Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



UN PROGRAMME DE VIE INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE

IV
Lire Romains XIII, 1 à 7.

Nous sommes ici en présence des devoirs du chrétien vis-à-vis de l'État, du gouvernement, des autorités. C'est donc du chrétien citoyen que nous allons parler. Le sujet ne manque ni d'intérêt ni d'actualité. On ne peut lui reprocher de ne pas répondre aux préoccupations de notre temps.

Une remarque essentielle s'impose à nous dès le début. Ce n'est pas l'idée des nationalités, et par conséquent, pas celle de patriotisme, qui ressort de ce que nous venons de lire, mais bien celle de l'organisation sociale et des devoirs qui incombent à l'enfant de Dieu, au sujet et au serviteur du Roi des rois envers cette organisation. Il y a quelque chose de plus important et de plus élevé que le patriotisme ; et aujourd'hui plus que jamais, nous avons besoin qu'on nous le redise, et qu'on nous rappelle à cet égard à l'ordre voulu de Dieu. Chose curieuse et triste à constater : à mesure que les relations internationales se multiplient par les voyages, par les échanges commerciaux et par les congrès sur toutes les questions imaginables, le nationalisme s'exaspère ; l'impérialisme, c'est-à-dire la soif de dominer et de régenter l'univers, tourmente toutes les grandes nations, y compris celles desquelles on l'aurait le moins attendu : le pangermanisme, le panslavisme, le panaméricanisme sont nés de nos jours et fleurissent. Peut-être est-ce le besoin instinctif de se défendre contre l'envahissement du cosmopolitisme, de l'universalisme. On veut être allemand, anglais, français ou suisse d'abord ; homme ensuite, s'il reste du temps, des capacités ou des forces. Le patriotisme exagéré (il y a un amour légitime du pays natal, nous ne le méconnaissons pas), passé à l'état de chauvinisme, nous fait méconnaître, oublier ou négliger la société, l'humanité, et nos devoirs vis-à-vis d'elle. Combien opportun est l'enseignement de Paul ! L'apôtre énonce deux principes fondamentaux.

Les autorités, par où il faut entendre tout d'abord les positions et les fonctions plutôt que les hommes, ont été instituées par Dieu. L'anarchie n'entre pas dans la pensée divine. La société ne peut subsister que s'il existe un gouvernement, des chefs qui commandent, des magistrats qui administrent les affaires du pays et rendent la justice. Une hiérarchie des pouvoirs est indispensable. Il en est de même dans la famille, qui ne saurait se passer de chef. Si un établissement d'instruction, d'éducation ; si une industrie, un commerce ; si une église, veulent accomplir leur mission et prospérer, il faut absolument qu'il y ait des maîtres qui enseignent et des élèves qui écoutent, des patrons qui ordonnent et des employés ou ouvriers qui obéissent, des fidèles et des conducteurs, des brebis et des pasteurs. Aucune institution ne peut vivre et se développer sans un esprit de subordination et de discipline. Dieu est un Dieu d'ordre, et non de confusion. Un ordre merveilleux règne dans l'univers qui est son oeuvre. De là le nom de Kosmos, régularité, harmonie, beauté, que donnèrent les anciens à l'ensemble de la création visible.
Les magistrats sont, qu'ils le sachent ou qu'ils l'ignorent, qu'ils le veuillent ou qu'ils s'en défendent, les ministres ou serviteurs de Dieu. Ils auront de ce fait un compte rigoureux à rendre à leur Maître. Et ce compte sera double : celui de l'homme privé et celui de l'homme public. Si cette pensée était plus familière à nos contemporains, ils seraient peut-être moins portés qu'ils ne le sont à solliciter les hautes positions, et à s'efforcer d'y arriver par tous les moyens, même les moins avouables. - Ce que les magistrats doivent faire régner, c'est la justice ; ils doivent encourager le bien et réprimer le mal ; et pour cela, il importe que pour leur propre compte ils pratiquent la justice et le bien. Ce sont là de ces choses élémentaires qu'il faut proclamer, parce que notre génération les a totalement perdues de vue.

Il n'y a pas d'autorités, - et maintenant nous voulons parler, non plus des positions et des fonctions, mais des personnes, des hommes constitués en dignité, - il n'en existe pas, disons-nous, que cela ne vienne en fin de compte de Dieu lui-même. Elles existent, sinon toujours par sa volonté expresse et directe, du moins par sa permission ou son consentement. Sa providence, qui prévoit tout et qui pourvoit à tout, les accepte et les tolère tout en se réservant de maintenir sa souveraineté et d'intervenir toutes les fois qu'elle le jugera bon. Il en résulte que le chrétien doit être respectueux et soumis vis-à-vis du gouvernement établi, quelle qu'en soit la forme ou l'origine. D'ailleurs, pour quiconque connaît l'histoire, il n'existe aucun régime qui n'ait à son point de départ quelque acte de violence ou d'usurpation. C'est dire qu'en réalité et au fond il n'y a dans ce inonde aucun gouvernement absolument légitime. Cependant le chrétien est tenu de l'accepter : il ne saurait être ni un révolutionnaire ni un agitateur politique ni un homme de parti. Il garde et sauvegarde son indépendance d'appréciation et d'action vis-à-vis des partis, des coteries et des syndicats, dont les membres la plupart du temps abdiquent tout jugement personnel et renoncent à toute liberté effective.

L'enfant de Dieu s'incline devant les lois et donne l'exemple de l'obéissance volontaire et empressée à leurs prescriptions. Il s'acquitte ponctuellement et consciencieusement de ses devoirs de citoyen. Par son bulletin de vote, il contribue pour sa part, modeste mais nécessaire, à la bonne marche des affaires de sa patrie. Si la confiance de ses concitoyens lui confère un mandat sans que pour cela il ait usé d'aucun des procédés louches usités dans les élections, il ne se refuse pas à l'accomplissement d'une mission particulière, à servir sa patrie dans la tâche qu'elle lui prescrit elle-même.

En un mot, il rend à César c'est-à-dire à l'État, ce qu'il doit à César, mais il se garde de faire de César son Dieu et de la politique l'aliment principal de sa pensée et de son coeur.

Ce qui vient d'être exposé ne concorde guère avec l'esprit moderne tout pénétré du souffle délétère du mécontentement amer, de la récrimination et de la révolte sourde ou tapageuse. Cependant lorsque Paul écrivait son exhortation, le César s'appelait Néron ! Réfléchissons : Tout acte de violence pour renverser ce qui existe est un acte d'incrédulité à l'égard de Dieu, que nous ne croyons pas capable d'intervenir au moment opportun, et une atteinte portée à son autorité souveraine. Nous oublions que « l'Éternel règne ».
Il est toutefois un cas, un seul, où nous pouvons et même devons résister au gouvernement ; c'est celui où il s'ingère dans les affaires de la conscience et l'opprime en nous empêchant de rendre à Dieu ce que nous devons à Dieu. Alors il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. (Actes 4,19). Mais hâtons-nous d'ajouter qu'il ne s'agit pas d'une résistance ouverte, d'une protestation insolente, d'une révolte à main armée.

« Ceux qui prendront l'épée périront par l'épée. » (Matth. 26, 52.) « Les armes de notre guerre ne sont point charnelles. » (2 Cor. 10, 4.) C'est un refus tout pénétré de déférence, un « Me voici, je ne puis autrement ; que Dieu me soit en aide ! » un appel modéré à la raison et à la conscience des magistrats : « Jugez vous-mêmes.... »

Nous ne saurions donc approuver les guerres de religion, même lorsqu'elles avaient pour but la défense des opprimés pour la foi. Encore moins quand elles se proposaient d'imposer la vérité par la force aux populations qui ne s'en souciaient que médiocrement, ou de la protéger contre ses adversaires. Nous ne condamnons pas ceux qui ont entrepris ces guerres, mais nous estimons qu'ils ont commis une grave erreur. Nous trouvons animés d'un esprit plus évangélique les martyrs qui priaient pour leurs bourreaux et pour le roi qui les faisait conduire au supplice ; et les assemblées du Désert de France, qui intercédaient pour le monarque dont les dragons pouvaient d'un instant à l'autre paraître à l'horizon et s'emparer des hommes pour les conduire aux galères et des femmes pour les enfermer à la Tour de Constance.

Saint Paul demande expressément qu'on prie pour les gouvernements et pour les hommes qui détiennent le pouvoir. (1 Tim. 2, 1 à 3.) C'est là un devoir que nous ne négligeons que trop. Si nous priions davantage, d'une part les choses iraient mieux parce que Dieu entend et exauce les supplications, et de l'autre nous serions moins disposés à critiquer, à blâmer, et à entretenir par là l'esprit de mécontentement et d'insubordination. Ce que nous devons désirer par-dessus tout, c'est de pouvoir mener une vie paisible et tranquille en toute piété et honnêteté, en d'autres termes de pouvoir servir Dieu et les hommes en toute liberté.

Une première conséquence des deux principes que nous venons d'établir, c'est que résister à l'autorité ou aux autorités, c'est s'opposer à l'ordre établi de Dieu, c'est être un perturbateur, un fauteur de désordres, un instigateur d'indiscipline et de bouleversement ; c'est porter atteinte à l'harmonie, à la paix, à la sécurité sociales; c'est en réalité et tout bien considéré faire la guerre à Dieu. Nous devons lui laisser complètement le soin d'abaisser et d'élever, de faire descendre au sépulcre et d'en faire remonter qui bon lui semble et quand bon lui semble. Sans cela nous nous exposons au jugement de Dieu, à un châtiment, à une réprobation publique ou privée qui nous humiliera profondément. Celui qui s'élève et veut prendre la place de Dieu sera abaissé, parfois jeté à terre et foulé aux pieds par les hommes, comme le sel qui a perdu sa saveur.

Et, remarquons-le, ce n'est pas tant la crainte des hommes, de la police, des gendarmes, des juges, de la prison, ou simplement de l'opinion, qui doit nous retenir et nous guider, que la crainte de Dieu, qu'une conscience éclairée et spirituelle. La crainte du jugement des hommes et des conséquences de ce jugement n'est pas rejetée par Paul, mais simplement considérée comme étant d'ordre inférieur. Faute de mobiles plus élevés, elle a sa place pour nous arrêter dans la voie du mal ou pour contribuer à notre éducation.

Une seconde conséquence des principes établis, c'est que le chrétien doit payer ses impôts avec régularité, bonne grâce et bonne humeur, ce qui n'est pas toujours le cas, on en conviendra. Il se gardera de toute dissimulation et de toute fraude vis-à-vis de l'État, aussi bien quand il passera à la douane que lorsqu'il aura des droits à payer sur des marchandises, des immeubles ou des successions. Il est certain que ceux qui agissent avec droiture dans ce domaine sont pressurés outre mesure. Il semble que les lois fiscales aient été établies en prévision de la tromperie et pour que toute fraude défalquée, il reste encore assez au trésor. Les gens scrupuleux sont ainsi dupés. Mais rien ne les empêche de protester, de réclamer, de s'associer à des démarches légales et loyales et de favoriser ainsi l'établissement de la probité la plus stricte dans ces sortes d'affaires.

Terminons par une remarque générale : Nous traversons des temps difficiles, des temps de grandes agitations nationales, politiques, sociales et religieuses. On veut tout bouleverser, tout renverser, tout changer. On attaque toutes les traditions et les institutions les plus anciennes et les plus vénérables, tous les droits acquis. C'est dans toutes les sphères de la vie qu'on veut rompre avec le passé, comme s'il ne contenait rien de bon, comme si les expériences accumulées d'un grand nombre de siècles et de générations d'hommes n'avaient aucune valeur et aucune autorité pour nous. Et on veut refaire la société et l'église de fond en comble selon des théories et des systèmes inventés par des hommes de talent ou de génie qui ont aussi peu de contact que possible avec les réalités de la vie de tous les jours! Qu'au milieu de ce tourbillon d'idées mal mûries, ou de déclamations sonores, le chrétien se montre calme, plein de discernement, de sagesse et de modération ; plein de tact et de charité ; conservateur là où il faut conserver, réformateur où il faut corriger et améliorer, et il sera une lumière au milieu des ténèbres qui s'épaississent toujours plus dans le monde de la pensée.

Et que toujours, partout et à l'égard de tous et de tout ce qui est sincère, l'enfant de Dieu se montre respectueux, alors qu'il est de mode de ne respecter plus rien ni personne, si ce n'est les chefs de parti ou d'école (qui ne sont du reste honorés que par leurs disciples) et par là il témoignera pour l'Évangile, pour Christ et pour Dieu.


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