ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
ÉPÎTRE DE SAINT PAUL AUX
GALATES.
Dans l'Épître aux Galates (Chap.
I-IV.), qui fut écrite environ l'an 52 de
Notre Seigneur, saint Paul combat ceux qui
enseignaient que pour être sauvé ce
n'était pas assez de croire en
Jésus-Christ, niais qu'il fallait de plus
être circoncis et garder les
cérémonies de la loi de Moïse.
L'apôtre prouve, contre ces gens-là,
que les chrétiens sont justifiés par
la seule foi en Jésus-Christ, sans qu'ils
soient obligés d'observer ces
cérémonies. Il exhorte ensuite les
Galates (Chap. V. et VI.) à demeurer dans
celle liberté ; mais il les avertit de
n'en pas abuser pour vivre dans le libertinage.
CHAPITRE
PREMIER.
Dans le premier chapitre, saint
Paul, après la salutation,
- censure les Galates de ce qu'ils
s'étaient écartés de la
doctrine qu'il leur avait enseignée, et
qui était la seule doctrine qu'il
fallût recevoir.
- Il leur dit ensuite qu'il tenait cette
doctrine de la révélation de
Jésus-Christ, et non d'aucun homme ;
et pour cet effet, il les fait souvenir qu'il
avait été autrefois fort
zélé pour les
cérémonies et pour les traditions
des Juifs, qu'il avait même
été un ardent persécuteur
des chrétiens, mais que Dieu l'avait
appelé à la connaissance de la
vérité, et qu'incontinent
après sa conversion il avait
prêché l'Évangile en divers
lieux, sans consulter aucun homme ni aucun
apôtre. Saint Paul dit cela, pour montrer
qu'il avait reçu sa vocation de
Jésus-Christ et non de saint Pierre, ni
de qui que ce fût, et qu'il avait la
même autorité que les autres
apôtres ; ce que les faux docteurs
lui contestaient.
I. 1-10 ; II. 11-24.
RÉFLEXIONS.
CE chapitre nous présente ces
deux réflexions principales :
I. Que les chrétiens ne
doivent jamais se détourner de la pure
doctrine de l'Évangile, qui a
été annoncée et mise par
écrit par les apôtres, et qu'ils
doivent fuir tous ceux qui
voudraient leur annoncer une
autre doctrine que celle-là, et leur
proposer un autre moyen de salut que la foi en
Jésus-Christ.
2. Le récit que saint Paul
fait de sa conversion, et ce qu'il dit pour montrer
qu'il tenait son autorité de
Jésus-Christ, nous oblige, d'un
côté, à recevoir la doctrine de
cet apôtre comme divine et à nous y
soumettre ; et de l'autre, à
reconnaître la miséricorde du Seigneur
et la puissance de sa grâce envers ceux qui
sont dans l'ignorance et dans
l'égarement ; de quoi l'on voit un
illustre exemple en saint Paul, que Dieu convertit
et appela à la charge d'apôtre, et qui
était auparavant un ennemi
déclaré de la religion
chrétienne.
CHAPITRE
Il.
Saint Paul, pour soutenir sa
vocation et son autorité, et pour faire voir
qu'il n'était pas inférieur aux
autres apôtres,
- dit non-seulement que sa doctrine avait
été approuvée à
Jérusalem par saint Pierre, par saint
Jacques et par saint Jean, mais que même
il avait repris saint Pierre de ce que cet
apôtre, par une trop grande complaisance
pour les Juifs, n'osait pas manger avec les
gentils qui avaient cru en
Jésus-Christ ; ce qui aurait pu
autoriser les préjugés des Juifs
et donner lieu de croire que les gentils
devaient s'assujettir aux
cérémonies de la loi de
Moïse.
- Il enseigne après cela, que tant les
Juifs que les gentils sont justifiés par
la seule foi en Jésus-Christ ; mais
il montre en même temps que, bien loin que
cette doctrine favorisât le
relâchement au contraire, la foi en
Jésus-Christ crucifié retirait les
hommes du péché et les faisait
vivre d'une vie toute spirituelle.
I. 1-14 ; II. 15-21.
RÉFLEXIONS.
Nous avons à remarquer ces
deux choses dans ce chapitre :
La première est
l'autorité, la sincérité et le
zèle avec lequel saint Paul annonçait
la pure doctrine de l'Évangile,
jusque-là qu'il reprit saint Pierre qui, par
trop d'égard pour les Juifs, évitait
le commerce des gentils.
Cela montre à tous les
chrétiens, et surtout aux ministres de
l'Évangile, qu'ils doivent toujours suivre
leur vocation et marcher de droit pied selon la
vérité, et que jamais on ne doit user
d'aucun déguisement ni de la moindre
dissimulation en matière de religion.
2. Saint Paul établit, dans
ce chapitre, la doctrine de la justification par la
seule foi en Jésus-Christ ; mais il
enseigne en même temps
très-expressément que cette doctrine
n'autorise en aucune manière les hommes
à vivre dans le péché, qu'au
contraire la vraie foi qui nous justifie
détruit nécessairement le
péché en nous et nous fait vivre
à Dieu. C'est ce que saint Paul nous apprend
par ces belles paroles, qui marquent si bien
l'état et les sentimens d'un vrai
fidèle qui croit en
Jésus-Christ : Je suis crucifié
avec Christ, et je ne vis non plus moi-même,
mais Christ vit en moi ; et si je vis encore
dans ce corps mortel, je vis dans la foi du Fils de
Dieu, qui m'a aimé et qui s'est donné
soi-même pour moi.
CHAPITRE
III.
Saint Paul
- censure les Galates de ce qu'ils
s'étaient détournés de la
doctrine qu'ils avaient auparavant
embrassée ; il entend cette doctrine
qui enseigne qu'on est justifié par la
foi en Jésus-Christ sans les oeuvres de
la loi. Et pour montrer que cette doctrine
était la seule véritable, il leur
fait remarquer,
- 1. que lorsqu'ils l'avaient reçue,
Dieu leur avait communiqué les dons
miraculeux du Saint-Esprit.
- 2. Il prouve, par l'exemple d'Abraham, par
la nature des promesses qui lui avaient
été faites et à sa
postérité, et par la
malédiction que la loi dénonce
à ceux qui ne l'accompliraient pas
parfaitement, que tous les hommes, et les
gentils mêmes, ont dû être
justifiés par la foi en
Jésus-Christ ; d'où il
s'ensuit que ceux qui prétendaient
être justifiés par la loi se
privaient de ces promesses et demeuraient sous
la malédiction. il confirme cela, en
remarquant que la loi de Moïse, qui n'a
été donnée que Iong-temps
après la promesse que Dieu avait faite
à Abraham, n'avait pu anéantir
cette promesse ; mais que Dieu avait
donné cette loi par le ministère
de Moïse, qui était médiateur
entre Dieu et le peuple, pour retenir les
Israélites dans leur devoir, en attendant
que Jésus-Christ vînt, et afin de
préparer les hommes à recevoir la
grâce qui devait les rendre tous enfans de
Dieu, tant les Juifs que les gentils, selon la
promesse qui avait été faite au
patriarche Abraham.
I. 1-14 ; II. 15-18 ; III.19-29.
RÉFLEXIONS.
Nous avons à
considérer sur ce chapitre,
1. que c'est une grande folie et un
extrême aveuglement de se détourner de
la vérité, après l'avoir
connue, et de finir mal après avoir bien
commencé;
2. que les dons miraculeux du
Saint-Esprit, qui furent
communiqués aux premiers chrétiens,
prouvent la divinité de la doctrine qu'ils
avaient embrassée, et son excellence
par-dessus la loi.
3. Il faut faire attention aux
preuves que saint Paul allègue pour montrer
que c'est par la foi en Jésus-Christ que les
hommes sont justifiés, et qui sont prises de
l'exemple d'Abraham, des promesses que Dieu lui
avait faites, de la malédiction que la loi
dénonçait aux Israélites, et
du temps auquel la loi avait été
donnée. La manière dont
l'apôtre raisonne sur ce sujet fait voir
qu'il avait reçu de Dieu des lumières
extraordinaires ; cela doit aussi nous faire
reconnaître la vérité de sa
doctrine, puisqu'on en trouve des preuves si
solides dans la loi même et dans l'alliance
que Dieu avait traitée avec Abraham.
Enfin la sagesse et la bonté
de Dieu paraissent d'une manière
très-sensible en ce qu'il avait donné
la loi pour réprimer le péché
et pour amener les hommes à
Jésus-Christ, en attendant que le temps
fût venu auquel il les recevrait tous dans
son alliance, tant les Juifs que les payens.
Reconnaissons par là qu'ayant le bonheur de
vivre dans ces temps heureux, et qu'étant
devenus les enfans et les héritiers de Dieu
par la foi en Jésus-Christ, nous sommes
obligés de lui rendre une obéissance
sincère et filiale, et d'accomplir les
devoirs auxquels nous engage l'alliance de
grâce dans laquelle nous avons
été reçus.
CHAPITRE
IV.
Ce chapitre a trois parties.
- Dans la première, saint Paul, pour
montrer combien les Galates avaient de tort de
vouloir s'assujettir de nouveau aux
cérémonies de la loi de
Moïse, leur met devant les yeux la
différence qu'il y a entre l'état
oit les Juifs étaient sous la loi et
l'heureux état où les
chrétiens sont sous l'Évangile,
ayant le bonheur d'avoir été
adoptés pour être les enfans de
Dieu. C'est ce qu'il représente par la
comparaison de l'état d'un enfant qui vit
sous des tuteurs, et de celui où se
trouve un fils qui a l'administration de ses
biens.
- 2. Il leur parle de la grande affection
qu'il leur portait et de celle qu'ils avaient
eue autrefois pour lui, et il leur marque
l'inquiétude où il était
à leur sujet.
- 3. Pour représenter la
différence qu'il y avait entre l'alliance
de la loi et celle de l'Évangile, et
entre ceux qui s'attachaient à l'une ou
à l'autre, il se sert de l'image
d'Ismaël et d'Isaac, les deux fils
d'Abraham, dont l'un était né,
selon le cours de la nature,
d'Agar, qui était servante, et l'autre
était lié par un miracle, et
ensuite de la promesse de Dieu, de Sara, qui
était libre et la femme d'Abraham.
I. 1-10 ; II. 11-20 ; Ill. 21-31.
RÉFLEXIONS.
CE chapitre nous instruit en
général de la différence qu'il
a entre les Juifs et les chrétiens, et il
montre combien nous sommes heureux de vivre sous la
dispensation de l'Évangile et d'avoir
été adoptés de Dieu, pour
être ses enfans par la foi en
Jésus-Christ. Cette doctrine doit exciter en
nous un vif sentiment de notre bonheur et une
grande reconnaissance envers Dieu ; elle doit
aussi nous inspirer des sentimens dignes de la
gloire de notre adoption, et nous porter surtout
à vivre comme les enfans de Dieu et à
lui obéir volontairement et par un principe
d'amour.
2. Comme saint Paul travaillait avec
un grand zèle à rétablir parmi
les Galates la pureté de la foi et à
empêcher qu'ils ne mêlassent les
cérémonies de Moïse avec
l'Évangile, les ministres de
Jésus-Christ doivent s'appliquer à
maintenir la religion dans sa pureté et
à préserver leurs troupeaux de
l'erreur et du vice.
Et si les Galates étaient
blâmables de ce qu'après avoir
été affranchis par
Jésus-Christ des cérémonies de
Moïse ils voulaient s'y assujettir de nouveau,
les chrétiens ne le sont pas moins, qui,
étant éclairés des
lumières de la foi, s'attachent encore aux
choses vaines et frivoles de ce monde.
3. L'allégorie de Sara et
d'Agar, par laquelle l'apôtre saint Paul
représentait l'état différent
de ceux qui voulaient demeurer sous l'alliance de
la loi et de ceux qui s'arrêtaient uniquement
à celle de l'Évangile, peut aussi
être appliquée aux
chrétiens ; et elle nous met devant les
yeux la différence qu'il y a entre ceux qui
cherchent leur bonheur dans les choses de la terre,
et qui demeurent sous l'esclavage du
péché, et ceux qui, étant
affranchis de cette servitude, jouissent de la
liberté des enfans de Dieu.
4. On remarque, dans ce chapitre,
que les Galates avaient eu dans les commencemens un
respect et un amour extraordinaires pour saint
Paul, mais que cet apôtre craignait qu'ils
n'eussent changé à son égard,
quoiqu'il les aimât toujours avec la
même tendresse qu'il l'avait fait auparavant.
Les chrétiens doivent chérir et
honorer les bons pasteurs ; mais ceux qui
ayant eu ces sentimens ne les conservent pas, ou
qui conçoivent même de l'aversion
contre eux quand ils leur disent
la vérité, sont extrêmement
condamnables.
Pour ce qui est des fidèles
serviteurs de Dieu, ils ont toujours pour l'Eglise
du Seigneur l'affection la plus tendre ; ils
sont continuellement en inquiétude pour les
brebis qui leur sont confiées, et ils
ressentent la plus vive douleur, lorsqu'elles ne
répondent pas à leur amour et
à leurs soins.
CHAPITRE
V.
Il y a deux parties dans ce
chapitre.
- Dans la première, saint Paul exhorte
les Galates à demeurer dans la
liberté chrétienne, qui consistait
en ce qu'ils n'étaient plus assujettis
à la circoncision et aux
cérémonies de la loi de
Moïse ; il leur dit que
Jésus-Christ ne leur servirait de rien
s'ils voulaient retenir ces
cérémonies, et il les avertit de
ne pas écouter ceux qui leur inspiraient
d'autres sentimens, et même de ne les pas
souffrir parmi eux.
- 2. Il les exhorte à ne pas abuser de
cette liberté et à n'en pas
prendre occasion de vivre dans la licence et de
suivre les désirs de la chair. Il leur
recommande de s'aimer et de vivre dans la paix,
et il marque dans le détail les
péchés auxquels la chair porte les
hommes, et les fruits que le Saint-Esprit
produit en ceux qu'il anime.
I. 1-12 ; Il. 13-26.
RÉFLEXIONS.
Voici un chapitre très-instructif, et
l'on doit bien retenir la doctrine qui y est
contenue. Saint Paul y explique bien clairement
comment il faut entendre ce qu'il a enseigné
dans cette Épître, que les
chrétiens ne sont plus sous la loi, et que
les oeuvres que cette loi prescrit ne sont pas
nécessaires pour être
justifiés. C'est qu'ils ne sont point
obligés d'observer la circoncision, ni les
cérémonies de la loi de
Moïse ; mais qu'ils sont cependant dans
une obligation indispensable de vivre saintement.
L'apôtre dit, de la
manière la plus claire et la plus
précise, que la foi justifiante opère
par la charité et par les bonnes
oeuvres ; il avertit
très-expressément qu'on ne doit point
prendre occasion de la doctrine de la justification
par la foi et de la liberté
chrétienne, de vivre dans le
péché et dans la licence.
Il marque la différence qu'il
y a entre ceux qui vivent selon la chair et ceux
qui sont animés de l'Esprit de Dieu ;
il spécifie les péchés de la
chair, dont les principaux sont l'impureté,
la sensualité, les haines et les
divisions ; et il
déclare que ceux qui commettent ces
péchés-là ne
posséderont point le royaume de Dieu. Il
montre quelles sont les vertus que l'Esprit de Dieu
produit dans les vrais fidèles.
Enfin il dit que la marque à
laquelle on reconnaît ceux qui appartiennent
à Jésus-Christ et en qui son Esprit
habite, c'est qu'ils se conduisent par les
mouvemens de cet Esprit saint et qu'ils ont
crucifié la chair avec ses mauvais
désirs. Tout cela fait voir que le but de la
doctrine de l'Évangile est notre avancement
dans la piété et dans la
sainteté, et que ce doit être aussi
là notre principale étude.
CHAPITRE
VI.
Saint Paul
- exhorte les Galates à reprendre avec
douceur ceux qui tombent en quelque faute, et
à être animés les uns envers
les autres d'un esprit de charité,
d'humilité et de support.
- II les exhorte, en second lieu, à
pourvoir à la subsistance de ceux qui les
enseignaient et à exercer la
charité.
- Il finit en avertissant encore une fois les
Galates de ne pas écouter ceux qui
voulaient les obliger à être
circoncis, et en donnant un abrégé
de sa doctrine et de toute cette
Épître.
I. 1-5 ; Il. 6-10 ; III. 11-18.
RÉFLEXIONS.
SAINT Paul nous enseigne, dans ce
chapitre,
1. que ceux qui ont plus de
connaissance que les autres, et qui sont plus
avances dans la piété, doivent
supporter ceux qui sont moins instruits, reprendre
avec douceur ceux qui pèchent par
infirmité, les regarder toujours comme des
frères, et se souvenir, au reste, qu'ils
pourraient aussi succomber eux-mêmes à
la tentation, et que chacun rendra compte pour
soi-même à Dieu et portera son propre
fardeau ;
2. que les chrétiens sont
particulièrement obligés de pourvoir
à l'entretien de leurs pasteurs et de faire
du bien à tout le monde, mais principalement
à ceux qui sont membres de l'Eglise et qui
travaillent pour son édification ;
3. que ce sont là des devoirs
indispensables, et que Dieu nous jugera selon la
manière dont nous nous en serons
acquittés ; ce que saint Paul a
marqué, en disant : Ne vous abusez
point, ce que l'homme aura semé il le
moissonnera aussi.
Enfin il faut bien remarquer et bien
retenir ce que saint Paul dit en finissant cette
Épître, et qui est
le sommaire de toute sa doctrine : c'est que
Dieu n'aura point égard si l'on a
été juif ou payen, circoncis ou non,
mais que ce qu'il exige principalement, c'est que
l'on soit un homme nouveau et
régénéré. C'est ce que
signifient ces paroles : En
Jésus-Christ, il ne sert de rien
d'être circoncis ou de ne l'être pas,
mais il faut être une nouvelle
créature ; et pour tous ceux qui
marcheront suivant cette règle, que la paix
et la miséricorde soit sur eux et sur
l'Israël de Dieu. Amen !
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