Saints en Christ
QUATRIÈME JOUR
Sainteté et révélation
L'Éternel vit qu'il se
détournait pour voir ; et Dieu l'appela
du milieu du buisson, et dit :
Moïse ! Moïse. Et il
répondit : Me voici ! Dieu
dit : N'approche pas d'ici, ôte tes
souliers de tes pieds, car le lieu sur lequel tu te
tiens est une terre sainte. Et il ajouta : Je
suis le Dieu de ton père, le Dieu d'Abraham,
le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob. Moïse se
cacha le visage, car il craignait de regarder
Dieu.
(Ex. III, 4-6.)
Et pourquoi était-ce une terre sainte ?
Parce que Dieu y était descendu et qu'il
l'occupait. Où Dieu est, là est la
sainteté ; c'est la présence de
Dieu qui rend saint. C'est là la
vérité que nous avons
déjà rencontrée dans le jardin
d'Éden, lorsque l'homme fut
créé ; ici, où
l'Écriture emploie pour la seconde fois le
mot de saint, cette vérité est
répétée et comme
renforcée. Une étude attentive de ce
mot à la lumière du buisson
enflammé nous en révélera
davantage encore la profonde signification. Voyons
ce que l'histoire sacrée, ce que la
révélation de Dieu, ce que Moïse
nous enseignent sur cette terre sainte.
1° Notez d'abord que la première
révélation directe de Dieu à
l'homme comme le Saint, a lieu dans l'histoire
sacrée. En Éden, nous avons vu le mot
saint employé pour le septième
jour. Depuis lors, vingt-cinq siècles se
sont écoulés. Nous avons vu dans ce
fait : Dieu sanctifiant le jour du repos, la
promesse d'une nouvelle dispensation ; la
révélation du Créateur
tout-puissant devant être suivie de celle du
Saint, qui sanctifie. Et cependant, à
travers tout le livre de la Genèse, le mot
saint ne se retrouve pas une seule
fois ; c'est comme si la sainteté de
Dieu était dans l'attente ; et ce n'est
que dans le livre de l'Exode qu'avec la vocation de
Moïse ce mot réapparaît. Ceci est
un fait d'une portée considérable. De
même qu'un père ou un pédagogue
cherche, dans la première enfance, à
graver une leçon à la fois dans
l'esprit de son enfant, de son élève,
Dieu en agit de même dans l'éducation
de la race humaine. Après avoir
montré dans le déluge son juste
jugement contre le péché, Dieu
appelle Abraham à être le père
d'un peuple élu. Et comme fondement de
toutes ses dispensations envers ce peuple, il lui
enseigne, et à sa postérité,
la leçon d'une confiance
enfantine ; confiance en lui comme dans le
Tout-Puissant ; et confiance en lui comme dans
Celui qui est fidèle et dont le serment ne
peut être violé. Avec le
développement d'Israël devenant un
peuple, nous voyons la révélation
avancer d'un degré. La simplicité de
l'enfance est remplacée par
l'entêtement de la jeunesse, et Dieu doit
alors intervenir avec la discipline et les
restrictions de la loi.
Puis, ayant obtenu le droit à leur confiance
comme en Celui qui était le Dieu de leurs
pères, il les prépare à une
révélation plus complète. Le
principal attribut du Dieu d'Abraham était
la toute-puissance ; le principal attribut du
Dieu d'Israël était la
sainteté.
Et quelle devait être la marque
spéciale de cette nouvelle période
qui allait être inaugurée et qui
était introduite par le mot
saint ? Dieu dit à Moïse
qu'il va se révéler à lui sous
un nouveau caractère. Il avait
été connu à Abraham comme le
Dieu tout-puissant, le Dieu de la promesse. (Ex.
VI, 3). Il voulait maintenant se manifester comme
Jéhovah, le Dieu de l'accomplissement des
promesses, et cela, spécialement dans le
rachat et la délivrance de son peuple de
l'oppression dont il avait parlé à
Abraham. Dieu, le Tout-Puissant, est le Dieu de la
création. Abraham crut à Dieu
« qui ressuscite les morts, et qui
appelle les choses qui ne sont point comme si elles
étaient ». Jéhovah est le
Dieu de la rédemption et de la
sainteté. Avec Abraham, il n'est question ni
de péché ni de culpabilité,
et, par conséquent, pas de rédemption
et de sainteté. Mais la loi est
donnée à Israël pour le
convaincre de péché, et pour
préparer le chemin de la
sainteté ; c'est maintenant comme le
Saint d'Israël, le Rédempteur, que
Jéhovah ! apparaît. Et c'est la
présence de ce Saint qui rend cette terre
sainte.
2° Et comment se révèle
cette présence ? Dans le buisson ardent
Dieu se fait connaître comme Celui qui habite
au milieu du feu. Ailleurs, dans les
Écritures, le rapport qui existe entre le
feu et la sainteté de Dieu est clairement
exprimé en ces mots : « La
lumière d'Israël deviendra un feu et
son Saint une flamme ».
(Esaïe X, 17). La nature du feu
est bienfaisante ou destructive. Le soleil, source
première et centrale du feu, peut donner la
vie et la fécondité, mais il peut
aussi brûler jusqu'à produire la mort.
Tout dépend de la position que nous occupons
vis-à-vis de cet astre puissant. Et de
même partout où Dieu se
révèle, nous trouverons ces deux
aspects sous lesquels il se présente
à nous : la sainteté de Dieu
comme jugement contre le péché et
détruisant le pécheur qui persiste
dans son péché, et la
miséricorde de Dieu affranchissant son
peuple du péché. Il n'est aucun des
éléments de la nature qui
possède une vigueur aussi grande et
d'essence aussi spirituelle que le feu ; il
prend ce qu'il consume et le transforme en sa
propre nature, rejetant comme fumée et
cendres ce qu'il ne peut s'assimiler. Et de
même la sainteté de Dieu est cette
perfection infinie par laquelle il s'affranchit de
tout ce qui n'est pas divin, et a cependant
communion avec la créature, l'unit à
lui en détruisant et en rejetant tout ce qui
ne cède pas à sa divine
puissance.
C'est donc comme un Dieu qui habite dans le feu,
qui est lui-même un feu consumant que
Dieu se révèle au commencement de
cette nouvelle période de rédemption.
Avec Abraham et les patriarches, ainsi que nous
l'avons vu, l'enseignement relatif au
péché et à la
rédemption se réduit à fort
peu de chose ; ce qui avait été
révélé c'était la
proximité et l'amitié (friendship)
de Dieu. Maintenant la loi va être
donnée, le péché sera rendu
manifeste, la distance qui sépare l'homme de
Dieu sera sentie, afin que l'homme, en apprenant
à se connaître lui-même et
à connaître son péché,
puisse apprendre à connaître et
à désirer le Dieu qui sanctifie. Dans
toutes les révélations que Dieu donne
de lui-même, nous trouverons deux
éléments : l'un qui attire,
l'autre qui repousse ; l'un qui effraie,
l'autre qui rassure. L'Éternel viendra
demeurer dans sa maison, au milieu d'Israël,
et cependant ce sera dans la redoutable et
inaccessible solitude, et dans l'obscurité
du lieu très saint, au delà du voile.
Il veut s'approcher d'eux et cependant les tenir
à distance. À mesure que nous
avancerons dans notre étude de la
sainteté de Dieu, nous verrons avec une
clarté toujours plus évidente
comment, ainsi que le feu, elle repousse et attire,
et comment elle réunit en une seule et
même chose sa distance infinie et son infinie
proximité.
3° Mais ce qui nous frappera tout
d'abord et d'une manière saisissante, c'est
la distance. C'est ce que nous voyons en
Moïse : il se voile la face, car il
craint de regarder Dieu. La première
impression que produit la sainteté de Dieu
est celle de la crainte et de la terreur.
Jusqu'à ce que l'homme, comme
créature et comme pécheur, apprenne
combien Dieu est au-dessus de lui, combien, lui est
différent et éloigné de Dieu,
la sainteté de Dieu n'aura pour lui que peu
de valeur et peu d'attraits. Moïse se voilant
la face nous montre l'effet que doit produire sur
le pécheur le fait de s'approcher du Dieu
trois fois saint, et nous enseigne aussi le chemin
d'une révélation plus
complète.
Combien cela ressort des paroles mêmes de
Dieu ! « N'approche pas d'ici ;
ôte tes souliers de tes pieds, car le lieu
sur lequel tu te tiens est une terre
sainte ». Oui, Dieu s'était
approché, mais Moïse ne devait pas le
faire. Dieu s'approche ; l'homme doit rester
à distance. De la même parole Dieu
dit : « Approche-toi et ne
t'approche pas ». Il ne peut y avoir une
vraie connaissance de Dieu, ou une proximité
de sa personne sainte, là où nous
n'avons pas entendu premièrement son :
« N'approche pas d'ici ». Le
sentiment du péché, de notre
incapacité de demeurer en la présence
de Dieu est le fondement d'une vraie connaissance
de Dieu comme de Celui qui est le Saint, et d'un
vrai culte pour lui.
« Ôte tes souliers de tes
pieds ». Les souliers,
représentent les moyens par lesquels nous
entrons en contact avec le monde, les aides dont
notre chair, notre nature se sert pour se mouvoir
et pour faire son oeuvre ici-bas. Placés sur
une terre sainte, nous devons nous
débarrasser de ces moyens. C'est avec les
pieds nus et débarrassés de tout ce
qui peut les couvrir que l'homme doit se prosterner
devant le Dieu saint. La première
leçon que nous devons apprendre si nous
voulons jamais participer à la
sainteté de Dieu, c'est notre
incapacité absolue de nous approcher de lui,
ou d'avoir avec le Saint aucune affaire quelconque.
Ce « ôte tes souliers »
doit exercer sur notre être tout entier sa
puissance de condamnation jusqu'à ce que
nous en venions à saisir la pleine et
entière signification de cette parole de
l'apôtre : « Dépouillez
le vieil homme, et revêtez-vous du Seigneur
Jésus » ; et que nous
comprenions ce que c'est que « cette
circoncision de Christ qui consiste dans le
dépouillement du corps de la
chair ».
(Col. II, 11). Oui, tout cela
appartient à notre nature, à notre
chair ; tout cela est notre faire, notre dire,
notre vie propre ; et c'est de tout cela dont
il faut se dépouiller ; c'est tout cela
qu'il faut « faire mourir » si
Dieu doit se faire connaître à nous
comme le Dieu saint. Nous avons déjà
vu que la sainteté est plus que la
bonté ou que l'affranchissement du
péché : même la nature
avant la chute n'était pas sainte.
La sainteté est cette gloire redoutable par
laquelle la divinité est
séparée de tout ce qui est
créé. Aussi, les séraphins
eux-mêmes se voilent-ils la face de leurs
ailes quand ils disent :
« Saint ! saint ! saint !
est l'Éternel notre Dieu ! »
Mais lorsque la distance et la différence ne
sont pas seulement celles qui existent entre la
créature et le Créateur, mais entre
Dieu et le pécheur, oh ! avec quelle
humiliation, quelle crainte, quelle confusion nous
devons nous incliner à la voix du Dieu
saint ! Hélas ! un des plus
terribles effets que le péché ait sur
notre âme, c'est qu'il nous aveugle. Nous ne
savons pas combien le péché et notre
nature pécheresse sont impurs et abominables
aux yeux de Dieu. Nous avons perdu la
capacité de reconnaître la
sainteté de Dieu. La philosophie
païenne n'a pas même eu l'idée
d'employer ce mot de sainteté pour exprimer
le caractère moral de ses dieux. En perdant
la lumière de la gloire de Dieu, nous avons
perdu la capacité de connaître le
péché dans son essence. Et maintenant
la première oeuvre de Dieu en s'approchant
de nous est de nous faire sentir que nous ne
pouvons nous approcher de lui tels que nous
sommes ; qu'il devra y avoir un sérieux
et réel dépouillement et même
une crucifixion de tant de choses qui nous
apparaissent encore comme choses légitimes
et nécessaires.
Non seulement nos chaussures sont souillées
par leur contact avec une terre impure, mais
même notre visage doit être couvert et
nos yeux fermés pour bien indiquer que les
yeux de notre coeur, que notre sagesse humaine et
notre entendement sont incapables de contempler le
Saint des saints. La première leçon
à l'école de la sainteté
personnelle, c'est la crainte, c'est de se voiler
la face devant la sainteté de Dieu.
« Car, ainsi parle le Très-Haut
dont la demeure est éternelle et dont le nom
est saint ; j'habite dans les lieux
élevés et dans la sainteté,
mais je suis avec l'homme contrit et
humilié ». La repentance, l'esprit
brisé, la crainte et le tremblement,
voilà ce que Dieu demande d'abord de ceux
qui veulent voir sa sainteté. Moïse
devait être le premier prédicateur de
la sainteté de Dieu. Sa préparation
pour être le messager du Dieu saint se fit
lorsqu'il se voilà la face parce qu'il avait
peur de regarder vers Dieu. C'est la face dans la
poussière ; c'est non seulement en
ôtant les souliers, mais en ôtant tout
ce qui a été en contact avec le
monde, avec le moi, avec le péché,
que l'âme s'approche du feu au milieu duquel
Dieu habite, de ce feu qui brûle, mais qui ne
consume pas. Oh ! que tout croyant qui cherche
à rendre témoignage à Dieu
comme à Celui qui est le Saint apprenne
ainsi que l'accomplissement du type que nous avons
dans le buisson ardent c'est Christ, le
Crucifié, et que si nous mourons, avec lui,
nous recevrons le baptême de feu qui
révèle à chacun de nous ce que
signifie cette parole : « Le Saint
dont la demeure est un buisson ardent ».
Ainsi seulement, nous apprendrons ce que c'est que
d'être saints comme il est saint.
Dieu très saint ! je
t'ai vu, toi qui fais du feu ta demeure ; j'ai
entendu ta voix me dire :
« Ne t'approche pas ;
ôte tes souliers de tes
pieds ». Et mon âme a craint
de regarder vers toi, le Saint. Et cependant,
ô mon Dieu ! je dois te voir. Tu m'as
créé à ton image, et
pour ton image. Et tu as enseigné que cette
image, c'est ta sainteté :
« Soyez saints, comme je suis
saint ». O mon Dieu ! comment
apprendrais-je à être saint,
sinon en te contemplant, toi le Saint ! Pour
être saint, je dois regarder à
toi, mon Dieu !
Je te bénis pour la
révélation que tu m'as donnée
de toi dans les flammes du buisson ardent, et dans
le feu du bois maudit de la croix. Je me prosterne
à tes pieds avec un saint effroi à
cette vue qui m'humilie : ton Fils, dans la
faiblesse de l'humaine nature au milieu du feu, et
pourtant pas consumé ! O mon
Dieu ! avec crainte et tremblement je me suis
donné à toi comme pécheur,
afin de mourir comme il est mort. Oh ! que le
feu consume tout ce qui en moi est encore
impur !" Apprends-moi aussi à te
connaître comme le Dieu qui fait du feu sa
demeure pour fondre, purifier, détruire tout
ce qui n'est pas de toi, et pour sauver et
envelopper de ta sainteté tout ce qui est
vraiment à toi ! O Dieu
saint ! je me prosterne dans la
poussière devant ce grand mystère.
Révèle-moi ta sainteté, afin
que j'en sois un des témoins et des
messagers sur la terre. Amen.
1° La sainteté comme feu de Dieu.
Béni soit Dieu de ce qu'il existe une
puissance qui peut consumer tout ce qui est vil,
abject, toutes scories ; une puissance qui ne
peut laisser subsister aucune souillure !
« Un buisson en feu qui ne se consume
pas » n'est pas seulement la devise de
l'Église dans les temps de
persécutions ; c'est le mot d'ordre de
toute âme dans l'oeuvre de sanctification que
Dieu accomplit.
2° Il existe une nouvelle théologie qui
ne parle que de l'amour de Dieu manifesté
dans la croix. Cette théologie a l'air
d'ignorer la justice et le juste jugement de Dieu.
Mais ceci n'est pas le Dieu de l'Écriture.
« Notre Dieu est un feu
consumant », voilà la
théologie du Nouveau Testament. Adorer Dieu
« avec crainte et
tremblement », c'est aussi la religion du
Nouveau Testament. Le jugement et la
miséricorde se rencontrent dans la
sainteté.
3° La sainteté comme crainte de
Dieu. Se voiler la face devant Dieu avec
crainte, sans oser ni le regarder, ni lui parler,
voilà le commencement du repos en Dieu. Ce
n'est pas encore le vrai repos, c'est le chemin qui
y conduit. « L'esprit de la
crainte de l'Éternel » est la
première manifestation de l'Esprit de
sainteté, et il prépare le chemin
à la joie de la sainteté.
« Marcher dans la crainte du Seigneur et
dans la consolation du Saint-Esprit »,
voilà les deux faces de la vie
chrétienne.
4° La sainteté de Dieu a
été révélée
à Moïse, afin qu'il en soit le
messager. Plus que jamais, l'Église a besoin
aujourd'hui de chrétiens qui puissent rendre
témoignage à la sainteté de
Dieu. Voulez-vous être un de
ceux-là ?
Il y a des chrétiens qui cherchent
très sérieusement la sainteté,
et qui ne la manifestent jamais sous un aspect qui
attire le monde, ou même les croyants ;
et cela précisément parce que
l'élément de la crainte fait
défaut. C'est la crainte du Seigneur qui
produit cette humilité, cette bonté,
cette douceur, cette défiance et cette
connaissance de soi-même qui forment le
terrain d'un caractère vraiment saint.
« Qui est comme toi, magnifique en
sainteté, digne de louanges ? —
Craignez l'Éternel, vous ses saints !
— Je me prosterne dans ton saint temple avec
crainte. — Célébrez par vos
louanges sa sainteté. Tremble devant lui,
terre ! — Qu'ils louent son nom grand et
terrible, car il est saint. — La crainte de
l'Éternel est le commencement de la
sagesse ; tous ceux qui l'observent ont une
raison saine. « Qui ne te craindrait,
ô Dieu ! et ne glorifierait ton nom, car
toi seul tu es saint ».
C'est cette crainte de Dieu qui nous fera, comme
Moïse, nous prosterner devant Dieu, nous
cacher la face en sa présence, et attendre
de l'Esprit de Dieu qu'il ouvre les yeux de notre
coeur, et qu'il nous inspire les pensées
d'adoration, de louanges avec lesquelles nous
devons nous approcher de lui, le Saint !
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