HUDSON TAYLOR
TREIZIÈME PARTIE
MINISTÈRE
ÉLARGI
1887-1894
CHAPITRE 77
Encore plus profond
1891-1892
Les temps devenaient graves et dangereux
pour les étrangers, en Chine. Les cinquante
Scandinaves étaient à peine partis en
chantant que des soulèvements
éclatèrent dans la vallée, du
Yangtze. L'un après l'autre, les locaux de
la Mission furent détruits et, quoique la
fureur populaire se tournât surtout contre
les catholiques, tous les étrangers se
trouvèrent en péril. Même
à Shanghaï, il était douteux que
les autorités pussent réprimer le
pillage et la violence, et il ne fut guère
possible de dormir, pendant plus d'une
brûlante nuit d'été, parce que
le soulèvement était attendu avant le
matin.
M. Stevenson avait été
obligé de prendre un congé bien
nécessaire, après cinq années
de lourdes responsabilités de direction.
Hudson Taylor resta donc seul en charge à
Shanghaï et sans pouvoir quitter le quartier
général, quelque désir qu'il
eût d'aider ceux qui se trouvaient dans une
situation plus difficile. Il était
préoccupé du sort des femmes
missionnaires, dont les petits groupes
isolés, dans l'intérieur du pays,
n'avaient pas d'autre protection humaine que celle
des chrétiens indigènes. Un
missionnaire wesleyen avait été
assassiné, tandis qu'il attendait le bateau
sur le Yangtze, et avec lui un Européen,
employé des douanes, qui s'était
porté à son secours. Partout on
entendait des rumeurs inquiétantes.
Le grand ennemi des âmes fait
rage contre les missions en Chine, écrivait
Hudson Taylor. Je considère les
récents soulèvements comme une
réplique de Satan à l'appel de la
Conférence à mille nouveaux ouvriers.
Mais Dieu aura Sa réponse; si l'ennemi est
puissant, Dieu seul est
tout-puissant.
Son souci principal était
que la Mission, demeurât ferme dans la foi,
donnant aux chrétiens chinois l'exemple du
calme et de la confiance en Dieu.
Nous encourageons sans cesse nos
convertis à affronter la persécution
et à se laisser dépouiller pour la
cause de Christ, écrivait-il encore dans une
lettre circulaire. Ils peuvent penser qu'il nous
est facile de parler ainsi, quand ils nous voient
dans l'aisance et à l'abri du danger. Mais,
quand nous aussi sommes en danger, ils nous
observent de près et jugent eux-mêmes
de la mesure dans laquelle nous croyons que : Son
bras seul nous suffit et nous est une sûre
défense.
Quel dommage ce serait qu'un seul
d'entre eux puisse croire que nous comptons sur une
canonnière ou une troupe de soldats
plutôt que sur le Dieu vivant ! Des
années d'enseignement les impressionnent
moins que ne peut le faire notre attitude en de
tels moments.
Leur sympathie nous sera acquise
s'ils nous voient résolus à souffrir
comme eux pour l'Évangile. Une
période de danger fournit l'occasion d'une
grande leçon pratique pour les
chrétiens indigènes.
Pendant cinq mois, l'agitation se,
poursuivit, malgré une proclamation
impériale favorable. Sauf de rares
exceptions, les ouvriers de la Mission à
l'Intérieur de la Chine purent rester
à leur poste et aucun d'eux ne trouva la
mort dans les émeutes, quoique beaucoup
eussent été sérieusement
menacés. En octobre, comme ils l'avaient
fait en juin, les missionnaires de Shanghaï se
réunirent Pour la prière.
L'été avait été fort
chaud, et l'on pensait qu'une pluie forte et
continue, dont le besoin se faisait vivement
sentir, serait plus propre que toute autre chose
à calmer la population. Les prières
furent ardentes et précises et, trois
semaines plus tard, une lettre de Mme Taylor
enregistrait l'exaucement : « La pluie est
tombée presque tout le mois. » L'effet
fut précisément celui qu'on
espérait : les rassemblements populaires
furent dispersés et, peu à peu,
l'hostilité envers les étrangers
cessa.
D'autres fardeaux devenaient de plus en
plus lourds. Il était inévitable
qu'une Mission si nombreuse, dispersée sur
un vaste territoire, aux besoins spirituels et
matériels de laquelle il fallait subvenir,
fût un sujet de soucis et d'incessantes
préoccupations pour la direction de
Shanghaï.
Vous-même, cher M. Howard,
écrivait Hudson Taylor, ne pouvez vous faire
une idée de ce que c'est que de
connaître et d'aimer nos ouvriers,
d'apprendre leurs soucis et leurs
difficultés, leurs déceptions et
leurs luttes, leurs maladies et leurs besoins de
secours; de recevoir des télégrammes
qui demandent des directions dans le danger,
annoncent quelque mort, rendent compte de massacres
ou d'incendies, sans parler des
responsabilités ordinaires et des
nécessités
pécuniaires d'une Mission
qui compte près de cinq cents membres. Il
n'y a qu'un moyen d'éviter d'en être
écrasé, c'est d'apporter tout cela a
notre Maître; Il donne le secours qu'il nous
faut.
Le problème des ressources
était particulièrement
délicat. Tandis que l'oeuvre se
développait rapidement, depuis deux ou trois
ans les ressources venant d'Angleterre baissaient.
Persuadé que tout don fait à la
Mission devait résulter d'une impulsion
divine, Hudson Taylor ne pouvait s'empêcher,
devant cet état de choses, de chercher avec
prières ce qui, dans l'oeuvre, pouvait faire
obstacle à la bénédiction de
Dieu. Son coeur fut maintenu en paix à ce
propos, comme en tout ce qui lui incombait, mais il
ne fallait pas moins pour cela qu'un miracle
quotidien de la grâce de Dieu.
Des difficultés d'un autre ordre
se présentaient. Hudson Taylor estimait que
la direction des affaires en Chine devait
être donnée à des hommes
expérimentés, capables de
régler sur place les questions
soulevées et en qui leurs collègues
auraient pleine confiance. Il était facile
de comprendre que les directeurs et comités,
en Europe et en Amérique, devaient
être libres d'appliquer les principes de la
Mission aux problèmes qui se posaient
à eux et d'y conformer leur ligne de
conduite. Mais il fallait du temps et de
l'expérience pour rendre évident que
l'administration en Chine devait jouir de la
même autonomie. Ce principe était
nouveau et contraire aux traditions reçues.
Il avait été accepté
dès l'abord, mais c'était une chose
d'avoir confiance, en Hudson Taylor quand il avait
toutes les affaires en main ; c'en était une
autre d'accorder cette confiance au Comité
de Chine. Cependant, c'était là un
point essentiel de l'organisation qui se
constituait.
M. Berger a raison,
écrivait-il à ce sujet à M.
Stevenson en mai 1891 : la question capitale est
celle de la direction suprême. Il est
évident pour moi qu'elle ne peut être
dévolue qu'au Comité de Chine. Mais
il faut beaucoup de douceur et de patience pour
démontrer à tous que cela est
raisonnable. C'est l'oeuvre du Seigneur, et Celui
qui y est le premier intéressé nous
aidera.
Il lui était dur de sentir que
des frères vénérés et
dévoués à la cause de la
Mission ne partageaient pas sa conviction, mais
aucun compromis n'était acceptable sur une
question aussi importante.
Dans ces circonstances, aucun
encouragement ne pouvait être plus
précieux que les bénédictions
spirituelles dont il plut au Seigneur de
réjouir Ses serviteurs de Shanghaï.
Personne ne pouvait soulager Hudson
Taylor des lourds fardeaux qu'il portait, mais
d'autres pouvaient être les canaux de la
grâce divine et apporter un vrai
rafraîchissement à toute la
Mission.
En février, M. Frost vint pour la
première fois en Chine. Arrivé de
Toronto avec quelques missionnaires, il resta
jusqu'au milieu de l'été et parcourut
toutes les stations du voisinage. Une
conférence de missionnaires
américains, organisée à
Shanghaï pour le rencontrer, fut un vrai
réconfort spirituel. Elle débuta par
un cantique disant :
Nous désirons voir
Jésus
qui, tôt après, fut modifié
pour traduire plus exactement les
expériences et la vie rayonnante des
missionnaires :
Nous avons vu Jésus.
Au début de l'automne, M. Cassels arriva
du Szechwan pour participer aux séances du
Comité. Les demoiselles Newcombe, de la
Church Missionary Society, qui devaient peu
après donner leur vie pour l'amour de
Christ, arrivèrent aussi de Foochow pour une
visite. Tous apportèrent une
bénédiction aux missionnaires de
Shanghaï et à tous ceux qui, nombreux,
s'y rendaient ou en partaient. Ils Parlèrent
beaucoup de la vie ou, réellement, « ce
n'est plus moi, mais Christ » qui vit dans le
croyant. Y a-t-il quelque chose de plus propre
à stimuler le coeur ?
Peu après débarquaient,
venant d'Angleterre, M. et Mme Orr-Ewing, et M.
Walter B. Sloan qui, après avoir prié
pendant des années, voyait enfin s'ouvrir le
chemin de la Mission. Avant de se rendre à
Anking pour l'étude du chinois, il traita,
dans une série d'études bibliques,
quelques-unes des vérités les plus
profondes qu'il avait apprises pendant cette
période d'attente.
Puis ce furent des temps magnifiques
où plusieurs eurent à envisager une
question qui révélait les besoins les
plus intenses des coeurs et faisait entrevoir
d'immenses bénédictions. Une jeune
missionnaire de l'intérieur, retenue
à Shanghaï, assistait à ces
réunions. Quatre années de travaux en
Chine lui avaient enseigné quelque chose des
joies et des bienfaits d'une intime communion avec
le Maître, mais aussi des influences morbides
du paganisme, de la puissance du
mal et du désespoir que l'on éprouve
parfois en cherchant à aider les autres,
tandis que sa propre âme n'est pas en contact
permanent avec Christ. Combien elle soupirait
après la vie transformée qu'elle
entrevoyait parfois, mais qu'elle ne savait comment
obtenir. Personne ne se doutait qu'elle demandait
avec angoisse lumière et secours, lorsqu'un
mot, avant Noël, lui apporta la
délivrance et fit toutes choses
nouvelles.
À la fin d'un service dans la
salle de la Mission, un étranger, un marin
chrétien, s'approcha d'elle et lui dit
:
- Êtes-vous remplie du
Saint-Esprit?
Elle oublia ce qui suivit, mais cette
question demeura brûlante dans son coeur.
Voici l'explication de tous les insuccès,
des tristesses inutiles, des efforts
stériles. Dieu avait fait un don qu'elle
n'avait jamais complètement reçu.
Elle comprit que le Saint-Esprit devait être
sa vie, car si un homme n'a pas l'Esprit de Christ,
il ne lui appartient pas. Elle éprouva alors
que, certainement, elle n'était pas «
remplie de l'Esprit » et en connaissait peu la
puissance.
Tout en redoutant d'être induite
en erreur et de prendre pour la
réalité une émotion
décevante, elle étudia la Parole de
Dieu, les Actes des Apôtres, qui
n'étaient que les Actes du Saint-Esprit
transformant et stimulant des vies de la même
manière qu'elle avait besoin d'être
transformée et stimulée.
C'était bien le Saint-Esprit qu'il lui
fallait, la plénitude de l'Esprit pour
rendre réelles les choses invisibles et
possibles celles qui paraissaient impossibles.
Devant elle se dressèrent les paroles de
l'apôtre : « Christ nous a
rachetés de la malédiction de la loi,
avant été fait malédiction
pour nous, afin que nous reçussions Par la
foi l'esprit qui avait été promis.
»
Que faisait-elle du don infini
acheté à un tel prix? Elle comprit
que, de même que Christ est à nous par
un don de Dieu, mais qu'il nous faut Le recevoir
personnellement, de même il en est du
Saint-Esprit. Il doit être reçu par la
foi dans le coeur qui ne peut être uni, sans
lui, au Sauveur ressuscité. Avec crainte et
tremblement, sachant à peine ce que cela
signifiait, elle laissa l'Esprit de Dieu
pénétrer en elle et la
posséder pleinement. Sans rien sentir, ni
rien voir, elle prit Dieu au mot et Lui demanda que
la promesse se réalisât pour elle.
Son grand chagrin pendant des mois avait
été son manque de puissance pour
gagner des âmes, car elle n'en connaissait
à peine une qui eût été
amenée à Christ par son moyen.
Croyant qu'en cette semaine de Noël une
transformation profonde s'était produite en
elle, elle demanda à Dieu, avec foi, de lui
en accorder la preuve en produisant des conversions
quotidiennes par le moyen des réunions qui
avaient lieu ces jours-là.
Et, chaque jour, sa prière fut
exaucée. Il lui fut donné d'aider
plus de vingt personnes, jeunes et plus
âgées, marins, visiteurs ou habitants
de Shanghaï, à se décider pour
Christ. En même temps, elle témoignait
d'une telle joie et d'une telle liberté de
coeur que d'autres étaient amenés
à désirer la même
bénédiction. Aucun encouragement ne
pouvait être plus précieux à
Hudson Taylor que de voir la main de Dieu à
l'oeuvre de cette façon-là.
Pendant des semaines et des mois, la
bénédiction s'étendit. En
maints endroits, des membres de toutes les missions
parvinrent à la plénitude de la vie
en Christ. Le 16 avril, à Shanghaï, le
Comité interrompit ses séances pour
demander, en faveur de toute la Mission en Chine et
des divers comités, la plénitude du
Saint-Esprit.
La prière, encore, fut
exaucée. Des stations les plus
éloignées arrivèrent des
lettres qui parlaient de missionnaires et de
groupes entiers renouvelés, dans leur vie
intérieure, par la même
puissance.
À Shanghaï,
écrivait Hudson Taylor le 29 mars 1892, Plus
de conversions se sont produites en quelques mois
qu'auparavant en plusieurs années. Le besoin
suprême de toutes les missions est,
actuellement, la présence manifeste du
Saint-Esprit. Des centaines de milliers de
traités et de portions de l'Écriture
ont été distribuées, des
milliers de discours sur l'Évangile ont
été prononcés, des dizaines de
milliers de kilomètres ont été
parcourus en tournées missionnaires, mais
combien peu de vraies conversions en sont
résultées. Comme Mission, nous avons
un grand besoin de nous humilier devant
Dieu.
Peu d'entre nous,
assurément, sont satisfaits des
résultats de notre oeuvre et quelques-uns
croient peut-être que si nous étions
mieux équipés nous pourrions mieux
faire. Nous n'avons pas besoin d'équipement,
mais de puissance divine. Si les dizaines ou les
centaines que nous atteignons chaque jour ne sont
pas gagnées à Christ, quel avantage y
aurait-il à en atteindre le double ? Ne
vaut-il pas mieux suspendre nos travaux et, dans
l'humiliation, demander à être remplis
de l'Esprit afin de devenir
comme les canaux par lesquels Il agirait avec une
puissance irrésistible ?
Des âmes périssent
maintenant, faute de, cette puissance. Dieu
bénit maintenant quelques-uns de Ses
serviteurs qui Lui demandent avec foi cette
bénédiction. Tout est prêt si
nous sommes prêts. Demandons-Lui
d'écarter tout ce qui L'empêche d'agir
plus efficacement par notre moyen. Si l'un de nous
a été tenté de murmurer,
d'avoir des pensées ou des paroles peu
aimables à l'égard de ses
collègues, si des conversations futiles ou
des plaisanteries « qui ne sont pas
convenables » ont été
tolérées, si nous avons laissé
des choses secondaires prendre le temps et les
forces qui devaient être consacrés
à l'oeuvre de Dieu, si la lecture de la
Parole de Dieu et la prière en secret ont
été négligées,
confessons ces fautes à Dieu et
demandons-Lui Son pardon, en évitant
soigneusement à l'avenir de retomber.
Après nous être offerts
nous-mêmes, dans une nouvelle
consécration, acceptons par la foi
d'être remplis du
Saint-Esprit.
Avant la fin de l'année, les
difficultés en présence desquelles
ils avaient été si longtemps, furent
enfin résolues. Hudson Taylor avait dû
retourner en Angleterre. Lorsqu'il semblait que
l'unanimité ne pouvait être obtenue
par la discussion des problèmes, la
séance tout entière du Comité
était consacrée à chercher le
secours de Dieu, et le résultat apparaissait
aussitôt. Après de sages concessions,
la liberté fut entièrement
accordée à l'administration en Chine
et, dès le début de. la nouvelle
année (1893), il fut évident que
cette longue et pénible période
était dépassée.
L'état-major de Londres avait
vaillamment fait l'effort que lui imposait le
développement de l'oeuvre. Les mesures
prises lorsque M. Broomhall fut nommé
secrétaire général, alors que
le nombre des missionnaires était d'une
centaine, devinrent insuffisantes quand ce chiffre
fut quintuplé. M. Walter B. Sloan,
renonçant à sa vie de missionnaire,
accepta de devenir, à Londres, le
secrétaire-adjoint de M. Broomhall. M.
Marcus Wood fit aussi le sacrifice d'une
activité qui le passionnait en Chine pour
parcourir l'Angleterre, et tenir des
réunions afin d'enrôler de jeunes
hommes pour les missions étrangères.
M. Stevenson étant retourné en Chine,
Hudson Taylor put rester quelque temps encore en
Angleterre, ce qui encouragea grandement le
Comité et le personnel de la
Mission.
Quant aux difficultés
financières, Hudson Taylor avait
écrit avant de quitter Shanghaï :
Dieu nous a aidés d'une
manière merveilleuse. Des dons opportuns des
membres de notre Mission, dont quelques-uns
représentaient de gros sacrifices, des
contributions d'amis du dehors ou de visiteurs ont
souvent répondu, dans la journée
même, à nos prières. Souvent
nous nous sommes trouvés sans ressources
pour les besoins généraux de la
Mission, tandis qu'il nous restait des
réserves spéciales qui ne pouvaient
être détournées de leur
destination. Mais nos coeurs sont restés
paisibles, car nous savions que Dieu ne peut
manquer à Ses promesses. Et, à la
question « Avez-vous manqué de quelque
chose ? », nous ne pouvons que
répondre, comme les disciples autrefois :
« De rien, Seigneur. »
Ces temps-là furent aussi des
temps où les membres de la Mission, unis
dans la prière d'une façon toute
spéciale, éprouvaient un amour et une
sympathie renouvelés les uns envers les
autres et apprenaient les leçons
précieuses des soins fidèles de Dieu.
Ainsi, en décembre 1891, il fallait de toute
urgence deux mille livres sterling pour les besoins
généraux de la Mission et l'on
attendait le télégramme de Londres
annonçant le versement mensuel. Le
télégramme arriva au moment où
M. et Mme Taylor, avec un jeune membre de la
Mission, travaillaient dans leur bureau.
Après avoir prié en silence, ils
l'ouvrirent. Le versement était de cent
soixante-dix livres !
Cent soixante-dix livres, alors
qu'il en fallait deux mille! À peu
près cinq cents missionnaires, et pas de
versement jusqu'au mois suivant!
Après un instant de silence,
Hudson Taylor se tourna vers ses collaborateurs et
leur dit, d'une façon toute paternelle
:
C'était une occasion
magnifique de manifester l'intervention de Dieu, et
le triomphe de la foi. La somme insuffisante fut
complétée, non par un don
extraordinaire, mais par divers moyens où
l'on reconnut la main divine. D'Australie, des
envois plus importants parvinrent à
Shanghaï. Puis, des dons inattendus
arrivèrent de Chine même, si bien
qu'à la fin du mois l'allocation moyenne put
être transmise aux diverses stations avec le
sentiment très net de l'amour et de la
sollicitude de Celui qui, toujours, demeure
fidèle.
Peu avant le règlement des
difficultés administratives, une
délivrance remarquable vint réjouir
tous les coeurs à la rue de Pyrland.
C'était le 3 octobre 1892. Le
trésorier, n'ayant sous la main qu'une
petite somme, avait attendu le retour
d'Écosse d'Hudson Taylor,
afin de savoir comment il fallait disposer de
l'argent reçu en septembre. Le Comité
devait se réunir le soir même. Hudson
Taylor suggéra, en présence de
l'insuffisance des fonds, d'attendre un jour encore
avant de télégraphier à
Shanghaï et, laissant de côté
l'ordre du jour de la séance, de prier sans
retard pour demander à Dieu des ressources.
M. Fishe rappela que les comptes de septembre
étaient clos et le télégramme
fut alors envoyé. Mais, lorsque à
midi la maisonnée se réunit pour la
prière, cette grande préoccupation
financière en fut le principal objet. Tard,
dans l'après-midi, arriva une lettre qui
transforma la réunion du Comité en
une réunion de louanges. Non seulement elle
contenait un chèque de cinq cents livres,
mais une demande inusitée accompagnait le
chèque. Elle émanait d'une dame et
d'un monsieur qui se sentaient contraints,
disaient-ils, d'envoyer cette somme pour qu'elle
fût immédiatement transmise en Chine.
Il était trop tard pour le faire le jour
même, mais, dès le lendemain, la bonne
nouvelle fut télégraphiée
à Shanghaï où elle arriva, on
l'apprit plus tard, dans un moment
critique.
C'était l'époque des
séances d'automne du Comité de Chine.
À la réception du premier envoi, des
actions de grâces, malgré tout,
montèrent à Dieu pour les
délivrances passées, et la
difficulté présente - on ne disposait
que du cinquième de la somme
nécessaire -, fut remise entre Ses mains.
Vingt-quatre heures plus tard, le second
câblogramme arriva et M. Stevenson put
annoncer en même temps qu'il avait
reçu d'ailleurs une autre somme de cinq
cents livres également. Le
procès-verbal de cette séance
mentionne que les membres du Comité, remplis
de joie et de reconnaissance, se levèrent
pour chanter un cantique de louange.
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