ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
PREMIÈRE ÉPÎTRE DE
SAINT PAUL AUX CORINTHIENS.
Cette Épître fut écrite
environ l'an 56 de Jésus-Christ. Saint Paul
y donne plusieurs instructions, tant sur les
défauts et sur les désordres qu'il y
avait dans l'Eglise de Corinthe, et
particulièrement sur les divisions qui y
régnaient, que sur divers articles importans
de la religion.
CHAPITRE
PREMIER.
L'apôtre commence
- par des salutations, par des actions de
grâces, et par des voeux.
- Ensuite il reprend les Corinthiens de ce
qu'ils étaient divisés entr'eux,
au sujet des ministres qui leur avaient
annoncé l'Évangile, et de ce
qu'ils s'attachaient les uns à saint
Pierre, les autres à Apollos on à
lui-même, et il leur fait voir qu'ayant
été baptisés ait nom de
Jésus-Christ, et non pas en celui d'aucun
des apôtres, ils ne devaient s'attacher
qu'à Jésus-Christ seul.
- Et parce que plusieurs s'efforçaient
de rendre saint Paul méprisable, cet
apôtre dit que sa prédication
n'avait point été
accompagnée de la sagesse et de
l'éloquence mondaine ; mais qu'il
avait prêché d'une manière
fort simple et conforme à la nature de
l'Évangile, qui est la doctrine de la
croix, Dieu avant trouvé à propos,
dans son infinie sagesse, de sauver les hommes
par un moyen faible en apparence, et qui
paraît une folie aux mondains et aux
incrédules, savoir par
Jésus-Christ crucifié, et
d'appeler au salut les personnes qui
étaient les moins considérables
dans le monde.
I. 1-9 ; II.10-16 ; III. 17-31.
RÉFLEXIONS.
Ce que saint Paul dit à
l'entrée de cette Épître, et
les voeux qu'il fait pour les Corinthiens, nous
enseignent que la perfection des chrétiens
consiste à être enrichis de toutes
sortes de dons spirituels, tellement qu'ils soient
trouvés irrépréhensibles
à la venue de Jésus-Christ. C'est
à quoi ils doivent tous travailler, et ce
qu'ils doivent aussi se souhaiter les uns les
autres.
2. Les censures que saint Paul
adresse aux Corinthiens, sur les
partis qui régnaient parmi eux, nous
montrent qu'il n'y arien qui nuise plus à
l'Eglise que les divisions, les schismes, surtout
ceux qui se forment pour des sujets qui concernent
la religion ; que les chrétiens ne
doivent jamais se dire les disciples et les
sectateurs d'aucun homme ou docteur, quel qu'il
soit, et que les ministres de l'Evangile, bien loin
de donner lieu à ces divisions et de les
entretenir, doivent, à l'exemple de saint
Paul, les empêcher de tout leur pouvoir, et
être toujours animés d'un esprit de
paix et d'humilité, cherchant uniquement la
gloire de leur maître et l'édification
de l'Eglise, qui ne s'avance que par l'union et la
concorde.
3. Il paraît de ce chapitre
que le but de la prédication des ministres
de l'Évangile étant d'annoncer
Jésus-Christ crucifié, ils doivent
prêcher et enseigner avec une grande
simplicité, sans rechercher la sagesse et
l'éloquence du siècle, qui ne sont
que folie devant Dieu.
4. On voit ici que ceux que Dieu
avait appelés en ce temps-là à
la profession de l'Évangile n'avaient rien
qui les distinguât dans le monde, et que ce
fut cependant par leur moyen que Dieu
établit son règne d'une
manière glorieuse. Cela doit nous apprendre
à ne pas estimer les richesses, la noblesse,
la puissance, et ces autres avantages temporels qui
ne donnent aucun droit à la grâce de
Dieu, et qui sont souvent un obstacle à la
foi. Enfin, puisque la doctrine de
l'Évangile et en particulier la croix de
Jésus-Christ, est le moyen que Dieu a
choisi, par un effet de sa sagesse et de sa
bonté, pour sauver les hommes, nous devons
nous attacher uniquement à
Jésus-Christ, qui nous a été
donné de Dieu, pour nous communiquer la
sagesse, la justice et la sainteté, et pour
nous conduire au salut et à la vie
éternelle.
CHAPITRE
II
Ce chapitre a trois parties.
Saint Paul dit :
- 1. qu'il avait prêché
l'Évangile à Corinthe avec
beaucoup de simplicité ;
- 2. que cependant, quoique sa doctrine fut
simple, elle ne laissait pas d'être
sublime et d'une origine céleste et
divine.
- 3. Il conclut de la que cette doctrine
étant spirituelle et céleste, elle
devait être annoncée d'une
manière simple, et que s'il y avait des
gens qui la rejetassent, cela venait de ce que
c'étaient des hommes charnels et
attachés aux choses de la terre.
I. 1-5 ; Il. 6-11 ; III. 12-16.
RÉFLEXIONS.
LES ministres de Jésus-Christ et tous les
chrétiens doivent apprendre de ce
chapitre :
1. que la vaine éloquence et
la fausse sagesse des gens du monde ne doivent
point être mêlées avec la
prédication de l'Évangile ;
2. que la doctrine de
l'Évangile, quoique fort simple, est la plus
sublime et la plus parfaite qui ait jamais
été annoncée ; qu'elle
est infiniment élevée au-dessus de
tout ce que les hommes les plus
éclairés auraient jamais pu
découvrir, puisqu'elle enseigne des choses
qu'aucun oeil n'avait jamais vues, qu'aucune
oreille n'avait jamais ouïes, et qui
n'étaient jamais venues dans l'esprit
d'aucun homme, mais qui nous ont été
révélées par l'Esprit de Dieu.
Il suit de là que la
révélation divine était
absolument nécessaire pour le salut, que ce
n'est que par elle que nous pouvons y parvenir, et
qu'ainsi nous devons estimer la doctrine de
l'Évangile par-dessus toutes choses.
L'apôtre eut aussi faire voir par là
que ceux qui annoncent cette doctrine ne doivent
jamais se départir de la simplicité
chrétienne, et que l'Évangile n'a pas
besoin de l'éloquence du siècle pour
se soutenir.
3. Saint Paul nous donne une
instruction très-importante, lorsqu'il dit
que l'homme animal ne reçoit point les
choses qui sont de l'Esprit de Dieu, et qu'elles
lui paraissent même une folie. Cela nous
apprend que, s'il y a des gens qui ne comprennent
et ne goûtent point la doctrine de
Jésus-Christ, cela vient de ce que ce sont
des hommes charnels, remplis de
préjugés et attachés à
la terre. Cette doctrine étant toute
spirituelle, elle ne peut être reçue
que par des hommes spirituels ; et pour en
sentir l'efficace, il faut être
dégagé de l'amour du monde et se
laisser conduire par l'Esprit de Dieu.
CHAPITRE
III.
Saint Paul fait quatre choses
dans ce chapitre.
- 1. Il dit qu'il n'avait enseigné aux
Corinthiens que les premiers fondemens du
christianisme, à cause de l'état
de faiblesse où ils étaient, et il
leur reproche d'être encore dans cet
état-là, vu les divisions qu'il y
avait parmi eux à l'occasion des
ministres qui leur avaient prêché
l'Évangile.
- 2. Pour faire cesser ces divisions, il dit
que les ministres ne sont que des instrumens en
la main de Dieu pour le salut des hommes, et que
tout le fruit de leur ministère vient de
Dieu seul.
- 3. Il ajoute, dans le même but, qu'il
avait posé le fondement comme un sage
architecte, c'est-à-dire, qu'il avait le
premier annoncé l'Évangile aux
Corinthiens, et que ceux qui
l'annonçaient après lui devaient
prendre garde à ne prêcher que des
doctrines véritables et utiles, qu'il
appelle de l'or, de l'argent, et des pierres
précieuses, et non des doctrines
incertaines et inutiles, lesquelles il compare
à du bois, à du foin ou à
du chaume ; et il dit que ceux qui
annonçaient ces doctrines inutiles
perdraient le fruit de leur travail que
cependant, s'ils avaient conservé le
fondement de la doctrine chrétienne, ils
seraient sauvés par une grâce
particulière, comme en passant par le
feu.
- Enfin saint Paul déclare que l'Eglise
étant le temple de Dieu et sa maison,
Dieu détruira ceux qui empêchent
l'édification de l'Eglise, en enseignant
des doctrines dangereuses, en excitant des
divisions, ou en quelque autre manière,
et que les Corinthiens ne devaient mettre leur
gloire qu'en Dieu seul, et non dans ceux qui
leur annonçaient l'Évangile,
puisque les apôtres et les autres
ministres n'étaient établis que
pour leur utilité et pour la gloire de
Dieu.
I. 1-4 ; II. 5-9 ; III. 10-15 ;
IV. 16-2,2.
RÉFLEXIONS.
LES quatre parties de ce chapitre
nous donnent ces quatre instructions :
1. Que les ministres de
Jésus-Christ doivent proposer la doctrine
chrétienne avec prudence, et accommoder
leurs instructions à la portée de
ceux qu'ils enseignent.
2. Ce que saint Paul dit qu'il avait
planté, qu'Apollos avait arrosé, mais
que Dieu avait donné l'accroissement,
marque, d'un côté, que le
ministère des pasteurs est
très-nécessaire, et que c'est un
moyen que Dieu a trouvé à propos
d'employer pour l'édification de
l'Eglise ; et de l'autre, que l'efficace de
leur prédication doit être
attribuée à Dieu seul.
La troisième instruction est
qu'il est d'une grande importance que l'on retienne
dans l'Eglise le fondement d'une bonne et saine
doctrine, et qu'outre cela on n'y annonce que des
doctrines utiles et édifiantes ; et
qu'ainsi les ministres doivent bien prendre garde
qu'il ne leur arrive jamais de mêler avec les
vérités essentielles de la religion,
des choses vaines, incertaines ou peu utiles, de
peur de perdre en cela le fruit de leur travail et
de retarder l'édification. Ce que saint Paul
représentait aux Corinthiens, en leur disant
qu'ils étaient le temple de Dieu, et que si
quelqu'un détruisait ce temple, Dieu le
détruirait, doit faire reconnaître
à tous les chrétiens, et surtout
à ceux qui ont charge
dans l'Eglise, avec combien de
soin ils doivent en procurer l'édification
et éviter tout ce qui pourrait y causer du
scandale et du trouble.
Enfin l'apôtre montre qu'au
lieu de prendre occasion du ministère de
l'Évangile de se diviser, les fidèles
doivent rapporter cette sainte charge, de
même que les autres avantages spirituels dont
ils jouissent, et généralement toutes
choses, à la gloire de Dieu et à leur
salut, et que c'est là le grand but qu'ils
doivent toujours se proposer.
CHAPITRE
IV.
Le dessein de saint Paul est de
remédier aux dissensions qu'il y avait dans
l'Eglise de Corinthe à l'occasion des
ministres qui y avaient prêché
l'Évangile de Jésus-Christ. Dans
cette vue il fait trois choses.
- 1. Il dit que les Corinthiens devaient avoir
des sentimens de respect pour les ministres du
Seigneur, mais que ce n'était point
à eux à préférer
certains ministres à d'autres; que
quoiqu'il exerçât sa charge en
bonne conscience, il ne s'estimait pas plus que
ses collègues; que tout ce que les
ministres ont de dons vient de Dieu, et que
c'est à Dieu seul, et non à aucun
homme, à juger de leur
fidélité.
- 2. Et comme les persécutions
auxquelles l'apôtre était
exposé, encore plus que les autres
ministres de l'Évangile, donnaient
occasion à plusieurs de le
mépriser, il parle des maux qu'il
endurait, et il témoigne qu'il les
souffrait avec patience, et même qu'il en
faisait gloire. Par où il veut engager
les Corinthiens à avoir pour lui les
sentimens qu'ils devaient, et à l'imiter
dans sa patience, dans sa douceur et dans son
humilité.
- 3. Il les avertit qu'il irait bientôt
les voir, et il les menace de se servir de la
puissance que Dieu lui avait donnée, pour
faire cesser les désordres qu'il y avait
dans leur Église, et pour châtier
ceux qui en étaient les auteurs.
I. 1-8; Il. 9-13; III. 14-21.
RÉFLEXIONS.
ON voit ici,
en premier lieu, quels sentimens il
faut avoir des vrais ministres de
Jésus-Christ. On doit les estimer et les
avoir en révérence, sans pourtant
leur attribuer ce qui n'appartient qu'à
Dieu, et sans s'attacher aux uns pour
mépriser ès autres.
2. La manière dont saint Paul
parle des jugemens différens qu'on pouvait
faire de lui, nous apprend qu'à la
vérité il ne doit pas nous être
indifférent qu'on juge bien ou mal de nous,
mais que cependant nous ne devons pas nous
arrêter au jugement des
hommes, que c'est à Dieu seul à juger
de notre fidélité, et que ce sera lui
qui mettra en évidence les choses
cachées et les pensées des coeurs, et
qui rendra à chacun la louange qui lui est
due.
3. L'apôtre nous enseigne que
tout ce que nous avons de dons et d'avantages vient
de Dieu, que nous n'en possédons aucun que
nous n'ayons reçu de lui, et qu'ainsi au
lieu de nous en glorifier, la gloire en est due
à Dieu seul.
4. On voit dans la description que
saint Paul fait de ses souffrances, que les vrais
chrétiens, et principalement les
fidèles serviteurs de Dieu, peuvent
être exposés à toutes sortes de
misères et d'opprobres. Mais l'exemple de
cet apôtre montre que ceux qui sont ainsi
affligés, bien loin de se croire malheureux
dans cet état et de se laisser aller
à l'impatience et à des désirs
de vengeance, doivent souffrir tous ces maux avec
résignation, et même avec joie, pour
l'édification de l'Eglise, prier pour ceux
qui leur font du mal, et se mettre du reste peu en
peine de la haine et du mépris du monde,
pourvu qu'ils aient l'approbation de Dieu et de
leur conscience.
Les derniers versets de ce chapitre
font voir que saint Paul aimait tendrement les
Corinthiens, que ce n'était qu'à
regret qu'il les menaçait de les
châtier, et qu'il n'avait en vue que leur
édification ; c'est aussi là
l'esprit dont tous les vrais ministres du Seigneur
sont animés.
CHAPITRE
V.
Saint Paul
- censure les Corinthiens de ce qu'ils
souffraient parmi eux un homme coupable
d'inceste, et il le livre à satan,
c'est-à-dire à être
affligé en son corps par satan, ce qui
était une punition extraordinaire que les
apôtres avaient le pouvoir d'infliger.
- Il leur représente, par la similitude
du levain, qu'il est très-dangereux de
souffrir dans l'Eglise ceux qui vivent d'une
manière scandaleuse, puisqu'ils infectent
et qu'ils corrompent les autres.
- Enfin il ordonne aux Corinthiens de
retrancher du milieu d'eux, par
l'excommunication, les impurs et tous ceux qui
vivaient dans le dérèglement, et
de ne les pas regarder comme frères et
comme membres de l'Eglise.
I. 1-5. ; II. 6-9 ; III. 10-13.
RÉFLEXIONS.
Ce chapitre contient une doctrine
très-importante. Nous y voyons quelle est la
nécessité de la discipline de
l'Eglise, et surtout de cette
partie de la discipline qui consiste dans
l'excommunication. Saint Paul reprend les
Corinthiens de ce qu'ils n'avaient pas
ôté de leur Église un
incestueux qu'il y avait parmi eux. Il dit que,
quand des personnes, qui se disent
chrétiens, tombent dans des
péchés qui déshonorent la
religion de Jésus-Christ, toute l'Eglise
doit en être dans la tristesse, qu'elle ne
doit point les souffrir dans son sein, mais qu'elle
doit les retrancher de sa communion.
Il déclare, de la
manière la plus expresse, que l'on ne doit
point reconnaître pour frères et pour
chrétiens les impurs, les injustes, les
médisans, les ivrognes, ni les autres
pécheurs scandaleux, et qu'il n'est pas
permis d'avoir un commerce familier avec ces
gens-là.
C'est là la loi de
Jésus-Christ ; c'est ce que les saints
apôtres ont commandé de sa part, et
l'ordre qu'ils ont établi dans toutes les
Églises du monde, pour l'honneur de la
religion chrétienne, pour le salut des
pécheurs eux-mêmes, et pour
empêcher que leur mauvais exemple ne corrompe
les autres membres de l'Eglise ; et c'est
aussi ce que les premiers chrétiens ont
religieusement observé. Par là on
peut connaître que l'Eglise n'est point
gouvernée aujourd'hui comme elle le devrait
être.
Cependant le devoir de tous les
chrétiens est de s'éloigner autant
qu'il leur est possible du commerce des
méchans, et de se distinguer d'eux par une
vie sainte et exemplaire ; et pour ce qui est
des pécheurs qu'on laisse vivre dans la
communion extérieure de quoiqu'ils dussent
en être ôtés, il faut se
souvenir que Jésus-Christ ne les
reconnaît point pour ses membres, et qu'ils
n'éviteront pas la punition que
mérite leur hypocrisie et leur
impiété.
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