LE
MONDE ET L'HUMANITÉ
DE LA CRÉATION
AU DÉLUGE
AVANT-PROPOS
L'idée de publier ces études ne
m'est pas venue spontanément. Elles avaient
fait la matière de prédications
qu'entendit un ami genevois villégiaturant
à la Côte d'Azur. À son
départ, il me pria d'accepter quinze francs
« comme pierre d'attente en vue d'une
publication prochaine ». Ce geste
généreux était si
imprévu que je ne pus me défendre d'y
répondre, en éclatant de rire :
« Moi ! publier des sermons ?
C'est le genre le plus ennuyeux que je
connaisse ! »
Le vieil adage : Ne dites jamais
« fontaine je ne boirai pas de ton
eau !... » eut raison encore cette
fois-ci, puisque j'en suis venu à
goûter de ce breuvage que j'avais cru ne
jamais porter à mes lèvres.. Le
pourquoi de cette conversion ? C'est que
d'autres amis m'ont tenu le même langage,
auquel j'ai fini par céder. J'ai donc remis
ces études sur le métier, pour leur
donner une tournure laïque, et je prends la
liberté de les offrir présentement au
public.
Il est assez rare, je crois, que l'on fasse
des séries de sermons sur ces sujets...
antédiluviens. Au
lecteur de juger si cela
est
dépourvu d'à-propos. Si je les ai
traités aussi longuement, c'est qu'ils m'ont
paru avoir une valeur immense comme documents
historiques, et une importance capitale pour les
fondements de la foi.
La mode actuelle relègue au rang des
grandes traditions de l'Orient, autant dire de
légendes, les premiers récits de nos
saints livres. L'on n'en veut retenir que la
vérité religieuse consistant en
données plus ou moins précises sur la
puissance, la sainteté et l'amour divins.
Aussi nombre de chrétiens se font-ils une
idée très vague, voire très
confuse, de l'origine du monde et de la dotation
primitive de l'homme, comme aussi du
caractère de Dieu qui, ayant
créé l'homme faible, l'aurait
exposé à une tentation à
laquelle il ne pouvait résister, pour le
frapper ensuite avec une
sévérité impitoyable. Cette
conception erronée est très
répandue ; elle ne peut engendrer dans
l'esprit qu'une méfiance instinctive
à l'égard des textes bibliques ;
et la foi se trouve sapée à sa base
même ; celle funeste confusion ne manque
pas de se répercuter à travers toute
la révélation biblique, qu'elle
dénature en méconnaissant les
principes fondamentaux sur lesquels repose
l'édifice des relations de Dieu avec les
hommes.
Les mêmes règles
d'interprétation appliquées aux faits
du Nouveau Testament les réduisent à
des symboles, à des
paraboles. Que reste-t-il alors de la mort
expiatoire du Sauveur et de la
résurrection ?
Souvent encore l'on oppose
catégoriquement le Dieu de l'Ancienne
Alliance à celui de la Nouvelle.
Aussi les esprits sérieux, avides de
comprendre et d'être en mesure de donner
raison de leur foi en toute circonstance, sont-ils
désemparés. Pour un peu, ils
répéteraient le moi de Pilate :
« Qu'est-ce que la
vérité ? »
Au cours d'une carrière
déjà longue, j'ai eu mainte occasion
d'écouter, d'observer, de lire et d'entendre
tout ce qui concerne le problème capital de
la vie. Arrivé bientôt au terme de ce
pèlerinage, je vois les textes bibliques
s'imposer à mon esprit, à ma raison,
à ma conscience et à mon coeur avec
une autorité toujours plus pressante, celle
de la vérité. je les crois vrais,
tout simplement. Et je suis saisi par leur
réalité psychologique
indéniable, qui a franchi les siècles
et dominé le développement de la
pensée humaine. Ces pages, que d'aucuns
veulent désuètes, sont pour moi
palpitantes de vie.
À ceux qui dénonceront en moi
le retardataire, le rétrograde, le
réfractaire à la saine
évolution des idées
théologiques, je réponds d'avance
que, de même qu'après avoir
goûté aux mets succulents ou
épicés on en revient toujours au pain
de froment,
de même aussi, après avoir
excursionné dans les champs de la
philosophie et de la théologie, c'est avec
une joie toujours grandissante que j'ai
retrouvé le pain de vie dans le Saint Livre,
et cela de la première ligne de la
Genèse à l'Évangile.
P. P.
PRÉFACE
DE LA SECONDE ÉDITION
Avec une célérité
imprévue, la première édition,
sortie de presse en mars, s'épuisait
dès l'automne. Preuve que les sujets
traités, pour
« antédiluviens » qu'ils
soient, a conservé quelque
actualité.
De chaleureux témoignages sont
parvenus de tous côtés à
l'auteur, l'engageant à suivre le conseil
des imprimeurs : mettre au plus tôt sur
pied une seconde édition.
Le premier texte n'a pas
été modifié, une page
supplémentaire, dans le chapitre de la
Providence, s'inspire de l'Océan et de ses
marées, que l'auteur contemplait pour la
première fois l'été
dernier.
Deux appendices sont venus grossir
notablement le volume.
Reprenant une phrase du chapitre II, le
premier développe la question si complexe de
l'Atlantide, jadis réputée
légendaire, mais qui prend de plus en plus
figure historique et scientifique, grâce,
surtout, à la fameuse théorie des
Dérivées Continentales émise
par l'illustre savant Wegener. Géologie,
histoire naturelle, ethnographie et linguistique
sont tour à tour mises
à contribution et projettent sur l'antique
récit de Platon un jour nouveau illuminant
le passé de notre globe et de
l'humanité dune clarté jusqu'ici
insoupçonnée.
Le second Appendice aborde le sujet si
controversé du Transformisme, dont de
nombreux théologiens avaient, à la
légère, admis les thèses
hardies et subversives. Durant quelques
décades, on put croire que les successeurs
de Darwin l'avaient emporté ; les
coryphées de ce qu'on appelle la Nouvelle
Théologie lancèrent dans le monde
religieux des affirmations sonores sapant à
la base la doctrine biblique de la Création
et de la Révélation.
Ces déclarations bruyantes sont
aujourd'hui frappées à leur tour de
caducité pour la raison capitale que le
Transformisme n'a point réussi à se
donner le fondement expérimental
indispensable, seule pierre de touche d'une science
authentique. Il se trouve lui-même
relégué au rang des hypothèses
- géniales ou non -
échafaudées en vain par les penseurs
pour donner du monde une explication
scientifique.
Les premières pages de la Bible
posent les principes essentiels des origines, de la
création et de la destinée de
l'homme, de sa chute et de ses conséquences
tragiques, comme aussi et surtout de l'oeuvre
rédemptrice annoncée
déjà en Eden et poursuivie à
travers les siècles. Par là ces
documents vénérables
sont de tous les
temps ;
ils sont si actuels qu'ils viennent de subir le
plus terrible assaut qu'ils aient jamais
essuyé. Ils en sortent vainqueurs.
Une fois de plus, les croyants sont en
droit de répéter la parole naïve
et profonde de Théodore de Bèze, qui
figure à l'exergue de l'image classique de
l'enclume et des trois forgerons :
Plus à me frapper on
s'amuse
Tant plus de marteaux on y use.
Paul PERRET,
pasteur.
79, rue
Denfert-Rochereau, Paris
(XIVe).
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