Près de la ville de Gap, non loin de la
frontière sud-est de la France, au pied des
Alpes, existe un petit hameau à demi
caché sous les arbres et entouré de
vertes prairies émaillées de fleurs.
La Durance, qui descend en bouillonnant des
montagnes, passe près du village. À
la fin du quinzième siècle, les
Farelles, c'est le nom du hameau,
dépendaient d'un manoir dominant les
chaumières et habité par un seigneur
nommé Farel. On voit encore les ruines du
château et de sa haute terrasse
entourée d'un verger. Ce seigneur avait cinq
fils, Daniel, Jean, Jaques, Claude, Guillaume et
Gauthier, et une fille. Guillaume, qui parait avoir
été l'avant-dernier, naquit en 1489.
Le nid paternel de Guillaume Farel n'était
pas une retraite que ni troubles ni tumultes ne
pouvaient atteindre. Au contraire, les montagnes du
Dauphiné
n'étaient rien moins que paisibles. Les
vallées voisines du Piémont
étaient habitées par les Vaudois,
humbles montagnards qui obéissaient en
grande partie à la Parole de Dieu et avaient
souvent été persécutés
par les papes de Rome et leurs
suppôts.
Deux ans avant la naissance de Farel,
Innocent VIII ordonna que ce qui restait du
malheureux peuple des Vaudois, fût poursuivi
et exterminé. « Écrasez ces
hérétiques sous vos pieds,
s'écria le pontife, comme des serpents
venimeux. » Conformément à cet
ordre pastoral, les modestes demeures qui
abritaient le petit troupeau de Christ, furent
attaquées en 1488 et 89, par une
armée de dix-huit mille soldats, à la
tête desquels marchait le légat du
pape. Les malheureux Vaudois se
réfugièrent dans les cavernes et les
antres des rochers, mais les soldats les
poursuivirent de retraite en retraite, ne laissant
pas une forêt ou un vallon inexplorés
et couvrant le sol des victimes de celui qui
s'appelait le vicaire de Christ sur la terre. Ces
scènes sanglantes se passaient autour du
village des Farelles lorsque Guillaume naquit, et
ses parents ont dû en avoir connaissance,
mais ils ne paraissent pas avoir mis en doute que
les soldats du pape ne fissent l'oeuvre de Dieu;
ils avaient des oreilles pour ne pas ouïr, des
yeux pour ne pas voir. Du reste, les prêtres
n'affirmaient-ils pas que ces pauvres gens
étaient tous des sorciers et des magiciens,
qui se réunissaient avec les Juifs les nuits
de sabbat pour adorer le diable et commettre toute
sorte d'abominations. Les prêtres racontaient
encore que les Vaudois se rendaient à ces
sabbats nocturnes en chevauchant à travers
les airs sur le dos de monstres, ou bien assis sur
un manche à balai, en bois de bouleau,
franchissant ainsi de grandes distances avec la
rapidité de l'éclair.
C'étaient, ajoutait le clergé, ces
invocations des hérétiques au diable,
qui produisaient les mauvaises récoltes, les
épidémies et autres calamités.
« Mes parents, dit Farel, croyaient
à toutes ces choses. » Il nous est
difficile de comprendre que pareille folie et
pareille ignorance aient jamais existé. Et
pourtant il y a de nos jours bien des gens aussi
crédules que les Farel, qui mettent la
parole de l'homme à la place de celle de
Dieu et pensent faire acte de foi en acceptant les
inventions de l'homme. Il y a, par exemple, des
milliers de personnes qui croient encore qu'un
prêtre peut pardonner les
péchés, et qu'il suffit d'être
baptisé d'eau par un pasteur,
consacré par les hommes, pour être
né de nouveau. Cela nous paraît
peut-être moins absurde que de croire aux
sorciers voyageant dans les airs sur des manches
à balai, mais aux yeux de Dieu c'est tout
aussi condamnable, surtout de la part de ceux qui,
possédant la Bible, peuvent
s'éclairer. Nous devons avoir pitié
des Farel, car ils n'avaient que la parole de
l'homme, celle de Dieu leur était inconnue;
ils croyaient bien, mais leur foi était en
l'homme et non en Dieu, or le Seigneur Jésus
a dit: « Croyez en Dieu. » Cette
foi-là est la seule efficace
Guillaume était aussi
crédule que ses parents; on lui enseigna,
comme il le dit lui-même, à prier tant
de saints et d'anges, que son esprit devint comme
un temple d'idoles et qu'il était semblable
à un calendrier ambulant des jours de saints
et de jeûnes. Guillaume apprit en outre les
merveilleuses légendes de ces saints;
comment St-François en causant amicalement
avec un loup dans les bois, lui persuada de ne plus
dévorer les hommes, comment il fit monter en
chaire devant toute la congrégation le loup
qui donna la patte en signe d'obéissance, et
enfin comment ce bon loup tint fidèlement sa
promesse. On lui racontait aussi l'histoire de
Ste-Elisabeth dont le mari lui avait défendu
de donner du pain aux pauvres. La sainte continua
ses distributions malgré les ordres de son
mari. Or un jour qu'elle allait en ville avec son
tablier plein de pain et de viande, elle rencontra
son époux qui lui
demanda ce qu'elle portait. Ste-Élisabeth
répondit que c'étaient des fleurs; le
mari méfiant ouvrit son tablier, mais n'y
trouva en effet que des lis et des roses. Le petit
Guillaume aimait à réfléchir,
il aura pu se demander s'il était louable
pour une femme de désobéir à
son mari, et s'il pouvait être mal de mentir
puisque les saints en donnaient l'exemple.
On lui apprit à lire lorsqu'il
était encore un tout jeune garçon,
mais hélas, personne ne lui donna la Bible,
c'était un livre que lui et ses parents
n'avaient jamais vu. « Quand je pense, dit-il
lui-même, où j'en ai été
auparavant, l'horreur me prend, en songeant aux
heures, prières et services divins que j'ai
faits et fait faire à la croix et à
autres telles choses contre le commandement de
Dieu. Et si alors Satan ne m'eût
aveuglé, ce que je faisais et ce que je
voyais me devait bien montrer et faire
connaître combien j'étais hors du
droit chemin. La première notable
idolâtrie dont il me souvienne et le premier
pèlerinage auquel j'aie été,
fut à la sainte croix qui est en une
montagne auprès de Tallard, diocèse
de Gap, laquelle croix sert, à ce qu'on dit,
à faire recouvrer la vue; le lieu porte le
nom de la croix et l'on dit qu'elle est du propre
bois de la croix en laquelle Jésus-Christ a
été crucifié.
Or le bois d'icelle croix est couleur de
cendre, c'est un bois tout rude et non aplani, et
en tout contraire à celui de la croix que
j'ai adorée et baisée à
Paris... et je ne pense point qu'il y ait un seul
des bois que j'ai vas qu'on dit être de 'a
croix, qui ressemble à l'aube ni qui soit de
la même espèce de bois. Cette croix de
laquelle j'ai tantôt parlé est garnie
de cuivre... si le bois est saint, le cuivre l'est
aussi au dire des prêtres, car ils
prétendent qu'il vient du bassin dans lequel
notre Seigneur lava les pieds à ses
disciples... On a voulu maintes fois transporter
cette croix ailleurs et l'enfermer,
néanmoins elle retourne toujours en son
lieu... le prêtre nous disait que quand
le mauvais temps venait, toute la
croix frémissait; mais que cela arrivait
surtout à un petit crucifix mal en ordre et
peint d'une manière burlesque, lequel
était attaché à la croix. Ce
crucifix, disait le prêtre, se mouvait
tellement qu'il semblait sur le point de se
détacher de la croix, comme voulant courir
contre le diable. Et, en outre, il disait que le
crucifix jetait des étincelles de feu,
affirmant que si cela ne se faisait, il ne
demeurerait rien sur la terre. »
Le père et la mère de
Guillaume, il avait alors sept ans,
écoutaient tous ces prodiges et y croyaient
fermement. Mais leur enfant semble avoir
déjà eu l'esprit
éveillé et manifeste cet amour du
vrai, cette haine des faux semblants qui, nous le
verrons plus tard, est un des traits les plus
remarquables de son caractère. Il nous
raconte que pendant que lui et ses parents
regardaient avec dévotion celle croix, une
jeune femme arriva pour rendre visite au
prêtre qui eut l'air enchanté de la
voir et l'emmena dans la chapelle voisine. «
J'ose bien dire, ajoute Farel, que jamais danseur
ne prit femme et ne la mena faisant meilleure mine
que ces deux ne faisaient.» Même alors,
les manières effrontées de la jeune
femme déplurent à Farel. « Mais,
dit-il, nous étions tous si aveuglés
que nous n'eussions pas même osé
soupçonner quelque mal. » Il y avait
encore un spectacle à contempler au pied de
cette croix, c'était un homme qu'on appelait
« le sorcier du prêtre ». Il
était effrayant à voir avec ses yeux
couverts de peaux blanches; le sorcier avait pour
mission d'appuyer tous les récits miraculeux
du prêtre, lequel affirmait que personne ne
pouvait voir trembler le crucifix excepté
lui et le sorcier aux yeux blancs.
La famille Farel s'en retournait
satisfaite d'avoir vu la croix merveilleuse, mais
Guillaume se livrait à beaucoup de
réflexions qu'il ne communiquait à
personne. Néanmoins, il ajoutait foi
à ce que ses parents lui
disaient et il ne se serait pas permis de douter de
la véracité des prêtres, mais
il se sentait malheureux et perplexe. C'est
à regret que j'ai donné cette
esquisse peu édifiante de l'enfance de
Guillaume Fatal. Dieu veut que nous sachions ces
choses afin qu'elles nous servent d'avertissement.
Il a fait écrire les histoires de
Jéroboam, d'Achab et d'Achaz, afin
qu'Israël vît les fruits amers de la
désobéissance envers Dieu. Les
péchés des Juifs et de la
chrétienté doivent nous servir
d'avertissement. Laissez-moi vous faire observer
que pour les Juifs comme pour la
chrétienté, les malheurs qui sont
survenus ont eu pour origine l'abandon de la Parole
de Dieu pour des inventions humaines. Et dans les
deux cas, ce sont les pasteurs et les aveugles qui
ont été les aveugles conducteurs
d'autres aveugles.
« Il est arrivé dans le
pays, dit l'Éternel à Israël,
une chose étonnante et qui fait horreur, les
prophètes prophétisent le mensonge,
les sacrificateurs dominent par leur moyen et mon
peuple a pus plaisir à cela. » Nous
avons vu que Paul prédisait un temps
où les hommes détourneraient leurs
oreilles pour rechercher des fables. Ne croyez pas,
chers lecteurs, que ce temps-là soit
passé et que nous ne soyons pas en danger de
nous laisser conduire par l'homme plutôt que
par Dieu. Satan met peut-être plus
d'habileté que jadis à se
déguiser en ange de lumière, mais
cela me fait qu'augmenter le péril, à
moins que nous ne soyons enseignés de Dieu
à reconnaître la voix du bon Berger et
à la distinguer de celle de Satan. Du temps
de Farel, alors que la Bible était
introuvable, Satan pouvait bien faire enseigner des
erreurs par ses serviteurs sans être
obligé de dissimuler le mal sous un
mélange de bien.
Les ténèbres
étalent si profondes que les hommes
n'auraient pas su discerner de la
vérité les plus absurdes folies. Mais
à présent que nous avons tous la
Bible, l'Ennemi s'y prend
autrement; il réunit dans un même
livre (peut-être un recueil d'hymnes ou de
sermons), le bien et le mal, si habilement
présentés que Dieu seul peut nous
faire découvrir le piège.
Plus tard Farel écrivit les
paroles suivantes que je voudrais savoir
gravées dans tous les coeurs à
jamais: « Je prie tous ceux qui aiment
Jésus-Christ... de ne pas prendre autrement
qu'il ne faut, si je ne mets pas les Pères
de l'Église au rang de la Sainte
Écriture et si je regarde diligemment si ce
qu'ils ont écrit est selon la
vérité de la Sainte Écriture
ou non. Tant s'en faut que je voulusse contredire
les grands et saints personnages disant la
vérité, car même le plus petit,
le moindre qui soit et le moins estimé,
parlant vérité, m'est en telle
réputation que pour quoi que ce soit, je ne
voudrais le contredire dans ce qu'il dit de vrai.
Or la vérité doit être
manifestée par la Sainte Écriture et
maintenue parce qu'elle y est contenue... car
l'Écriture est très ferme et ne dit
rien qui ne soit vrai et que chacun ne doive
recevoir et tenir, mais tout ce qui est sans
l'Écriture ne doit avoir lieu, poids ni
autorité dans les choses qui regardent le
service de Dieu... Christ est la
vérité et Lui seul doit être
écouté; il ne faut avoir égard
à aucun autre, quoi qu'il dise ou fasse,
mais suivre Jésus-Christ. Et si l'on doute
que Jésus-Christ ait dit ou ordonné
quelque chose, il faut en référer aux
Saintes Écritures comme à la source
divine par laquelle le Seigneur veut que nous
éprouvions toutes choses pour savoir ce qui
est selon Jésus-Christ et ce que nous devons
selon lui, croire et tenir, sans y faire rien
ajouter ou diminuer, sans tirer ni çà
ni là, ni à droite ni à
gauche, mais seulement suivre ce qu'II a
ordonné. » Qu'il serait à
désirer que tous ceux qui s'appellent
chrétiens marchassent en suivant une telle
règle.
Revenons au petit Guillaume, qui, j'aime
à le constater, ne passait pas tout son
temps à apprendre les légendes des
saints. C'était un enfant courageux,
entreprenant, parfois même
téméraire et emporté. Le
développement de son corps fut plus rapide
que celui de son âme, car de bonne heure il
apprit à escalader les rochers et à
traverser les rivières à la nage. Il
était fort et robuste, Dieu lui avait
donné une grande énergie physique,
laquelle devait un jour lui être
précieuse. Guillaume grimpait avec ses
frères dans les endroits les lus
périlleux, il ne craignait ni les hommes ni
les bêtes, ni les précipices, ni les
torrents impétueux. Son père, lui le
destinait à la carrière des armes,
disait qu'il ferait n excellent soldat. Mais, en
grandissant, Guillaume manifesta de tout autres
désirs. Il demanda à consacrer tout
son temps à l'étude afin de devenir
un savant.
À cette époque les
études commençaient à
être à là mode, non seulement
parmi les fils de famines nobles, mais dans toutes
les classes de la société. Il y avait
un grand désir d'apprendre; en France et
ailleurs, le peuple sentait son ignorance et
soupirait après la lumière. Je crois
pouvoir signaler trois faits qui contribuaient
surtout à cet état des
esprits.
Premièrement, il était
arrivé en Italie beaucoup de savants de
Constantinople, d'où les Turcs les avaient
chassés une trentaine d'années avant
la naissance de Farel. Les Grecs, qui
possédaient Constantinople avant l'invasion des
Turcs,
étaient des chrétiens de nom, aussi
éloignés de Christ que leurs
frères d'occident, bien que
supérieurs aux Français et aux
Italiens quant à l'instruction. Lorsque les
Turcs arrivèrent en Europe, les savants
grecs se réfugièrent en Italie,
emportant avec eux les livres de la
bibliothèque de Constantinople.
Malheureusement la plupart de ces écrits
étaient ceux d'anciens philosophes et
poètes païens de la Grèce qui ne
pouvaient être d'aucun profit pour le bien
des âmes, mais Dieu fait servir toutes choses
à ses desseins bénis. Le désir
de pouvoir lire les livres des savants fugitifs
poussa beaucoup de personnes à apprendre le
grec; des écoles où l'on enseignait
cette langue s'ouvrirent à Paris et
attirèrent une foule d'étudiants. On
pouvait voir, pendant les nuits d'hiver, des
vieillards, des jeunes gens, même de jeunes
garçons, traverser les rues en tenant un
chandelier d'une main et un gros cahier de notes
dans l'autre. C'est ainsi que se préparaient
les voies par lesquelles le Nouveau Testament dans
l'original grec devait se répandre
rapidement avant d'être traduit dans toutes
les langues de l'Europe.
Cette remarquable soif d'instruction fut
encore excitée par un second fait. Peu avant
l'époque dont nous parlons, les Maures, qui
possédaient depuis des siècles une
partie de l'Espagne, en furent expulsés par
les soi-disant chrétiens espagnols. Ces
Maures étaient des Mahométans comme
les Turcs; les sciences étaient en grand
honneur parmi eux; ils semblent les avoir
reçues surtout des Juifs qu'ils
encourageaient à vivre dans leurs
états. Les Juifs avaient d'anciens livres
appelés la Cabale qui contenaient des choses
fort curieuses; ils avaient aussi l'Ancien
Testament en hébreu et en avaient fait de
nombreuses copies; de sorte que tandis que les
chrétiens étaient privés de la
Bible, les Juifs en avaient une partie et la
connaissaient très bien. Du moins ils en
avaient la connaissance qui vient de l'intelligence
naturelle,
mais
non celle que donne l'Esprit de Dieu, qui est la
seule efficace.
Quand les chrétiens
s'emparèrent du territoire des Maures, ils
commencèrent une persécution terrible
contre les Juifs qui s'y trouvaient. Beaucoup
d'entre eux furent mis à la torture,
brûlés vifs et massacrés de
diverses manières. En 1492, 800.000 Juifs
furent bannis de l'Espagne et dispersés dans
toute l'Europe, emportant avec eux leurs livres
cabalistiques et leurs copies de l'Ancien
Testament. Les moines dominicains se
signalèrent parmi leurs plus acharnés
persécuteurs Un million de volumes juifs et
maures furent brûlés à Grenade.
Quatre-vingt mille manuscrits juifs furent aussi
brûlés par les ordres du cardinal
Ximénès. Mais il arriva le contraire
de ce que voulaient le clergé et les moines;
la curiosité s'éveilla, et chacun
voulut savoir ce que contenaient les livres
défendus. Les Juifs seuls, écrivait
en 1494 Reuchlin, un savant allemand qui avait
étudié leurs livres, les Juifs seuls
ont conservé quelque connaissance du nom de
Dieu.
En vain les prêtres avertissaient
le peuple que quiconque apprenait l'hébreu
se trouvait immédiatement transformé
en Juif, et que le grec était une langue
d'invention nouvelle dont tout chrétien
devait se méfier. Ils ne
réussissaient pas à arrêter le
mouvement et beaucoup de personnes se mirent
à apprendre l'hébreu aussi bien que
le grec. Si vous lisez la biographie de Thomas
Platter, vous verrez comment ce jeune homme, qui
vivait du temps de Farel et qui avait gardé
les chèvres dans les montagnes, copia toute
une grammaire hébraïque et donna
jusqu'à son dernier sou pour acheter un
Nouveau Testament. Dieu préparait donc les
voies pour l'Ancien aussi bien que pour le Nouveau
Testament, mais jusqu'alors on ne savait que copier
les livres à la main et ils n'auraient
jamais pu se répandre facilement, si Dieu
dans sa Providence n'y avait pourvu.
Ceci m'amène à vous parler
du troisième fait qui contribua puissamment
à mettre les études à la mode,
comme dit Thomas Platter. Vers le milieu du
quinzième siècle, l'art de
l'imprimerie fut découvert; avant l'an 1500,
quatre millions de volumes furent imprimés,
et dix-sept millions dans les trente-six
années qui suivirent. C'étaient les
premiers rayons de lumière qui
commençaient à éclairer les
hommes; Satan excita en vain les ennemis de Dieu,
ils ne réussirent pas à les
éteindre et cependant de 1480 à 1488
les persécutions furent continuelles en
Espagne. Les Juifs furent cruellement
éprouvés, mais les
persécuteurs tournèrent aussi leur
fureur contre les personnes qui avaient
commencé à lire la Parole de Dieu. En
1481, à Séville seulement, deux mille
hommes et femmes furent brûlés par les
dominicains. Pour sauver les âmes et remettre
en lumière l'Évangile de Dieu, il ne
suffisait pas d'avoir retrouvé la Bible, ni
de savoir le grec et l'hébreu car les Juifs
qui lisaient si diligemment l'Ancien Testament
demeuraient aussi aveuglés que jamais. La
Bible seule, sans l'enseignement de Dieu le
St-Esprit, est un livre scellé. Or le
St-Esprit n'habite que dans des temples vivants,
dans le coeur des croyants, et s'il n'y avait point
de vrais croyants, le monde serait plongé
dans les ténèbres, lors même
qu'il serait rempli de Bibles. C'est pourquoi Dieu
ne préparait pas seulement les moyens de
répandre sa Parole, mais aussi des hommes
qui la comprissent et qui, étant remplis du
St-Esprit, prêchassent la bonne nouvelle.
Cependant les premières lueurs du jour
avaient seules commencé à poindre;
des imprimeurs travaillaient sans relâche;
malheureusement ils ne publiaient que des Bibles ou
des psautiers en latin, des livres de messe ou des
classiques païens. Aussi Guillaume Farel et
les autres hommes choisis du Maître
étaient-ils encore dans l'aveuglement. Dieu
seul pouvait dire: « Que la
lumière soit» et quand vint le temps,
la lumière parut. Mais le temps
n'était pas encore venu, les Turcs et les
Juifs incrédules avaient été
employés de Dieu à leur insu; plus
tard le Maître enverra des ouvriers qui
travailleront par amour pour Lui et dans la
puissance du St-Esprit.
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