LE PÈLERINAGE
DOULOUREUX
de
L'ÉGLISE A
TRAVERS LES ÂGES
5. Rationalisme et critique
biblique
Notre attention a été
attirée sur les personnes et les églises qui ont
accepté les Écritures comme la révélation
divine, appropriée et suffisante pour montrer le chemin du
salut personnel et de la marche, ainsi que pour guider les
églises de croyants concernant leur bon ordre et leur
témoignage.
Nous avons vu surgir un corps clérical
qui, graduellement, a assumé l'autorité et
développé un système rituel qui est devenu
l'ennemi implacable de ceux qui continuaient à agir selon
l'enseignement des Écritures.
Au dix-neuvième siècle, est
apparue une autre forme d'attaque de la Bible, le rationalisme.
Mettant de côté la révélation, il
prétend que l'entendement - ou la raison - est suffisant pour
permettre à l'homme de trouver la vérité et pour
atteindre le bien suprême.
Les progrès sans précédent
de la science apportèrent de précieuses lumières
dans la connaissance des oeuvres de Dieu en création, mais ils
provoquèrent aussi, en certains esprits, le désir
d'expliquer la création en dehors de Dieu. Pour cela, il
fallait prouver que le récit biblique de la création
n'était pas d'inspiration divine, qu'il provenait de
l'ignorance des hommes d'alors, qui n'en pouvaient savoir autant que
nous. A mesure que se faisaient de nouvelles découvertes dans
le champ illimité de la nature, on élaborait des
théories nouvelles, prétendues incompatibles avec le
récit de la Genèse, lequel ne Pouvait être
qu'incorrect. D'autres faits venant à la lumière, ils
nécessitaient d'autres théories, les unes annulant les
précédentes, et cependant acceptées à
leur tour sur l'autorité de la science des hommes qui les
formulaient. En 1859, Charles Darwin publia: « De l'origine des
espèces », qui marqua une importante étape dans ce
développement de la pensée.
Naturellement, ceux qui adoptaient le point de
vue, qu'il n'y avait pas eu de création, perdaient tout
contact avec le Créateur. Il en résultait la perte de
toute connaissance révélée, car la
révélation de Dieu dans l'Écriture commence par
la création, comme étant l'oeuvre de Dieu, hors de la
quelle il n'y aurait pas eu la chute de l'homme, sa créature.
Dès lors, la rédemption de l'homme n'aurait
été ni nécessaire, ni possible. En
conséquence, les hypothèses, - produit de la raison
humaine - faisaient fi de l'enseignement biblique de la chute, le
remplaçant par des théories toujours changeantes sur
l'évolution de l'homme d'une forme de vie inférieure
à une supérieure. Basées sur de tels
enseignements, l'expérience du salut et l'espérance de
la rédemption devenaient inacceptables, l'individu restant
sans espoir, quelles que soient les vagues promesses faites à
la race.
S'il est vrai que dans les esprits du grand
nombre, l'évolution a remplacé le Créateur, que
beaucoup déclarent descendre des bêtes plutôt que
de Dieu et ignorent Dieu comme leur Rédempteur, cependant,
même parmi les hommes de science les plus éminents, tous
n'ont pas adopté cet enseignement. On ne saurait dire que
l'accroissement de la connaissance des sciences naturelles conduise
nécessairement à l'incrédulité. De fait,
l'assertion, souvent si passionnément proclamée,
qu'aucun homme moderne, éduqué et intelligent, ne peut
croire les Écritures, est sans fondement. Il n'est pas vrai
que plus les gens savent, moins ils croient, ou que plus ils sont
ignorants, plus ils ont de foi.
Le rationalisme provient surtout de la
méconnaissance du fait que l'homme n'est pas seulement
entendement, mais coeur et entendement, et que celui-ci est toujours
au service du coeur. Le coeur, c'est-à-dire le
caractère, la volonté et les affections, est le
siège de l'expérience. Il met à son service
l'entendement, avec l'intelligence et les facultés de
raisonnement. Le coeur de l'homme naturel se sert de son entendement
pour justifier son incrédulité envers Dieu et les
Écritures. Il trouve d'innombrables raisons de se plaindre de
Dieu, et des contradictions et des erreurs dans les Écritures.
Mais ce même homme fait-il une expérience lui
révélant son état de péché et son
besoin de salut, Christ lui est alors dévoilé. Son
coeur - sa volonté et ses affections - sont saisis. Tout son
être, par la foi, s'ouvre à Christ comme Sauveur et
Seigneur; la vie divine et éternelle lui est
communiquée, selon la parole: «... afin que quiconque
croit en Lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie
éternelle». (Jean 3. 16). Cet homme, ou son entendement -
ni plus ni moins capable, peu instruit ou plus intelligent
qu'auparavant - entre au service d'un coeur transformé,
découvre la vérité, la beauté et la
révélation dans ces mêmes Écritures qu'il
méprisait, et perçoit dans les voies de Dieu des
raisons renouvelées de louange et d'adoration. L'erreur du
rationalisme est d'avoir confié le jugement à un
mauvais juge.
Une autre ligne d'attaque des Écritures,
fut la critique biblique, qui s'affirma surtout au
dix-neuvième siècle. Tout comme les investigations de
la science, elle est bonne en elle-même, mais le rationalisme
la poussa dans des voies erronées. L'examen critique du texte
biblique, accompagné d'une étude des anciens
manuscrits, a été extrêmement utile, en
corrigeant des erreurs de traduction, en épurant le texte
original et en faisant ainsi ressortir la force et la signification
de la Parole écrite.
La «haute critique» a mis en
lumière beaucoup de points intéressants concernant les
circonstances extérieures, historiques, géographiques
et autres, au cours desquelles les différents livres ont
été écrits. Elle a aussi étudié
leur caractère littéraire intrinsèque et, de ces
divers éléments, elle a déduit tout ce que l'on
peut apprendre sur les dates et sur les auteurs bibliques. Mais,
là aussi, la méthode rationaliste a conduit
l'étudiant à des théories étranges et
très diverses, en examinant les Écritures sans tenir
compte de Dieu, ni de l'inspiration du St-Esprit qui agit par
l'intermédiaire des auteurs humains et en coopération
avec eux.
Les Écritures furent transmises au monde
par un instrument choisi, le peuple d'Israël. Moïse et les
prophètes transmirent la Parole de Dieu, et les
différents livres renfermant leurs témoignages que ce
soit la loi, l'histoire, les Psaumes ou les prophètes, furent
conservés par le peuple juif avec un soin et une
ténacité, dont aucune autre race n'eût
été capable. Christ et les apôtres
acceptèrent l'A. Testament et en firent plein usage comme
étant la Parole de Dieu, le complétant par le N.
Testament. En tous temps, ce Livre, ou Bible, a été
accepté comme divinement inspiré et a prouvé sa
puissance divine par son action dans les coeurs et les vies des
hommes. Il y a toujours eu des gens pour lui contester ses droits;
mais il était réservé au dix-neuvième
siècle de voir cette levée de boucliers contre son
autorité.
Le ritualisme avait longtemps
préconisé un enseignement qui ajoutait à
l'Écriture et entraînait son abandon. Le rationalisme,
en retranchant ce qui ne lui plaisait pas, réussit à
détruire les bases de la foi en la
révélation.
L'un des premiers et des plus frappants
arguments de la haute critique a été
étayé sur l'emploi des noms divers donnés
à Dieu dans le livre de la Genèse. De ces
différences, on a conclu que le livre devait être
l'oeuvre de plusieurs auteurs. On déploya beaucoup
d'habileté à diviser l'a Genèse puis d'autres
livres, selon ces prétendus auteurs différents, chaque
critique donnant son avis. Par ce procédé, la
personnalité de Moïse disparut, puis bientôt ce fut
la mode de nier l'existence d'Abraham et d'autres hommes
dépeints dans les premiers écrits bibliques. On les
représenta comme des personnages légendaires, en
rattachant à un homme imaginaire l'ensemble des mythes,
concernant les héros israélites. Les progrès se
succédèrent rapidement dans ce sens. Edouard Reuss
(1834) avança la théorie que les livres de la loi
avaient été écrits après ceux des
prophètes, et les Psaumes encore plus tard. Cette supposition
provoqua toutes sortes de spéculations et de propositions pour
arranger les diverses parties de l'A. Testament suivant le plan
nouvellement conçu. Bientôt, les miracles du N.
Testament furent rejetés comme impossibles, et l'on expliqua
laborieusement comment ces récits reposaient sur des
malentendus et sur des amplifications légendaires. L'histoire
de l'Evangile fut reconstruite. La « Vit de Jésus »,
de Renan, et «Das Leben Jesu», de Strauss, jouirent
temporairement d'une vogue considérable. La critique battait
son plein. Le simple fait que la Bible affirmait telle chose semblait
être une raison suffisante pour en douter. Ces extrêmes
produisirent une certaine mesure de réaction; beaucoup de ce
qui avait été rejeté fut réadmis. Les
recherches archéologiques révélèrent
l'exactitude historique de bien des événements
décrétés fabuleux.
En amenant beaucoup d'hommes à s'occuper
du texte biblique, ces conflits eurent pour résultat de mettre
en lumière plus que jamais les trésors de
vérité et de sagesse de l'Écriture. Durant tout
ce temps, de nombreux pécheurs de toutes classes furent
conduits au salut.
6. Spurgeon. Les Sociétés
bibliques
Si le ritualisme fut l'instrument du
clergé pour retenir les pécheurs loin du Sauveur, le
rationalisme, si répandu aujourd'hui et si efficace pour
entraîner les masses vers l'incrédulité, doit son
pouvoir au fait qu'il s'est d'abord emparé de la pensée
des théologiens, qui sont censés être - dans leur
domaine - les chefs intellectuels du peuple. Le rationalisme a
presque entièrement conquis les écoles de
théologie et les institutions préparant au
ministère, si bien que les guides spirituels du peuple
conduisent leurs troupeaux - souvent contre leur gré - vers
des régions arides, sans pâture. Ils leur montrent
qu'ils ne peuvent plus être considérés comme
intellectuels, ou même intelligents, s'ils n'acceptent pas les
prétendues preuves qu'il n'existe aucune
révélation divinement inspirée. Il n'y a donc
pas de Créateur, pas de Fils de Dieu qui, par amour des
pécheurs, devint homme, et qui, pour nous, humains, vainquit
le péché, la mort, et nous ouvrit la voie du retour
à Dieu. L'enseignement rationaliste fait de Jésus un
homme bon, se trompant souvent, et pourtant un modèle que nous
devons imiter. On a promis que ces doctrines nous apporteraient la
paix universelle, la prospérité et la fraternité
et tout cela a été lamentablement démenti par la
guerre et les armements, par les grèves et les banqueroutes.
L'espérance et l'attente du retour du Seigneur pour
régner n'ont aucun sens pour ceux qui ne savent pas qui fut
Celui qui vint souffrir ici-bas.
Une grande partie du clergé de
l'Église anglicane, la majorité des pasteurs des
églises luthérienne et réformées, des
ministres des églises presbytérienne,
congrégationaliste et méthodiste, toute la
Société des Amis - à part quelques exceptions -
et bon nombre de pasteurs baptistes, enseignent totalement, ou
partiellement, la forme rationaliste de l'incrédulité.
Là où, autrefois, on prêchait l'Evangile et on
expliquait les Écritures, travaillant à la conversion
des pécheurs et à l'édification des saints,
aujourd'hui on fait des discours sur la littérature, la
politique, ou les problèmes sociaux. Les
sociétés missionnaires et leurs représentants au
loin, pour autant qu'ils professent ces doctrines, apportent,
à des nations ayant un urgent besoin de l'Evangile, des
enseignements qui sont pour elles des pierres au lieu de
pain..
Dans toutes les Églises, il y eut
cependant beaucoup d'hommes qui s'opposèrent au rationalisme
et continuèrent à employer les Écritures avec
une puissance et une efficacité qui justifièrent
pleinement la vérité de leur témoignage ou
l'inspiration de la Parole de Dieu. Le plus éminent de tous
fut Charles Haddon Spurgeon. A l'âge de dix-neuf ans (1851) il
fut converti et reçu parmi les Baptistes.
Immédiatement, il commença à témoigner
pour Christ. Un an après, mettant de côté toute
préparation théologique conventionnelle, il devint
pasteur d'une église baptiste. Déjà alors il
prêcha avec tant de puissance spirituelle qu'il attira un
nombre toujours croissant d'auditeurs. Aucun bâtiment
n'étant assez spacieux pour ces foules, il fallut bâtir
le «Tabernacle Metropolitain » qui pouvait recevoir 6.000
personnes. Là, durant toute sa vie, non seulement il
prêcha régulièrement l'Evangile, mais encore il
exposa les Écritures et employa, en toute humilité, ses
dons remarquables. Aussi contribua-t-il à l'édification
d'une église selon les principes du N. Testament, d'où
découlèrent des fleuves de vie pour d'innombrables
âmes. Dans ses prédications, Spurgeon s'en est tenu
étroitement aux Écritures, qu'il appliquait à
ses auditeurs avec une sympathie et une émotion intenses. Son
message était rehaussé de nombreuses et heureuses
illustrations et accompagné d'un humour intarissable. La
lecture de ses sermons fut autant bénie que leur audition. Ils
étaient publiés aussitôt après leur
prédication et eurent une immense diffusion, qui continua
même après sa mort. Réalisant fortement
l'obstacle qu'était pour l'Evangile la doctrine de la
régénération baptismale, il prit la courageuse
résolution de prêcher et de publier un sermon sur ce
sujet; ce qui lui valut les attaques d'un grand nombre
d'églises protestantes évangéliques retenant
cette doctrine. Le conflit qui s'ensuivit décida Spurgeon, un
an après, à se retirer de «l'Alliance
évangélique». Puis, comme la critique biblique
s'appliquait de plus en plus à détruire la foi en
l'inspiration des Écritures et que «l'Union
baptiste» en était fortement influencée, Spurgeon
quitta aussi cette association (1887). Ce pas lui fit perdre des amis
et l'entraîna dans la controverse, mais réveilla
beaucoup d'âmes, en danger de douter des bases de leur foi.
Dans les jours difficiles, ce fut un encouragement à
s'attacher à la vérité biblique, en attendant
les temps où cette attitude serait grandement justifiée
par les nouvelles découvertes faites sur le terrain de
l'histoire ancienne et de la science moderne.
D'autre part, jamais les Écritures n'ont
été si largement répandues et si
généralement lues qu'elles le sont aujourd'hui. Leur
appel à la repentance et à la foi est plus riche en
résultats que jamais. La Société biblique
britannique et étrangère - avec d'autres - continue
avec un succès toujours croissant son travail de traduction et
de diffusion. Ses colporteurs, chaque année plus nombreux,
voient s'étendre encore leur champ d'action. De nouvelles
traductions ouvrent les trésors de la Parole aux peuples les
plus arriérés. Si, chez quelques nations
favorisées, on sous-estime le privilège de pouvoir
librement lire les Écritures, liberté acquise au prix
du sang des ancêtres, il en est d'autres, les dernières
appelées, qui viennent occuper les premières
places.
Tandis que l'extrême développement
du ritualisme s'est manifesté par l'Inquisition et par la
détermination de dominer à tout prix sur les
consciences des hommes - l'extrême développement du
rationalisme a abouti au bolchévisme. Il cesse alors
d'être libéral et tolérant. Il méprise
ceux qui croient encore et se donne comme supérieur à
eux. Il s'est imposé la tâche - sans scrupules sur les
moyens à employer - d'enlever la Bible au peuple et de lui
défendre de croire à son enseignement sous peine de
famine, de persécutions et de mort.
Les églises qui font encore de la Bible
leur guide et leur modèle et qui s'efforcent de lui
obéir, sont aussi exemptes de rationalisme qu'elles le furent
autrefois de ritualisme. Elles s'élèvent comme un
rempart contre l'incrédulité et offrent un refuge aux
âmes désireuses de vivre en accord avec la Parole de
Dieu et en communion avec des frères d'une même
pensée. Leur nombre croissant, et leur présence en de
nombreux pays ont une importance capitale, ainsi que le fait qu'elles
continuent à naître spontanément partout
où pénètre la Bible. Il est aussi à
prévoir que, comme plusieurs des diverses dénominations
s'écartent de la foi, certains chrétiens, qui en font
partie, se verront dans l'obligation d'agir comme tant d'autres avant
eux: de former des églises composées de croyants, de
mettre eux-mêmes en pratique les enseignements bibliques et de
prêcher la Bonne Nouvelle autour deux. Souvent des membres du
clergé ont dirigé des réveils issus de quelque
retour aux principes de la Parole de Dieu, et ce fait pourrait se
reproduire. Huss, le chapelain, Luther, le moine, Spener et Franke,
tous deux pasteurs luthériens, puis les pasteurs de
l'Église anglicane, John et Charles Wesley, avec George
Whitefield, en sont quelques exemples parmi beaucoup d'autres. La
préparation et l'expérience d'hommes semblables
prennent toute leur valeur une fois qu'ils ont été
délivrés des chaînes qui entravaient
l'obéissance de la foi.
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