BOTANIQUE
BIBLIQUE
CHAPITRE LXI
L'Aneth
Malheur à vous,
Scribes et Pharisiens hypocrites, car vous payez la
dîme de la menthe, de l'Aneth et du cumin, et
vous négligez les choses les plus
importantes de la Loi, la justice, la
miséricorde et la fidélité. Ce
sont là les choses qu'il fallait faire, sans
néanmoins omettre les autres.
(Matth. XXIII, 25.)
L'Aneth (Anethum graveolens) est une plante
ombellifère annuelle, qui produit des
graines aromatiques. Il ressemble au fenouil ;
ses fleurs sont jaunes. Il croît dans les
champs de l'Espagne et d'autres contrées du
sud de l'Europe, ainsi qu'en Égypte.
En médecine, la graine a des
propriétés stimulantes et
digestives ; les Orientaux et les Cosaques en
font un grand usage, comme autrefois les Juifs.
D'après le Talmud, l'Aneth vert ou
mûr, herbe ou semence, était soumis
à la dîme.
CHAPITRE LXII
Le Nard et l'Aspic
Et comme il
était à Béthanie, dans la
maison de Simon le lépreux, et qu'il
était à table, il vint là une
femme qui avait un vase d'albâtre rempli d'un
parfum de Nard et de grand prix ; elle rompit
le vase et répandit le parfum sur la
tête de Jésus.
(Marc XIV, 3.)
On apprécie mieux cette touchante
manifestation de l'amour de cette femme pour
Jésus, lorsqu'on sait combien ce parfum
était précieux. Il était si
estimé dans l'antiquité, que, suivant
Horace, une petite boîte d'onyx qui en
était remplie valait autant que la plus
grande amphore de vin. Son prix élevé
chez les anciens, tenait certainement à ce
qu'il provenait d'un pays très
éloigné.
L'Aspic, cité Cantique des Cantiques
I, 11, était, selon toute
probabilité, la même substance que le
Nard : « Tandis que le roi a
été assis à table, mon Aspic a
rendu son odeur. »
Quelques anciens écrivains pensaient
reconnaître la plante qui produit ce parfum,
dans un grand Andropogon qui ondule sur les
plaines de la Perse et de l'Arabie, et exhale
l'odeur la plus délicieuse lorsqu'il est
foulé par une troupe de
chevaux.
Nardoastachys
Jatamansi (Nard)
La fleur et le
fruit avec son calice, grossis, plus deux
étamines
Il est infiniment probable, cependant, que la
vraie plante d'Aspic ou de Nard est l'espèce
de Valériane nommée
aujourd'hui par les botanistes Nardostachyx
Jatamansi .
Elle croit dans les pâturages froids et
secs des montagnes de l'Inde ; on en recueille
les racines, qui, desséchées, forment
un article de commerce considérable et sont
transportées dans tout l'Orient.
Les Hébreux et les Romains employaient
l'huile parfumée du Nard pour les
sépultures ; on la tenait en
général renfermée dans des
vases d'albâtre. Pour recevoir dignement ses
hôtes, le maître de la maison les
couronnait de fleurs, et brisant le sceau d'un
flacon de Nard, les aspergeait de ce parfum.
On prépare encore aujourd'hui en Orient,
avec le Jatamansi, diverses espèces
d'essences et de pommades.
Les détails de la planche XIV
représentent la fleur et le fruit avec son
calice, grossis, plus deux étamines.
CHAPITRE LXIII
La Menthe
Malheur à vous,
pharisiens, qui payez la dîme de la Menthe,
de la rue et de toutes sortes d'herbes, tandis que
vous négligez la justice et l'amour de Dieu.
(Luc XI, 42.)
Sérieux avertissement pour tous ceux qui ont
les formes de la piété, sans foi et
sans efficace !
(2 Tim. III, 5.)
La Menthe, la rue et autres herbes
cultivées en Palestine, n'étaient
point soumises à la dîme par la Loi de
Moïse. Les Juifs le reconnaissaient
eux-mêmes, en disant que la dîme du
blé était de la Loi, celle des
herbes, des rabbins ; mais ils
s'étaient accoutumés malheureusement
à mettre la parole de l'homme au niveau,
sinon au-dessus des commandements de
Jéhovah.
Les espèces de Menthe probablement
cultivées en Palestine, étaient notre
Menthe sauvage (Mentha sylvestris) et la
Menthe à feuilles rondes (Mentha
rotundifolia).
La première est encore commune à
Alep. La saveur et l'odeur de la Menthe sont bien
connues ; nous l'employons dans la confiserie
et la médecine ; mais chez les
Hébreux, les Grecs et les Romains, elle
était d'un usage beaucoup plus
fréquent que chez nous.
On en assaisonnait un grand nombre de mets.
Rosenmuller fait observer que, dans le livre de
cuisine du Romain Apicius, la Menthe, soit
fraîche, soit sèche, est
indiquée presque à chaque page.
Discoride en parle comme d'un puissant stomachique.
On jonchait les synagogues de ses feuilles
odorantes.
CHAPITRE LXIV
La Rue
Vous payez la
dîme de la Rue.
(Luc XI, 42.)
Selon Rosenmuller, le Talmud exigeait la dîme
pour toutes les plantes servant à la
nourriture de l'homme et qu'on cultivait dans les
jardins ou dans les champs. Cet écrivain
ajoute que la Rue était
déclarée exempte de la dîme,
parce que, quoique employée dans la cuisine,
elle n'était pas originairement
cultivée dans les jardins. Mais, des paroles
du Sauveur que nous venons de citer, il conclut
qu'à cette époque elle était
devenue un objet de culture.
La Rue (Ruta graveolens) était
très probablement employée par les
Juifs, soit pour assaisonner les mets, soit comme
médicament. Elle a une
odeur forte et
désagréable, une saveur amère,
et des propriétés stimulantes si
puissantes, qu'il est dangereux de l'employer mal
à propos intérieurement.
Les feuilles fraîches appliquées sur
la peau l'irritent au point d'occasionner parfois
de petites ampoules, lorsqu'on les manie longtemps
sans précaution. On cultive cette herbe dans
les jardins des villages, où l'on s'en sert
pour les maladies des bestiaux. Toute sa surface
est couverte de glandes remplies de l'huile
volatile qui donne à la plante son
odeur.
Ses propriétés médicinales
étaient déjà
appréciées du temps d'Hippocrate, et
quelques praticiens l'emploient encore. C'est
l'Herbe de grâce des anciens
herboristes.
La Rue croît spontanément en
Palestine, surtout dans les régions
montagneuses.
CHAPITRE LXV
Le Caroubier
II eût bien voulu
se rassasier des Carrouges que les pourceaux
mangeaient, mais personne ne lui en donnait.
(Luc XV, 16.)
Le Caroubier (Ceratonia siliqua) est
très commun en Palestine, en Syrie et dans
tout le bassin de la Méditerranée.
Dans l'île de Malte, dont le sol
blanchâtre et calcaire manque de verdure, le
Caroubier est presque le seul arbre qui
égaie un peu le paysage.
Ceratonia
silliqua (Caroublier)
Son port est assez semblable à celui du
pommier, avec d'abondantes feuilles
découpées, analogues à celles
du frêne, mais plus arrondies, plus
luisantes, et persistantes pendant l'hiver. Cet
arbre porte une quantité de gousses en forme
de haricots gigantesques, plates et brunes, longues
d'un décimètre et demi à deux
décimètres (6 à 8
pouces) ; avant leur maturité, elles
sont extrêmement acides ; mûres,
elles sont pleines d'un suc doux et brun, semblable
à du miel. Un seul arbre en produit souvent
huit à neuf quintaux (4 à 500
kilogrammes). Ces gousses sont un article assez
important de nourriture dans les pays où le
Caroubier croît sans culture. Les Arabes en
comparent le goût à celui de la
manne.
Les Musulmans en mélangent le jus avec celui
de la réglisse, des raisins secs ou d'autres
fruits, et en font des sorbets. Les pauvres paysans
de l'Espagne mangent des Carrouges, mais on s'en
sert surtout, comme dans la parabole, pour nourrir
les porcs et le bétail. Il en est fait
souvent mention dans le Talmud comme principal
aliment des animaux. De nos jours, des vaisseaux
chargés de Carrouges sont
expédiés de
Palestine à Constantinople, où l'on
vend ces gousses au bazar pour les donner aux
chevaux. On en tire aussi d'Espagne sous le nom
d'Algarrobas ; ce mot est formé
par l'adjonction de l'article al au
substantif arabe Kharroub, d'où est
dérivé le nom français de
l'arbre, Caroubier.
Le Caroubier est aussi connu sous le nom d'Arbre
à sauterelles ou de Pain de
Saint-Jean, d'après une vieille
tradition suivant laquelle les sauterelles et le
miel sauvage dont Jean-Baptiste se nourrissait,
seraient les fruits de cet arbre et la pulpe qu'ils
contiennent. Il croît certainement dans les
lieux où Jean prêcha la repentance,
mais il n'y a pas de raison suffisante pour
admettre cette interprétation, d'autant plus
qu'à toutes les époques de disette
les sauterelles ont servi de nourriture aux peuples
de l'Orient.
CONCLUSION
Nous voici, cher lecteur, arrivés au
terme de nos recherches. Espérons qu'elles
n'auront point été sans quelque
résultat d'instruction et
d'édification ; d'instruction,
puisqu'elles peuvent contribuer pour leur part
à éclairer la lecture de nos Saints
Livres, en faisant revivre à nos yeux un des
éléments naturels au milieu desquels
écrivaient les auteurs sacrés ;
d'édification, puisqu'elles nous ont
appelés à étudier une partie
intéressante de l'oeuvre admirable de notre
Dieu.
Quelle variété, quelle richesse,
combien d'usages divers, de bienfaits et
d'agréments dans les quelques
végétaux que nous avons passés
en revue ! Ceux mêmes que nous serions
tentés d'appeler nuisibles, ont aussi leur
rôle en vue de l'épreuve morale de
l'homme déchu, et leur place dans l'harmonie
générale de la création.
Au reste, forcés de nous restreindre aux
végétaux de la Bible et à ce
qui pouvait jeter sur eux quelque lumière,
nous n'avons pu aborder une foule de détails
généraux des plus intéressants
sur la structure des plantes, leurs fonctions, leur
distribution géographique, leur
classification.
Nous n'avons étudié qu'une
très minime fraction de ce riche tapis qui
couvre la terre habitable, de ces innombrables
végétaux qui l'abritent de leur
ombrage, la parent de leurs fleurs et
l'enrichissent de leurs fruits. Que serait-ce, si
nous avions été appelés
à pousser plus loin ! Mais ce que nous
avons vu suffit pour faire briller à nos
yeux la sagesse, la bonté, la puissance du
Père céleste, qui éclatent
pour le chrétien non moins dans l'oeuvre de
la nature que dans celle de la grâce.
Que le Seigneur nous donne de nous écrier
avec le Psalmiste, dans un profond sentiment de
reconnaissance, d'adoration et d'amour :
0 Éternel ! que tes oeuvres sont en
grand nombre ! Tu les as toutes faites avec
sagesse. La terre est pleine de tes
richesses !
(Ps. CIV, 24.)
FIN
|