MIRIAM n'était pas soldat par
force, mais une engagée volontaire,
véritable soldat en tout temps. Dans son
pays ou à l'étranger, dans la maladie
comme en bonne santé, elle sentait que
l'honneur de son Roi lui était
confié; les intérêts du
Seigneur occupaient la première place dans
son coeur; de son propre désir, elle
était toujours de service.
Fillette de quatorze ou quinze ans, elle
commença ce service appelé dans
l'Armée « visites spéciales
». Elle partait avec ses soeurs Catherine et
Marie pour des campagnes de fin de semaine. Sa
soeur, la
Colonelle
Marie, se rappelle ces expériences :
Je ne saurais dire ce que Miriam
fut
pour moi, comment elle m'aida à prendre ma
place dans l'oeuvre publique. Elle me fit vaincre
ma terrible timidité.
Une fois, pendant mon
allocution,
je fus saisie du trac si fortement, que j'en
oubliai la suite de mon discours. Miriam s'en
aperçut; en un moment, elle fut à mes
côtés et, le sourire aux
lèvres, vint à mon secours
:
- Je vous demande
pardon, tandis
que ma soeur parlait, sa phrase me
rappela...
Et elle raconta un
incident qui
occupa l'attention des gens et me permit de me
ressaisir. Et je continuai sans que personne, sauf
nous deux, se soit aperçu de mon
malheur.
- Marie, vous devez
persévérer, que vous l'aimiez ou non,
me disait-elle.
Aujourd'hui, je sens la
valeur de
ses paroles d'une manière que très
peu peuvent comprendre.
Elle possédait une
habileté remarquable pour amener les
âmes au Christ, même contre toutes
prévisions. Par exemple, je me rappelle une
de ces campagnes de fin de semaine où il
semblait certain que nous terminerions sans avoir
gagné une âme. Mais Miriam ne
l'entendait pas ainsi :
- Marie, je ne puis
rendre les
armes, disait-elle.
Elle laissa la pêche (1)
et monta sur
l'estrade d'où elle fit retentir un nouvel
appel. Et, résultat inattendu, un certain
nombre d'âmes cherchèrent le salut.
Miriam, en vérité, profitait de
toutes les circonstances comme si elles
étaient les dernières qui lui soient
accordées.
Le premier de ses efforts
spéciaux fut entrepris a Hythe, un poste
commandé par la Capitaine
d'État-Major Kate Lee, l'Ange Adjudante,
l'héroïne de Pois Cassés (2),
le livre de
M. Harold Begbie. Miriam la connut dès son
enfance.
À la recherche de nouveaux
orateurs pour une campagne sous la tente qu'elle
avait organisée, la Capitaine
d'État-Major invita Catherine et Miriam
Booth à présider les réunions
de fin de semaine. Elle raconte ainsi cette
expérience :
Bien que quinze ans
soient
passés depuis, je me rappelle très
bien ces réunions.
Miriam était une douce
enfant aux longs cheveux pendant sur les
épaules, au visage ardent, à l'expression
changeante. Sa
voix
claire se répandait par toute la tente, la
simplicité de ses paroles saisissait et
retenait la foule. Ses paroles me firent une telle
impression, que je pris quelques notes. Elle parla
le samedi soir sur : « Tiens ferme ce que tu
as, afin que personne ne prenne ta couronne.
»
Elle nous conta
l'histoire d'un
homme tombé pardessus bord à la mer;
il saisit la corde qu'on lui lançait et la
serrait avec tant de force que ses mains en
saignèrent. Puis elle se plongea dans les
contes de fées pour enfants; elle nous dit
l'histoire d'un petit ours parti en voyage de
découvertes, mais il se fatigua et abandonna
son projet.
- Quel malheur que le
petit ours
n'ait point continué !
dit-elle.
Les gens rirent, mais
elle avait
fait pénétrer son message au plus
profond des coeurs. Je remarquai son regard
parcourant toute l'assemblée à la
recherche de quelqu'un, semblait-il.
- J'ai choisi ma cible,
me
dit-elle plus tard.
Elle voulait dire
qu'elle avait
choisi spécialement une personne à
l'aspect rude et grossier sur laquelle elle
concentrait ses efforts pendant cette fin de
semaine. Elle parlait avec chaleur à cet
homme pendant les réunions de prières
et je crois qu'il se convertit avant la fin de la
campagne. La réunion du matin fut
remarquable, un grand nombre d'assistants
s'approchèrent pour chercher la grâce
de la sanctification, l'assemblée resta sous
la tente et la réunion se continua
jusqu'à 2 heures de l'après-midi.
L'année suivante, j'étais
à Douvres - j'invitai Marie et Miriam
à venir présider les réunions
du dimanche. Les jeunes filles, en plus de leurs
dons personnels et de l'influence du nom de leur
grand-père, étaient si bonnes et si
dévouées, que je savais que leur
présence dans la ville attirerait des
multitudes qui ne fréquentent pas
d'ordinaire nos réunions. Je louai
l'hôtel de ville et je fis une grande
publicité.
J'allai les attendre à
la
gare et, comme nous revenions à travers les
rues, leurs regards furent attirés par une
grande affiche annonçant leur visite. La
crainte se peignit sur leurs visages et elles
s'écrièrent :
- Oh! pourquoi
avez-vous fait
cela? Les gens vont s'attendre à quelque
chose d'extraordinaire...
Mais tout alla bien. Le
dimanche
après-midi, la salle était
bondée, sur l'estrade se pressaient toutes
les personnes influentes de la ville. La
chère Miriam, âgée de quinze
ans, en robes courtes, les cheveux sur le dos,
conférença comme je l'avais
annoncé, sur l'oeuvre des bas-fonds. Elle
parla très bien, basant son allocution sur
ce texte : « Moïse vit les durs travaux
de ses frères. » Elle avait
divisé son sujet en trois parties : a) Les
frères de Moïse; b) leurs durs travaux;
c) le grand coeur de Moïse. Pour
préparer sa conférence, elle avait
été visiter la semaine
précédente nos asiles pour hommes et
pour femmes. Elle appuya chacun des points de son
discours sur des incidents racontés sans
art, mais qui n'en étaient ainsi que plus
pathétiques et plus éloquents; ils
émurent fortement ses auditeurs.
Miriam vint me voir à
nouveau lorsque j'étais à Croydon;
elle parla dans le théâtre à
une foule d'environ huit cents personnes. Je
surveillais le développement de ses dons et
je croyais qu'elle tiendrait un jour une des
principales places de l'Armée. Son charme
principal était peut-être cette
inconscience de sa valeur; pas l'ombre d'une
affectation en elle, ni cet esprit de
désobéissance qui murmure : «
Oh! je ne saurais pas faire cela. » Elle
répondait immédiatement à
l'appel du devoir. Elle était si joyeuse,
une vraie salutiste!
Après les réunions,
le dimanche soir, j'avais les plus grandes
difficultés pour la faire se coucher. Elle
voulait à tout prix repasser dans nos
conversations le travail de la journée, elle
me cajolait pour me faire conter mes
expériences du champ de bataille. Toutes ses
pensées et toute son activité se
concertaient sur le combat que menait
l'Armée : sauver des pécheurs et
découvrir des amis qui fourniront les
subsides pour l'extension de l'oeuvre de
l'Armée.
La dernière fois que
Miriam vint dans un de mes postes, c'était
à Norland Castle. À la fin de son
discours, à la réunion du dimanche
après-midi, elle sentit qu'elle devait faire
un appel direct à l'auditoire, pour qu'il se
convertisse maintenant et dans cette salle. Dix
ivrognes vinrent au banc des pénitents.
Miriam semblait vraiment un ange agenouillé
auprès de ces pauvres hommes,
s'efforçant d'aider ces âmes
stupéfiées et de les introduire dans
la pleine lumière de Dieu. Le soir, un seul
de ces hommes revint, elle
remarqua avec un clignement d'oeil malicieux,
citant une parole de Jésus :
- N'étaient-ils pas
dix?
Les neuf autres, où sont-ils?
Cependant, elle fut
heureuse
qu'il y en eût au moins un qui tînt
bon.
Je compte ma
connaissance intime
de la Capitaine Miriam comme une de mes joyeuses
expériences dans l'Armée. Parmi ses
grâces et ses dons, après son amour
pour les âmes, venait son habileté
à se familiariser avec les personnes qui
l'entretenaient, sans pour cela se livrer à
elles.
À peu près au moment
dont nous parle la Capitaine d'Etat-Major Kate Lee,
Miriam accompagna Mme Booth pour plusieurs
réunions en Angleterre et sur le continent
européen. Par ses chants, par son
témoignage, elle fut en
bénédiction à
plusieurs.
Un écho d'une visite en
Suisse, pendant les Assemblées de
l'Ascension se trouve dans une lettre de sympathie
qu'un officier suisse adressa à Mme Booth
après la mort de Miriam. Il écrivit
:
Pendant votre visite en
Suisse,
lorsque vous présidiez, Madame, nos
fêtes de l'Ascension, votre fille Miriam vous
accompagnait. À chacune des réunions,
au moment où commençait l'appel aux
âmes de s'approcher pour chercher le Sauveur,
elle se mettait au
piano.
Avec quelle joie et quel oubli de soi-même
elle accompagnait les choeurs. De temps en temps,
elle se levait et venait près du banc des
pénitents :
- Brigadier,
combien?
- Quinze, vingt,
vingt-cinq.
Le visage radieux, elle
retournait au piano, ne paraissant même pas
se fatiguer. Lorsqu'elle demanda pour la
troisième fois combien se sont
approchés du banc des pénitents, elle
découvrit qu'il y en avait tant que nous
savions à peine où les placer. Elle
retourna à sa place; ses pieds ne semblaient
plus toucher terre. Plusieurs officiers avec moi
étaient émus aux larmes d'un tel
amour pour les âmes chez cette jeune fille.
Elle fut un exemple pour chacun de nous, et une
bénédiction inoubliable pendant
toutes ces années.
La Commissaire Duff nous raconte
une
visite que Miriam fit avec elle aux oeuvres
sociales de l'Armée :
Entre autres, nous
visitâmes un refuge pour femmes, et je
remarquai comment elle sut trouver rapidement et
naturellement le coeur des femmes présentes.
Nous eûmes une petite réunion et je
lui demandai :
- Voulez-vous chanter
et leur
adresser quelques mots?
- Pourquoi pas?
répondit-elle.
Elle commença à
chanter et s'arrêta subitement
- Elles ne peuvent pas
me voir!
s'exclama-t-elle. Je n'ai pas
besoin qu'elles se tordent le cou pour me voir.
Donnez-moi une chaise.
Et elle grimpa sur sa
chaise,
afin que toutes puissent la voir aisément.
Elle chanta et leur parla. Puis, descendue de sa
chaise, elle se mêla à elles, semant
des paroles d'affection et de gentils sourires,
jusqu'à ce qu'elles fussent toutes
réjouies et encouragées. Je racontai
cela plus tard à Mme Booth; elle sourit et
elle me dit :
- Oui, c'est bien la
façon
de Miriam.
Dans son adolescence, Miriam fut
obligée d'aller à
l'établissement d'hydrothérapie de
Metcalf, à Richmond. La directrice Burgin,
une vraie chrétienne, était,
attirée par cette enfant radieuse qui, bien
que souffrante, glissait comme un rayon de soleil
à travers les chambres.
C'était une charmante
fillette, dit Mlle Burgin. Les traits principaux de
son caractère qui me frappèrent le
plus, en ce temps-là, c'étaient son
amour pour sa Bible, sa foi, son courage. Elle me
dit une fois quelques mots par hasard qui eurent
sur moi une influence éternelle. Quelques
jeunes filles, qui étaient en traitement ici
à ce moment-là, discutaient à
propos des romans qu'elles lisaient au lit avant de
s'endormir. Les yeux de Miriam disaient son
étonnement, lorsqu'elle me confia
:
- Songez donc, lire
quelque chose
après avoir lu sa Bible !
Depuis ce temps, j'ai
senti aussi
que la Parole de Dieu devait être ma
dernière lecture le soir.
Miriam n'était
nullement
solennelle. Elle babillait avec humour, elle
semblait projeter du soleil autour d'elle. Elle se
joignait à tous les groupes. Un habit
spécial, tel l'uniforme de l'Armée du
Salut, ne convient pas dans de semblables
établissements; mais Miriam porta toujours
sa broche salutiste. Pour ce qui est de parler de
l'Armée, elle ne pouvait s'en
empêcher. Elle avait cela dans le sang. Elle
forçait les gens à aimer ce qu'elle
aimait. Elle intéressa les malades à
son oeuvre. Un jour, elle vint me trouver,
très amusée, parce qu'une brave dame
s'était étonnée qu'une
salutiste sache parler un anglais classique et
élégant; elle fut encore plus
étonnée d'apprendre que Mlle Booth
parlait couramment le
français.
- Elle s'imagine que
ces choses
ne s'accordent pas. Quelles drôles
d'idées les gens se font donc de
l'Armée !
Et Miriam riait.
Elle venait dans ma
chambre tous
les matins et nous priions ensemble. Ses
prières étaient si simples et si
confiantes, qu'une fois je lui dis
- Miriam. vous semblez
certaine
de l'exaucement de vos
prières.
Elle fixa sur moi ses
grands yeux
étonnés
- Naturellement, j'en
suis
sûre, répliqua-t-elle.
Les doutes et les
difficultés spirituelles semblaient
impossibles à son esprit pur et confiant.
Pendant les nombreuses années que J'ai
passées ici, pas une malade ne fit une si forte
impression sur le personnel. Une de nos
infirmières l'appelle encore « la
petite sainte ». Quand sa mort nous fut
annoncée, quatre de celles qui
étaient ici, il y a quinze ans,
demandèrent des billets pour le service
commémoratif,
J'étais enfant au
moment
des émeutes contre les salutistes à
Eastbourne. Mon père, pasteur dissident de
la ville, dit :
- Nous vivrons assez
pour voir le
triomphe de ces gens-là.
Lorsque je vis le
cercueil de
Miriam descendre Clapton Road et toute la
circulation arrêtée pour permettre le
passage de cette longue procession, un sanglot de
joie souleva ma poitrine; car non seulement j'avais
vu le jour annoncé par mon père, mais
encore j'avais vu, dans les enfants de la
troisième génération, revivre
l'esprit des pionniers de
l'Armée.
Quand Catherine et
Marie
quittèrent le foyer pour devenir
officières, Miriam y prit la place de fille
aînée. Les petites marques d'affection
et les milles petites attentions qu'elle prodiguait
à ses parents et à son
grand-père, et qui rendent la vie plus
facile et plus heureuse, firent d'elle un
trésor inestimable. Dans une lettre à
sa mère, après avoir mentionné
d'une manière méthodique une douzaine
d'affaires, elle continue :
J'étais vraiment
embarrassée sur ce point, je n'avais pas
compris tout d'abord ce que vous désiriez
exactement, et vous savez que je souhaite toujours
faire ce que vous désirez.
D'anciennes servantes de la
maison,
maintenant mariées, écrivirent au
moment de son départ pour la demeure
céleste, l'âme en deuil. Une d'elles
dit :
La chère Mlle Miriam,
elle
ne se plaignit pas une seule fois pendant tout le
temps que j'étais chez vous.
Mme la Commissaire
Booth-Hellberg
rappelle l'impression que les soins affectueux de
Miriam firent sur sa petite Mildred (sa Mimi),
lorsqu'elle dut la laisser pendant six mois au
« Homestead » :
La petite ne savait que
le
français, écrit Mme Booth-Hellberg,
et Miriam comprenant parfaitement cette langue,
prit la petite sous son aile protectrice; elle
l'entoura d'affectueuses attentions. Pour les
distinguer, Miriam fut appelée « Grande
Mimi » et la petite Mildred « Petite Mimi
». Lorsque « Petite Mimi » revint
à la maison, elle me raconta plusieurs
jolies histoires de la « Grande Mimi »;
elle me dit son amour pour les méchants
petits garçons de High Barnet, et comment
elle conduisait la « Petite Mimi » aux
réunions de la Jeune Armée le
dimanche après-midi; elle
marchait à pied tout le long de la route
pour que le bébé de six ans puisse
s'asseoir sur la bicyclette et ne point fatiguer
les petites jambes courtes et
rebondies.
Miriam était une source de
grandes joies pour ses frères et soeurs. Les
dernières années, elle entreprit
l'éducation des deux plus jeunes, et la dame
qui lui enseignait les langues dit :
C'était vraiment
intéressant de la contempler avec les petits
et particulièrement avec le petit Wycliffe,
presque bébé encore. Je me rappelle
Miriam assise avec le petit sur ses genoux, elle
lui lisait des histoires d'animaux. Elle se
glissait si bien dans l'esprit du récit que
je suis sûre que la chambre se peuplait, pour
le petit garçon, de toutes les
créatures dont le livre
parlait.
Wycliffe conserve
précieusement le souvenir heureux de ces
jours-là. Il déclare :
Mim exerça sur ma vie
une
bonne et puissante influence. C'est elle qui me fit
comprendre que j'étais pécheur aux
yeux de Dieu. Voici comment cela arriva. Un soir,
j'avais environ neuf ans, elle surveillait mon
coucher. Je ne portais ni souliers, ni chaussettes
en ce temps-là, et tandis que je me lavais
les pieds dans la salle de bains, elle me parla
sérieusement. Elle commença par une
série de questions :
Wyc, comment cela
va-t-il? Ne
pensez-vous pas qu'il serait
temps de vous convertir? Vous n'êtes pas
sauvé, n'est-ce pas?
Je n'étais pas
préparé à cette attaque et je
le lui fis voir; mais évidemment elle avait
dressé ses batteries intentionnellement et
ne me lâcha point.
L'exagération était
un de mes défauts à cet âge, et
elle m'en montra la laideur, elle fit
défiler ainsi devant moi tous mes autres
péchés jusqu'à ce que je
sentisse combien le péché
était haïssable. Alors elle me fit
prier. Ma prière était si ardente et
si sincère, que je crois que ce
soir-là Dieu changea mon coeur. À ce
moment je choisis définitivement de suivre
Jésus.
Mim était professeur
née. Elle rendait la géographie
intéressante, et l'histoire, comme elle
l'enseignait était vraiment vivante et
fascinante. Maigre son enseignement animé et
agréable, elle tenait la main à la
discipline. Si une leçon avait
été mal sue, elle ne nous le laissait
pas ignorer. Un jour, je le confesse à ma
honte, je n'avais pas même regardé ma
leçon; alors Miriam fit une chose dont on
n'avait jamais entendu parler dans notre maison :
elle me donna un soufflet cinglant sur la joue.
J'étais un grand et fort gaillard, capable
de supporter une douzaine de pareils coups; j'en
fus plus étonné que je n'en souffris,
et tout ce que je dis, fut :
- Bien, Mim, vous êtes
la
première qui m'ayez jamais
giflé.
Le lendemain, elle me
dit
:
- Wyc, je regrette de
vous avoir
souffleté, hier, mais vous
le méritiez, vous savez (certainement je le
méritais), je le regrette tout de
même.
Cet incident agit
puissamment sur
moi. J'avais si honteusement abusé de sa
patience, et elle était assez bonne pour me
faire des excuses à moi le coupable.
Longtemps après, le souvenir de cette minute
m'aidait encore à persévérer
dans mes efforts.
Miriam excellait dans
toutes les
situations. La plus joyeuse des camarades, je ne
connais Personne qui sache conter une histoire
comme elle le faisait. Mes premiers souvenirs de
Miriam se rattachent à un jeu d'imagination
que nous jouions tous ensemble. Dans nos
promenades, n'importe où nous allions, nous
observions les gens pour les faire entrer comme
personnages dans ce jeu sans fin. Nous nous
amusions énormément. Nous, les plus
jeunes, nous adoptions très vite les
personnages de Miriam, car son imagination lui
suggérait des exploits surprenants. Nous la
mettions souvent à bout de ressources, et je
me rappelle comment, lorsqu'elle ne savait plus que
dire ensuite, elle nous sortait cette phrase en
français : « Et le père a dit...
» (Nous parlions toujours français
entre nous.) Une clameur de protestation
s'élevait alors contre elle, car le
père dans notre jeu, disait toujours :
« Enfants, il est temps de se coucher.
»
Plaire à Dieu, voilà
le but de Miriam, non pas seulement dans les
circonstances spéciales, non pas d'une
manière spasmodique, par foucades, mais
délibérément, constamment, chaque jour. Sa vie
spirituelle,
tel un clair et pur ruisseau portant la
fraîcheur et la fécondité sur
son passage, coulait, augmentant de force et de
volume chaque année, nourrie des eaux vives
des collines célestes.
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