jésus-Christ lui-même?
Oublierez-vous qu'il se montre sous deux qualités, comme Sauveur et comme Juge, et que c'est en lui seul et par lui seul que peuvent se concilier la justice et la bonté de Dieu.

Et avec cette justice peut-on concilier l'idée des peines éternelles? Est-il juste de condamner à un châtiment sans fin les fautes de quelques années?
D'abord il n'y a rien de contraire à la justice à ce qu'une faute d'un moment serait punie
dans une espace de temps plus long. Une menace sévère dépend quelquefois de la facilité à commettre la faute, d'autres fois de la nécessité absolue de l'obéissance, d'autres fois de la gravité du péché, d'autres fois encore de la dignité de celui qui défend.

Vous trouvez injuste de punir ainsi le péché; mais savez-vous bien ce que c'est que le péché?
En avez-vous à tous égards une véritable horreur?
Comprenez-vous bien tout ce qu'emporte avec soi cette circonstance qu'il soit commis contre Dieu, et par un être destiné à vivre toujours?
St Paul au lieu d'admettre une pareille idée, tranche en quelque sorte la question en ces termes:
Dieu n'est-il pas injuste quand il punit? Je parle comme les hommes. Loin de nous cette pensée! Si cela était, comment Dieu jugerait-il le monde (Romains 3: 5-6)?
Et Asaph nous apprend que
les deux annonceront sa justice, parce que c'est Dieu qui est juge (Psaume 50: 6). Cette raison leur suffisait; ils n'en voulaient pas d'autres: C'est Dieu qui est juge.

D'ailleurs qu'on ne raisonne pas comme si, d'un autre côté, ces peines n'étaient pas proportionnées à l'état des pécheurs. L'Écriture nous fait entendre qu'il y aura des degrés. Jésus nous dit lui-même que le serviteur qui aura connu la volonté de son maître et ne l'aura pas faite, sera battu de plus de coups (Luc 12: 47), il déclare que ceux de Sodome seront traités moins rigoureusement que Capernaüm au jour du jugement (Matthieu 11: 24), il annonce aux Scribes et aux Pharisiens hypocrites qu'en dévorant les maisons des veuves, tout en affectant de faire de longues prières, qu'à cause de cela, dis-je, ils seront punis d'autant plus sévèrement (Matthieu 23: 14).

Du reste, n'est-il pas de la justice, que la loi s'exécute: que cette conscience qui ne promet rien au pécheur ait sa sanction: que la menace prononcée par le Souverain s'accomplisse?
Dieu ne promet-il pas aussi un bonheur éternel; n'est-il pas juste que cette offre soit telle, que celui qui ne la veut pas, tombe nécessairement dans un malheur éternel?
Serait-il juste qu'ayant établi un moyen de grâce, il accordât cette grâce à ceux qui l'auront méprisée? Non! Toutes ces réflexions nous font entrevoir des exigences de la justice divine telles que notre raison ne saurait y fixer de bornes.

Direz-vous que l'homme est un être capable de se perfectionner? que l'idée des peines éternelles serait contraire à celle-là, et que ce qui ne se fait pas ici, à l'égard de la sanctification, se fera ailleurs?
Voilà ce qu'on affirme; mais il faudrait le prouver. Il faudrait présenter des promesses claires de Dieu qui disent au pécheur: «Si dans l'économie actuelle tu ne profites pas des moyens qui te sont offerts pour ton salut, il s'en offrira de nouveaux dans une autre.»
Où se trouve dans toute l'Écriture un tel passage?

L'expérience nous apprend que si l'homme peut se perfectionner en bien, il peut aussi se perfectionner en mal: le premier pas ne se fait guère sans hésitation et sans combat; mais, une fois lancé dans la carrière du mal, l'homme s'enhardit. Tel homme est mort sur un échafaud qui peut-être a rougi de ses premiers vols, de ses premiers mensonges. On sait par l'histoire de l'humanité qu'une fois qu'un homme a jeté le masque, il n'y a plus de bornes à ses passions, il avance d'impudicités en impudicités, de forfaits en forfaits, d'effronterie en effronterie, d'avarice en avarice, d'aveuglement en aveuglement; il devient zélé, industrieux à commettre l'iniquité, rien ne l'arrête, rien ne le frappe; il ne reçoit instruction de rien: les épreuves par lesquelles le Seigneur le visite, ne soumettent point son cœur, elles ne font qu'irriter sa méchanceté.
Qu'est-ce qui nous assure donc que l'âme de l'infidèle entrée une fois dans l'éternité, montera cette échelle au lieu de la descendre d'étages en étages?
Et puisque, entouré des bienfaits de Dieu, il reste dans l'endurcissement, que serait-ce, lorsque, sans aucune consolation, il sera châtié de sa verge?
Si l'éducation laisse des traces ineffaçables, quelles seront celles de cette éducation qu'on nomme la vie présente?
Évoquez l'âme du traître Judas pour vous dire les progrès qu'il a faits depuis le jour de désespoir où il s'est donné la mort !.. Voici ce que dit le Père Abraham en parlant des endurcis de ce monde:
Ils ont Moïse et les prophètes, qu'ils les écoutent. Que s'ils n'écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne se convertiront pas, quand même l'un des morts ressusciterait (Luc 16: 29-31). C'est un progrès dans l'incrédulité.
St Paul nous dit
qu'après la mort suit le jugement, et que chaque homme sera jugé suivant le bien ou le mal qu'il aura fait, étant dans son corps (2 Corinthiens 5: 10). Il n'y a là aucun progrès, aucune amélioration future annoncée. Et il faut en convenir, l'impression de l'Évangile est très distincte sur la nécessité de saisir le temps actuel le jour d'aujourd'hui. Je m'en vais, dit Jésus, et vous me chercherez, et vous mourrez dans vos péchés (Jean 8: 21).

La lumière est encore avec vous pour un peu de temps, marchez, pendant que vous avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous surprennent; car celui qui marche dans les ténèbres ne sait où il va. Pendant que vous avez la lumière, croyez à la lumière, afin que vous soyez des enfants de lumière. Jésus dit ces choses; puis il s'en alla et se cacha d'eux (Jean 12: 35-36).

Aujourd'hui si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs (Hébreux 3: 7-8; 4: 7).

Et si les reprouvés pouvaient faire des progrès dans une autre économie, par qui serait-ce, sinon par Jésus? Et c'est Jésus qui les repousse: Retirez-vous de moi, maudits!

Mais nous nous lassons de raisonnements; nous sentons le besoin d'un guide là-dessus; il faut en revenir à la Parole, et c'est sur le sens des textes que porte la question.
On joue sur le mot ÉTERNEL, si je puis m'exprimer ainsi. On dit que ce mot est quelquefois employé pour indiquer un siècle, une longue durée, et que c'est le sens de ce mot dans les passages qui concernent les peines à venir. C'est précisément ce qu'il faudrait prouver; car on ne peut pas nier que le même mot ne soit aussi employé dans l'Écriture pour indiquer l'éternité, comme par exemple lorsque Dieu dit de lui-même: Je suis vivant éternellement (Deutéronome 32: 40), ou dans ces paroles de St Paul: Les choses visibles ne sont que pour un temps, mais les invisibles sont éternelles (2 Corinthiens 4: 18).

Je le demande donc, dans quel sens faut-il entendre ces paroles: Allez au feu éternel?
C'est par d'autres passages de l'Écriture sur ce sujet que nous l'expliquerons. Dans le même discours du Seigneur
, nous trouvons encore ces paroles: Et ceux-ci iront aux peines éternelles, mais les justes iront à la vie éternelle.

Ne serait-ce pas absurde de soutenir que cette vie, ce bonheur ne durera pas toujours? qu'il aura une fin?
Pourrait-on dans ce cas l'appeler
la vie éternelle?

Cette fin ne transformerait-elle pas le bonheur en malheur?

Aussi personne, à ce que je crois, ne prétend que le bonheur des justes doive prendre fin. Si donc on explique ÉTERNEL par ces mots: sans fin, lorsqu'il s'agit de la vie, par quoi est-on autorisé à les traduire autrement dans la même phrase, lorsqu'il s'agit des peines éternelles?

Ce mot: ÉTERNEL n'est-il pas suffisamment et clairement expliqué par d'autres passages relatifs au même sujet?
Comme il est dit que c'est à Dieu
qu'appartient le règne, la puissance et la gloire aux siècles des siècles, ainsi il est dit: la fumée de leur tourment montera aux siècles des siècles... ils n'auront aucun repos ni jour ni nuit (Apocalypse 14: 11). Jésus répète solennellement trois fois en parlant du feu de la géhenne, ces mots:le ver ne meurt point, où le feu ne s'éteint point (*c 9: 43-48).
Il met dans la bouche d'Abraham cette réponse au riche qui implore une goutte d'eau:
Il y a un grand abîme entre vous et nous, de sorte que ceux qui voudraient passer d'ici vers vous ne le peuvent, non plus que ceux qui voudraient passer de là ici (Luc 16: 26).
Or je le demande à tout homme qui cherche dans la Bible non ses propres idées, mais la pensée du Seigneur, quel est d'après cela le sens de ces paroles:
Les méchants iront aux peines éternelles?

L'esprit de l'homme est ingénieux à trouver des faux-fuyants. Il n'en est peut-être pas de preuves plus frappantes que la tentative de se rassurer au sujet des peines éternelles par un des passages les plus effrayants que renferme l'Écriture: Si quelqu'un a parlé contre le fils de l'homme, il pourra lui être pardonné mais celui qui aura parlé contre le Saint-Esprit, n'en, obtiendra le pardon ni dans ce siècle, ni dans celui qui est à venir (Matthieu 12: 32). Il est parlé ici d'un péché qui ne sera point pardonné, par conséquent évidemment de peines éternelles; et cependant parce qu'on aperçoit qu'il est question de pardon dans ce siècle et dans celui qui est à venir, on en conclut qu'il n'y aura pas de peines éternelles. Comme si pour obtenir le pardon et dans ce monde et dans celui qui est à venir, il ne fallait pas être uni à Jésus-Christ; et nous voyons par ses propres paroles que ce bonheur n'appartiendra point aux maudits, puisqu'il leur dira: Retirez-vous de moi.

Ne leur ayant point pardonné dans ce siècle, il ne leur pardonnera pas dans celui qui est à venir. C'est ce que Marc explique en ces mots: jamais de pardon, condamnation éternelle! (Marc 3: 29)
Et l'Épître aux Hébreux établit cette idée comme appartenant au fondement de la doctrine, ajoutant aux premiers principes de cette doctrine
la résurrection des morts, et le jugement éternel (Hébreux 6: 2).
Que dit-on encore?
Comme tous meurent en Adam, tous revivront par Christ (1 Corinthiens 15: 22). De là on tire la conclusion que comme le péché appartient à tous les hommes, de même la grâce leur appartiendra un jour à tous; par conséquent que les peines des damnés finiront.

Ne séparez pas, M. F., ces paroles de ce qui les suit, et les explique. Paul après avoir dit: tous revivront par Christ, ajoute: mais chacun en son propre rang. Il est bien certain que tous revivront fidèles ou infidèles, mais les uns en résurrection de vie et les autres en résurrection de condamnation (Jean 5: 29), comme dit le Seigneur (3).
Ceux qui expliquent ainsi la parole conviendront que ce n'est point là la première impression qu'elle fait sur les esprits. Récitez à l'enfant, au simple, les passages frappants qui établissent l'éternité des peines, et demandez-leur si ces peines finiront: leur réponse n'est pas douteuse. Ce n'est qu'après avoir philosophé; subtilisé, qu'on en vient à chercher des issues et des commentaires.
On voudrait concilier la Parole avec les vues humaines
; on se flatte d'y réussir. Mais les voies de l'Éternel ne sont pas nos voies; ses pensées ne sont pas nos pensées (Ésaïe 55: 8).
Que ceux qui subtilisent sur quelques passages égrenés, pour appuyer la doctrine d'un rétablissement final et universel, malgré l'évidence d'un si grand nombre d'autres, se demandent à eux-mêmes si ce n'est pas là tordre les Écritures, lors même qu'on n'en aurait pas directement l'intention, plutôt que les expliquer en toute simplicité.

«Quel plaisir prenez-vous à nous désespérer?» dira-t-on. «Il est inutile de prêcher cela; c'est la charité qui doit nous conduire, et non la crainte.»

Dites-le à Christ qui, en plusieurs occasions diverses, a mis en avant la même doctrine et qui s'exprime le plus fortement là-dessus. Ceux qui croient n'avoir pas besoin de cet avertissement, ignorent encore leur propre misère et la corruption de l'homme. Aux grands maux il faut de grands remèdes. Il faut mettre un frein aux passions qui ont tant d'empire. Il faut rendre sérieuse la légèreté de notre nature. Pour cela il faut faire entendre les tonnerres de Sinaï. Il faut montrer les souffrances des réprouvés et dire qu'elles seront sans espoir et sans fin. Il faut cela pour amener les âmes à Celui qui seul peut leur faire connaître la charité. Oui, il est nécessaire de rappeler cette effrayante vérité; il faut qu'un pasteur avertisse quelquefois les âmes qui lui sont confiées, à la lueur des flammes éternelles. C'est ce qui les effraiera peut-être à salut; c'est ce qui rompra tant de liens qui les retiennent; c'est ce qui leur fera comprendre le sens de ces paroles: Une seule chose est nécessaire (Luc 12: 30).

Que donnerait l'homme en échange de son âme (Marc 8: 36)? Et lors même que nous nous tairions sur ce danger, en seriez-vous, je vous prie, délivrés par notre silence?
Pourquoi tiendrions-nous sous le boisseau une vérité qui nous est révélée avec cette importance?
Une vérité qui, toute effrayante qu'elle est, ne laisse pas de faire naître les plus beaux fruits de zèle et de reconnaissance.

Il est des hommes qui ne veulent pas des raisons et qui répondent, soit ouvertement, soit en eux-mêmes, à tout ce qu'on peut leur dire là-dessus: «Je ne puis le croire.»

M. F., ces dénégations détruisent-elles la vérité?
Regardez-vous le Seigneur comme un père ou une mère inconsidérés qui font à leurs enfants des menaces mensongères pour les faire obéir?
Toi qui dis ne pouvoir admettre que l'Éternel inflige à ses sujets rebelles des châtiments éternels, es-tu bon juge en cette matière?
Dans un tribunal humain on fait retirer les parties intéressées. On n'admet pas à décider une cause celui qui est en même temps partie. Si quelque saint ange qui n'eût jamais péché contre son Souverain, venait nous dire: «Non, il m'est impossible de croire que Dieu punisse de la sorte la désobéissance de ses créatures,» ces paroles pourraient produire quelque impression.
Mais toi qui es atteint de la maladie du péché, toi qui es accoutumé à le voir et en toi-même et hors de toi; toi qui, peu jaloux de la gloire de Dieu, prendras facilement la cause du pécheur contre son Juge; que diras-tu?
Que signifient tes discours?
Tu n'es pas neutre et tu voudrais décider la chose comme par impétuosité de sentiment.
Tes intérêts personnels, tes affections pour autrui, ta conduite même, s'opposent dans ton âme à la conviction, et ferment ton oreille aux déclarations de l'Écriture.
Comment cette doctrine effrayante et sévère s'accorderait-elle avec la crainte du monde qui t'empêche de travailler à l'avancement du règne de Dieu, de te décider à te montrer ouvertement, à résister au torrent du mal et des erreurs, à proclamer la vérité?
Comment la pensée du malheur éternel s'accorderait-elle avec l'usage que tu fais de ton temps et de ton argent, avec tes profusions et ta mondanité, avec ta sécurité, ton insouciance, ton indolence, pour tout ce qui ne touche pas aux affaires de ce monde?
On comprend bien que tu ne saurais y croire; bien plus, si tu soutenais cette doctrine; on pourrait douter de ta sincérité. Mais c'est précisément pour cette raison que ton sentiment particulier ne saurait entrer dans la balance.

Nous avons bien besoin de courage en Dieu pour oser lever la langue sur ce sujet, vu notre propre intérêt qui le combat, et pour espérer d'en convaincre ceux auxquels nous prêchons. Toutefois s'il y a ici quelqu'un qui résiste encore aux déclarations de l'Écriture: en qualité de ministre et d'ambassadeur de Christ, je le prends à témoin en face de cette assemblée, qu'il a été sérieusement averti du danger; je me déclare net de son sang, et je lui donne rendez-vous au tribunal de mon Maître. On saura, dit l'Éternel, quelle parole tiendra, ou la mienne ou la leur (Jérémie 44: 28; Ézéchiel 2: 7; 3: 27; 7: 27).

***

Il est donc vrai pour ceux qui admettent l'Évangile en simplicité, qu'un jour une portion de l'humanité sera mise à la gauche de Christ, qu'elle sera rejetée de Lui, maudite, envoyée à des supplices sans fin, dans la société des anges rebelles.

De quels hommes sera-t-elle composée?
Ce sera d'abord, d'après ce que nous enseigne notre texte, de ceux qui n'auront pas eu d'amour pour les
plus petits des frères de Jésus, c'est-à-dire pour les chrétiens, et qui n'auront pas témoigné cet amour par des œuvres; ceux qui ne leur auront pas donné à manger lorsqu'ils avaient faim, à boire lorsqu'ils avaient soif; ceux qui ne les auront pas recueillis lorsqu'ils étaient étrangers, vêtus lorsqu'ils étaient nus, visités lorsqu'ils étaient en prison et malades. Ce seront les pécheurs désignés par ces paroles:

Ne savez-vous pas que les injustes n'hériteront point le royaume de Dieu? Ne vous abusez point, ni les impurs, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les abominables, ni les larrons, ni les avares, ni les ivrognes, ni les médisants, ni les ravisseurs n'hériteront point le royaume de Dieu (1 Corinthiens 6: 9-10).

Les œuvres de la chair sont manifestes, savoir: l'adultère, la fornication, l'impureté, la dissolution, l'idolâtrie, l'empoisonnement, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les disputes, les divisions, les hérésies, les envies, les meurtres, l'ivrognerie, les débauches, et les choses semblables dont je vous dis, comme je vous l'ai déjà dit, que ceux qui commettent de telles choses, n'hériteront point le royaume de Dieu (Galates 5: 9-21).

L'Apocalypse ajoute encore aux héritiers de la malédiction les timides, les incrédules, tous les menteurs, quiconque aime la fausseté et la commet (Apocalypse 2: 8; 22: 15).
À ceux-là se joignent aussi ceux qui sont
endormis, qui méprisent les Puissances, et parlent mal des dignités, qui parlent mal de tout ce qu'ils ne connaissent pas, qui se corrompent en tout ce qu'ils savent naturellement; ceux qui ne font que murmurer, qui se plaignent toujours, qui marchent suivant leurs convoitises, qui prononcent des paroles d'orgueil, et qui admirent pour leur profit les personnes qui ont de l'apparence, tous ceux qui pèchent volontairement après avoir reçu la connaissance de la vérité (Jude 8: 10-16; Hébreux 10: 26).

En un mot le Fils de l'homme enverra ses anges, qui ôteront de son royaume tous les scandales, et ceux qui commettent l'iniquité, et ils les jetteront dans la fournaise ardente; c'est là qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents (Matthieu 13: 41-42).

Enfin il y a des sentences générales qui indiquent collectivement la troupe des réprouvés. Ce sont ceux qui ne connaissent point Dieu et qui n'obéissent pas à l'Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ (2 Thessaloniciens 1: 8)

Qui croit au Fils a la vie éternelle; qui ne croit pas au Fils ne verra pas la vie, maïs la colère de Dieu demeure sur lui (Jean 3: 36)

Quiconque ne fut pas trouvé écrit dans le livre de vie, fut jeté dans l'étang de feu (Apocalypse 20: 15).

Et vous qui m'écoutez, serez-vous à la droite ou à la gauche de Jésus-Christ?
Il y a mille chemins pour se perdre, il n'y en a qu'un pour se sauver.

Je suis le chemin, la vérité et la vie, dit Jésus; nul ne vient au père que par moi (Jean 14: 6).

L'avez-vous trouvé ce chemin?
Y êtes-vous?
Demandons-nous à nous-mêmes: Serai - je du nombre des maudits?
Si vous répondez: non; sur quoi ce non est-il fondé?
Savez-vous que la marche naturelle de l'homme, et par conséquent votre marche naturelle est vers la perdition?
Que la porte large et le chemin spacieux mènent à la perdition? et qu'il y en a beaucoup qui y entrent: mais que la porte étroite et le chemin étroit mènent à la vie et qu'il y en a peu qui le trouvent (Matthieu 7: 13-14)?
Savez-vous que
si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu (Jean 3: 3)?

Votre conscience ne vous dira-t-elle point: «Le disciple de Christ, l'enfant de Dieu, l'héritier du royaume, doit être autre chose que ce que je suis?»
Êtes-vous exempts d'impureté, d'avarice, d'idolâtrie, d'inimitiés, de jalousies, de disputes, de dissolution, d'hypocrisie, de mensonge, d'orgueil, de lâcheté, d'incrédulité, de sommeil, de murmures, en un mot de tout ce qui mène à la mort seconde?
Prenez-garde de vous tromper vous-mêmes; il n'y a que le chrétien qui, ayant dépouillé
sa propre justice, et s'étant revêtu par la foi de la justice de Dieu (Romains 10: 3-4), puisse dire: j'ai la paix avec Dieu (Romains 5: 1), je suis d'entre les bénis du Père.

Direz-vous peut-être: «j'espère bien échapper au malheur «éternel?»
Permettez-moi, M. F., de vous demander sur quoi vous l'espérez?
Votre espérance est-elle l'espérance chrétienne?
S'il en est ainsi, elle est ferme, elle est certaine,
elle ne confond point (Romains 5: 5). Mais si c'est une espérance sans véritable paix, sans joie; «je l'espère» ne signifie autre chose que «je crains» ou «je doute.»
Y aurait-il besoin de vous prouver, M. F., qu'une telle espérance n'est rien?

de bonheur, de l'autre éternité de misère, et tu ne sais sur lequel tu te trouves, tu ne sais où aboutiront tes jours?
Comment peux-tu jouir de quelque paix, de quelque 
bonheur avant d'être assuré de ta route? Demain, que dis-je? Aujourd'hui tu peux être arrivé, et tu ne sais où tu aborderas! Quelle légèreté, quelle insouciance, quelle folie!...

Ah! M. F., que d'oeuvres, que de vies qui prouvent qu'on ne croit pas à l'éternité !... Combien y a-t-il de personnes dans ce temple qui craignent réellement les peines éternelles?
Si l'on en était persuadé, on vivrait autrement, on ne serait pas si durs aux avertissements de la Parole, on chercherait plus sincèrement et avec plus d'empressement le Seigneur, on ferait plus d'efforts pour le connaître, on estimerait bien autrement la nouvelle de l'Évangile et la grâce du salut. Nous pouvons en juger par la manière dont on s'occupe maintenant d'un danger probable qui nous menace (1). Si l'on craignait ainsi la colère à venir, ne saurait-on pas aussi en parler, répandre des ouvrages sur le moyen d'y échapper, envoyer des personnes au-devant du mal. Rien ne nous accuse plus d'incrédulité que ce qui se fait maintenant.


Non, cela n'est que trop évident, vous ne craignez pas la menace du Seigneur! Que faudra-t-il pour vous donner l'alarme?
Pourquoi ces cris: «au feu! au feu!» lorsqu'ils retentissent dans vos rues, vous causent-ils plus d'émotion que la menace du feu éternel? Ouvrez les oreilles! Écoutez attentivement! C'est ce que je crie à vos âmes.
Et n'y a-t-il pas une voix sourde et pourtant éclatante, une voix extraordinaire qui vient de loin, qui s'approche de plus en plus, et qui se joint à la mienne pour crier à cette génération:» la mort! la mort!»
Dispose de ta maison, car tu t'en vas mourir (Ésaïe 38: 1). Après la mort suit le jugement (Hébreux 9: 27).

Si vous croyez à l'enfer, M. F., si vos âmes en sont agitées, c'est quelque chose; mais ce n'est rien encore, à moins que vos regards ne se portent sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi (Hébreux 12: 2). Car ce n'est pas l'Enfer que le Seigneur prêche, c'est le Ciel.

Veuille-t-il y recevoir nos âmes. 

Ainsi soit-il!


1) For judgement to come an argument. Part. VII.

2) V. Saurin sur ce sujet.

3) Quant au passage Romains 11: 32, on ne peut, par les mêmes raisons et en l'examinant à la place qu'il occupe, l'entendre que des élus, dont il est question au chap. 7. C'est aux fidèles seuls d'entre les Juifs et d'entre les païens que les deux propositions que renferme le verset allégué, s'appliquent également. S'il s'agit des réprouvés, on ne peut leur appliquer que la première. Voyez le fondement de cette explication: Romains 5, 18.

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