Voix Chrétiennes dans la
Tourmente
« LES COEURS
PURS »
Pasteur P. VERGARA
12 Avril 1942
LECTURES BIBLIQUES
- Jésus, voyant la foule, se rendit
sur la montagne ; et quand il fut assis,
ses disciples s'approchèrent de lui.
Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les
enseigner, en disant :
- Heureux les pauvres en esprit, car le
Royaume des Cieux est à eux !
- Heureux ceux qui pleurent, car ils seront
consolés !
- Heureux ceux qui sont doux, car la terre
leur appartiendra
- Heureux ceux qui ont faim et soif de la
justice, car ils seront rassasiés
- Heureux les miséricordieux, car
ils obtiendront miséricorde !
- Heureux ceux qui ont le coeur pur, car
ils verront Dieu !
- Heureux les pacificateurs, car ils seront
appelés fils de Dieu !
- Heureux ceux qui sont
persécutés pour la justice, car le
Royaume des Cieux est à eux !
- Heureux serez-vous quand on vous
outragera, quand on vous persécutera et
que l'on dira faussement contre vous toute sorte
de mal à cause de moi.
Réjouissez-vous et tressaillez de joie,
parce que votre récompense sera grande
dans les cieux, car c'est ainsi que l'on a
persécuté les prophètes
venus avant vous.
- Vous êtes le sel de la terre ;
mais si le sel perd sa saveur, avec quoi la lui
rendra-t-on ? Il n'est plus bon qu'à
être jeté dehors et foulé
aux pieds par les hommes. Vous êtes la
lumière du monde ; une ville
située sur une montagne ne peut
être cachée, et on n'allume pas une
lampe pour la mettre sous le boisseau ;
mais on la met sur un support, et elle
éclaire tous ceux qui sont dans la
maison. Que votre lumière luise ainsi
devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes
oeuvres, et qu'ils rendent gloire à votre
Père qui est dans les cieux.
ÉVANGILE SELON SAINT MATTHIEU,
CH. V, V. 1 A 16.
-
- « Heureux
les
coeurs purs car ils verront
Dieu. »
-
MATTHIEU,
V, 8.
Jamais parole plus haute n'est sortie de la
bouche d'un homme. Jésus déclare ici,
comme une chose évidente par elle-même
et sans essayer d'accompagner son affirmation du
moindre argument emprunté à l'ordre
de l'intelligence ou de la raison, que la
pureté du coeur conduit à la vision
et à la connaissance de Dieu.
« Heureux les coeurs purs parce qu'ils
verront Dieu. » Le futur employé
par Jésus ne doit cependant pas nous faire
prendre cette béatitude pour la promesse
d'une grâce à recevoir dans un avenir
supraterrestre, dans quelque ciel lointain. Non,
c'est dès maintenant, ici-bas, au sein
palpitant de la vie présente, que les coeurs
purs ont le privilège de connaître
Dieu, de le voir à l'oeuvre, de relever la
trace de ses pas, l'ouvrage de ses mains, les
étonnants accomplissements de son dessein
d'amour.
Parfois cette vision de l'Oeuvre de Dieu
paraît facile. Si nous en croyons les
poètes, nous n'avons qu'à sortir de
nos cités de pierre, gagner les champs et
les bois et ouvrir nos yeux et partout
apparaîtra la signature du Souverain Artiste.
- Et les flots bleus que rien ne gouverne
et n'arrête
- Disaient en recourbant l'écume de
leur crête
- C'est le Seigneur, le Seigneur Dieu.
Dans les littératures de tous les peuples
nous trouvons des affirmations semblables à
celle-ci, et nous croyons volontiers à la
sincérité des poètes.
Mais la vie présente des moments plus
difficiles, nous ne nous trouvons pas toujours en
promenade dans les sites consolants de la nature,
nous ne sommes pas tous poètes ou nous le
sommes à nos heures et ces heures sont
exceptionnelles ; la plupart du temps nous
sommes placés devant des circonstances et
dans un environnement où il est moins
aisé de voir Dieu et de contempler son
ouvrage. Notre vie est un pèlerinage rempli
d'aléas, elle a, certes, ses heures
paisibles et heureuses, ses heures de repos
« dans les verts pâturages et
près des eaux tranquilles »,
comme dit le Psalmiste, mais elle présente
aussi, et il n'a garde de l'oublier, ses heures
difficiles où il nous faut cheminer dans
d'étroits défilés et dans
cette « vallée de l'ombre et de
la mort » dont il nous parle en
termes si évocateurs.
Quand il n'y a plus de fleurs
parfumées ni de chants d'oiseaux, quand les
étoiles n'apparaissent plus au-dessus de nos
têtes, pouvons-nous voir Dieu encore et
malgré tout ? Pouvons-nous le voir dans
l'horreur des épreuves que traverse le monde
en ce moment, à travers la fumée des
incendies et la poussière des cités
écroulées, et la faim, et la
nudité, et le péril et
l'épée ? Dieu n'est-Il pour nous
que le Dieu des beaux jours qui parle dans la paix
et la tranquillité du bonheur, dans les
harmonies souriantes de la nature, ou bien,
entendons-nous aussi Sa voix dans l'orage et
voyons-nous se déployer la force de Son bras
aux époques de révolution et de chaos
et jusqu'au sein de la guerre ?
Pour ma part, voici ma foi : Dieu est
dans les situations concrètes quelles
qu'elles soient, dont nos existences sont
semées et si notre coeur est assez pur nous
pouvons l'y voir à l'oeuvre. Qu'est-ce que
notre vie après tout, si ce n'est une suite
ininterrompue de situations concrètes. Il en
va nécessairement ainsi tant que nous
demeurons sur le plan terrestre. Nous passons d'une
situation à une autre avec une
rapidité qui jette souvent la confusion dans
nos esprits ; nouvelles expériences,
nouvelles décisions à prendre,
nouveaux choix à faire, conflits d'opinions,
tentations, trahisons, lassitude ou enthousiasme,
défaites ou victoires, crises de toute
nature, voilà ce dont est fait le tissu de
notre vie. Et nous sortons de
chaque expérience
nouvelle, différents de ce que nous
étions, quand nous y sommes
entrés,
Nous nous demandons souvent, par exemple,
avec anxiété ce que deviendra notre
pays quand la guerre sera finie ; beaucoup
redoutent le retour pur et simple aux errements
passés ; mais c'est là une
crainte superflue parce que les
événements nous ont tous
modifiés ; ni nos prisonniers dans
leurs camps, ni nous-mêmes ne sommes
restés ce que nous étions avant la
tourmente ; si nous ne pouvons prédire
ce que sera notre pays nous pouvons en tout cas
être certain d'une chose, c'est qu'il sera
différent parce que nous serons tous
changés.
Nous ne pouvons jamais faire de plan
à longue échéance parce que
les circonstances concrètes avec lesquelles
nous sommes aux prises nous modifient s'ans cesse
et que nos plans d'hier ne répondront plus
demain à notre désir ni à
notre besoin. Tout ce que nous pouvons faire, c'est
de nous efforcer de discerner pas à pas
notre route telle quelle se dégage des
circonstances elles-mêmes et telle que Dieu
nous l'indique au jour le jour, car c'est dans la
variété infinie des faits de la vie
journalière que Dieu nous
révèle Sa volonté du moment.
Pour chacun de nous il en est ainsi.
Notre vie est une succession ininterrompue
de crises difficiles, nous passons constamment en
jugement, nous récoltons un jour ce que nous
avons semé la veille. Oui, mais les moments
de crise ne sont pas seulement les temps du
jugement de Dieu, ils sont aussi les moments des
révélations nouvelles de Dieu, des
moments créateurs, des moments qui ne
contiennent pas seulement la condamnation du
passé quand il fut mauvais, mais aussi
l'espérance de Dieu pour le meilleur avenir
de ses enfants ; c'est bien souvent à
partir de ces moments-là qu'émergent
des commencements nouveaux dont nous n'avions pu
nous faire aucune représentation
auparavant.
Prenez l'exemple de la conversion de
l'Apôtre Paul. Le martyre d'Étienne
fut certainement une période de crise
très grave pour l'Eglise de Jérusalem
qui venait à peine de se constituer.
Allait-elle périr dès sa
naissance ? Et pour le diacre martyr
lui-même, quel sombre jour lorsqu'il se
trouva entouré de la foule hurlante de ses
exécuteurs ecclésiastiques, et que
les pierres de la
lapidation
pleuvaient sur lui ; les
préjugés, la violence, le
conservatisme le plus aveugle et le plus stupide,
prenaient leur revanche et écrasaient en lui
le champion d'une forme nouvelle de la foi
religieuse. Pour Étienne il n'y avait plus
désormais aucune espérance sur la
terre ; son seul refuge et sa seule
consolation était de contempler de ses yeux
mourants la gloire du Christ Éternel qui
l'accueillait dans le monde supérieur. Et
pour les partisans d'Étienne, pour cette
poignée de chrétiens qui constituait
la jeune Église et dont tout l'avenir du
message évangélique au monde
dépendait, la situation ne paraissait
guère plus favorable. Pour eux
c'était l'emprisonnement à bref
délai, l'exil, la dispersion, le
découragement qui s'empare des coeurs quand
tout paraît perdu et fini.
Mais pour nous qui connaissons la suite de
l'histoire, tout apparaît bien
différent. Nous pouvons voir maintenant que
Dieu était présent dans cette
tragédie et qu'Il y préparait
l'avenir. Un jeune homme était
là ; il ne prenait pas de part directe
à l'exécution, il gardait simplement
les vêtements des prétendus
justiciers, il observait la scène, il
écoutait les paroles du martyr, il
réfléchissait, des horizons inconnus
et nouveaux s'entr'ouvraient aux regards de son
âme. Tout ce qu'il voyait et entendait
là se gravait en lui en images
indélébiles et devait quelques jours
plus tard, sur le chemin de Damas, provoquer la
grande révolution intérieure
d'où devait sortir l'Apôtre Paul.
Dès cet instant-là un nouveau chef
était né des circonstances
elles-mêmes et ce nouveau chef devait
bientôt conduire la foi chrétienne
à la conquête du Monde Antique ;
des Églises seraient fondées, des
lettres écrites, des mers traversées,
des emprisonnements supportés et une
influence puissante serait exercée à
travers les siècles dans le monde
entier.
Dieu n'était-il pas dans cette
tragédie et si trop de faits surprenants,
trop de conséquences étendues en ont
résulté pour que nous en puissions
douter, pourquoi ne serait-il pas encore à
l'oeuvre aujourd'hui, dans le terrible
ébranlement du monde et des choses anciennes
dont nous sommes les témoins ?
Devant les situations concrètes de la
vie on peut prendre trois attitudes. On peut tenter
de les exploiter, d'en tirer un profit personnel et
égoïste, y voir une occasion de gagner
de l'argent, des avantages,
d'occuper des places ; c'est la route large,
beaucoup y marchent et s'y pressent ; mais il
arrive que les situations se retournent et que le
profit se change en ruine. On peut aussi se laisser
sombrer dans l'amertume et le désespoir,
s'abandonner au scepticisme et au cynisme, trahir
et déserter dans le dégoût de
tout. On peut, comme dit Shakespeare,
considérer la vie « comme un
conte raconté par un idiot plein de son et
de furie, et ne signifiant rien ».
Cette route-là est aussi une route large et
d'accès facile ; elle mène au
néant.
Mais il y a un autre chemin, il y a une
autre attitude. Quels que puissent être les
événements nous pouvons, avec
humilité et piété, nous
efforcer d'y découvrir la main de Dieu,
l'action de Dieu. Si nous devons rencontrer Dieu
face à face dans notre vie il est certain
que ce sera toujours dans l'ordre concret des
relations humaines et des faits de l'histoire,
à l'occasion de quelque
événement particulier, surprenant ou
redoutable, de quelque haut exemple venu du dehors
troubler et réveiller notre âme, de
quelque difficulté à affronter et
à surmonter.
L'ordre divin d'existence et de
possibilité, duquel les hommes
dépendent pour ces biens de la vie qui ont
une valeur suprême a été
révélé dans
l'histoire ; le Dieu vivant, le Dieu des
Patriarches, des Prophètes, de
Jésus-Christ, des Saints, des
Témoins, des Martyrs, le Dieu de
Vérité, de justice et d'Amour, s'est
manifesté dans les faits concrets et
notre piété intérieure n'est
que la réponse à cette divine
manifestation. Si les Chrétiens ne
s'étaient pas exclusivement enfermés
dans la piété intérieure,
s'ils avaient cherché davantage à
découvrir cette action de Dieu dans les
faits, ils auraient sans doute mieux compris leur
responsabilité dans la vie sociale qui
devrait être un des Temples de Dieu, ils
n'auraient pas abandonné, comme ils l'ont
fait, surtout depuis quatre siècles, ce
vaste champ à la discrétion des
gouvernements et des puissances politiques,
à l'idolâtrie, au polythéisme,
aux idéologies sectaires et brutales, dont
l'adoration a abouti finalement au
démembrement et à la ruine de la
civilisation. Ce qu'il nous faut comprendre c'est
que la vie, toute la vie, doit être
envisagée avec une piété et un
respect infinis, parce que c'est là
que Dieu se montre, parce
qu'aucune prévision, aucun idéal
ancien, aucune philosophie, aucune vision du
passé, ne peuvent contenir la richesse et la
bouleversante nouveauté que Dieu a
déposées dans les situations
concrètes devant lesquelles il nous place,
et par lesquelles ses initiatives de salut se
manifestent à ceux qui ont des yeux pour
voir.
Et quels sont ceux qui savent les
voir ?
C'est ici que la parole de notre texte
revient avec un sens enrichi et une plus profonde
signification. Quels sont ceux qui savent discerner
l'action de Dieu dans le tumulte et parfois dans le
drame des événements ? Ce
sont les coeurs purs. Ils verront Dieu, nous
dit Jésus, ils découvriront son
intervention là où d'autres
n'auraient jamais pu imaginer qu'il fût
présent. Et qui sont les coeurs purs dont
parle le Maître ? Non point les intacts,
les irréprochables, les translucides, les
béatifiés. La pensée du
Maître a un peu plus de vertèbres que
cela, elle ne constitue pas un texte pour une de
ces irréelles images de piété
factice.
Jésus qui connaissait son Ancien
Testament, et en particulier les Psaumes dont Il
savait un grand nombre par coeur, devait avoir dans
la mémoire quand Il prononça la 6e
Béatitude, ces paroles
du Psaume 24e :
« Qui pourra monter à la
montagne de l'Éternel, qui
s'élèvera jusqu'à son Saint
Lieu ? Celui qui a les mains innocentes et le
coeur pur, celui qui ne livre pas son âme au
mensonge, qui ne jure pas pour
tromper ». Qui sont les coeurs
purs ? Ceux qui sont moralement droits, ceux
qui cherchent en trébuchant souvent et
souvent en gémissant, mais toujours avec
ardeur, la vérité. Ceux dont le coeur
n'est pas partagé, déchiré par
des dominations irréconciliables, ceux qui
refusent l'habileté de se ménager des
alibis et de s'assurer des amis dans tous les
camps, ceux qui ne tentent pas la synthèse
impossible de postulats contradictoires ; les
coeurs purs sont ceux qui sont liés au Bien
et au Vrai par un loyalisme entier et sans feinte,
ceux dont le oui est oui et le non est non, et qui
repoussent toute addition comme venant du
démon, le père du mensonge.
Voilà les purs de coeurs selon
Jésus. Ces coeurs-là
découvrent et expérimentent la
présence de Dieu dans des situations
où les
égoïstes, les corrompus, les menteurs,
les superficiels, les consciences à vendre
au plus offrant ou au plus fort, passent sans rien
voir. Comment trouveraient-ils Dieu, alors qu'ils
ne cherchent qu'eux-mêmes et leur sordide
intérêt ? La sublime
récompense des sincères et des purs
c'est qu'ils voient Dieu sans cesse à
l'oeuvre dans leur vie propre et dans la vie du
monde, et que cette vision, loin de
décroître et de s'estomper aux heures
graves, grandit au contraire et s'impose. Dans les
plus terribles circonstances, quand ils sont
entourés d'ennemis et de menaces de tous
côtés, ils savent lever les yeux et
voir la main du Libérateur
Céleste ; comme Élisée
ils voient la montagne pleine de chariots de feu,
et comme le voyant de Patmos « l'Ange
qui se tient debout dans le soleil »
(Apocalypse 19/17).
Prenez la terrible situation du monde
actuel. Devant les faits, trois réactions,
trois attitudes, trois types d'hommes : il y a
ceux qui les exploitent à leur profit, il y
a les hommes qui tirent parti du chaos et de la
détresse générale pour
s'enrichir. Vous connaissez ces fortunes nouvelles
ramassées dans les larmes et le sang, cet
horrible argent qui devrait brûler les mains
de ceux qui l'entassent dans de telles
circonstances. Ces hommes-là ne connaissent
pas de « ligne de
démarcation », il n'y a pour eux
que des clients et celui qui paie le mieux est le
meilleur, serait-il l'ennemi. D'autres exploitent
la situation en occupant les places, les emplois,
en prenant des revanches électorales ;
aucune génuflexion ne leur coûte.
Toute une écume se pousse aux premiers
rangs. Sans doute dans le nombre en est-il qu'anime
le désir de servir, mais ils sont
l'exception, et la majorité ne s'embarrasse
d'aucun idéal. Ils profitent et c'est
tout.
Une autre attitude devant le malheur actuel
est celle des découragés et des
défaitistes : « Les choses
sont ce qu'elles sont, il n'y a qu'à
s'incliner et à accepter ce qu'on ne peut
empêcher ; nous sommes dans un monde
où la vérité et la justice ne
sont que des mots, des conventions, et où le
loup a toutes les chances et l'agneau tous les
torts ». Telle est la philosophie de
scepticisme et de désespoir au fond de
laquelle ils se laissent couler.
Mais il y a une troisième attitude.
Vous pouvez voir, Dieu à l'oeuvre en ce
moment même, Dieu jugeant le monde, Dieu
châtiant l'égoïsme, l'insouciance
ou l'avidité des nations, Dieu
démontrant une fois de plus - et de quelle
terrible manière - à ceux qui mettent
leur confiance dans la violence et dans les armes,
la futilité de leurs calculs, Dieu laissant
aller les insensés jusqu'à
l'extrême limite de leurs succès pour
les précipiter dans un gouffre d'autant plus
profond.
Vous pouvez aussi voir Dieu
révéler en ce moment la noblesse et
l'héroïsme du petit peuple, des humbles
gens, de tous ceux qui n'ayant pas de biens
matériels à sauver sont cependant, et
sans doute à cause de cela, les plus ardents
champions de la défense des biens
invisibles, de l'âme de la patrie, de ses
principes, de sa civilisation. Vous pouvez voir
Dieu choisissant parmi ceux-là de nouvelles
élites, de nouvelles classes dirigeantes
pour remplacer celles qu'il renverse de leur
siège.
Si votre coeur est pur, si les feintes et
les reniements et l'égoïsme ne l'ont
pas corrompu, vous pouvez pressentir que dans le
martyre actuel du monde, Dieu prépare
certainement des Apôtres pour demain. Au lieu
d'accepter que l'avilissement spirituel s'ajoute
à la défaite matérielle, au
lieu de vous replier dans le mépris de tout
et de tous, vous pouvez garder la foi que dans la
souffrance il y a en ce moment, dans notre patrie
et dans les autres patries martyrisées, des
jeunes hommes, des jeunes femmes, qui regardent,
qui sont troublés jusqu'au fond de
l'âme, dans le coeur desquels une grande
révolution se prépare
silencieusement, obscurément, et qui
bientôt, sur la route déserte et
brûlante où ils doivent marcher,
sentiront des écailles tomber de leurs yeux
et la Céleste vision apparaître, et
l'écrasant appel retentir. Parce que Dieu
les aura préparés dans
l'épreuve, ils feront ce que nous n'avons
pas su faire, ils discerneront clairement la
volonté divine pour un monde de justice, de
vérité et de paix, rendu enfin
possible par la destruction même des choses
anciennes qui s'y opposaient.
Un poème épique de la Table
Ronde disait de l'un de ses héros qu'il
avait la force de dix hommes parce que son coeur
était pur.
Mais ce que Jésus a dit est
infiniment plus vaste et plus profond quand il a
proclamé : « Heureux sont les
coeurs purs car ils verront Dieu. »
Que pouvons-nous désirer voir de plus
grand et de plus consolant dans ces sombres
jours ?
Oh ! Seigneur, ouvre nos yeux pour
qu'ils voient Ton salut qui se
prépare !
Amen.
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