Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
REGARD
Bibliothèque chrétienne online
EXAMINEZ toutes choses... RETENEZ CE QUI EST BON
- 1Thess. 5: 21 -
(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



LA BIBLE


§ 4. on reproche enfin à la Bible d'attrister les enfants et d'assombrir la vie humaine par ses doctrines de la justice de Dieu, du jugement, de l'enfer.

Ce n'était pas, Messieurs, ce que pensait un citoyen de cette ville, vieux républicain de 1831. Il professait l'incrédulité ; mais lorsque la première école du dimanche fat fondée ici par feu Augustin Favre, il y envoya ses enfants. Un de ses amis, de qui je tiens le fait, ne put s'empêcher de lui exprimer l'étonnement que lui causait cette inconséquence. Eh ! répondit-il, si je veux qu'ils ne soient pas aussi malheureux que moi !

C'est qu'en effet la Bible ne rend pas malheureux. Ne confondons pas, s'il vous plaît, joie et gaîté, bonheur et plaisir, sérieux et tristesse. La joie, le bonheur, vous les trouvez chez les enfants qui ont cru à la Bible, et chez les hommes qui acceptent sa révélation. Combien de fois n'ai-je pas entendu des adversaires de la Bible et parmi eux des hommes instruits et même haut placés dans l'administration de l'Etat, me dire : « Je voudrais croire ! Je voudrais avoir la foi de ma mère ! » D'où vient cet aveu, sinon de la conscience que la Bible donne une paix qu'on ne trouve pas ailleurs ?

Et croit-on sérieusement que le bonheur pour les enfants et pour les hommes consiste à ignorer et à laisser de côté les graves problèmes que la raison voit sans cesse se dresser devant elle ? En ne les connaissant pas, les supprime-t-on ? La négation de Dieu le tue-t-elle ? Vivre sans penser à la mort empêche-t-il de mourir? Est-ce une éducation digne de ce nom que celle qui consiste à présenter aux enfants la vie comme une fête incessante ? Est-ce assombrir leur existence que de les préparer aux rudes combats qu'ils auront à soutenir? Ne leur faut-il pas au contraire une éducation virile pour qu'ils ne demeurent pas trop au-dessous de leur tâche? Et croyez-vous qu'ils seront bien malheureux quand ils sauront qu'il y a au Ciel un Dieu vivant, mais un Dieu qui est leur père; quand on leur aura appris à envisager la mort en face, et à regarder Celui qui est le vainqueur de la mort ? J'ai vu mourir des enfants qui savaient qu'ils allaient mourir, et qui se réjouissaient de mourir, parce qu'ils savaient où ils allaient. Dernièrement mourait ici un enfant de 6 ans qui, pendant sa maladie, disait souvent: « Le ciel ! Le ciel ! Au ciel je serai guéri ! » Etait-il donc si malheureux de croire au ciel !

Illusions, dira-t-on; illusions tant que vous voudrez, mais ce sont des illusions qui font du bien. On est plus heureux quand on croit qu'il y a quelqu'un au ciel que quand on croit que le ciel est vide ; plus heureux quand on croit à l'efficace de la prière que quand on croit au fatalisme ; plus heureux quand on croit à la vie éternelle que quand on croit au néant; plus heureux quand on croit à l'expiation que quand on sent l'aiguillon du péché sans savoir où est la délivrance, et surtout que quand on ne sent pas l'aiguillon du péché. Illusions ! dira-t-on encore; illusions tant que vous voudrez, mais laissez-nous nos illusions, jusqu'à ce que vous ayez trouvé quelque chose qui les puisse remplacer.

Le célèbre astronome Lalande chercha à propager l'athéisme dans le canton de Vaud, mais on lui opposa quelquefois des arguments inattendus. Pendant son séjour à Lausanne, il fit visite à M. de Treytorrens, professeur de philosophie. Ce dernier, atteint d'une maladie douloureuse, était plongé dans une profonde mélancolie. L'athée lui fait part de son système. M. de Treytorrens l'écoute avec patience; puis, le conduisant devant ses pistolets, il lui parle des maux qui l'accablent, du régime austère qu'il suit depuis plusieurs années et de cette maladie affreuse qui lui rend l'existence insupportable. Il n'y a plus de bonheur pour moi, lui dit-il, je n'ai pas un seul moment de plaisir sur la terre; je ne puis pas même espérer quelque adoucissement à mes maux; toute ma force, mon unique consolation est dans l'espoir d'une meilleure vie, et si vous parveniez jamais à ébranler ma certitude, vous voyez ces deux pistolets ! Le premier serait pour vous, homme cruel; le second pour moi, à qui il ne resterait aucun motif pour supporter plus longtemps mon infortune. - M. de Lalande se retira sans réplique.

Mais ce ne sont pas des illusions. La nourriture que je prends et qui soutient mon corps est-elle illusoire? Ces espérances, ces consolations qui soutiennent mon âme, la dressent vers le ciel, la nourrissent, la fortifient, seraient-elles des illusions? Non certainement.

Peu de temps avant sa mort, Walter Scott, sentant sa fin prochaine, se tourna un jour vers son gendre, et lui dit: Donnez-moi un livre, je voudrais lire quelque chose. - Quel livre désirez-vous? lui répondit son gendre. - Pouvez-vous me poser une telle question? demanda avec surprise le grand écrivain. Mais il n'y a qu'un seul livre au monde, ô précieuse Bible ! Il n'est rien qu'elle n'offre , rien qu'elle ne donne à l'homme qui sent sa misère et qui cherche les vrais biens. Vérité qui ne vieillit jamais, richesse qui dure à toujours, joies qui ne lassent point, couronne qui ne se flétrit point, adoucissement dans la souffrance, soulagement dans l'inquiétude, bienheureuse espérance de la vie éternelle : tels sont les dons que Dieu a déposés dans sa Parole pour tous ceux qui l'aiment et la vénèrent. »

Ainsi parlait Walter Scott, et il disait vrai. Tels sont les biens que la Bible apporte à ceux qui l'aiment, et si elle est la joie de l'homme fait, la force du vieillard, la consolation, du mourant, elle n'assombrira pas nos enfants et ne gâtera pas leurs joies, mais sanctifiera leur gaîté.

Je dis donc, Messieurs, et je crois l'avoir établi par des faits : la Bible n'est pas immorale , elle n'éteint pas l'intelligence, elle n'avilit pas les caractères, elle n'attriste pas la vie. On a dit qu'elle doit avoir une influence funeste sur la conscience et sur l'intelligence; il est facile de savoir quelle influence elle doit avoir; il suffit de se rendre compte de celle qu'elle a eue. Ceci n'est point affaire de raisonnement, c'est affaire d'expérience, et l'expérience a prononcé; je conclus donc que les raisons alléguées sur lesquelles on s'appuie pour demander qu'elle soit ôtée des mains des enfants et retranchée de leur éducation, ne peuvent pas motiver une telle révolution. Il me reste à vous développer les raisons pour lesquelles les chrétiens demandent que la Bible ne cesse pas d'être le fondement de l'éducation de l'enfance. Je ne ferai que les indiquer brièvement, car j'ai l'espoir que cette question sera abordée par un de nos pédagogues les plus distingués. Je ne m'occuperai pas de la Bible comme instrument de culture intellectuelle; il y aurait beaucoup à dire sur ce sujet; je ne m'occuperai d'elle que comme instrument de culture morale, et je dis qu'à ce point de vue nul livre ne peut l'égaler.

En premier lieu, elle parle de Dieu comme personne n'a parlé de lui ; elle donne à l'enfant les notions les plus justes, les plus précises, les plus profondes, les plus simples sur cet être insondable, sur sa nature et ses perfections ; non-seulement cela : elle le montre agissant; le Dieu de la Bible n'est pas le Dieu qui, ayant créé le monde, lance la terre d'un coup de pied dans l'espace et rentre dans son repos ; il n'est pas davantage le Dieu-nature qui se confond avec les lois de la nature et se perd dans la nature; il n'est pas non plus le Dieu-bon enfant qui laisse tout passer et ne s'indigne de rien ; il est encore moins un Dieu sans entrailles et sans compassion. C'est un Dieu vivant, personnel, au-dessus du monde, en dehors de la nature, qui s'occupe des êtres qu'il a créés, pour lequel aucun détail n'est trop petit, présent partout, agissant sans cesse, entendant les prières, les exauçant, dirigeant les événements, saint et miséricordieux. La Bible le montre entrant dans l'histoire, préparant le salut de l'humanité, maudissant le péché, frappant le pécheur impénitent, faisant grâce à celui qui se repent, et sauvant enfin ses enfants perdus par une telle manifestation de son amour que ceux qui jugent Dieu d'après eux-mêmes ne peuvent pas comprendre ni croire que Dieu ait pu nous aimer à ce point.

Eh bien, Messieurs, mettez les enfants en rapport avec ce Dieu de la Bible, avec ce Dieu de paix, avec ce Dieu saint, avec ce Dieu bon, ils apprendront à le voir partout, à se tenir en sa présence, à marcher sous son regard ; la pensée de Dieu agira sur leur conduite, elle les détournera du mal comme Joseph, elle leur apprendra à n'avoir pas d'autre crainte que celle de Dieu et à ne plier ni devant les menaces ni devant les promesses; ils sauront qu'ils peuvent se confier en lui ; ils le prieront, et dans ce commerce avec leur Dieu, ils puiseront la force de travailler, la volonté de faire le bien, et l'énergie nécessaire pour l'accomplir. Ce sont là les enfants qu'il nous faut, si nous voulons préparer une génération virile et saine, et c'est pourquoi je dis : Mettez-les en rapport avec le Dieu personnel et vivant, agissant et présent partout, saint et bon, que la Bible nous fait connaître avec une si admirable précision.

Il faut que l'enfant connaisse Dieu, il faut aussi qu'il connaisse son devoir ; sa conscience lui parle, mais sa conscience peut être faussée, endormie, peu éclairée; elle est insuffisante; il lui faut une loi immuable, écrite, que l'intérêt, l'égoïsme, la peur, l'ambition, les passions ne puissent modifier; qui soit toujours là, devant lui, inaltérable, réveillant sa conscience. Cette loi est dans la Bible. Connaissez-vous un livre qui dise mieux, qui expose plus complètement à l'enfant, à l'homme, ses devoirs? Mais la Bible fait plus que de rappeler le devoir; elle montre, dans la vie de ceux dont elle parle, comment ce devoir a été accompli ou violé ; c'est ainsi une action vivante qui se passe sous les yeux de l'enfant; elle fait plus encore : elle lui montre la sainteté réalisée en Jésus-Christ. Quelle que soit votre opinion sur Jésus-Christ, vous ne lui refuserez pas d'avoir vécu dans une sainteté que nul n'a surpassée ni égalée. Eh bien, croyez-vous qu'il soit inutile de présenter aux enfants cette vivante sainteté? Si nous les excitons à l'amour de la patrie en leur rappelant des exemples de patriotisme, pourquoi ne les exciterait-on pas à la sainteté en leur présentant le modèle parfait de la sainteté ? Et savez-vous ce qui se passe dans l'âme de l'enfant mise en présence de Jésus-Christ? Il l'admire, il l'aime, il s'attache à lui ; mais en môme temps il reconnaît combien il s'en faut qu'il ne ressemble à son modèle ; il sent sa faiblesse; il voudrait faire le bien, et alors commence en lui quelque chose d'infiniment précieux, et que nul éducateur ne négligera : une lutte morale !

Il lutte contre le mal qui est en lui, il en souffre, il le déplore, et il lutte pour atteindre le bien que sa conscience lui révèle et que Jésus lui montre, il y fait effort, il le cherche, il le veut, il le demande à son Dieu par la prière. Quand cette passion du bien est allumée dans une âme, sa cause est gagnée; et pourquoi hésiteriez-vous à mettre entre les mains des enfants le livre qui, mieux que tout autre, révèle le devoir, le fait aimer, et fait connaître Celui par lequel il est possible de l'accomplir?

Dieu, le devoir, voilà les deux notions sans lesquelles il n'est pas d'éducation possible, et que la Bible présente non-seulement avec clarté, mais de la manière la plus vivante. Il en est une troisième à ajouter à ces deux premières : la fraternité. Tous les hommes sont frères; tous ont droit an respect et à l'affection de tous; tous sont égaux; tous sont membres de la même famille. C'est cette vérité que la Bible enseigne de telle manière que toute hésitation devient impossible dans l'accomplissement de nos devoirs envers les autres hommes. Elle dit que tous les hommes descendent du même père; elle dit que tous ont participé à la même chute, et que la race entière est tombée avec son chef; mais que chaque âme d'homme est tellement précieuse aux yeux de Dieu qu'il n'a pas reculé pour sauver le monde devant le plus grand des sacrifices. Comment serait-il possible dès lors de dire à telle race : Tu es faite pour servir, puisque nous sommes tous enfants d'Adam? De dire à tel individu : Je t'envisage comme une chose sans valeur, puisque Dieu l'a racheté an prix du sacrifice de son Fils? De dire à tel autre : je te hais, puisque Dieu l'a aimé jusqu'à lui donner son Bien-aimé? Que devient la vengeance en présence de la croix du Calvaire, et de la prière de Jésus pour ses bourreaux? Que devient l'égoïsme quand nous voyons Christ s'immoler pour nous? Quelles bornes poserons-nous à notre charité quand Jésus n'en a posé aucune à la sienne? Ah! n'éloignez pas de vos enfants ce livre où l'amour fraternel et le respect de l'âme humaine sont poussés jusqu'à leurs plus lointaines limites, mais laissez au contraire leur mémoire retenir ces préceptes divins de charité, et leur coeur se réchauffer, s'animer, se purifier, se dépouiller de tout égoïsme, au contact de l'amour brûlant du Crucifié; cette croix tue l'orgueil, l'indifférence, l'égoïsme, la haine ; elle enseigne le respect de l'individu quel qu'il soit et la charité pour l'individu quel qu'il soit ; cette croix a fondé la fraternité en établissant la commune origine de l'humanité, sa commune chute et sa commune rédemption; cette croix sauve, laissez vos enfants être sauvés !

Enfin, Messieurs, une éducation est manquée lorsqu'elle est toute tournée vers la terre, comme le temps passé à l'école, serait un temps perdu s'il ne préparait à la vie qui doit suivre. Il faut que nos enfants apprennent qu'ils sont appelés à de plus hautes destinées que celles qui les attendent ici-bas; il faut qu'on leur enseigne à juger les choses et les événements de haut, non du point de vue de ce monde, mais de celui de l'éternité, de manière à n'être ni éblouis par la bonne fortune, ni découragés par la mauvaise; il faut qu'ils sachent que le temps est une préparation de l'éternité, et c'est seulement alors qu'ils comprendront la valeur du temps, comme ils ne comprennent à quoi sert l'école que quand ils savent qu'elle les prépare à la vie dans laquelle ils entreront bientôt. Parlez-leur du ciel, de la vie à venir, de l'éternité, et le résultat de vos paroles ne sera pas de les rendre indifférents à la vie actuelle, au devoir, à la tâche à accomplir, mais de les détacher des petites ambitions, des mesquines satisfactions d'amour-propre, des jouissances grossières et mauvaises; vous déposerez en eux le germe des grands dévouements, du saint oubli de soi-même; vous ouvrirez en eux une source intarissable de parcs joies, de précieuses consolations pour l'avenir; vous les armerez de la patience et du courage si nécessaires dans la vie présente, où les intentions les meilleures sont souvent mal comprises, et où les efforts pour la plus sainte cause ne sont souvent couronnés que d'insuccès, en leur faisant comprendre que quels que soient nos revers ici-bas, l'éternité est là pour réparer les erreurs du temps présent.

Et où trouverez-vous pour cet enseignement, sans lequel une éducation est manquée, des lumières plus pures', des instructions plus nettes, des révélations plus précises que dans la Parole de Dieu? Elle prêche non point une vague et confuse immortalité, mais la persistance de la personnalité humaine; bien plus, une résurrection du corps, qui ne me paraît pas plus impossible que la création à laquelle je suis obligé de croire; puis un jugement, et enfin la continuation dans l'éternité de notre vie dans la direction que nous lui aurons imprimée ici-bas: avec Dieu, si déjà sur cette terre Dieu a été le centre de notre vie, c'est le ciel; sans Dieu, si déjà' sur cette terre nous avons vécu sans Dieu, c'est l'enfer. Ah ! Messieurs, que ces vérités pénètrent dans les coeurs; nous aurons encore des savants, mais surtout nous aurons des hommes, des hommes qui ne veulent point se suicider eux-mêmes en renfermant leur vie dans les quelques années de l'existence présente, mais qui regardent plus loin, qui aspirent plus haut, qui savent souffrir, qui peuvent être consolés, qui espèrent, qui attendent, qui demeurent fermes, parce que pour eux le dernier mot de la vie n'est pas le cimetière et que leur plus belle espérance n'est pas de mourir comme des chiens.

Voulez-vous donc, Messieurs, des hommes qui connaissent Dieu, qui connaissent le devoir, qui s'aiment, et qui marchent les coeurs en haut et les regards en haut? Donnez la Bible à vos enfants, car c'est elle qui est le meilleur instrument d'éducation morale.

« Les protestants, a dit M. Jules Simon, qui donnent une Bible à chaque couple dont ils bénissent l'union, ne rendent pas seulement service au protestantisme, mais à l'humanité. »

Je n'ai fait qu'indiquer ce rôle de la Bible dans l'éducation; le temps ne me permet pas de donner à cette partie de mon sujet tous les développements qu'elle comporte, et d'ailleurs j'ai l'espoir qu'elle sera reprise par un homme autrement plus compétent que moi. Je veux seulement ici laisser aussi parler les faits, comme je l'ai déjà fait, et auparavant encore, sans m'arrêter au témoignage de Goethe, qui dit qu'il est redevable à la Bible de tout son développement moral, et qui ajoute : « Plus les siècles gagneront en culture, plus la Bible pourra être utilisée, soit comme base, soit comme moyen d'éducation, non pas sans doute par les esprits suffisants, mais par les hommes véritablement sages », vous citer ces belles paroles de Guillaume de Hambold : « La consolation de la Bible découle avec une égale abondance, quoique d'une manière différente, de l'Ancien et du Nouveau Testament. Il ne peut y avoir aucune disposition d'esprit ou de sentiment qui ne trouve son écho dans l'Ecriture sainte. Peu de choses sont assez difficiles pour qu'un sens simple ne puisse les pénétrer. Le savant pénètre seulement plus profondément; mais nul ne s'en retourne sans avoir trouvé de quoi le satisfaire. La lecture de la Bible est une source infinie de consolation, la plus sûre qu'il y ait. Je ne sais rien qui puisse lui être comparé. »

Mais j'en viens aux faits.

Le 22 juillet 1620, un petit vaisseau partait de Hollande , emportant des émigrants pour l'Amérique; obligés de relâcher en Angleterre, ils quittaient ce dernier pays le 6 septembre sur la Fleur de Mai. Cette Fleur de Mai est le berceau de cette nation forte, puissante, libre, prospère, qui s'appelle les Etats-Unis; ce navire était monté par ceux qui furent les fondateurs de cet empire. Qui étaient ces hommes, Messieurs, et qu'étaient-ils? C'étaient des puritains chassés de l'Angleterre par la persécution et qui cherchaient un coin de terre où ils pussent servir Dieu selon leur conscience; c'étaient des hommes de la Bible. Ils s'étaient préparés à leur entreprise par la prière, le jeûne, la lecture de la Parole de Dieu.

Au moment du départ, ils tombent à genoux et leur pasteur implore encore sur eux la bénédiction de Dieu. Ils partent emportant dans leurs coeurs les vertus qu'ils ont apprises à l'école de la Bible, humilité devant Dieu, égalité et fraternité entre eux, respect et obéissance aux élus du peuple souverain. Ils partent, et 250 ans plus tard, le peuple sorti d'eux couvre un monde. Ils partent, et leur Eglise républicaine a enfanté une société qui lui ressemble, et de la religion de ces hommes est sortie une liberté qui a résisté à tous les orages, et que la plaie de l'esclavage n'a pu détruire. Ils partent, et ils élèvent sur la terre l'impérissable monument qui atteste que si la liberté ne se trouve ni dans les doctrines fatalistes du Coran, ni dans les doctrines désespérées du Bouddhisme, elle se trouve dans l'Evangile, et que toutes les libertés, religieuse, sociale, politique, individuelle, sont filles de la Bible.

Il y a quelques années mourait un poète, enfant d'un siècle sans foi, qui ne se pare pas de sentiments qu'il n'éprouve pas, et qui nous montre sans détour le vide affreux que la mort de la foi a laissé dans le coeur humain. Il dit :

 

O Christ, je ne suis pas de ceux que la prière
Dans tes temples muets amène à pas tremblants;
Je ne suis pas de ceux qui vont à ton Calvaire,
En se frappant le coeur, baiser tes pieds sanglants.
. . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . .
Je ne crois pas, ô Christ, à ta parole sainte;
Je suis venu trop tard dans un monde trop vieux.
D'un siècle sans espoir naît un siècle sans crainte.
Les comètes du nôtre ont dépeuplé les cieux.

Le poète se réjouit-il de cette absence de foi? Ecoutez :

Ton cadavre céleste en poussière est tombé! ...
Eh bien! qu'il soit permis d'en baiser la poussière
Au moins crédule enfant de ce siècle sans foi,
Et de pleurer, ô Christ, sur cette froide terre
Qui vivait de ta mort et qui mourra sans toi!
. . . . . . . . . . . . . . . . .
Du plus pur de ton sang tu l'avais rajeunie
Jésus, ce que tu fis, qui jamais le fera?
Nous, vieillards nés d'hier, qui nous rajeunira?

 

Et c'est alors que le poète, en face de cette vie sans foi, sans espérance, réduite à la débauche, et de cette terre dégénérée, désespérée, morte comme aux jours de Claude et de Tibère, applique le fer chaud de son indignation sur le front de celui qu'il envisage comme l'artisan de cette ruine immense :

Dors-tu content, Voltaire, et ton hideux sourire
Voltige-t-il encor sur tes os décharnés?
Ton siècle était, dit-on, trop jeune pour te lire;
Le nôtre doit te plaire, et tes hommes sont nés.
. . . . . . . . . . . . . . . . .
Crois-tu ta mission dignement accomplie,
Et, comme l'Eternel, à la création,
Trouves-tu que c'est bien et que ton oeuvre est bon?

- Puis un cri de douleur:

Et que nous reste-t-il, à nous, les déicides?
Pour qui travailliez-vous, démolisseurs stupides,
Lorsque vous disséquiez le Christ sur son autel?
Que vouliez-vous semer sur sa céleste tombe?..
. . . . . . . . . . . . . . . . .
Vous vouliez pétrir l'homme à votre fantaisie?
Vous vouliez faire un monde? Eh bien, vous l'avez fait,
Votre monde est superbe, et votre homme est parfait!
Les monts sont nivelés, la plaine est éclaircie;
Vous avez sagement taillé l'arbre de vie.
Tout est bien balayé sur vos chemins de fer;
Tout est grand, tout est beau; mais on meurt dans votre air!
. . . . . . . . . . . . . . . . .
L'hypocrisie est morte, on ne croit plus aux prêtres.
Mais la vertu se meurt, on ne croit plus à Dieu.

Messieurs, voulez-vous que la génération future soit de celles qui fondent les empires et maintiennent les républiques, ou de celles qui perdent tout avec la foi, et qui s'en vont, le vide au coeur, la mort devant elles, sans savoir où, doutant de tout, se moquant de tout? Voulez-vous des coeurs forts comme les puritains, on des coeurs vides et malades comme ceux dont parle Alfred de Musset dans la page immortelle que je viens de vous rappeler? Messieurs, choisissez: laissez la Bible à vos enfants, et instruisez-les selon la Bible, vous aurez des hommes forts ; ôtez la Bible, vous aurez cet état moral que dépeint le poète avec une énergie qui n'a d'égale que la vérité de sa description.

En 1820, Pestalozzi prononçait ces paroles: « Connaître exactement l'histoire biblique, et, en particulier, la vie, les souffrances et la mort de Christ, puis s'approprier, par un esprit de foi enfantine, les plus sublimes passages de la Bible, voilà ce que j'envisage comme le commencement et l'essence de ce qui est indispensable relativement à l'enseignement religieux, et après cela il faut chercher avec une sollicitude paternelle à faire comprendre aux enfants tout le prix de la prière faite avec foi. » Voilà de bonnes paroles, et des paroles vraies. Nous ne demandons pas que l'enseignement religieux soit rendu obligatoire, mais qu'il y ait un enseignement religieux, dans la famille, dans l'école, pour ceux qui veulent y prendre part, dont la Bible soit le fondement, et je ne peux que répéter le cri de Herder: Esprit de Dieu, souffle sur nos écoles ! Oh ! merci aux instituteurs et aux institutrices qui, comprenant la valeur de ce livre, veulent le lire avec leurs élèves. Vous travaillez pour le bien de la patrie en instruisant les enfants qui vous sont confiés, vous y travaillez plus encore en les formant selon la discipline de la Parole de Dieu.

Je ne redoute point, pour la vérité religieuse, des discussions analogues à celle qui s'est produite ici. Je me demande seulement si la société d'utilité publique, société subventionnée par l'Etat, est bien le milieu où elles doivent avoir lieu, et s'il ne vaudrait pas mieux qu'elle restât en dehors des discussions politiques ou religieuses de nature à froisser une partie de ses membres. Mais je n'insiste point. Je n'ajoute plus qu'un mot La Bible restera debout. Une vieille gravure la représente comme une forte enclume autour de laquelle se lit cette fière devise

Tant plus à me battre on s'amuse
Tant plus de marteaux on y use.

La vérité de cette devise a été déjà démontrée bien souvent; elle le sera une fois de plus.



Table des matières

.

NOTES

Comme je m'y attendais, M. le professeur Buisson a dit que je ne lui avais pas répondu, car il n'a jamais accusé la Bible d'être un livre immoral, étouffant l'intelligence, opposé à la liberté et au bonheur. Je pourrais me borner à dire que je n'ai point voulu répondre directement à M. Buisson, puisque cette réponse avait déjà été faite et que, d'ailleurs, je ne l'avais point entendu ni lu quand j'ai fait ma conférence. Mais je trouve plus simple de prier mes lecteurs de relire sa brochure et de juger; ils reconnaîtront aisément que, si la thèse de M. Buisson est vraie, la Bible doit disparaître non-seulement des mains des enfants, mais des mains de leurs parents. Je pouvais donc, sans être en dehors de la question, prendre la défense de la Bible au point de vue où je devais me placer après la conférence de M. Godet, et montrer par des faits l'influence bénie d'un livre dont on disait qu'il ne pouvait avoir sur les enfants qu'une action pernicieuse.

...

On m'a dit que j'avais dépeint d'une manière trop favorable l'état moral des Juifs, et que je n'aurais pas dû oublier le peu de délicatesse qu'ils montrent souvent dans les affaires. Je trouve ma réponse dans un article de la Revue de Westminster où se lit cette phrase: « Il est impossible de lire l'histoire des Juifs, depuis la dispersion, sans voir qu'ils se distinguèrent dans toutes les carrières qui leur étaient ouvertes, et que leur caractère d'usuriers leur a été pour ainsi dire imposé par les persécutions qui suivirent les croisades. »

 

- haut de page -