Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Du Thabor à Golgotha



PRÉFACE

Ces pages, quand je les ai écrites, n'étaient point destinées au public. Mon but était de laisser en héritage à mes jeunes enfants, si Dieu ne m'accordait pas la grâce de les élever et de les introduire dans l'Eglise chrétienne, la profession de foi de leur père comme guide dans la vie. C'est avec cette pensée que j'ai médité la passion de notre Seigneur Jésus-Christ, qui est à mes yeux le lieu très saint du sanctuaire, l'Évangile dans l'Évangile. Cette étude, dont chaque ligne a été écrite avec prière, a servi à ma propre édification. Quoique j'aie fréquemment prêché sur les souffrances du Christ, j'éprouve toujours plus le besoin de méditer et d'approfondir les saintes douleurs et l'inexprimable angoisse que le bon Berger a endurées par amour pour ses brebis.



I
LE THABOR

Le moment décisif de la vie du Sauveur est à mes yeux la transfiguration. C'est sur le Thabor que je place la ligne de démarcation entre sa mission de prophète et celle de sacrificateur. Si, jusqu'alors, il a manifesté aux hommes sa sainteté parfaite par une obéissante activité, c'est maintenant par la souffrance qu'il accomplira la volonté de son Père. La même voix divine qui, à son baptême, l'avait consacré comme prophète, se fait de nouveau entendre et vient l'oindre pour l'holocauste.

I. LA VIE DE PRIÈRE DU SAUVEUR

La transfiguration a lieu pendant que jésus prie. « Le Seigneur, durant les jours de sa chair, avait offert, avec de grands cris et avec larmes, des prières et des supplications. » (Hébr. V, 7.) Ce passage se rapporte essentiellement à la dernière prière de Jésus à Gethsémané ; il a cependant un sens plus étendu.

Le Seigneur priait sans cesse. Son âme sainte était en communion constante avec son Père. Plus sa mission demeurait incomprise de ses disciples, plus la différence devenait incommensurable entre sa personnalité exceptionnelle et celle des autres hommes, et plus il devait éprouver le besoin de s'isoler pour s'entretenir seul à seul avec son Père céleste. Nul homme n'a vécu ici-bas d'une vie tout à la fois aussi humaine et aussi peu terrestre. « Là où est votre trésor, là sera aussi votre coeur » (Matth. VI, 21), disait-il à ses disciples. Le coeur de son Père était son trésor. Il vivait et se mouvait dans la crainte de Dieu, dans la prière incessante.

Outre cette communion intime et constante avec son Père, le Sauveur recherchait souvent la solitude afin de répandre librement son coeur devant Dieu. Ce qui s'est passé dans ces saintes retraites, dans ces nuits de recueillement, entre le Père et son Fils unique, entre l'Éternel et l'Agneau pur et sans tache, nul ne peut se le représenter. Ce sont des choses au-dessus de la pensée humaine, des choses qui embrassent le ciel et la terre, le temps et l'éternité. Jamais prières semblables à celles de Jésus ne sont montées d'ici-bas au trône de Dieu.

Christ nous a ouvert le chemin ; il nous convie à de semblables heures de consécration. Le voile qui cachait le lieu très saint est déchiré ; le Père est prêt à accueillir ses pauvres enfants fatigués.

Pour le chrétien, la prière doit être un délassement ; la communion avec Dieu, son bonheur. Où qu'il se trouve, il doit consacrer sa demeure par la prière. La chambre que tu habites, l'atelier où tu travailles, n'ont peut-être jamais entendu l'accent de la prière, mais en revanche beaucoup de paroles coupables. Que ta communion avec le Dieu saint vienne purifier ce lieu souillé ! Le wagon du chemin de fer dans lequel tu t'assieds, est peut-être occupé par des personnes qui vivent loin de Dieu et dont le coeur est léger ou méchant. Poursuivras-tu ta route, préoccupé de pensées terrestres ou même mauvaises ? Les anges de Dieu qui t'accompagnent vont-ils pleurer sur toi ? ou te verront-ils sanctifier ton travail et ton voyage par un soupir vers le ciel ?

Ii. LE CIEL SUR LA TERRE

Parvenu au sommet du Thabor, Jésus s'agenouille. Il élève les mains et le regard vers le ciel : il prie. « Et son visage devint resplendissant comme le soleil et ses habits devinrent éclatants comme la lumière. » (Matth. XVII, 2.) Son corps, ses vêtements reflètent une gloire inconnue. La divinité du Fils unique, voilée jusqu'alors par son humanité, perce son enveloppe terrestre et répand sur tout son être une lumière douce, céleste, indéfinissable. Les disciples contemplent leur Maître avec étonnement ; ils éprouvent, d'une manière saisissante, l'avant-goût de la vie éternelle et bienheureuse.

Ce n'est point tout. Le ciel s'ouvre ; deux personnages glorieux apparaissent et viennent s'entretenir avec Jésus. Ces envoyés de Dieu sont chargés d'un message pour Celui qu'ils adorent comme leur Seigneur et Maître et « qui s'est dépouillé lui-même, ayant pris la forme de serviteur. » (Phil. II, 7.) « Ils lui parlent de sa mort qu'il devait accomplir à Jérusalem. » (Luc IX, 31.) Jésus reçoit le message de son Père avec une soumission filiale, l'Agneau de Dieu monte volontairement sur l'autel afin de s'offrir en sacrifice pour l'humanité tombée : « Voici, je viens, ô Dieu ! pour faire ta volonté. » (Hébr. X, 7.) Cette parole, Jésus l'accomplira jusqu'à son dernier soupir, jusqu'à la dernière goutte de son sang.

Un nuage lumineux descend du ciel, enveloppe la montagne et une voix venant d'en-haut se fait entendre : « C'est ici mon Fils bien-aimé, en qui j'ai pris plaisir ; écoutez-le.) (Matth. XVII, 5.) Les disciples, comprenant qu'ils se trouvent en présence de l'Éternel, de Jéhovah, du Dieu trois fois saint, tombent à terre épouvantés. Jésus s'approche, les relève et leur dit : « N'ayez point de peur. » (Matth. XVII, 7.)

Cet événement merveilleux jette un nouveau jour sur la personne du Sauveur, sur sa divine origine et sur le but de sa mort. Il confirme, non par des paroles, mais par un acte éclatant de vérité et de gloire, le témoignage que Jésus a rendu de lui-même. Son humanité est maintenant parvenue à maturité ; il est digne d'entrer dans le sanctuaire céleste. « Il nous fallait un tel souverain Sacrificateur saint, innocent, sans souillure, séparé des pécheurs, et élevé au-dessus des cieux. (Hébr. VII, 26.) La puissance des ténèbres a vainement essayé de le souiller de la plus légère ombre de péché.

Il est demeuré parfaitement pur ; aussi la mort ne pourrait-elle avoir aucun pouvoir sur lui, s'il ne livrait lui-même sa vie par un acte entièrement volontaire. « Personne ne m'ôte la vie, mais je la donne de moi-même ; j'ai le pouvoir de la quitter et le pouvoir de la reprendre. » (Jean X, 18.) « Il donne sa vie en rançon pour plusieurs. » (Matth. XX, 28.)

L'intelligence humaine ne parviendra jamais à sonder le mystère de la divinité et de l'humanité réunies en la personne du Christ. Dans les tentations, les combats, les victoires de sa vie terrestre, la nature divine du Sauveur s'est comme effacée pour laisser agir sa nature humaine. Aussi est-il « le chef et le consommateur de la foi. » (Hébr, XII, 2.) « Il a appris l'obéissance par les choses qu'il a souffertes. » (Hébr. V, 8.) « Il a été éprouvé en toutes choses, comme nous, mais sans péché. » (Hébr. IV, 15.) Toutes les tentations qui s'attaquent à l'homme, le Seigneur les a connues. Ses miracles mêmes n'ont point été accomplis par sa divinité, mais par son humanité, Dieu exauçant les prières du saint Fils de l'homme. « Père, je te rends grâces de ce que tu m'as exaucé. je savais bien que tu m'exauces toujours. » (Jean XI, 41.)

Il semble que le Seigneur se rapproche de nous, lorsque nous le contemplons sous sa face humaine. Quand nous entendons les prières et les supplications que le saint Lutteur a offertes avec larmes, nous sentons en lui le souverain Sacrificateur plein de compassion, de miséricorde et d'amour. « Car Celui qui n'a point connu le péché, Dieu l'a traité en pécheur pour nous, afin que nous, nous devenions justes de la justice de Dieu en lui. » (2 Cor. V, 21.) C'est pour nous qu'il a surmonté le péché, vaincu la tentation et accompli la loi.

Moïse, le législateur, Elie, le réformateur du peuple hébreu, les deux plus grands prophètes de l'ancienne alliance, apparaissent et s'entretiennent avec Jésus de sa mort prochaine. Leur présence sur le Thabor fait pressentir l'importance qu'auront pour le Sauveur et pour l'humanité les souffrances au-devant desquelles il s'avance. Moïse et Elie avaient prédit à leur peuple une rédemption future ; ils lui avaient parlé d'espérance céleste, de purification, de rachat du péché ; mais ils n'avaient pu accomplir eux-mêmes cette rédemption, ni en prévoir le moyen. Sur le Thabor, il leur est donné de contempler la chute épouvantable de l'humanité et le sacrifice inouï que Dieu prépare pour son salut ; ils adorent la sainte victime qui va s'offrir en holocauste et l'amour incompréhensible de Dieu pour les hommes tombés et déchus. Avec quel saint respect et quel joyeux étonnement, Moïse et Elie auront salué le Sauveur du monde et admiré l'oeuvre rédemptrice qu'il allait accomplir !

De nos jours la cause et le but de la mort de Christ sont connus dans le monde entier. Au moment de la transfiguration personne ne les comprenait. Les apôtres mêmes ne pouvaient accepter l'abaissement de leur maître. N'est-il pas admirable que le Seigneur soit allé au-devant de la mort pour des hommes que son sacrifice laissait indifférents, auxquels même il était en scandale ?

Moïse a transmis aux hommes la loi sainte et immuable de Dieu ; mais il n'a pu l'observer dans sa perfection. Aucun homme ne l'a accomplie. Sur le Thabor, Moïse salue en Jésus celui qui a satisfait, dans leur sens le plus complet, toutes les exigences de la loi, qui, parfaitement pur et saint lui-même, a détourné de l'humanité la juste colère de Dieu et attiré sur elle sa bienveillance paternelle. Le législateur des Hébreux avait prononcé une parole redoutable : « Maudit est celui qui n'accomplit pas les paroles de cette loi en les mettant en pratique. » (Deut. XXVII, 26.) Cette malédiction pesait sur l'humanité tout entière. Le saint Fils de l'homme vient s'offrir pour « nous racheter de la malédiction de la loi » (Gal. III, 13), et prendre sur lui la condamnation que nous avions méritée. « Ils parlaient de sa mort qu'il devait accomplir à Jérusalem. » (Luc, IX, 31.)

Lorsque, en présence du ciel et de la terre, Christ eut manifesté sa volonté arrêtée d'obéir jusqu'à la mort, le Dieu saint intervient lui-même et lui accorde la consolation la plus douce, la force la plus puissante, dont il avait besoin pour supporter les souffrances de la Passion. « Et voici il vint de la nuée une voix qui dit : « C'est ici mon Fils bien-aimé, en qui j'ai pris plaisir ; écoutez-le. » (Matth. XVII, 5.) Durant sa vie terrestre, le premier et l'unique désir de Jésus fut de mériter l'approbation de son Père ; aussi cette déclaration dut-elle être pour lui un sujet de joie et de consolation.

Notre bonheur devrait être aussi de nous sentir approuvés de Dieu. Si je possédais les plus grands privilèges terrestres : richesse, honneur, puissance, si j'avais gagné le monde entier, mais qu'en même temps j'eusse encouru le déplaisir de l'Éternel, je ne serais qu'un pauvre et misérable fou, digne de pitié. Que sont les louanges et la faveur du monde, qu'importe la bienveillance des hommes, en présence de l'indignation et de la colère, du Tout-Puissant ? Mais « si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » (Rom. VIII, 31.)

La transfiguration nous fait comme toucher du doigt le but des souffrances de Christ : rétablir les rapports entre le ciel et la terre, entre Dieu et l'humanité ; rouvrir le Paradis à l'homme déchu et lui rendre le bonheur. Le royaume de Dieu apparaît pendant ce court instant, dans sa gloire, sa paix et sa félicité - c'est l'aurore de la transformation du monde qui s'accomplira par la mort du Christ ; sa mort en est le chemin douloureux, mais aussi le divin gage.

La transfiguration du Seigneur sur le Thabor est un présage de sa transfiguration éternelle, après l'accomplissement de la rédemption ; elle est l'onction qui inaugure son règne. C'est, il est vrai, avec son propre sang que le Sauveur doit conquérir le royaume ; il le donne volontairement et par amour ; c'est pourquoi Dieu le consacre ici comme roi. « Toute puissance lui est donnée dans le ciel et sur la terre. » (Matth. XXVIII, 18.) Christ ne veut pas jouir seul de la gloire immortelle; il ne veut pas que les habitants du ciel en soient seuls participants ; c'est pour cela qu'il va mourir sur la croix. « Père, je désire que ceux que tu m'as donnés soient avec moi, où je serai, afin qu'ils contemplent la gloire que tu m'as donnée, parce que tu m'as aimé avant la fondation du monde. » (Jean XVII, 24.)

Les saintes Écritures parlent à plusieurs reprises du sort bienheureux des rachetés. Les nouveaux cieux et la nouvelle terre avec leur splendeur, leur harmonie, leur félicité, sont dépeints par des images que l'imagination a peine à saisir. La transfiguration est la promesse la plus solennelle de la gloire et du bonheur qui seront le partage des élus.

Si, après avoir contemplé cette glorieuse perspective, nous reportons nos regards sur nous-mêmes et sur le monde qui nous entoure, nous serons saisis d'une profonde tristesse ; car le but que les hommes poursuivent est bien éloigné de celui que Dieu leur propose, et souvent il lui est entièrement opposé. Le coeur humain a été créé pour le bonheur ; il le cherche sans cesse, mais il ne le trouve pas ici-bas. Les explorateurs découvrent des pays inconnus ; les savants font de merveilleuses inventions ; mais ni les uns ni les autres ne parviennent à délivrer l'homme de la souffrance et de la fatigue. La transfiguration du Christ nous offre l'image et la promesse du bonheur et de la gloire à venir ; elle nous montre ce que sera notre propre transfiguration.

III. LA VIE À VENIR

As-tu perdu tes bien-aimés ? sans doute tu les suis par la pensée ; tu voudrais ne jamais te séparer d'eux ; tu aimerais connaître leur état actuel. Mais que tu en sais peu de chose ! Dormiront-ils jusqu'au jour de la résurrection ? Sont-ils auprès de Dieu ? Voient-ils ta douleur ? Les reconnaîtras-tu dans le ciel ?

À ces questions que chacun a entendues ou s'est posées à lui-même, les réponses varient. Les uns pensent que, ne sachant rien de l'état des âmes après la mort, nous n'avons pas à nous en préoccuper ; il doit nous suffire de savoir nos bien-aimés délivrés de la souffrance et entrés dans le repos. D'autres déclarent que, comme aucun mort n'est revenu affirmer son existence, nous ne possédons pas de preuves d'une vie à venir.

Mais il est un témoin de l'éternité qui reviendra certainement à une époque plus ou moins rapprochée. Celui-là, tous le verront. Alors les incrédules en grand nombre, oubliant leurs objections et leurs critiques, supplieront les montagnes de « tomber sur eux et de les cacher de devant la face de Celui qui est assis sur le trône, et de devant la colère de l'Agneau. » (Apoc. VI, 16.)

Sur le Thabor apparaissent ensemble Moïse et Elie, qui ont vécu sur la terre à dix siècles d'intervalle. L'éternité réunit ceux qui ont eu la même foi, travaillé à la même oeuvre, poursuivi le même but. À leur mort, les hommes sont partagés en deux camps : les enfants de lumière et les enfants des ténèbres ; les uns vont à la condamnation, les autres à la vie éternelle. « Dieu est le Dieu des vivants. » (Marc XII, 27.) Quand nous aurons déposé notre enveloppe mortelle, nous verrons toutes choses sous un jour nouveau. Moïse et Elie, sur le Thabor, auront porté un jugement tout autre sur leur peuple que pendant leur vie ; les promesses divines, le péché, la grâce, auront pris à leurs yeux une bien plus grande importance. Il est dit que Moïse et Elie s'entretiennent avec le Sauveur. Sans doute les bienheureux converseront ensemble, mais sur d'autres sujets que lorsqu'ils étaient sur la terre. On n'entendra plus de paroles oiseuses ; le sérieux de l'éternité les dissipera.

Les disciples reconnaissent immédiatement Moïse et Elie ; si près du ciel, le souffle de l'immortalité les effleure. Ce fait nous permet de conclure que nous nous reconnaîtrons dans la vie à venir. Pensez-vous qu'en apercevant Luther, il sera nécessaire de demander son nom ? Et que ceux que vous avez connus et aimés sur la terre vous seront étrangers ? Oh oui ! tu les verras, tu les retrouveras, tes bien-aimés, et désormais nulle ombre, nul nuage ne te sépareront d'eux.

Moïse et Elie s'entretiennent des souffrances que le Sauveur devait supporter à Jérusalem. Ils avaient donc conservé un saint intérêt pour l'oeuvre à laquelle leur vie avait été consacrée et, dans le monde invisible, ils sont préoccupés du même but. Les saintes Écritures ne parlent pas de l'activité des élus dans le ciel, mais l'entretien qui a lieu sur le Thabor montre l'intérêt qu'ils prennent au salut de l'humanité. Le fait qu'il est parlé dans l'Apocalypse du repos des bienheureux (Apoc. XIV 13), n'est point une objection concluante contre cette interprétation. Ce qui est certain, c'est qu'ils ne connaîtront plus la fatigue. « Si les anges sont envoyés pour exercer un ministère en faveur de ceux qui doivent hériter le salut, » (Hébr. I, 14) ne pouvons-nous pas nous représenter les hommes qui ont travaillé sur la terre au salut d'autrui, comme continuant à s'en occuper encore dans le ciel ?

Mais la transfiguration nous dit des choses infiniment plus importantes pour notre vie chrétienne : elle montre le rapport qui existe entre la souffrance et la gloire, entre la croix et la délivrance. Avant son dernier voyage à Jérusalem, où s'accomplir pour lui le suprême sacrifice, le Seigneur reçoit de son Père une éclatante manifestation de son amour. La sombre nuit de Golgotha a dû être éclairée par ce souvenir, même lorsque les écrasants nuages de la justice divine voilèrent au Sauveur la face de son Père : « Je ne suis pas seul, parce que mon Père est avec moi. » (Jean XVI, 32.)

Ce même rapport, entre la souffrance et la gloire, se retrouve dans la vie des patriarches, ainsi que chez les apôtres et les disciples qui ont marché sur les traces du Sauveur. Sans doute le souvenir de la transfiguration aura fortifié ces derniers pour les jours de l'épreuve. Bientôt ils devaient voir leur Maître tomber entre les mains de ses ennemis acharnés ; ils allaient entendre le peuple crier : « Crucifie-le ! Crucifie-le ! » enfin ils devaient le voir mourir !

Il en est de même pour nous. Si nous suivons Jésus, si nous cherchons sa face avec prière, nous recevrons des forces et des consolations proportionnées à nos souffrances.

Depuis que le péché est entré dans le monde, la douleur est devenue le lot amer de l'humanité. La terre est une vallée de larmes. Nul n'est épargné. Les chrétiens ont une part toute spéciale d'épreuves. « C'est par beaucoup d'afflictions qu'il nous faut entrer dans le royaume de Dieu. » (Act. XIV, 22.) La multitude des rachetés, que saint Jean contemple devant le trône de Dieu, « sont tous venus de la grande tribulation. » (Apoc. VII. 14.) Dieu ne trace pas à ses élus des sentiers privilégiés. La seule différence, - et sans contredit, elle est grande, - c'est que les enfants de Dieu sont puissamment consolés, tandis que ceux qui ne lui appartiennent pas pleurent sans espérance. Dieu donne son secours à chaque chrétien suivant ses besoins. Souvent même, dans sa miséricorde infinie, il lui envoie la consolation avant de lui imposer la croix.

Si le Seigneur nous accorde sur le Thabor une heure de rafraîchissement, s'il inonde nos coeurs de paix et de joie, jouissons-en avec reconnaissance et gardons-en précieusement le souvenir ; nous pouvons être appelés à marcher comme Elie quarante jours et quarante nuits dans le désert, à lutter à l'exemple du Sauveur à Gethsémané et à suivre Jésus, en portant notre croix jusqu'à Golgotha. Plus le Thabor aura été radieux, plus l'épreuve sera sérieuse et douloureuse. L'important est de ne pas nous laisser gagner par le sommeil sur la sainte montagne. « Veillez et priez, de peur que vous ne tombiez dans la tentation ; car l'esprit est prompt, mais la chair est faible. » (Matth. XXVI, 41.)


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