REINE
BLANCHE EN PAYS NOIR
Vie de Mary
Slessor, missionnaire au
Calabar
QUATRIÈME PARTIE
Nouvelles Conquêtes
1902-1910.
CHAPITRE VI
L'automobile du gouvernement arpentait le
pays en tout sens et venait parfois à Use.
Le chauffeur, un blanc, avait comme aide
indigène un jeune homme bien
élevé et instruit, nommé
David, originaire de Lagos.
David eut bientôt fait de se lier
d'amitié avec Dan ; mais il ne s'en
tint pas à cette très facile
conquête. Il avait d'autres
aspirations ; il ne désirait ni plus ni
moins que de gagner le coeur de Mary, une des
filles de Ma ! Annie était
déjà mariée à un jeune
chrétien, et plusieurs autres avaient
demandé, - sans l'obtenir, - la main de
Mary. « J'aime mieux rester ici avec toi,
avait dit la jeune fille à Ma ; je n'ai
aucune envie de m'en aller ».
N'empêche que David réussit où
les autres avaient
échoué !
Ma, qui connaissait le jeune homme,
donna son consentement au mariage, et bientôt
David et Mary furent mariés civilement par
le Gouverneur du district. Mais comme il n'y avait
sous la main personne qui pût
célébrer la cérémonie
religieuse... après le mariage civil
« chacun s'en fut chez soi »,
comme le dit notre vieille
chanson, jusqu'à une meilleure
occasion !..
Heureusement que celle-ci se
présenta plus tôt qu'on ne s'y
attendait. Un missionnaire arriva à
l'improviste. Vite on se dépêcha de
terminer la robe de noces et l'on fit savoir
à David qu'il pouvait arriver en compagnie
de son habit noir ! Il ne se le fit pas dire
deux fois.
UNE
COIFFURE DE GRAND STYLE
Bien entendu la cérémonie fui
suivie d'un déjeuner de fête, qui eut
lieu sous la véranda. Le matin de bonne
heure, David avait dressé des tables et
apporté des sièges. Les dames
missionnaires d'Ikotobong mirent le couvert et
décorèrent les tables de fleurs, sans
oublier d'y placer une petite touffe de
bruyère venue d'Écosse. La
mariée et Janie avaient
préparé le repas. À onze
heures, on se mit à table. La place
d'honneur était occupée par un
vieillard mahométan, ami de la famille de
David. Un grand nombre de ses coreligionnaires
étaient venus habiter le
pays et assistaient aux cultes tenus par Ma. Ce
vieillard portait un vêtement blanc et un
turban. Il avait une grande admiration pour
Ma ; dès leur première rencontre
il lui avait dit : « Il n'y a que
Dieu qui puisse t'aider à être ainsi
une mère et une aide si précieuse
pour tous » ; puis il s'était
penché sur la main de Ma et l'avait
baisée, et, les yeux pleins de larmes, avait
imploré sur Ma la bénédiction
de Dieu.
À côté du vieillard
étaient assis la mariée et son mari.
Pendant que « les gens
importants » déjeunaient sous la
véranda, la brave Janie s'occupait des
enfants de l'école et les faisait
goûter.
À la fin du repas, le
mahométan se leva et fit un petit discours.
« J'ai connu la mère de David
avant la naissance de celui-ci, dit-il entre autres
choses, et je bénis Dieu de ce qu'Il a
envoyé David chercher ici sa
femme ». Puis David s'avança vers
Ma : « Maman, dit-il, ne nous laisse
pas partir sans prier avec nous » ;
et lui et sa jeune femme s'agenouillèrent
devant Ma, qui pria et les remit entre les mains de
Dieu. Chacun accompagna les jeunes époux
jusqu'au seuil de la hutte qui leur avait
été préparée; et dans
cette hutte le culte domestique fut toujours
célébré.
Parmi les « cadeaux de
noces », il y eut une machine à
coudre donnée par Ma, des gâteaux
faits par les missionnaires d'Ikotobong, une
casquette de chauffeur, un mouchoir en soie, des
rubans et une paire de ciseaux.
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