LA
CRÉATION ou LA PREMIÈRE PAGE DE LA
BIBLE
CHAPITRE VIII
LES POISSONS ET LES OISEAUX
« Puis Dieu
dit : « Que les eaux
fourmillent d'une abondance d'âmes
vivantes ; et que des oiseaux volent
au-dessus de la terre, vers
l'étendue des cieux. »
Dieu créa donc les grands animaux
marins et toute âme vivante qui se
meut, dont les eaux fourmillent selon leur
espèce, et tout oiseau ailé
selon son espèce ; et Dieu vit
que cela était bon. Et Dieu les
bénit, disant :
« Soyez féconds et
multipliez et remplissez les eaux dans la
mer, et que l'oiseau multiplie sur la
terre. » Ainsi fut le soir,
ainsi fut le matin, ce fut le
cinquième
jour. »
(Gen.I, 20-24.)
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« Et Dieu dit. » C'est ainsi
que progresse l'oeuvre de la création.
Jusqu'alors les régions aériennes et
les mers étaient demeurées
désertes et silencieuses. Le
quatrième jour s'était
écoulé ; de nouveaux cataclysmes
enveloppèrent le globe de fumée, de
nouvelles chaînes de montagnes surgirent. Les
mers agitées couvrirent de limon, de sable
et de rochers les vastes forêts primitives du
troisième jour de la création.
Lorsque cette terrible activité volcanique
se fut calmée, quand les épais nuages
de fumée et de vapeur se furent
dissipés, qu'un soleil radieux illumina de
nouveau le monde, et que, le
cinquième jour de la création, une
nouvelle végétation, riche et
variée elle aussi, reparut sur la terre,
alors les airs et les mers commencèrent
à s'animer par l'apparition de poissons et
d'oiseaux de toute espèce, appelés
à l'existence par le souverain
« fiat » du maître de
l'univers.
Il parait étrange, à
première vue, que deux genres d'animaux si
différents soient ici compris ensemble,
comme ayant été créés
simultanément le même jour. Pourtant
une observation plus exacte nous fait
reconnaître que poissons et oiseaux
appartiennent à une même grande
classe, en opposition aux quadrupèdes, dont
ils diffèrent essentiellement, et bien des
analogies témoignent de leur commune
origine. Chez les uns comme chez les autres, le
corps est ovale et se termine en pointe par
derrière, présentant ainsi la forme
la plus propre à l'exécution de
mouvements dans l'air ou dans l'eau. Chez tous deux
aussi les organes du mouvement, c'est-à-dire
les nageoires et les ailes, sont fixés sur
les côtés, tandis que
l'extrémité inférieure, en
forme d'éventail doit servir d'aviron et de
gouvernail, appendice qu'on ne trouve sous cette
forme chez aucun animal terrestre. De plus, les uns
et les autres sont revêtus d'écailles
ou de plumes, sécrétant un liquide
huileux destiné à les garantir contre
le froid et l'humidité. Chez tous deux les
os, forts quoique très légers, sont
creux, remplis d'air au lieu de moelle.
Également ovipares, les globules de leur
sang, au lieu d'être ronds, comme ceux
des hommes et des
quadrupèdes, sont allongés et
beaucoup plus grands. Enfin, on retrouve chez les
deux espèces ce mystérieux instinct
de migration inconnu aux quadrupèdes, et si
prononcé chez les oiseaux de passage et chez
nombre de poissons, tels que les harengs, les
morues, les thons, les sardines qui, à
certaines époques de l'année,
paraissent, puis disparaissent de nouveau sans que
nous sachions où ils vont. En tenant compte
de toutes ces analogies, on peut dire que les
oiseaux sont les poissons de l'air et y nagent,
tandis que les poissons sont les oiseaux de
l'eau ; comme, du reste, il existe certaines
espèces d'oiseaux, les plongeurs, pingouins
et autres qui savent mieux nager sur l'eau et sous
l'eau qu'ils ne peuvent voler, il y a de même
des poissons volants qui peuvent pendant quelque
temps se maintenir dans l'air.
Quelle existence pleine de force et de
liberté que celle que Dieu a accordée
à ces humbles créatures! Ces
êtres ailés, dont pas un n'est
venimeux comme le serpent ou le scorpion, peuplent
les airs et nous réjouissent de leurs
chants. Dans plusieurs langues on dit en proverbe
« libre comme l'oiseau », et
l'aigle plane majestueusement au-dessus des sommets
les plus élevés et se berce, loin de
la terre, dans les profondeurs de l'azur, son
véritable élément ! La
force de certains oiseaux est presque incroyable.
Des pigeons volent en trois jours, sans eau et sans
nourriture, d'Europe en Amérique ; des
oiseaux plus petits, le pluvier
et le martinet, font chaque année un voyage
de 15,000 kilomètres, du cap de
Bonne-Espérance à la mer du Nord, et
le rouge-gorge à queue bleue peut faire,
d'après les observations du Dr Karl Perrot
à l'observatoire d'Helgoland, jusqu'à
334 kilomètres par heure ;
c'est-à-dire voler 5 fois plus vite qu'un
train express ! Les poissons ne sont pas moins
étonnants. Un requin a, pendant six
semaines, suivi nuit et jour un vapeur
anglais ! Un autre, harponné, a
entraîné, contre vent et marée,
une barque de 70 tonneaux avec une force
évaluée à 100
chevaux-vapeur.
La vraie patrie de l'oiseau, où,
à l'abri de l'homme destructeur et de ses
autres ennemis, il jouit librement du royaume de
l'air, ce sont les grandes solitudes des mers
antarctiques. Là, sur ces eaux froides et
orageuses, tourbillonnent, en nuées
innombrables, des millions de mouettes, de
pétrels, d'hirondelles de mer, de beaux
pigeons du Cap au plumage blanc et soyeux, qui
viennent se poser sans défiance sur les
fusils des matelots et les regardent de leurs
grands yeux si doux. Ils se reposent et nichent sur
les hauts rochers, sur les icebergs; ces montagnes
de glace flottantes aux contours fantastiques qui
paraissent au clair de lune pâles comme des
îles des morts, deviennent, quand
après de longs orages les rayons du soleil
les frappent de leurs flèches transparentes,
des grottes d'azur avec des ruisseaux
argentés descendant de leurs flancs, ou des
palais et des cathédrales de cristal, dont
un explorateur (C. Chum) dit que dans son tour du
monde il n'avait jamais rien vu
de si beau. Sur les banquises se tiennent de
longues files de manchots, de pingouins aux ailes
étriquées qui, debout, en petit frac
noir et jabot rouge, crient d'une voix rauque des
insultes aux marins qui viennent les troubler et
leur voler leurs oeufs.
Mais les vrais rois de l'air qui
tantôt se précipitent dans les
profondes vallées de la houle immense,
tantôt se balancent majestueusement
portés par le veut, sans faire, pendant des
quarts d'heures entiers, le moindre mouvement de
leurs puissantes ailes, - d'après ce que me
racontait un capitaine de vaisseau - ce sont la
frégate et l'albatros à la grande
envergure. Leur vie est de lutter, loin de toute
terre, pendant des semaines, même des mois,
avec la tempête qui ballotte et brise les
vaisseaux, de tourner autour des pôles, ou de
se rendre d'un vol puissant, en une cinquantaine
d'heures, dit Brehm, des mers australes au
Kamtschatka, en criant d'une voix monotone au Dieu
qui leur donne en son temps leur pâture.
Quelle belle vie que celle de ces voiliers de
l'atmosphère, ou celle du condor qui,
s'élevant en décrivant de vastes
cercles bien au-dessus des volcans des Andes,
embrasse d'un coup d'oeil ces neiges
éternelles rougies par les feux de leurs
cratères, et domine un continent et deux
océans !
Les profondeurs des mers sont aussi les
royaumes dont parle le psalmiste. « Que
tes oeuvres sont nombreuses, ô
Éternel ! Dans cette mer, grande et
vaste en tous sens, se meuvent sans nombre des
animaux petits et grands ;
là se promènent les navires, et ce
léviathan que tu as formé pour s'y
ébattre. Tous s'attendent à toi, afin
que tu leur donnes leur nourriture en son temps. Tu
leur donnes, ils recueillent ; tu ouvres ta
main, ils sont rassasiés de biens. Tu caches
ta face, ils sont troublés ; tu retires
leur souffle, ils expirent et retournent à
leur poussière. Tu envoies ton esprit, ils
sont créés, et tu renouvelles la face
de la terre ».
(Ps. CIV, 24-30.)
Des familles de baleines, monstres doux
et inoffensifs, se jouent dans ces flots avec leurs
petits, meurent plutôt que de les abandonner,
disparaissent dans les abîmes, filent
quelques centaines de lieues, et se cachent sous
les glaces du pôle quand l'homme impitoyable
les poursuit. Le vrai souverain, le despote de ces
mers, c'est le cachalot, à la tête
monstrueuse, aux massives mâchoires, devant
lequel le requin lui-même éperdu, fait
et se jette à la côte ; il est
redouté des marins dont il attaque et brise
souvent les vaisseaux. Puis cette majesté de
par la grâce de Dieu, plonge, va parcourir
ses états sous-marins et dévorer
là-bas des poulpes, ces polypes effrayants
aux gros yeux féroces, aux bras longs de 7
mètres, armés de terribles
suçoirs et quelquefois de griffes comme
celles des tigres ; on a trouvé en
effet des restes de ces monstres dans l'estomac du
cachalot.
À côté de ces
formidables géants de l'océan, les
infiniment petits nous étonnent par leur
nombre. Il est impossible de se faire une
idée de la multitude des
diatomées microscopiques,
aux formes si élégantes, qui teignent
en jaune les mers australes, ou des jolis
foraminifères dont d'Orbigny trouve 480
mille coquilles dans trois grammes de sable des
Antilles. Dans les mers polaires l'eau est
quelquefois remplie comme une soupe au sagou. de
petites méduses ; l'explorateur
Scoresby, qui traversa pendant des jours entiers
ces mers animées, calcule qu'il faudrait
à tous les hommes du monde des milliers
d'années pour compter les animalcules que
contient un mille anglais cube d'eau. Pourtant Dieu
les connaît et les compte, et chacun d'eux
est l'objet de ses soins !
Qu'elle est donc juste l'expression du
commandement divin au cinquième jour :
« Que les eaux fourmillent d'une
abondance d'êtres vivants ! »
Qui les comptera ces milliards de crabes, de
polypes, de coraux, d'éponges qui
fourmillent dans les mers ou en tapissent le
fond ? Quelle vie mystérieuse que celle
des madrépores, où l'individu se
confond avec l'état ! Ils aspirent,
à l'aide de pompes puissantes, des
quantités d'eau de mer dont ils extraient
assez de calcaire pour former des îles
entières ! Plus énigmatique
encore est l'existence des polypes qui portent sur
leurs rameaux des fleurs vivantes. Celles-ci
laissent échapper comme fruit une petite
vessie qui devient une méduse bien plus
grosse qu'eux, aux formes variées, aux
brillantes couleurs; puis cette méduse
engendre des oeufs, qui se fixent aux rochers, et
redeviennent des plantes-polypes. Quelle
singulière alternance de
deux êtres si
différents, où le fils reproduit le
grand-père, mais n'a rien de commun avec le
père ! Comment l'âme (puisque, au
verset 20 du premier chapitre de la
Genèse, la Bible nomme ces habitants des
mers « des âmes
vivantes », ) reste-t-elle ici la
même en passant continuellement d'une forme
à l'autre.
L'examen des diverses couches
antédiluviennes a fourni ici aussi des
preuves de la vérité du récit
mosaïque. Ces couches racontent
qu'après des bouleversements qui ont enfoui
la végétation primitive,
d'innombrables animaux aquatiques remplirent les
eaux. Nous en retrouvons les restes, notamment dans
les couches d'ardoise. Là se rencontrent en
grand nombre, exposés aujourd'hui dans nos
musées d'histoire naturelle, où leurs
formes et leur grosseur excitent
l'étonnement, des squelettes de grands
animaux marins, précurseurs de nos baleines
et de nos cachalots. Un grand nombre de ces animaux
appartiennent à la classe des
« sauriens », ainsi
nommés du grec
« sautros »,
lézard ; il est remarquable que le mot
du texte hébreu employé au
verset 21 pour « grands
animaux marins », signifie aussi
« crocodiles », et annonce
ainsi les sauriens. Ces sauriens sont des
lézards marins, de 7 à 16
mètres de long, recouverts d'une peau
épaisse et huileuse, au lieu
d'écailles, et pourvus de larges nageoires
en guise de pattes. C'était l'ichtyosaure,
de 9 à 10 mètres et plus de longueur,
fendant les flots avec vitesse, grâce
à sa forme effilée et à ses
puissantes nageoires, broyant, entre les
mâchoires de son long
museau pointu, les seiches et
autres animaux, dont on retrouve les restes dans
son estomac ! Ses yeux étaient
entourés de plaques osseuses mobiles, qui
pouvaient en se resserrant rendre l'oeil plus
petit, tandis que quand elles
s'élargissaient et s'ouvraient, l'oeil
devenait grand comme une assiette, selon que
l'animal nageait à la surface de l'eau,
où une lumière trop intense l'aurait
ébloui, ou qu'il cherchait son chemin et son
butin dans les profondeurs troubles de
l'océan.
À la surface des flots voguait,
comme un énorme cygne, le plésiosaure
au long cou surmonté d'une petite tête
à dents acérées ; et sur
les îles de vase et de rochers se reposaient
des tortues monstres de deux mètres de
hauteur, immobiles, remuant lentement leur cou de
côté et d'autre, on regardant fixement
en haut ; on dirait un premier essai de
l'esprit pour se dégager de la
matière. Il y avait encore nombre d'animaux
aquatiques, dont quelques-uns, les encrines,
présentaient une longue tige
enracinée au fond de la mer et
couronnée, à
l'extrémité supérieure, d'une
tête en forme de lis à cinq
pétales, contenant des milliers de petites
écailles calcaires ; puis les
ammonites, ou cornes d'Ammon, dont il existe plus
de 300 espèces, qu'on retrouve en bien des
lieux, soit petites comme une pièce de 50
centimes, soit grandes comme une roue et pesant
jusqu'à un quintal, qui voguaient par
flottes sur les Mers, comme aujourd'hui le
nautilus.
Dans ces mêmes couches se trouvent
aussi, pour la première fois, nouvelle
preuve de la vérité du récit
biblique, des vestiges d'animaux
aériens, qui comme le ptérodactyle,
ressemblent un peu à d'énormes
chauves-souris, et donnent l'idée des
premiers efforts d'un animal pour s'élever
dans les airs. Si le nombre de ces premiers oiseaux
n'égale pas, à beaucoup près,
celui des poissons et des animaux marins, c'est
encore là un accord frappant entre les faits
géologiques et la Genèse, où
il n'est parlé que pour ces derniers d'un
« fourmillement en toute
abondance ». Du reste les animaux
aquatiques, lorsqu'ils périrent, furent
enfouis dans la vase et ainsi conservés, au
lieu que les oiseaux morts restèrent
exposés à l'air libre et s'y
décomposèrent, souvent sans laisser
de traces ; la même raison explique
encore aujourd'hui an naturaliste la rareté
des squelettes d'oiseaux.
Quant à la
fécondité des animaux aquatiques,
signalée plus haut et prédite dans le
récit biblique, elle continue à
être vraiment phénoménale.
Tandis que les oiseaux se multiplient lentement -
les femelles ne pondent que d'un à six oeufs
- la vertu prolifique des poissons est telle
qu'elle dépasse même celle des
plantes. Ainsi un seul hareng peut contenir
jusqu'à 65,000 oeufs ; une carpe
200,000 ; le cabillaud, espèce de
morue, a jusqu'à 3 millions d'oeufs dans le
corps, et l'esturgeon de la Volga jusqu'à un
quintal de caviar. Ces oeufs sont, il est vrai, en
majeure partie détruits par des
tempêtes ou d'autres causes ; des masses
de poissons sont aussi dévorés,
à peine éclos. Néanmoins les
habitants des côtes peuvent se faire quelque
idée de la masse
prodigieuse d'animaux qui peuplent les profondeurs
des eaux salées. Du Havre, par exemple,
partent tous les jours de 30 à 40 grands
bateaux de pêche, qui reviennent
chargés de crevettes et d'autres animaux
marins, et en alimentent les habitants des ports,
ainsi que ceux des grandes villes et de la
capitale. Néanmoins la mer en fournit
toujours avec la même abondance. Ainsi la
ville de Londres consomme annuellement 375 millions
de poissons divers, outre les homards, les
langoustes, les crabes, les crevettes, etc.
Année après année
15 à 20,000 pêcheurs se rendent sur
les bancs de Terre-Neuve, et y prennent en moyenne
30 millions de morues, sans que leurs bancs
diminuent. Cela encore n'est rien comparé
à la pêche du hareng. Les Hollandais
prennent en moyenne annuellement 430 millions de
ces poissons, « et les habitants de la
Norvège, où arrivent du pôle
nord les grands bancs de poissons, ont
pêché en 1889, et cela pendant les
quelques semaines que dure le passage, outre 50
millions de morues, 1235 millions d'hectolitres de
harengs, tellement qu'ils se servirent du superflu
pour fumer leurs champs. Des baleines et des
requins suivent ces bancs et avalent par millions
ces poissons, et chaque année d'autres
redescendent en légions innombrables, pour
aller se perdre dans les profondeurs inconnues de
l'Océan. Il est probable que si l'on
disposait d'une quantité suffisante d'engins
de pêche et de moyens d'expédition et
de transport, l'humanité entière
pourrait se nourrir de poissons. N'est-ce pas
l'accomplissement visible et
littéral de la parole de Dieu, lorsqu'Il
commanda : « Que les eaux
fourmillent d'une abondance d'êtres
vivants », et l'effet de la
bénédiction qu'Il prononça sur
ces créatures du cinquième jour en
leur disant : Soyez féconds et
multipliez et remplissez les eaux de la
mer ?
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