ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
LES ACTES DES SAINTS APÔTRES.
CHAPITRE
XI.
Ce chapitre a deux parties.
- 1. Les Juifs de Jérusalem, qui
s'étaient convertis à la religion
chrétienne, ayant trouvé mauvais
que saint Pierre fût allé chez
Corneille, qui était payen, cet
apôtre les informa de la manière
dont Dieu lui avait fait connaître qu'il
devait annoncer l'Évangile à
Corneille, et du succès de sa
prédication, de quoi les chrétiens
de Jérusalem eurent une grande joie.
- 2. Saint Luc rapporte comment
l'Évangile se répandit en divers
lieux, et particulièrement à
Antioche; il parle aussi d'un prophète
nommé Agabus qui prédit une
famine.
I. 1-18; II. 19-30.
RÉFLEXIONS.
La première partie de ce
chapitre nous apprend que les chrétiens de
Jérusalem se scandalisèrent d'abord
de ce que saint pierre avait été chez
Corneille, parce qu'il n'était pas permis
aux Juifs d'aller chez les payens et d'avoir un
commerce familier avec eux.
Mais quand ils eurent appris que cet
apôtre y était allé par l'ordre
de Dieu, et que même le Saint-Esprit avait
été donné à Corneille
et à ceux qui étaient avec lui, ils
s'apaisèrent et ils se réjouirent de
ce que Dieu appelait aussi les Gentils au salut et
à la vie. Jamais il ne faut être
jaloux des grâces que Dieu fait aux autres;
au contraire nous devons nous en réjouir,
surtout lorsqu'il les appelle à la
repentance et au salut.
Au reste, cet heureux
événement, qui causa tant de joie aux
Fidèles de Jérusalem et qui leur fit
dire: Dieu a donc aussi donné la repentance
aux gentils afin qu'ils aient la vie ! doit aussi
faire à jamais la matière de notre
joie et de nos louanges, puisqu'il nous regarde
directement.
Il y a trois considérations
à faire sur la seconde partie de ce
chapitre.
La première, que la
dispersion de l'Eglise de Jérusalem et la
persécution qu'on avait suscitée
contre les chrétiens, contribuèrent
à répandre l'Évangile en
divers lieux et à établir plusieurs
belles Églises, et particulièrement
l'Église d'Antioche, où les disciples
de Jésus-Christ commencèrent à
être appelés chrétiens.
La deuxième, que ces
Églises furent fondées et entretenues
par le ministère de Barnabas, de saint Paul,
et des autres personnes qui s'employèrent
à leur édification. Cela montre que
le ministère des serviteurs de Dieu est
d'une grande utilité dans l'Eglise, pourvu
qu'il soit exercé par des personnes qui
soient gens de bien et remplis de foi et du
Saint-Esprit, tels qu'étaient ceux dont
saint Luc parle.
3. La prédiction que fit
Agabus d'une famine qui devait arriver, montre que
Dieu, outre le pouvoir de faire des miracles,
accordait en ce temps-là à ses
serviteurs le don de prédire l'avenir, et
qu'il n'arrive rien dans le monde que par la
Providence et par la volonté de Dieu. Et la
résolution que les chrétiens prirent
de faire une collecte, pour leurs frères qui
étaient en Judée, est un exemple qui
doit nous inciter à secourir les personnes
qui se trouvent dans la nécessité, et
surtout ceux qui sont nos frères et les
membres de Jésus-Christ, et même
à prévenir leurs besoins.
CHAPITRE XII.
Saint Luc récite trois
choses dans ce chapitre:
- 1. le martyre de saint Jacques, frère
de saint Jean;
- 2. l'emprisonnement de saint Pierre et sa
délivrance miraculeuse;
- 3. la mort du roi Hérode, qui mourut
étant frappé par un ange.
I. 1 et 2; II. 3-19; III. 20-25.
RÉFLEXIONS.
ON voit d'abord, dans ce chapitre,
que l'apôtre saint Jacques de même que
saint Étienne, scella la
vérité de l'Évangile par son
sang, et qu'ainsi la religion chrétienne
s'est établie par les souffrances de ceux
qui l'annonçaient; ce qui en fait voir la
vérité et la divinité.
2. Dieu qui avait permis que saint
Jacques fût mis à mort, permit aussi
que le roi Hérode mît saint Pierre en
prison; mais le Seigneur délivra
miraculeusement cet apôtre, en envoyant un
ange qui lui ouvrit les portes de la prison et le
mit en liberté. Cette merveilleuse
délivrance nous donne
lieu de reconnaître que, si Dieu souffre
quelquefois que les méchans exécutent
leurs desseins, il ne leur permet pas toujours de
faire tout le mal qu'ils avaient résolu, et
qu'il veille pour ses fidèles serviteurs.
Mais on voit aussi en cela combien
la prière a d'efficace puisque l'Eglise de
Jérusalem obtint la délivrance de
saint Pierre par les oraisons qu'elle fit à
Dieu.
3. La mort du roi Hérode, qui
fut rongé de vers pour punition de son
orgueil, est digne d'attention. Cet
événement, qui est aussi
rapporté par Joseph, historien juif (Ant.
Liv. XIX. ch. 8.), montre que Dieu confond les
orgueilleux, que les persécuteurs de
l'Eglise font d'ordinaire une fin funeste, et que
les princes cruels et superbes reçoivent
tôt ou tard la peine due à leur
méchanceté.
CHAPITRE
XIII.
Paul et Barnabas
vont d'Antioche en Chypre, et de là
à Paphos où saint Paul frappe
d'aveuglement un imposteur juif, et où il
convertit à la foi le proconsul
Serge-Paul, qui était le premier
magistrat de cette île.
- Après cela, saint Paul,
étant arrivé à Antioche
de Pisidie, fait un discours aux Juifs de
cette ville-là, dans lequel il leur
montre que Dieu, selon les promesses qu'il
avait faites à leurs pères,
avait envoyé Jésus-Christ; que
ce Jésus qui avait été
crucifié était
ressuscité, et que tous ceux qui
croiraient en lui obtiendraient le salut.
- Plusieurs, tant Juifs que Gentils, ayant
cru à la prédication de saint
Paul, les Juifs s'irritèrent contre
lui et le firent même chasser avec
Barnabas; mais ces apôtres leur
déclarèrent que, puisqu'ils
rejetaient l'Évangile, ils
l'annonceraient aux payens, et ils se
retirèrent.
I. 1-13; II.14-41; III. 42-52.
RÉFLEXIONS.
SAINT Luc rapporte, au commencement
de ce chapitre, que Paul et Barnabas étant
allés en divers lieux de l'Asie et de la
Grèce, par l'ordre du Saint-Esprit, et
après que les prophètes et les
ministres de l'Eglise d'Antioche eurent prié
et jeûné, ils annoncèrent
l'Évangile dans tous ces lieux-là
avec succès.
Ce sont là des marques de la
divinité de leur vocation; mais nous en
avons surtout une preuve remarquable dans la
conversion du gouverneur de Paphos et dans la
punition miraculeuse d'Elymas, qui voulait
détourner ce gouverneur d'embrasser la
religion chrétienne. On voit en ces deux
hommes, dont l'un crut à la
prédication de saint Paul, et l'autre s'y
opposait de toutes ses forces,
que si la parole de Dieu sauve ceux qui la
reçoivent, elle condamnera ceux qu'elle ne
convertit pas, et que ceux qui s'opposent à
la vérité et qui détournent
les autres de la foi et de la piété,
attirent sur eux les jugemens de Dieu les plus
sévères.
Le discours que saint Paul fit dans
la synagogue d'Antioche est un abrégé
de la doctrine chrétienne. Cet apôtre
y montre aux Juifs que Jésus est né
de la race de David, et que c'est lui qui est le
Messie promis; ce qu'il prouve par le
témoignage de Jean-Baptiste et par les
prédictions des prophètes. Il leur
déclare ensuite que ce Jésus, qu'on
avait crucifié à Jérusalem,
était ressuscité conformément
aux oracles du vieux Testament.
Enfin il leur apprend que le but de
la venue de Jésus-Christ a
été. d'obtenir aux hommes la
rémission de leurs péchés;
qu'ainsi tous ceux qui croiraient en lui seraient
justifiés, mais que ceux qui le
rejetteraient seraient exclus du salut. Puisque
c'est là la substance de la religion
chrétienne, nous y devons faire une
sérieuse et continuelle attention, et
reconnaître par là que ce n'est que
par le moyen de la foi en Jésus-Christ et
par l'obéissance à l'Évangile
que nous pouvons être sauvés. Pour ce
qui est de l'effet que produisit la
prédication de saint Paul, saint Luc nous
apprend que plusieurs la reçurent, mais que
le plus grand nombre des Juifs s'obstinèrent
dans leur incrédulité, ce qui fit que
cet apôtre leur déclara qu'il allait
se tourner vers les Gentils. La doctrine de
l'Évangile produit des effets bien
différens, quand elle est
prêchée. Il y en a qui en profitent;
mais il y en a d'autres qui la rejettent, et qui au
lieu de céder à la
vérité, s'y opposent même avec
fierté.
Mais, s'il y a des incrédules
qui demeurent dans l'aveuglement et dans la
perdition, ils en sont eux seuls la cause, personne
n'étant exclus de la vie éternelle
que ceux qui s'en jugent eux-mêmes indignes.
CHAPITRE
XIV.
Paul et Barnabas
prêchent à Icone.
- De là ils vont è Lystre
où ayant guéri un impotent, les
habitans de ce lieu-là les prirent
pour des dieux; ce qui donna occasion
à saint Paul de les exhorter à
renoncer à l'idolâtrie.
- Peu après, cet apôtre fut
lapidé par le peuple de cette ville
que les Juifs avaient soulevé; mais
Dieu lui ayant conservé la vie, il
s'en alla en d'autres lieux, et il revint
à Antioche.
I. 1-6; Il. 7-18; III. 19-28.
RÉFLEXIONS.
ON voit ici en général
que les apôtres ont exercé leur
ministère avec un grand zèle, et au
milieu des persécutions, et que saint Paul
en particulier a éprouvé partout la
fureur des Juifs, puisqu'il fut en danger
d'être lapidé à Iconie, avec
Barnabas, et qu'ensuite on le lapida à
Lystre, et qu'il fut même laissé pour
mort.
Mais on remarque aussi que Dieu
garantissait les apôtres, dans les
périls continuels auxquels ils
étaient exposés; qu'il faisait par
leur moyen des miracles surprenans, et que s'ils
avaient le déplaisir de voir les Juifs
s'opposer à eux, ils avaient d'un autre
côté la consolation d'amener plusieurs
payens à la foi.
2. Saint Paul fit paraître un
zèle admirable, lorsqu'après qu'il
eut guéri un impotent, les habitans de
Lystre les prirent, lui et Barnabas, pour des
dieux, et qu'ils voulurent leur rendre des honneurs
divins. Ceux qui craignent Dieu et qui ont un vrai
zèle ne cherchent jamais leur propre gloire;
mais leur grand but est que Dieu seul soit
glorifié et que les hommes le connaissent et
l'adorent.
3. Le discours que saint Paul fit
aux Lycaoniens, qui étaient des peuples
idolâtres, nous enseigne que Dieu s'est fait
connaître de tout temps aux hommes par les
oeuvres de la nature et de la Providence, et qu'il
leur a toujours donné des témoignages
de sa bonté. Sur quoi nous devons
considérer que, si les bienfaits que Dieu
accorde aux hommes dans la nature doivent les
engager à l'aimer et à le servir,
nous y sommes beaucoup plus obligés, nous
à qui il s'est révélé
par l'Évangile, et à qui il a
donné des témoignages si convaincans
de son amour, en envoyant Jésus-Christ au
monde.
4. Saint Luc remarque, sur la fin de
ce chapitre, que les apôtres avaient un soin
particulier d'aller en divers lieux, pour
établir des pasteurs en chaque Eglise. Cette
conduite des apôtres montre que les
Fidèles ont toujours besoin d'être
instruits et exhortés; qu'en particulier le
ministère de pasteur est tout-à-fait
nécessaire, et que la volonté de Dieu
est que partout où il y a des
chrétiens il y ait clés ministres,
pour enseigner, pour exhorter et pour conduire
l'Eglise.
CHAPITRE
XV.
Une dispute s'étant
élevée dans l'Eglise d'Antioche,
sur ce que quelques Juifs, qui s'étaient
faits chrétiens, soutenaient que les
payens qui se convertissaient à la
religion chrétienne devaient être
circoncis comme les Juifs et garder les
cérémonies de la loi de
Moïse, Paul et Barnabas furent
envoyés à Jérusalem, pour
consulter les apôtres sur cette
question-là.
- Les apôtres étant
assemblés, déclarèrent
que les payens n'étaient pas
obligés d'observer la circoncision et
les cérémonies de la loi et
qu'il suffisait qu'ils crussent en
Jésus-Christ, qu'ils obéissent
à et qu'ils s'abstinssent de ce qui
pourrait les entraîner dans
l'idolâtrie.
- C'est ce que les apôtres firent
savoir à l'Eglise d'Antioche, par une
lettre qui fut portée par Paul et
Barnabas, après quoi ces deux
serviteurs de Dieu allèrent en
d'autres pays pour y annoncer
l'Évangile.
1. 1-5; Il. 6-35; III. 36-41.
RÉFLEXIONS.
C'EST ici un chapitre qui
mérite une attention particulière, La
doctrine de la justification y est parfaitement
éclaircie, et ce qui y est dit sert à
l'intelligence des endroits du Nouveau Testament
où cette doctrine est traitée.
Il faut se souvenir, en premier
lieu, que la question qui fut proposée
n'était pas de savoir si les payens, pour
être sauvés, devaient garder les
commandemens de Jésus-Christ et faire de
bonnes oeuvres, personne ne doutait alors de cette
vérité-là, et il n'y avait
aucune dispute là-dessus. Mais la question
était si les payens devaient se soumettre
à la circoncision et aux
cérémonies de la loi de Moïse,
comme certains Juifs convertis à la foi
chrétienne le prétendaient.
Après cela, il faut remarquer
que les apôtres décidèrent deux
choses sur cette question. La première,
qu'il ne fallait point obliger les payens qui se
convertissaient à être circoncis et
à pratiquer les cérémonies des
Juifs, mais qu'il suffisait pour le salut qu'ils
crussent sincèrement en Jésus-Christ.
C'est ce que les apôtres prouvent,
1. parce que Dieu avait
répandu son Esprit sur les payens aussi bien
que sur les Juifs, et qu'il leur avait donné
la foi;
2. par la nature même des
cérémonies Mosaïques, et enfin
par les oracles des prophètes.
C'est aussi la doctrine que saint Paul
établit dans ses Épîtres aux
Romains et aux Galates,
où il enseigne que nous sommes
justifiés par la foi en Jésus-Christ,
sans les oeuvres de la toi.
L'autre chose que les apôtres
déclarèrent, fût que les payens
devaient cependant s'abstenir de ce qui avait
été sacrifié aux idoles, du
sang, des choses étouffées, et de la
fornication. La raison de cette défense
était que l'usage de ces viandes, de
même que l'impureté, faisaient une
partie du culte et des festins idolâtres des
payens; et qu'ainsi, si les chrétiens ne
s'étaient pas abstenus de ces
choses-là, cela aurait pu les
entraîner dans l'idolâtrie, scandaliser
les Juifs, et confirmer les payens dans leur fausse
religion.
Il paraît donc clairement
d'ici que les apôtres n'ont point
dispensé les hommes de l'observation de la
loi morale, mais qu'ils ne les ont dispensés
que de la loi des cérémonies; et que
même, en enseignant que nous sommes
justifiés par la foi, ils ont établi,
de la manière la plus forte, la
nécessité des bonnes oeuvres, puisque
la foi ne peut être sincère, si elle
ne produit l'étude de la sainteté et
l'obéissance à l'Évangile.
Pour ce qui est de la
séparation de saint Barnabas d'avec
saint Paul, dont il est fait mention sur la fin de
ce chapitre, on y voit à la
vérité quelque différence de
sentimens entre ces deux excellens serviteurs de
Dieu; mais cela ne les désunit point et ne
les empêcha pas d'aller toujours à
leur devoir, et de travailler sans relâche
à l'avancement du règne de
Jésus-Christ.
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