Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
REGARD
Bibliothèque chrétienne online
EXAMINEZ toutes choses... RETENEZ CE QUI EST BON
- 1Thess. 5: 21 -
(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



REINE BLANCHE EN PAYS NOIR
Vie de Mary Slessor, missionnaire au Calabar



PREMIÈRE PARTIE

En Écosse. - En famille et à la fabrique.
1848-1876


CHAPITRE I

Mary Slessor, le second enfant d'une famille de sept, naquit en décembre 1848, à Aberdeen, en Écosse. Son père, cordonnier de son métier, ne faisait pas de gros bénéfices, en sorte que l'économie la plus stricte était obligatoire dans le ménage : pas question d'y avoir une bonne d'enfants ! Dès ses plus jeunes années Mary aida sa mère à s'occuper des petits. Pour elle pas de poupées : les bébés à habiller, à endormir, à amuser, à faire promener, en tenaient lieu ! Et ne sont-ce pas là les meilleures poupées, ces petits êtres chéris qui vous rendent du matin au soir l'affection que vous leur donnez ?

Mais pourquoi, allez-vous peut-être demander, nous raconter l'histoire de Mary Slessor plutôt que toute autre ? Voici pourquoi : parce que Mary Slessor fut un instrument dont Dieu se servit pour accomplir une oeuvre immense. Elle se laissa guider par lui, elle obéit à sa voix, elle le suivit partout, et fut son témoin fidèle là où personne encore n'avait porté l'Évangile de Jésus-Christ.

Son histoire vous intéressera, je le sais, mais ce n'est pas seulement pour vous intéresser que je l'ai traduite à votre intention : c'est dans le ferme espoir que vous ferez comme a fait Mary Slessor ; qu'après avoir donné votre coeur au Seigneur, vous lui consacrerez vos forces, votre énergie, votre vie tout entière ; en un mot, que vous serez un instrument docile entre les mains de votre Dieu.

Un des jeux favoris de Mary Slessor, dans son enfance, était d'imaginer qu'elle était maîtresse d'école, qu'elle avait de petits écoliers devant elle, et que ces écoliers étaient nègres ! Idée bizarre !
Mais voici ce qui l'expliquait. La mère de Mary s'intéressait beaucoup aux Missions en pays païen. L'Église à laquelle elle appartenait avait envoyé des missionnaires dans différentes parties du monde, et, tout récemment, avait entrepris une oeuvre nouvelle sur la côte occidentale de l'Afrique, dans une contrée appelée Calabar, qui faisait partie de la Nigérie. En Écosse, tout le monde parlait de ce nouveau champ de travail, et pensait aux missionnaires qui y couraient de grands dangers et enduraient de grandes privations.

Mme Slessor, en revenant des réunions missionnaires, réunissait ses enfants autour d'elle, et leur racontait en détail tout ce qu'elle venait d'entendre ; elle leur parlait de ce terrible pays et des coutumes si cruelles de ses habitants ; elle leur disait, entre autres choses, que ces peuplades sauvages tuaient tous les enfants jumeaux et chassaient leurs pauvres mamans dans la forêt.

Mary avait le coeur serré en pensant à ces petits êtres, et elle y pensait très souvent. C'est pour cette raison qu'elle faisait d'eux ses écoliers imaginaires. Elle rêvait d'aller un jour en personne dans ce pays cruel et de sauver la vie des petits jumeaux !
- Maman, disait-elle parfois, je serai missionnaire ; j'irai donner des leçons aux petits nègres, et je leur apprendrai à se bien conduire.
- Toi, missionnaire ! répliquait Robert son frère aîné, de ce ton supérieur que tous nous connaissons si bien. Tu n'es qu'une fille, et les filles ne sont pas missionnaires. C'est moi qui serai missionnaire. Tu pourras venir avec moi ; même t'asseoir à côté de moi dans ma chaire, si tu es bien sage.

Mme Slessor souriait de ces discussions ; elle était heureuse de penser que son Robert serait peut-être, un jour, serviteur de Jésus dans les pays païens. Il ne devait cependant pas en être ainsi ; Dieu en avait décidé autrement ; Robert mourut jeune, et Mary devint ainsi l'aînée de la famille.

Un nuage noir vint bientôt, hélas ! s'abattre sur la famille. M. Slessor s'adonna à la boisson, et ne tarda pas à en devenir l'esclave. Il dépensait au cabaret presque tout l'argent qu'il gagnait ; sa femme et ses enfants manquaient du nécessaire.

Dans l'espoir que si M. Slessor s'éloignait des camarades qui l'entraînaient il abandonnerait ses tristes habitudes, la famille quitta Aberdeen, et alla s'établir à Dundee, autre ville d'Écosse. Là on loua une petite maison avec un bout de jardin. Mais M. Slessor continua à marcher dans la mauvaise voie où il s'était engagé.

L'ÉGLISE DE DUNDEE

Mary avait maintenant huit ans. Elle aidait sa mère de plus en plus efficacement ; elle emmenait les petits faire de longues promenades, leur faisait grimper des rues escarpées d'où l'on apercevait de loin la campagne, ou bien les conduisait au bord de la rivière. Quelquefois Mme Slessor donnait une pièce de douze sous qui permettait à toute la bande de se payer un tour sur les chevaux de bois.

Le dimanche, tout ce petit monde partait en trottinant pour l'église, et assistait d'abord au service, puis à l'école du dimanche. Heureusement que la maman avait eu soin de donner à chacun une pastille de menthe à sucer lentement pendant le sermon, pour que le temps parût moins long !

En règle générale, Mary était sage et patiente, mais cette règle-là, comme toutes les autres, avait des exceptions. Ainsi par exemple, la petite fille se fâchait, tout rouge contre ses frères, lorsque, pour la taquiner, ceux-ci l'appelaient carotte, à cause de la couleur de ses cheveux. Parfois aussi, elle faisait exprès quelque sottise, tout comme en font les enfants de son âge. Une ou deux fois même, elle remplaça l'école du dimanche par une promenade ; mais, à son retour, la tristesse de Mme Slessor suffit à la faire rentrer en elle-même.

Le jour approchait cependant où un grand changement allait se produire en elle, - le plus grand changement qui puisse se produire en tout être humain, et qui transforma sa vie : elle donna son coeur au Seigneur Jésus. Un soir, bien timidement, elle se glissa auprès de sa mère, et, mettant sa figure tout contre la sienne, lui raconta ce qui s'était passé ; puis elle ajouta : « J'essaierai, maman, de te faire plaisir et de t'aider ». La joie de Mme Slessor fut bien grande. Elle serra tendrement sa fillette dans ses bras. Ah ! si seulement le nuage noir se dissipait !
Mais, au contraire, il se faisait plus épais. Il ne suffit pas, pour perdre des habitudes mauvaises, d'aller d'une ville dans une autre ; il faut que le coeur soit changé. M. Slessor rapportait chez lui si peu d'argent que sa femme fut obligée de travailler au-dehors, pour que ses enfants eussent leur pain quotidien.

Restée seule au logis avec ses frères et soeurs, Mary devint plus que jamais la petite maman. Elle se levait de bonne heure, se couchait tard, était souvent bien lasse ; mais quand, fatiguée, Mme Slessor revenait de son travail, Mary la recevait toujours avec un joyeux sourire de bienvenue.

Les jours, les semaines, les mois se passèrent sans amener d'amélioration dans les habitudes du père de famille. Les enfants grandissaient et les dépenses se faisaient plus lourdes ; en sorte qu'à son tour Mary dut gagner sa vie. Et pourtant, elle n'avait que onze ans !

Elle fit ses débuts dans une grande fabrique. Entourée de machines, d'engrenages, de courroies tournoyant avec la rapidité de l'éclair, elle en fut d'abord un peu effrayée. Heureusement il était de règle que les très jeunes ouvrières ne travaillassent que le matin ; l'après-midi elles suivaient une école qui dépendait de la fabrique ; et là, elles apprenaient à lire, à écrire et à compter. Mary aimait la lecture, mais détestait cordialement les longues additions : il lui semblait que les chiffres dansaient devant elle ; et, quant aux problèmes, elle n'y comprenait rien de rien.

Mais, par contre, elle était fort habile de ses doigts et sut vite très bien tisser. Quelle joie ce fut pour elle de remettre à sa mère son premier salaire ! Mme Slessor le reçut en pleurant et le mit de côté, ne pouvant se décider à le dépenser tout de suite.

À quatorze ans Mary tissait à l'un des plus grands métiers et se faisait déjà de bonnes journées. Mais elle ne mangeait pas le pain de la paresse : elle se levait à 5 heures du matin, dès que le sifflet de la fabrique se faisait entendre, et devait être devant son métier à 6 heures. La journée ne finissait qu'à 6 heures du soir ; mais, entre temps, elle avait deux heures de liberté pour les repas. Le samedi après-midi et le dimanche elle avait congé, et en profitait pour donner un bon coup de main chez elle. Sa tenue était des plus simples ; non qu'elle fût indifférente aux toilettes Soignées, mais uniquement afin de mettre de côté le plus possible pour le ménage.

Car, hélas ! mère et fille avaient perdu tout espoir que M. Slessor leur vînt en aide. Le fardeau qu'elles portaient ensemble était bien lourd, la lutte qu'elles livraient bien acharnée. Dans leur détresse elles s'attachèrent l'une à l'autre toujours plus étroitement ; ensemble elles priaient, demandant au Seigneur de leur donner secours, force et courage. Le samedi soir, le père de famille rentrait fort tard, et se conduisait de telle façon que la pauvre Mary s'enfuyait souvent de la maison et errait dans les rues jusqu'à ce que son père fût couché. Oh ! qu'alors elle se sentait triste et misérable ! Comme elle sanglotait ! En passant devant les cabarets brillamment éclairés, elle se demandait pourquoi il était permis de vendre ces boissons, ruine de tant de vies.

Les tristes expériences par lesquelles elle passait laissèrent leur empreinte indélébile sur cette âme en formation ; mais Dieu permit que ces expériences mêmes eussent des résultats bénis pour Mary ; elle apprit à sympathiser avec ceux qui sont dans la peine, à avoir pitié de tous ceux qui souffrent. Et surtout elle devint le champion des petits enfants et de tous les êtres faibles ou opprimés. De plus, et sans qu'elle s'en rendît compte encore, ces expériences la préparèrent pour la tâche qui l'attendait. Comme certaines plantes des tropiques qui n'exhalent leur parfum que dans l'obscurité, Mary se développa spirituellement dans la nuit de l'épreuve ; elle apprit à être brave, patiente, à penser à autrui.

Grandir dans un milieu privilégié, former son âme dans des circonstances faciles, cela n'a pas toujours, je dirai même, cela n'a pas souvent pour résultat une vie utile à soi-même et aux autres.

C'est bien plutôt l'opposé. Combien d'hommes et de femmes, auxquels le monde doit beaucoup, eurent une enfance et une jeunesse ardues, durent lutter pied à pied contre des circonstances adverses ! Lincoln, par exemple, qui fut président de la République des États-Unis et libéra des millions d'esclaves, eut comme Mary Slessor une enfance et une jeunesse bien difficiles ; mais son nom est devenu un des plus célèbres de l'histoire. Qu'aucun de vous, les jeunes, ne se décourage parce qu'il est pauvre ou isolé, ou que tout semble se liguer contre lui ; que patiemment il - ou elle - lutte avec persévérance contre les obstacles qui obstruent son chemin. Peu à peu les choses s'arrangeront, de meilleurs jours viendront, le soleil percera les ténèbres.

Enfin M. Slessor mourut. Qu'il est douloureux, amèrement triste, d'avoir à regarder comme une délivrance la mort d'un père ou d'une mère ! Après le décès de son mari, Mme Slessor quitta la fabrique et prit un petit magasin. Le samedi après-midi et le samedi soir, qui sont toujours des moments de presse en Grande-Bretagne, où tous les magasins sont fermés le dimanche, Mary aidait sa mère dans la boutique.

Elle devenait jeune fille. Les beaux rêves de son enfance remplissaient de plus en plus son coeur et son esprit, et elle faisait de son mieux pour que ces rêves, devinssent des réalités. Ainsi, se rendant compte de son manque d'instruction, elle se mit à lire le plus possible ; et à mesure qu'elle apprenait, elle avait soif d'en savoir davantage. Dans son ardeur à s'instruire, elle lisait en marchant pour aller au travail ; et, sans savoir que Livingstone en avait fait autant dans sa jeunesse, elle appuyait un livre ouvert sur le coin de son métier et y jetait un coup d'oeil de temps en temps. Ses compagnes d'atelier racontaient qu'elle avait toujours un carnet dans sa poche, et y écrivait ses pensées, ses impressions, voire même des poésies ! Toujours est-il que jamais elle ne négligeait son travail.

Vous le voyez, Mary ne menait pas une vie facile ; mais les quelques précieux moments qui lui appartenaient, comme elle savait les mettre à profit ! Les livres qu'elle lisait n'étaient pas des histoires amusantes ou des romans, et je me demande ce qu'ils vous diraient, à vous ! C'étaient le « Paradis perdu », de Milton, les ouvrages de l'historien anglais Carlyle, etc. Les lectures la captivaient à tel point qu'elle les continuait parfois jusque bien avant dans la nuit, et tressaillait de surprise lorsque le sifflet de la fabrique annonçait qu'il était l'heure de se lever. En cela, vous ferez aussi bien de ne pas l'imiter !

Mais, de tous les livres, celui que Mary aimait le plus et connaissait le mieux, c'était la Bible. Elle ne lisait pas la Bible par devoir ou par habitude, comme le font tant d'autres jeunes gens ou jeunes filles, elle la lisait par amour pour cette précieuse Parole de Dieu ; souvent elle en apprenait par coeur de longs fragments. Elle faisait partie d'une classe biblique, et elle était toujours si prête à répondre aux questions que posait le pasteur, que celui-ci finit par lui dire en souriant : « Ne répondez que lorsque je m'adresserai à vous personnellement ». Ce qu'il ne faisait que si personne d'autre n'avait pu répondre. Alors, se tournant vers elle, il disait : À vous maintenant » ; et elle avait toujours une bonne réponse toute prête.

Elle ne se lassait pas de relire les évangiles. surtout celui de saint Jean. Quand elle réfléchissait à tout ce qu'avait fait pour nous le Seigneur Jésus, quand elle se disait qu'il avait quitté le ciel pour venir sur la terre arracher les hommes au péché et à la mort, qu'il avait souffert, même jusqu'à la mort de la croix, et qu'il apportait paix, délivrance et lumière à tous, il lui semblait que jamais elle ne pourrait assez prouver à son Sauveur son amour, sa reconnaissance, son dévouement. « Jésus a rendu les gens heureux, il les a rendus meilleurs, et il dit que nous devons le suivre et agir comme il a agi. Moi aussi je dois lutter contre tout ce qui est mal, tout ce qui est laid, tout ce qui trouble ». Ainsi pensait-elle. Jamais elle ne se disait : « Je ne suis qu'une fille, à quoi bon penser à travailler pour le Seigneur ? » Au contraire, elle savait très bien qu'elle aussi avait sa place dans l'armée de ses serviteurs. « Seigneur, disait-elle humblement, je ferai selon mon pouvoir ce que tu me donneras à faire ; mon coeur, mes mains, mes pieds, mon être tout entier, sont à ton service. »


Table des matières

Page précédente:
Page suivante:
CHAPITRE Il - La première chose que le Seigneur donna à faire à Mary
 

- haut de page -