Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



INIQUITÉ ET CHARITÉ


SECOND DISCOURS (1) .

 

« Hors de moi vous ne pouvez rien faire. »

JEAN XV, 5.

Le repas de la Cène avait fini depuis peu d'instants, lorsque Jésus a prononcé cette parole. Après quelques mots d'encouragement et de promesse à ses apôtres, le Sauveur les avait engagés à quitter avec lui la chambre haute : Levez-vous, leur avait-il dit, partons d'ici.

Leur chemin les conduisait, à ce que pensent les commentateurs, à travers des vignobles qui descendaient jusqu'au Cédron. On peut croire que la vue de ces vignes a fourni en quelque sorte à Jésus les premiers mots qui précèdent notre texte : « Je suis le vrai cep, et mon Père est le vigneron. » Ajoutons qu'on se trouvait alors au moment de la taille : on devait donc rencontrer partout des sarments coupés et mis en tas. Peut-être, au milieu de la nuit, distinguait-on ici et là des feux allumés avec ces sarments et qui consumaient, suivant l'ordre de Moïse (Exod. XII, 10.), les restes des agneaux de Pâque qu'on n'avait pas pu manger dans les repas de la soirée. Si cette supposition est exacte, elle donnerait une vie intéressante à toute la suite du discours de Jésus, entre autres au verset sixième : « Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il sera jeté dehors comme le sarment ; il sèche, puis on le ramasse, et on le jette au feu, et il brûle. »

Quoi qu'il en soit de cette conjecture, un enseignement reste certain. Jésus s'est comparé à un cep dont il a dit qu'il était « le vrai ; » et il a comparé ses disciples à des sarments. De là notre texte. Aussi vrai que le sarment séparé, du cep n'est plus bon à rien qu'à être brûlé, aussi vrai le chrétien, séparé du Christ, n'est plus bon à quoi que ce soit; sa vie n'est plus qu'un bruit de vivre, avant-coureur de la mort. Hors de moi, a dit Jésus (à nous comme aux apôtres), vous ne pouvez rien faire.

De nombreuses leçons ressortent de cette déclaration. Une des premières qui se présentent à l'esprit est relative à l'autorité souveraine de Jésus..... Qui donc est-il, cet homme qui a prononcé une parole si haute ? Qui est-il, celui qui a osé se présenter au monde, non pas seulement comme un aide, mais comme un être indispensable ? De deux choses l'une ou bien cet homme était un imposteur, - au cas le moins mauvais un halluciné, et tous ceux que sa parole a séduits ont été trompés comme lui, - ou bien il était plus qu'un homme, il était le Fils unique de Dieu, un avec son Père ; et ce passage, entre beaucoup d'autres, est une preuve de la divinité de Jésus.

Nous pouvons l'envisager aussi comme un résumé, très-court et très-complet, du développement de la vie chrétienne. Il nous montre l'esprit de Dieu pénétrant petit à petit dans une âme, comme la sève du cep dans le sarment ; la faisant croître avec d'autant plus de vigueur que son attache avec le Christ est plus étroite ; tirant d'elle, enfin, des fruits abondants et savoureux, comme ceux qu'on peut attendre du sarment, lorsqu'il est bien uni au cep. - Nous verrions aussi, par un tableau inverse, une âme détachée du Sauveur passer par les mêmes phases de maladie et de dessèchement qu'un sarment détaché du cep, jusqu'à ce que, toute sève étant épuisée, elle ne soit plus bonne qu'à être jetée dehors.

Sans abandonner ce côté de mon texte, je voudrais, mes frères, en tirer une leçon plus spéciale, bien que très-vaste aussi. Je voudrais en montrer la relation avec les maux que nous avons signalés, il y a huit jours, dans la famille, dans la société et dans l'Église. Nous avons dû reconnaître que, dans ces trois domaines, la charité s'était refroidie en même temps que l'iniquité s'était multipliée. Puis, nous nous sommes. demandé, en finissant, quels remèdes pourraient être donnés à cette maladie. À mes yeux, il n'y en a qu'un : ce remède est une personne, une personne vivante et aimante, source unique de la vie et de l'amour, c'est Jésus-Christ. - Envisager Jésus comme le seul vainqueur de l'iniquité, parce qu'il est le seul inspirateur de la charité, crier par conséquent à la famille, à la société et à l'Église : Hors de lui vous ne pouvez rien faire ! c'est, mes chers auditeurs, tout le but de ce second discours.

I

Nous commencerons par les petits, par les enfants.
On s'occupe beaucoup d'eux aujourd'hui. Toutes les questions relatives à l'éducation prennent une importance de plus en plus grande, et l'une des premières leçons qu'on a voulu retirer de la dernière guerre, c'est la nécessité d'améliorer l'instruction de la jeunesse. Lisez les articles de fond de la plupart des journaux sérieux, écoutez les discours les plus applaudis, vous verrez qu'ils abordent constamment le sujet de l'instruction publique. Il n'y a pas de projet qu'on n'agite pour la changer, ou pour la créer. Les résolutions, les promesses aussi. On ne recule pas plus devant les idées aventureuses que devant les grosses dépenses. Certes, s'il suffisait de faire du bruit autour d'une cause pour qu'elle triomphât, nous pourrions croire gagnée celle de l'instruction de nos enfants.

Regardons pourtant d'un peu plus près. Car enfin, ce n'est pas tout de remanier tous les deux ou trois ans des programmes d'enseignement. Les surcharger n'est pas non plus le meilleur moyen d'en assurer la bonne exécution, ni d'augmenter d'une manière durable les connaissances des élèves. Quel est, demanderons-nous, l'esprit général qui préside à ces efforts ? Quel but poursuivent les promoteurs de ce mouvement ? Ils nous le disent sans hésiter : Ils veulent rendre l'enseignement laïque et le soustraire à l'influence du clergé.

À ne la prendre que dans ces termes, cette réponse n'a rien qui doive nous effrayer. Enseignement laïque, soit ! Je ne sais pas un pasteur pieux qui ne soit prêt à se réjouir s'il voit une armée de laïques, amis des enfants, amis du Sauveur surtout, s'apprêter à revêtir la noble tâche d'élever et d'instruire de jeunes âmes. Il y a, pourquoi ne pas l'avouer, mille choses que des laïques pourront enseigner mieux que des ecclésiastiques. Il y a, dans l'influence cléricale proprement dite bien des éléments fâcheux, contre lesquels un père de famille aura raison de se mettre en garde. Si cela est vrai surtout du cléricalisme romain, je n'oserais affirmer que cela ne se puisse pas aussi dire du cléricalisme protestant. Malheur à nous, pasteurs, si nous ne sommes pas prêts à répéter en matière d'éducation, comme en matière de prédication, la parole de Moïse à Josué, quand celui-ci voulut le rendre jaloux des prophéties d'Eldad et de Médad : « Plût à Dieu que tout le peuple de l'Éternel fût prophète (Nomb. XI, 29.) » Dans cet esprit-là, je le répète, et dans ces conditions, nous n'aurions pas le droit de nous plaindre de l'enseignement laïque.

Mais est-ce bien là qu'on s'arrête ? Derrière ce projet ne s'en cache-t-il pas un autre, que les gens sincères ont déjà plus ou moins ouvertement avoué ? Convenons-en : ce n'est pas le ministre qu'on veut chasser de l'école. Les deux on trois heures par semaine qu'on lui accorde, dans nos classes primaires, n'auraient pas de quoi effrayer. C'est la religion elle-même, c'est Jésus-Christ qu'on prétend en bannir. Déjà, dans un canton voisin, une nombreuse assemblée a voté, à la presque unanimité, la résolution de rendre l'école de plus en plus indépendante de l'Église. Résolution fort naturelle, sage même, pour des pays où le clergé, asservi à un seul homme, ne saurait conduire de jeunes âmes à la liberté pas plus qu'à la vérité (2) ; mais résolution d'une portée plus grande, et qui vise plus haut que le clergé. Dans l'esprit de beaucoup de ceux qui la soutiennent, ce n'est pas de l'Église, c'est de la foi qu'on veut affranchir les écoles. Un journal qui s'imprime dans notre ville et que rédigent des hommes fort honorables, écrivait l'autre jour : « Que l'instituteur, par une appréciation plus exacte de ses droits et de ses devoirs, par une étude approfondie de la science pédagogique, par un labeur rationnel et soutenu, apprenne à compter sur lui-même et à écarter les influences oppressives qui, sous le masque de la liberté, veulent maintenir dans l'école les traditions autoritaires d'un autre âge (3). » Parents, vous l'entendez : écarter les influences oppressives, secouer les traditions autoritaires, cela s'appelle compter sur soi-même. De la foi, pas un mot ; de Jésus-Christ, l'éducateur souverain des instituteurs et des enfants, pas un mot non plus. Il faut compter sur soi-même.

Dans le principe, donc, il ne semble pas que la place soit faite à Jésus. Elle l'est aussi de moins en moins dans la pratique. Le temps manque pour parler de lui. Où voulez-vous mettre une leçon de religion entre toutes les heures consacrées à l'orthographe, à la géographie, à l'histoire et aux problèmes, sans parler des notions de droit constitutionnel, dont on juge à propos d'enrichir des enfants de douze ans ? Beaucoup d'instituteurs pieux souffrent de cet état de choses. Ils réagissent dans la mesure de leurs forces. Mais ne sont-ils pas les premiers à reconnaître, en les déplorant, les faits dont nous parlons ? Qu'ils mettent les enfants en état de passer leurs examens, de monter d'un degré à un autre, c'est, au fond, tout ce qu'on leur demande. Les conduire à Jésus, leur enseigner par Lui les « paroles de la vie éternelle, » on ne trouve pas que ce soit leur affaire. Et ces pauvres petits vont employer de longues heures à suivre le cours des fleuves et la succession des empires, sans être mis en présence de leur Père céleste ni de leur Sauveur (4).

Je sais, mes frères, qu'il ne manque pas de personnes pour appuyer, en principe, cette manière de concevoir l'instruction publique. Voulez-vous me permettre de laisser présentement l'examen du principe, et de m'en tenir à ses conséquences, à la pratique ? Si l'on veut rendre l'enseignement laïque, si sous cette prétention, se cache celle de chasser la religion de nos écoles, je pense, pourtant, que c'est en vue de faire l'enseignement meilleur, l'école plus profitable. Je ne saurais faire aux propagateurs de ces idées l'injure de supposer qu'ils ne s'embarrassent que de leurs théories, sans s'inquiéter des intérêts de nos enfants. Eh bien ! je le demande, ont-ils réussi ? Ont-ils fait faire des progrès à l'instruction ? Depuis que Jésus est plus ou moins sorti des classes, les écoliers y ont-ils appris plus de choses, les ont-ils apprises mieux ? C'est une simple question de fait.

Au tribunal de la vérité, la réponse n'est pas douteuse. L'instruction publique, chez nous, n'est pas en progrès. Elle baisse, au contraire.
On l'étend énormément en surface ; le champ des examens n'est jamais assez vaste. Mais comme elle perd en profondeur ! Le goût d'apprendre décroît chez nos enfants, chez nos jeunes gens. Ces travailleurs studieux, dont nos pères aiment encore à nous faire l'histoire, nous ne les connaissons plus guère que comme un souvenir d'un temps écoulé. On veut aller vite, très-vite ; savoir causer un peu de tout, imposer au public, charmer ou confondre des examinateurs, emporter de haute lutte un diplôme, et surtout, sortir au plus vite de ces longues études, dont on conserve une ineffaçable impression de fatigue et d'ennui. Pourquoi ? Est-ce que la science est moins attrayante de nos jours qu'il y a cinquante ans ? Non. Mais c'est que l'instruction publique ne peut pas mieux qu'autre chose violer impunément l'ordre établi par Dieu. C'est que Dieu a donné à nos enfants un coeur à nourrir, et non pas seulement une tète à remplir. C'est que ce coeur a besoin de charité pour première nourriture, et qu'il s'étiole, se dessèche, quand il ne trouve pas d'amour. C'est que l'amour qu'il lui faut, c'est celui de Jésus, quelque système d'éducation qui soit d'ailleurs suivi. C'est qu'il est vrai du jeune enfant, comme il l'était de Marthe et de Marie, comme il le sera toujours de nous tous « qu'une seule chose est nécessaire ( Luc X, 42. ) », et que cette seule chose n'est ni l'histoire, ni la grammaire, niais l'amour de Jésus. C'est, enfin, qu'en matière d'instruction publique comme ailleurs : Hors de Jésus nous ne pouvons rien faire (5).

Il y a pourtant une considération qui pourrait expliquer, sans la justifier, la campagne de ceux qui veulent à tout prix faire sortir la religion de l'école. Ne confondons pas, disent-ils, deux domaines distincts. Notre affaire à nous, instituteurs et professeurs, c'est l'instruction. La religion, c'est l'affaire des familles : à chacun d'enseigner à ses enfants la religion qui lui convient. Je suis convaincu, et je crois avoir montré que, même dans l'instruction publique, la religion a sa place marquée. L'une et l'autre, bien loin d'être traitées comme deux étrangères qui se saluent à peine de loin en loin, devraient être considérées comme deux soeurs, intimement unies et vivant toujours sous le même toit.
Mais admettons que la religion est avant tout l'affaire de la famille. C'est très-vrai, cela. Reste à savoir comment la famille s'occupe de cette affaire. Que fait-elle de la religion et, pour aller droit au centre, que fait-elle de Jésus dans ses travaux journaliers ? Quelle influence lui accorde-t-elle sur ses décisions, quelle place dans ses occupations ? Quand et comment parle-t-elle de lui aux enfants ? Leur fait-elle faire de bonne heure connaissance avec lui ? Encore ici, répondez vous-mêmes. Tantôt c'est le goût qui manque, tantôt c'est le temps. Les disciples du Sauveur n'auraient peut-être pas beaucoup à faire aujourd'hui pour repousser les mères qui voudraient amener au Maître leurs enfants. Beaucoup de mères ne les amènent pas ; beaucoup de pères non plus. Ils ont tant à faire ! Et les petits écoliers sont si chargés ! Voyez ce gros sac qu'on a rapporté du collège ou de l'école, tout bourré de livres et de cahiers. Il faut apprendre ces pages ; ces devoirs, il faut les mettre au net. Et quand on aura tout appris et tout écrit, quand on aura joué quelques instants, ces jeunes têtes vont se pencher, les paupières se fermeront, à peine dira-t-on du bout des lèvres une prière endormie, et l'on ira se coucher. Et puis demain ce sera comme aujourd'hui, et après demain aussi.

Et le dimanche, au moins ? Le dimanche ? Eh bien ! c'est le joui, où le père, absorbé pendant la semaine, lit son journal ou la revue qui l'attend sur la table ; c'est le jour où la mère, après avoir revu ses comptes, organise quelque plaisir pour la troupe enfantine. On ira se promener, on sautera, on courra, on ira prendre un bon repas..... Bien, très-bien ! Mais Jésus ? Je ne l'ai pas encore vu jusqu'ici. N'y aura-t-il rien pour lui dans ce jour du repos ?

Ne parlera-t-on point de Lui à ces petits, dont le coeur affamé a plus grand besoin que vous ne pensez de rencontrer le coeur de leur Ami ? - Oui, attendez. Voilà le dimanche fini. On a bien causé, bien ri, peut-être qu'on s'est bien amusé ; on va faire le culte de famille..... Mais, dites-moi, où le fait-on ? chez qui ? comment ? Que de fois le père s'est déchargé de ce saint devoir qui devait faire de lui le pasteur de sa famille ! La mère, alors, lit bien vite et bien bas quelques versets de l'Écriture, devant des domestiques qui bâillent et des enfants qui n'écoutent pas. Et c'est tout. Et quand une Marie-Madeleine, cherchant Jésus, serait venue visiter cette famille, elle en sortirait bientôt en disant : « On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais où on l'a mis (Jean XX, 13.). »

Il y a des exceptions, Dieu en soit béni ! Familles chrétiennes, vous ne m'accuserez pourtant pas d'injustice ; vous prierez plutôt pour les familles qui ne jouissent pas de votre bonheur. J'ai dépeint un état général et je ne crois pas avoir exagéré. Oui, Jésus est absent d'un très-grand nombre de nos maisons, comme il l'est d'un très-grand nombre de nos écoles.

Ou bien (ce qui ne vaut guère mieux), il se trouve au milieu d'elles à titre d'étranger respectable, avec lequel on cause quelquefois, rarement, et sans intimité ; mais non point à titre d'ami bien-aimé, de conseiller qu'on a besoin devoir et d'entendre partout, sans lequel on n'entreprend ni n'achève rien. Si Jésus était parmi nous cet ami, nous ne verrions pas les enfants si peu versés dans sa parole, connaître son histoire presque aussi mal que les prophéties qui l'annoncent. Pasteurs, nous n'aurions pas tant de catéchumènes pour qui les faits, les simples faits bibliques, sont un domaine aux trois quarts fermé. Nos jeunes gens sauraient au moins le contenu de ces deux Testaments dont Pascal a si bien dit que tous deux regardent à Jésus : « l'Ancien comme à son attente, le Nouveau comme à son histoire, tous deux comme à leur centre. »

Or, sans la Bible, sans Jésus, vous ne pouvez pas ramener dans vos maisons cette charité dont nous déplorions naguère l'absence, et dont le refroidissement marche de pair avec l'augmentation de l'iniquité. Sans Jésus, maris, vous ne pouvez pas aimer vos femmes ; femmes, vous ne pouvez pas être soumises à vos maris. Sans Jésus, parents, vous ne pouvez pas élever vos enfants « en les avertissant et en les instruisant selon le Seigneur. » Il y a toute chance, au contraire, que vous les aigrirez et les découragerez. Sans Jésus, enfants, vous ne pouvez pas obéir à vos parents, ni les honorer ; vous ne pouvez pas même les aimer. Sans Jésus, maîtres, vous ne pouvez pas « modérer vos menaces » envers vos serviteurs. Sans Jésus, domestiques, vous ne pouvez pas servir vos maîtres dans la simplicité de votre coeur, puisqu'il s'agit de leur « obéir comme à Christ (Eph. VI, 1-9.). » Sans un Jésus personnel, vivant, agissant au milieu de nous, reçu en nous, obéi par nous, nos demeures ne sauront rien de la charité. Toutes les théories sociales, toutes les réformes des novateurs d'aujourd'hui ou de demain, n'empêcheront pas sa parole d'être vraie dans la famille comme dans l'école : Hors de moi, vous ne pouvez rien faire !

II

Elle est vraie aussi, par conséquent, dans la grande famille qui s'appelle la société, et c'est ce qu'il nous reste à montrer. Dans un sujet aussi vaste, nous devrons nécessairement nous borner à quelques indications.
Qu'il soit bien entendu, d'abord, que nous n'envisageons point comme parfait l'état social actuel. Nous l'acceptons non comme définitif, non comme le terme dernier auquel la société devait atteindre, mais comme une étape, et comme une étape à qui nous ne souhaitons pas une longue durée, dans le voyage vers un meilleur avenir. Ceux qui le critiquent, cet état, n'ont pas tort sur tous les points. Il présente des sommes considérables de souffrances, dont nous n'avons pas le droit de prendre facilement notre parti. Les inégalités sociales, voulues de Dieu, sans doute, puisqu'il a créé l'inégalité des dons et des facultés, sont aggravées par maintes circonstances qui accusent le péché de l'homme, son égoïsme surtout.

Le travailleur, - j'entends celui qui travaille, et non pas celui qui usurpe sans aucun droit ce titre honorable, - le travailleur n'est pas encore parvenu à une position en rapport avec les services qu'il rend à ses frères. Nous lui devons notre bien-être : nous songeons peu au sien. Il nous coûte peu de le voir rester aux derniers rangs, tant pour l'influence que pour la jouissance. Il a encore sa vraie place à trouver et à prendre dans l'organisation de la société. Tant qu'il n'y sera pas arrivé, tant qu'il se verra dédaigné et oublié, nous n'aurons point à nous étonner qu'il se plaigne, qu'il lutte, qu'il tâche de briser ses liens. Je suis certain que Jésus, s'il contemplait avec nous la foule de nos ouvriers, prononcerait sur eux la même parole qu'il prononça sur une multitude affamée : « J'ai pitié ? (Matth. XV, 32.) »

Rien, donc, de plus légitime que les efforts de la classe ouvrière pour améliorer son sort. Mais ici, comme à propos de l'instruction publique, nous devons demander quels moyens sont employés et quel vrai but est poursuivi, sous l'apparence d'une simple question de justice. Là-dessus, on a pu, pendant quelque temps, se tromper. L'hésitation n'est plus possible aujourd'hui. Les découvertes effrayantes faites dans les dernières années ont, du moins, ceci de bon, que les voiles sont levés et que nous ne sommes plus entourés d'équivoques. La vaste association dont je vous parlais il y a huit jours, inscrit au nombre des premiers articles de son programme la guerre à toute, religion positive, très-particulièrement au christianisme. C'est, dit-elle, la religion chrétienne qui a jusqu'à présent asservi l'ouvrier, avili le travailleur. Un seul moyen reste au prolétaire pour conquérir sa dignité avec sa liberté, c'est de combattre à outrance le christianisme. À Jésus qui déclarait : Hors de moi vous ne pouvez rien faire ! l'association internationale répond : Tout sans Jésus et contre lui !

Le conseil général de la société, constitué à Londres en juillet 1869, s'est officiellement proclamé athée, et a réclamé « l'abolition de toute espèce de culte, le remplacement de la foi par la science, de la justice divine par la justice humaine. » Dans une circulaire adressée l'automne dernier aux sections, ce comité les somme péremptoirement d'attiser le feu de la haine et de la vengeance contre la religion. À Paris, dans les jours de la Commune, un des organes de ce gouvernement écrivait ces lignes que plusieurs de vous, n'ont probablement pas oubliées : « Nous sommes un parti qui n'a aucune crainte de Dieu, et qui sait comment on mène les hommes. Pour ce qui est du bon Dieu, nous n'en connaissons qu'un, c'est l'homme, et nous vous le montrerons ! » À Bruxelles, dans une conférence fort nombreuse, les orateurs se réunissent pour attester que la Bible est le code de l'immoralité. - Pardonnez, mes frères, ces citations (6). Je ne veux pas les allonger. Mais il est nécessaire de bien savoir sur quel terrain nous sommes. Pour guérir un mal, il ne faut pas fermer les yeux, sous prétexte qu'il est trop repoussant.

Nous voilà donc avertis, et ce ne sera que notre faute si nous ne voulons pas comprendre. Les réformateurs modernes, ceux du moins qui se donnent ce rôle, mettent au nombre de leurs procédés les plus efficaces, ou de leurs tâches les plus pressantes, la ruine de la religion, la guerre à Jésus. Les résultats qu'ils ont obtenus jusqu'ici ne sont pas de nature, il est vrai, à recommander leur oeuvre. Qu'ont-ils pu, qu'ont-ils fait, en dehors de Jésus ? De quel vrai bien ont-ils été les auteurs pour ceux qu'ils prétendaient servir ? Quels soulagements nouveaux ont-ils apportés aux souffrances du peuple ? Quelle vie, enfin, ont-ils inaugurée sur une terre dont ils se disaient les sauveurs ? Du sang, des décombres, des colères immenses, des haines sans fond, - voilà, jusqu'aujourd'hui, ce que nous avons vu sortir de leurs travaux. N'y a-t-il pas dans ces faits une confirmation douloureuse de la vérité de notre texte ?

Mais je ne veux pas insister sur cette preuve. Je m'adresse à vous, mes frères, pour savoir ce que vous allez opposer à ces entreprises. La charité, vous le sentez bien, court grand risque de s'éteindre. Comment la rallumerez-vous ? De quelle ressource essayerez-vous, pour éclairer ces yeux volontairement fermés, pour toucher ces coeurs si cruellement endurcis ?

On s'occupe de cette question. On y a répondu déjà par de nombreux essais, qui ont pour objet d'opposer aux associations de la destruction celles de la conservation ou du relèvement. De là tant de sociétés coopératives, tant de caisses de prévoyance ou de secours mutuels, tant d'avances généreuses pour mettre à la portée de tous les bienfaits de l'instruction avec ceux de l'épargne. De là, encore, beaucoup de tentatives pour intéresser l'ouvrier à ce qu'il fabrique, et pour faire mieux participer ses gains aux progrès de son industrie. Autant de mesures qui ont déjà fait du bien, je m'empresse de le reconnaître. Il faut appeler sur elles l'attention soutenue des amis du peuple. Néanmoins, en considérant d'une part les résultats obtenus, de l'autre la masse des maux à combattre ; en comparant le nombre encore si petit des leviers avec l'énormité des rocs à soulever, on se rappelle involontairement l'exclamation d'André, avant la multiplication des pains : « Qu'est-ce que cela pour tant de gens ! (Jean VI, 9.) »
Autre question, ensuite, et non moins grave : Qui soutiendra ces oeuvres excellentes, au milieu des difficultés quotidiennes qu'elles rencontreront ? Défiances constamment renaissantes de la part de ceux qu'on veut aider ; soupçons très-peu déguisés, parfois accusations passionnées qui détruisent en quelques instants le fruit de plusieurs années de peines. Il est si mal aisé de faire le bien, surtout à ceux qui ne veulent pas qu'on leur en fasse, afin de conserver le droit de se plaindre ! Qui soutiendra les bienfaiteurs ? Où puiseront-ils la force de recommencer après avoir vu, cent fois leurs plans échouer ? Dans leur philanthropie, dans leur amour pour la société, ou dans leur frayeur d'un cataclysme ? Ce serait peu, très-peu. Ces sentiments ne tiennent pas longtemps, s'ils sont seuls, dans la lutte de la vie. Ils ont besoin de s'alimenter à une source profonde qui ne tarisse pas, et cette source s'appelle l'amour de Jésus.

Quoi ? dira-t-on. Prétendez-vous qu'il faille, la Bible à la main, et le nom de Jésus sur les lèvres, pénétrer dans les assemblées de ces ennemis de Jésus, les suivre dans leurs demeures, visiter leurs familles, et là, leur faire entendre ce nom qu'ils détestent ?..... Pourquoi pas ? répondrai-je. Avez-vous peur de votre foi ? Avez-vous honte du Sauveur ? On a vu, dans des quartiers dangereux de Londres, la femme de la Bible pénétrer toute seule, mais l'Écriture à la main, jusque dans d'infectes mansardes, repaires habituels du crime, où l'homme de la police osait à peine se montrer, armé jusqu'aux dents. Il y a, voyez-vous, dans la seule parole de notre Dieu ; il y a dans le nom de Jésus, quand ce nom, dit avec amour, introduit en quelque sorte sa personne, une puissance dont vous ne vous doutez pas. Essayez.

Entendons-nous, d'ailleurs. Quand je dis qu'il faut partout prêcher Christ, je ne veux pas dire qu'il faut partout faire des sermons. Je répéterais bien plutôt, avec un de nos compatriotes qui s'occupait de la question sociale : « Le monde ne se laissera pas toujours prêcher, mais il se laissera toujours servir (7). » La prédication qu'il nous faut, aujourd'hui, pour panser les plaies de la société, c'est le service de nos frères, celui que l'apôtre recommandait et décrivait en ces termes : « Ne soyez point paresseux à vous employer pour autrui (Rom. XII, Il.). » Seulement, la meilleure manière, la plus utile, de vous employer pour eux, c'est, après avoir retrempé votre charité dans l'amour de Jésus, de leur faire connaître cet Ami, et de les servir en son nom. Ils ne savent pas, ces travailleurs, que Jésus les a aimés : dites le leur. Ils ne savent pas qu'il a souffert pour eux, après avoir été pauvre comme eux : dites-le leur. Ils ne savent pas que les places ne sont pas partagées au ciel comme sur la terre, qu'il y a plusieurs demeures dans la maison de leur Père, que Jésus veut leur préparer le lieu : dites-le leur.

Mais dites-le leur autrement qu'on ne le leur a dit jusqu'ici, car ils ne l'ont pas encore compris. Ne le leur dites pas de haut, ni de loin. Dites-le leur de près, dites-le leur chez eux, dans leurs associations, partout où ils vous laisseront parler et même là où ils ne vous permettront pas. Dites-le leur en les aimant. Ils ont été, jusqu'ici les enfants prodigues de la société. C'est vrai. Voulez-vous donc jouer à leur égard. le rôle du frère aîné, les repousser parce qu'ils sont coupables, les délester parce qu'ils sont malheureux ? Prenez garde de leur faire croire que le pardon n'est qu'un mot, l'Évangile une hypocrisie. « Mon âme est navrée, écrivait tout récemment un pasteur de la Suisse allemande, quand je vois les hommes des classes travailleuses attribuer si souvent au christianisme et à l'Évangile, ce qui n'est le fait que de notre manque de charité et de fidélité (8). » Ces hommes ont rejeté Jésus. Se croyant indépendants, ils ont crié : Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous (Luc XIX, 14.) » Ces violences, mes frères, nous montrent assez qu'ils sentent instinctivement en Jésus leur vainqueur et leur maître. Mais prouvons-leur enfin que ce maître ne veut les vaincre que par son amour. Sans lui, les questions sociales sont insolubles. Hors de lui, ni eux, ni nous, nous ne pouvons rien faire !

III

Pour terminer, mes frères, j'aurais voulu reposer vos pensées et les miennes sur une autre société, sur celle à, qui Dieu avait confié d'une manière toute spéciale la tâche que je viens d'esquisser, je veux dire : sur l'Église. Ici, malheureusement, bien des déceptions nous attendraient, si le temps nous permettait de nous arrêter.

À prendre l'Église dans son sens idéal, qui est le vrai : l'assemblée des croyants de tout pays, il est permis de remarquer qu'elle n'a pas entièrement failli à son mandat. Partout où il y a des enfants de Dieu, ils s'efforcent, isolément ou en commun, de lutter contre les maux de la famille et contre ceux de la société. Mais si, de cette oeuvre générale, nous passons à celle des Églises particulières, comme nous allons la trouver souvent retardée et mesquine. Ne disons rien des Églises étrangères : occupons-nous de la nôtre seulement. Exerce-t-elle, dites-moi, dans les questions sociales l'influence à laquelle il pouvait sembler que son histoire la destinait ? Présente-t-elle Jésus aux masses qui se détournaient de lui ? A-t-elle conservé vivante et chaude la charité de son Chef et va-t-elle, embrasée de cet amour, cimenter entre les pauvres et les riches, entre les ouvriers et les patrons, l'union qui repose sur Christ ? A-t-elle ainsi combattu efficacement les progrès de l'iniquité ?

Pour pouvoir le faire, il aurait fallu qu'elle commençât par chasser l'iniquité de son propre sein, par revenir à la loi de son Sauveur, et nous avons vu que, même au milieu d'elle, la soumission à la loi allait en décroissant. Il aurait fallu, pour crier au monde qu'il ne peut rien hors de Jésus, qu'elle commençât par comprendre qu'elle non plus, elle surtout, ne peut rien hors de Lui. Comment portera-t-elle des fruits, si elle n'est pas tout d'abord un sarment vigoureux attaché au cep ? L'est-elle, mes frères ? - Qui oserait l'affirmer, dans le triste état où nous la voyons tombée ?

Oh ! vous qui l'aimez encore, vous qui voudriez la guérir, gardez-vous, je vous en supplie, de vous, préoccuper outre mesure de ses formes et de ses institutions. Ce ne sont pas les institutions qui font l'Église, c'est Jésus-Christ. Préoccupez-vous de Jésus et de sa présence, dans cette pauvre Église de Genève, où vraiment il semble parfois qu'il soit la dernière personne à qui l'on pense. Vous voudriez sauver encore bien des débris d'un passé glorieux ; bien des formes qui furent autrefois une source de vie, parce qu'elles étaient pénétrées par l'Esprit. Je comprends ces regrets, je sympathise à ces désirs. Mais, voyez, toutes ces formes, tous ces souvenirs ne sont rien sans Jésus-Christ, et c'est Jésus qui s'en va du milieu de notre Église.

Eh ! n'avons-nous pas entendu les étonnants aveux qui ont été faits ces derniers temps. On parle de nous affranchir des jougs vieillis de l'autorité. On fait chatoyer devant nos yeux une trompeuse image d'indépendance et, pour commencer, on ne veut plus avouer que nous sommes « incapables par nous-mêmes de faire le bien » Mais qu'êtes-vous donc capables de faire, réformateurs de notre Église ? Par vous-mêmes, et sans Jésus, quel bien avez-vous fait ? Quels biens nous donnez-vous ?

Vers quels rivages nous menez-vous, après avoir brisé les chaînes dont vous affirmez que Calvin avait chargé nos consciences ? Je ne sais, pour ma part, quel christianisme vous nous créerez un jour, à la place de celui dont vous voulez nous délivrer. Mais je sais qu'un plus grand que Calvin, je sais que mon Sauveur a dit un jour à ses disciples : Hors de moi, vous ne pouvez rien faire !

Non! rien hors de lui dans l'Église, rien hors de lui dans la société, rien hors de lui dans la famille, parce qu'avant tout l'âme humaine n'est rien et ne peut rien hors de lui. C'est là qu'il nous en faut venir. Ce qui nous manque, mes frères, pour l'oeuvre que Dieu nous a donnée à faire, c'est la vie personnelle avec Jésus-Christ, c'est la vie tirée de sa vie, c'est la sève reçue de lui et circulant dans les sarments, c'est d'abord la conversion, la nouvelle naissance. Ne cherchez pas ailleurs la source de nos faiblesses, vis-à-vis des graves questions d'aujourd'hui. Nous sommes chrétiens à demi, aux trois quarts peut-être, nous ne le sommes pas entièrement. Nous nous figurons encore follement pouvoir faire quelque chose en dehors de Jésus. Voilà pourquoi nous avons laissé la charité se refroidir dans nos familles, l'iniquité se multiplier dans la société, la piété s'éteindre ou devenir fumante dans cette Église que nous avons appelée trop orgueilleusement la nôtre, tandis que nous aurions dû faire d'elle l'Église de Jésus-Christ. Mes frères, mes soeurs, un retour vers Jésus ! C'est le moment ou jamais. Notre patrie et notre Église, également menacées, également malades, ont besoin de votre conversion.

En terminant, une pensée me saisit. Trouverez-vous que j'ai mal usé de la chaire, en y portant ces questions brûlantes, qu'on réserve d'habitude pour la tribune ?

J'ai cru qu'appelée à édifier, c'est-à-dire à bâtir, la chaire était appelée aussi à reconstruire, selon son pouvoir, les édifices chancelants ou déjà démolis. J'ai cru qu'elle pouvait remplir les fonctions de Néhémie, et convier tous les enfants de l'Israël de Dieu à relever les murs de Jérusalem. Pardonnez, cependant, vous que mes paroles auraient involontairement détournés de l'édification plus intime que vous étiez venus chercher : n'en retenez qu'une seule, c'est que loin de Jésus, vous ne pouvez rien faire ! Pardonne, petit troupeau de mon Sauveur, toi que j'ai eu l'air d'oublier dans la peinture de l'iniquité contemporaine. À toi, peut-être, la joie de devenir l'aurore d'un jour nouveau, car c'est de toi qu'il est dit : Vous êtes le sel de la terre ! Pardonne surtout, ô Jésus ! pardonne, ô mon Père céleste, tout ce qui n'aurait pas été dit à ta gloire. Tu sais : c'est par amour pour les âmes que j'ai parlé de la sorte. Par amour aussi pour mon pays, pour mon Église... pour la tienne. Tu sais : ils sont malades. Guéris-les, et ils seront guéris ; sauve-les, et ils seront sauvés ; car tu es notre louange. Amen ! Amen !

FIN

Table des matières


1 Prêché dans le temple de St-Gervais, le 3 décembre 1871.

2 Je n'ai pas voulu faire de controverse du haut de la chaire ; mais ici, une explication me parait nécessaire.
Dans l'esprit de plusieurs de ceux qui déclarent, ou laissent déclarer, la guerre à l'enseignement religieux dans nos écoles, cette guerre est avant tout dirigée contre l'enseignement ultramontain. Je n'en prends certes pas la défense, et je ne confondrai pas celui qui veut éloigner de nos classes les doctrines des jésuites, avec celui qui voudrait en faire sortir l'influence de la Bible. Aussi est-ce pour Jésus que j'ai réclamé une place ; ce n'est pas pour le pape.

Ai-je eu tort d'affirmer que c'est à Jésus que voudraient l'ôter beaucoup de réformateurs de nos écoles ? Je serais heureux de m'être trompé ; mais je ne suis que trop sûr d'avoir eu raison.

3 L'Éducateur, 7me année, pag. 379.
4 Il est certain qu'un instituteur chrétien trouvera toujours moyen de mêler à ses enseignements, même aux leçons de grammaire, les leçons de l'Évangile. Il y en a qui le font, et nous devons les encourager de toutes nos sympathies. - Mais il n'est pas moins certain que la tâche est rendue de plus en plus difficile, à ceux qui voudraient faire entrer la religion dans leur école par la grande porte, et non pas seulement par la petite. Le projet de loi sur l'instruction publique, présenté en novembre au Grand Conseil du canton de Neuchâtel, aurait pour conséquence, s'il est adopté, de permettre au département l'interdiction de toute leçon de religion dans les classes. Que ferait, dans ce cas, l'instituteur pieux ?

La solution de la question me paraît de plus en plus dans la séparation de l'école d'avec l'État, et dans la création multipliée d'écoles évangéliques libres. Mais ce n'est pas une solution que j'ai voulu donner. Je n'ai cherché qu'à éveiller l'attention sur un sujet capital.

5 Est-il absolument vrai que l'homme ne peut rien en dehors du Christ ? En matière d'instruction, par exemple, n'a-t-on pas vu des incrédules et des païens arriver à une vaste science ?
À cette objection, je n'ai qu'une réponse, mais je la crois bonne. Ce n'est ni à des incrédules ni à des païens que Jésus a dit : Hors de moi vous ne pouvez rien faire. C'est à ses disciples, c'est à ses disciples aussi, et à eux seuls que j'ai parlé.
Quant aux résultats qu'obtiendront les incrédules ou les païens pour la régénération de la famille, de la société et de l'Église, attendons de voir pour croire.

6 Je les emprunte, au milieu de beaucoup d'autres, au rapport présenté, par le Dr Wichern aux conférences évangéliques de Berlin, le 12 octobre.

7 Journal religieux de Neuchâtel, 19 novembre 1871.

8 Correspondenz-Blatt, p. 82.

 

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