La
petite Marie et les deux voleurs
Il y a déjà bien des
années, un fermier chrétien vivait
avec sa famille dans une contrée
retirée en Angleterre. Il avait coutume de
conduire les siens en voiture au culte chaque
dimanche matin, en laissant un des membres de la
famille pour garder la maison. Les gens de ce coin
de pays avaient la réputation d'être
très honnêtes, car on n'y avait jamais
entendu parler d'aucun vol.
Un dimanche, il laissa sa petite fille
pour garder la maison. C'était la
première fois que son père la
considérait comme assez
âgée pour le faire, mais
elle n'avait pas peur et ne se sentit pas trop
solitaire ; n'avait-elle pas son bon vieux
chien Over pour la protéger ?
Elle regarda la voiture s'éloigner, puis
elle prit la grosse Bible et lut pendant une heure
les histoires merveilleuses qu'elle
renferme, puis se rendit au jardin
en ayant soin d'en fermer la porte pour
empêcher Rover de faire des
dégâts. Elle s'assit sur le gazon et
finit par s'endormir. Il était passé
midi quand elle se réveilla ; elle se
rendit à la maison, mit la table et
aperçut deux hommes qui se dirigeaient vers
la porte. Ils étaient malpropres et en
désordre, et ne ressemblaient pas à
des visiteurs du dimanche, mais Marie, avec
l'esprit d'hospitalité qu'elle avait appris
de son père, ouvrit la porte et les invita
à entrer. Ces deux hommes parurent tout
surpris et amusés de sa simplicité,
tandis qu'ils se regardaient l'un l'autre en
souriant.
- Ainsi tu es seule à la maison,
ma petite, lui dit le plus jeune des deux, en
s'asseyant.
- Oui, monsieur, moi et Rover.
- Qui est Rover ?
- C'est le gros chien ; je
m'étonne qu'il n'ait pas
aboyé.
- Les chiens ne nous font pas de mal.
Nous ne les laissons pas faire, répondit
l'autre homme.
- Qu'importe Rover, je pense que tu ne
connais pas le but de notre visite, ma
petite ?
- Non, monsieur, mais je pense que vous
aimeriez manger quelque chose. Vous paraissez avoir
faim ?
- À coup sûr ; aussi
tu feras bien de te dépêcher, dit le
plus vieux avec rudesse.
- N'effraie pas cette petite fille,
interrompit son camarade et s'adressant à la
petite, il lui dit « Il est grincheux
parce qu'il a faim. »
Rassurée, Marie dressa bien vite
une table bien garnie et s'assit avec ses
hôtes.
Le plus jeune commençait à
couper un morceau de viande, quand Marie lui
dit : « Ne voulez-vous pas rendre
grâce à Dieu
premièrement ? »
Faisant un signe à son compagnon,
l'homme s'écria : « J'avais
oublié, car ce n'est guère dans mes
habitudes. Fais-le toi-même, ma
petite ».
Marie parut surprise, mais se tenant
debout elle dit :
« Rends-nous
véritablement reconnaissants, ô Dieu,
pour ces aliments que tu nous donnes dans ta
bonté, pour l'amour de Jésus Christ.
Amen ! »
Quand ils furent rassasiés, les
deux hommes posèrent à Marie une
foule de questions. Ils lui demandèrent
à quelle heure elle attendait son
père, s'il avait été au
marché voisin la veille, et ainsi de
suite.
- N'as-tu pas peur ici toute
seule ? lui demanda le plus jeune des deux
hommes. Et si des bandits viennent ici, des
voleurs, par exemple ?
- Je n'ai nullement peur, dit-elle, en
le regardant en face. Dieu prendra soin de moi. Je
pense que vous connaissez le cantique qui dit que
Dieu prend soin de ceux qui se confient en Lui,
n'est-ce pas ?
- Je ne puis pas dire que je le
connaisse. Quel est ce cantique ?
- En voici un verset ! dit Marie.
« Les anges de Dieu campent autour des
demeures des justes et il leur accorde à
tous sa protection quand ils se reposent sur ses
promesses. »
- Et quelles sont les paroles du second
verset ? lui demanda l'homme en feignant
d'ignorer l'impatience croissante de son compagnon.
Elle répéta tout le cantique et quand
elle en vint au dernier :
« Quand les lions
affamés ne trouvent pas de proie, le
Seigneur pourvoira aux besoins de ceux qui se
confient en lui », le bandit se sentit
mal à l'aise. Il remuait sur sa
chaise ; il se leva enfin, alla près de
la fenêtre et son compagnon l'y suivit
promptement. Ils entamèrent une conversation
à voix basse qui finit par s'animer à
tel point que le plus jeune dit à haute
voix :
« Je te dis, Thomas, que je ne
le veux pas, et si tu as le malheur de bouger, on
verra lequel est le plus fort des
deux ».
Marie n'en entendit pas davantage, car
les deux hommes sortirent.
Bientôt le plus jeune rentra pour
demander à Marie son nom. - Je ne
l'oublierai pas, lui dit-il. Nous ne voulons pas
attendre le retour de ton père ;
peut-être reviendrons-nous un autre
jour.
Il lui donna une bonne poignée de
main et s'éloigna.
« Je me demande où
Rover a été tout ce
temps », se dit Marie après que
ces deux hommes se furent éloignés.
Elle sortit pour l'appeler, mais comme il ne venait
pas, elle retourna à la maison pour passer
l'après-midi à lire.
Quand ses parents arrivèrent,
elle leur raconta la visite des deux hommes, et peu
après, ils trouvèrent Rover
étendu sans vie. Ils surent alors que ces
deux hommes étaient des voleurs qui avaient
probablement appris que le fermier avait
rapporté du marché une forte somme
d'argent ; mais la confiance que Marie avait
en Dieu les avait empêchés de
voler.
Les voleurs n'abandonnèrent pas
leur mauvaise voie ; ils furent saisis et
condamnés à être
déportés en Australie. Le plus
âgé mourut pendant le voyage et Jim
Smith, le plus jeune, débarqua au
port ; là, à cause de sa bonne
conduite, on le plaça chez un fermier qui
élevait des moutons. Il assista à un
service religieux un dimanche. Le premier cantique
qu'on chanta fut celui que Marie avait
répété, et quand le pasteur
continua :
« Les anges de Dieu campent
autour des demeures des justes l'attention de Jim
fut rivée sur lui, et ses pensées se
reportèrent à l'incident
mentionné plus haut. Après le service
il demanda au pasteur la copie de ce
cantique ; ce dernier lui donna le livre
complet, prit son adresse et lui envoya une Bible
avec des traités évangéliques
exposant le salut que Dieu dans son amour infini
offre à tous gratuitement. Dieu s'en servit
pour sa conversion. Il resta chez le fermier qui
était bon pour lui, jusqu'à la fin de
sa condamnation, puis il prit une ferme pour
lui-même. Il prospéra et gagna
l'estime de tous.
Quelques années plus tard il
visita l'Angleterre, et se rendit à la ferme
isolée où la première semence
pour la vie éternelle avait
été semée. Il
y trouva le vieux fermier encore en vie avec Marie
qui n'était plus jeune et qui tenait
ménage pour lui, tous deux heureux dans la
connaissance du Seigneur, sachant que chaque jour
les amenait plus près de leur patrie
céleste.
Il leur raconta comment Dieu s'était
servi du cantique que Marie lui avait cité
avec une foi toute enfantine pour préparer
son coeur à recevoir le message de la vie
éternelle. Il fut ainsi rendu capable
d'aimer et de servir le Seigneur Jésus
Christ après l'avoir accepté comme
son Sauveur.
|