Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Du Thabor à Golgotha



V
VOILA L'HOMME

VII. LE ROI HÉRODE

Pilate interrompt brusquement l'interrogatoire par cette question : « Qu'est-ce que la vérité ? » Son entretien avec Jésus l'a convaincu de l'innocence de celui-ci. « Et quand il eut dit cela, il sortit de nouveau vers les Juifs et leur dit : Je ne trouve aucun crime en lui. » (Jean XVIII, 38.) C'était déclarer au sanhédrin et à la foule que leurs accusations étaient fausses et injustes. Cette réponse courageuse est digne d'un Romain.

Les principaux sacrificateurs sont dans une grande agitation à la vue du danger qui menace leur plan. Après s'être concertés, ils s'avancent avec une nouvelle accusation contre Jésus : « Il soulève le peuple, enseignant par toute la Judée, ayant commencé depuis la Galilée, jusqu'ici. » (Luc XXIII, 5.) L'affaire devient sérieuse. Au commencement, les pharisiens avaient gardé une certaine mesure ; maintenant la haine les emporte. Pilate, effrayé, comprend qu'il ne sortira de là, qu'en s'attirant l'animadversion de ces fanatiques, ou en commettant une grande injustice.

Mais on a prononcé le mot de Galilée ; « il demanda si cet homme était Galiléen. Et ayant appris qu'il était de la juridiction d'Hérode, il le renvoya à Hérode, qui était aussi à Jérusalem en ces jours-là. » (Luc XXIII, 6, 7.) Pilate espérait se décharger sur lui de cette pénible affaire, ou tout au moins retarder le moment du jugement. Pauvre Pilate ! il ne réussit qu'à gagner l'amitié du misérable Hérode, « En ce même jour, Pilate et Hérode devinrent amis ; car auparavant ils étaient ennemis » (Luc XXIII, 12), et à attirer sur le Seigneur une ignominie de plus.

Suivi des sacrificateurs, des principaux et de la multitude, Jésus traverse de nouveau, comme un malfaiteur, les rues de Jérusalem. « Quand Hérode vit Jésus, il en eut une grande joie ; car il y avait longtemps qu'il souhaitait de le voir, parce qu'il avait ouï dire beaucoup de choses de lui ; et il espérait qu'il lui verrait faire quelque miracle. Il lui fit donc plusieurs questions. » (Luc XXIII, 8, 9.)

Hérode était fils de cet autre Hérode, qui avait fait mettre à mort les enfants de Bethléhem, dans l'espoir de faire périr le fils de David. (Matth. II, 16-18.) Il était connu par son adultère avec Hérodias, femme de Philippe, son frère, et par le meurtre de Jean-Baptiste. Lorsque le bruit des miracles de Jésus vint à ses oreilles, l'incrédule et superstitieux libertin crut que Jean était ressuscité des morts. (Matth. XIV, 1-12.) Il avait entendu raconter des choses grandes et glorieuses de Jésus, mais il n'avait eu ni le temps ni l'occasion de le voir. Maintenant que le Seigneur est amené en sa présence, il espère lui voir faire quelques miracles.
« Mais le Seigneur ne lui répondit rien. » (Luc XXIII, 9.)

Malgré sa vie de péché, nous n'oserions porter un jugement sur Hérode, - car il pouvait se trouver encore en lui quelque bon sentiment, comme lors de la décapitation de Jean-Baptiste - si le silence de Jésus, ce silence absolu ne contenait en soi une sévère condamnation. Le Seigneur parle amicalement au païen Pilate ; à Judas même, il adresse un touchant et dernier appel ; mais, pour Hérode, il n'a pas une seule parole. Le Seigneur traite chaque homme comme il le mérite. Pour l'un il a des paroles de consolation et de miséricorde ; pour l'autre des avertissements ou des châtiments ; tandis que pour d'autres il n'a que le silence. Aussi longtemps qu'il n'a pas prononcé le jugement définitif, même lorsqu'il reprend, il y a encore de l'espoir. Quand il garde le silence, il n'en reste plus.

Le misérable Hérode et ses courtisans n'imaginent rien de mieux que de se moquer du Seigneur. « Hérode, avec les gens de sa garde, le traita avec mépris ; et pour se moquer de lui, il le fit vêtir d'un habit éclatant, et le renvoya à Pilate, » (Luc XXIII, 11.) Que de fois cette basse et lâche vengeance n'a-t-elle pas été exercée par les descendants spirituels d'Hérode !

VIII. BARABBAS

La horde sauvage, traînant toujours son innocente victime, revient devant le palais. Pilate, n'ayant pu réussir à se décharger sur Hérode de sa terrible responsabilité, est obligé d'en venir à une décision. Quelle sera-t-elle ? Jusqu'ici son courage et sa fermeté n'ont pas faibli. Sans doute il continuera à défendre l'innocent. - Hélas ! il entre dans la voie des compromis, il espère. parvenir à délivrer Jésus, en concédant quelque chose à la haine de ses ennemis. Mais il verra bientôt que les chemins détournés sont dangereux et les meilleures intentions vaines, quand elles sont servies par de mauvais moyens.

« Pilate, ayant assemblé les principaux sacrificateurs, et les magistrats, et le peuple, leur dit : « Vous m'avez amené cet homme comme soulevant le peuple - et cependant, l'ayant interrogé en votre présence, je ne l'ai trouvé coupable d'aucun des crimes dont vous l'accusez ; ni Hérode non plus ; car je vous ai renvoyés vers lui, et voici il n'a rien fait qui soit digne de mort. » (Luc XXIII, 13-15.) Sans doute Pilate terminera sa harangue en disant. « C'est pourquoi, au nom de l'empereur et de la justice romaine, je le mets en liberté et mes gardes sauront faire respecter cet arrêt. » Non, Pilate ne parle point ainsi : « L'ayant donc fait châtier, » ajoute-t-il, « je le relâcherai. » (Luc XXIII, 16.)
Pourquoi châtier un innocent ? Pour accorder une satisfaction aux pharisiens, pour ne point provoquer leur haine, pour plaire au peuple. Cette première concession est la perte de Pilate.

Il ne nous arrivera sans doute jamais d'être placés dans une position aussi critique que celle du gouverneur romain ; toutefois nous devons veiller sur nous-mêmes, afin d'être capable de résister au moment de la tentation et de demeurer véridique et consciencieux en toute chose. La crainte des hommes et la lâche complaisance pour le mal font de profondes blessures à la conscience et conduisent souvent à des compromis, dont l'issue peut être fatale. C'est par de petites infidélités que commence la ruine d'une âme et celui qui, par la grâce de Dieu, est retenu sur le bord de l'abîme, aura bien des luttes et des souffrances à traverser, pour rentrer dans le droit chemin.

Pilate fait un pas de plus. C'était la coutume des Juifs, à la fête de Pâque, anniversaire de la sortie d'Égypte, de rendre la liberté à un prisonnier, et les Romains leur avaient laissé ce privilège. « Il y avait en prison un nommé Barabbas, qui avait commis un meurtre dans une sédition. » (Marc XV, 7.) Pilate offre au peuple la mise en liberté d'un prisonnier, lui laissant le choix entre Jésus et Barabbas. Mais s'il s'attendait à la libération de l'innocent, il avait compté sans la haine des pharisiens. Ceux-ci, qui veulent à tout prix la mort de Jésus, incitent le peuple à demander la liberté de Barabbas. « De sorte qu'ils s'écrièrent tous ensemble : Fais mourir celui-ci, et nous relâche Barabbas. » (Luc XXIII, 18.) Pilate est troublé, agité ; il voudrait bien délivrer Jésus, mais il n'ose pas ; ses lâches concessions ont fait de lui une proie facile pour Satan.

Barabbas avait été reconnu coupable et condamné à mort. Enfermé dans une sombre cellule, il attendait, avec un profond désespoir, l'exécution de la sentence. C'est alors que le gouverneur le présente au choix du peuple. Le juste est rejeté, le malfaiteur est gracié.

Pourquoi Dieu a-t-il permis que le Sauveur soit mis en balance avec un malfaiteur et rejeté par le peuple ? Dieu l'a permis, non seulement par amour pour Barabbas, mais par amour pour nous. « Celui qui n'a point connu le péché, il l'a traité en pécheur pour nous, afin que nous, nous devenions justes de la justice de Dieu en lui. » (2 Cor. V, 21.)

Barabbas est le type de l'humanité et de chaque homme pris individuellement. Frappés par le juste jugement de Dieu, « nous étions assis dans la région et dans l'ombre de la mort » (Matth. IV, 16), sans espérance et sans perspective de salut. La justice du Dieu saint demandait satisfaction. Nous avions mérité la mort et nous l'aurions subie, si un Saint, si Dieu même ne s'était mis à notre place. « Lequel voulez-vous que je vous relâche ? » (Matth. XXVII, 17.) Lequel ? Cette question capitale s'est décidée dans le conseil secret de Dieu. Quelle en est la réponse ? Le juste pour le pécheur. « Le châtiment qui nous apporte la paix est tombé sur lui, et par sa meurtrissure nous avons la guérison. » (Esaïe LIII, 5.) Mais, pour avoir part à l'oeuvre de l'expiation, il faut que nous nous mettions à la place de Barabbas, il faut que nous nous sentions pécheurs et condamnés comme lui.

Barabbas n'avait point demandé l'échange. Celui-ci a lieu sans sa participation. Une fois accompli, la joyeuse nouvelle lui en est annoncée. Il en est de même pour nous. Le salut est un fait accompli. Le message de grâce est annoncé à tous : vous êtes libre. Le jugement qui vous condamnait a frappé un autre à votre place. La mort n'a plus de pouvoir sur vous. Le droit de bourgeoisie dans la patrie céleste, l'héritage glorieux des enfants de Dieu vous est acquis. « Toutes ces choses viennent de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par Jésus-Christ. » (2. Cor. V, 18.)

Barabbas accepte sa grâce. L'Évangile ne nous dit point de quelle manière, ni avec quels sentiments. Se trouvait-il parmi la foule sur la colline de Golgotha ? A-t-il regardé avec reconnaissance le Sauveur qui souffrait à sa place ?

Quoiqu'il en soit, il ne pouvait comprendre aussi clairement que nous, la haute importance de la mort du Christ. Et cependant, que nous y attachons encore peu de prix ! La plupart des hommes vivent comme si la délivrance du péché, la libération de la condamnation ne les concernait aucunement. L'humiliation, le sentiment du péché, le repentir font défaut à notre génération. Les chrétiens eux-mêmes trouvent tout naturel que Dieu ait livré son propre fils à la mort pour eux !

IX. LES SONGES

Cependant la séance du tribunal est interrompue par un incident digne de remarque. Un esclave vient remettre à Pilate un message de sa femme, Claudia Procula - celle-ci avait eu durant la nuit un rêve extraordinaire : Jésus lui était apparu comme un juste faussement accusé et persécuté, et elle s'était réveillée avec une grande angoisse et une souffrance réelle. La chose lui avait paru assez importante pour la communiquer immédiatement à son mari et, au milieu de l'audience, elle lui fait dire : « Ne te mêle point de l'affaire de ce juste ; car j'ai beaucoup souffert aujourd'hui en songe, à son sujet. », (Matth. XXVII. 19.)

Ce rêve est un merveilleux témoignage rendu à l'innocence du Sauveur. Sans nous arrêter à rappeler aux femmes qu'elles doivent être l'ange gardien de leur mari et cela d'autant plus que la responsabilité de ceux-ci est plus grande, nous voulons nous occuper un instant des songes.

Le rêve de Claudia était, on n'en peut douter, un avertissement d'en haut. Pourquoi lui fut-il envoyé, puisque la crucifixion du Christ par les Romains était chose arrêtée dans le conseil de Dieu ? Nous touchons ici à un mystère que l'esprit humain est incapable de sonder : la liberté de l'homme et la prescience de Dieu.

Non seulement les païens et le peuple de l'ancienne alliance, mais les chrétiens de tous les temps, ont souvent attaché beaucoup d'importance aux songes. Si un grand nombre de rêves ne sont que la conséquence des impressions reçues dans la journée, il en est certainement d'autres qui sont produits par l'inspiration du monde spirituel, soit des bons, soit des mauvais esprits. Dieu ne peut-il pas, aujourd'hui encore, envoyer à ses enfants un avertissement ou un encouragement par le moyen d'un songe, comme autrefois à Joseph, lorsqu'il commanda à ce dernier de prendre le petit enfant et sa mère et de fuir en Égypte ? (Matth. II, 13.)

Je crois que les mauvais esprits, qui nous environnent, se font souvent un jeu de l'homme endormi et lui présentent des images propres à l'induire au mal. Plus d'un beau rêve, plein d'images sensuelles, vient, non des bons, mais des mauvais esprits. Nous sommes entourés d'un monde invisible. L'expérience en rend témoignage aussi bien que les saintes Écritures.

Cette assertion sera sans doute rejetée par plusieurs. je ne veux pas discuter avec ceux qui nient le monde spirituel et qui regardent l'homme comme le plus noble ou, suivant l'individu, comme le plus ignoble des animaux. S'il est positif que le monde spirituel existe, si la patrie de l'homme et le but qu'il cherche sont en haut, n'est-il par rationnel que le monde invisible exerce sur lui son influence ?

La position de Pilate est réellement digne de pitié. Dans ce moment critique, où il ne sait comment faire pour délivrer Jésus, le message de sa femme vient encore ajouter à son angoisse.
Il donne essor à ce sentiment douloureux par une question désespérée : « Que voulez-vous donc que je fasse de celui que vous appelez le roi des Juifs ? » (Marc XV, 12.) Pauvre Pilate ! ne vois-tu pas qu'en t'adressant aux ennemis de Jésus, tu n'obtiendras que la même réponse : « Crucifie-le ! crucifie-le ! » (Marc XV, 13, 14.) Pilate n'aurait dû consulter que sa conscience. Il n'en savait pas autant que nous sur le Christ, mais suffisamment pour se rendre compte de la sainteté de celui qu'il livrait à la haine et à la jalousie des méchants. Sa question est déjà une défaite.

« Que ferai-je de Jésus ? » (Matth. XXVII, 22.) Cette question doit nécessairement se poser une fois ou l'autre pour chacun de nous. Celui qui s'en va demander conseil aux ennemis déclarés du Seigneur, recevra toujours la même réponse : crucifie-le ! crucifie-le ! La moquerie, la haine, le ton d'autorité tiennent lieu de preuves convaincantes. On ne cherche plus de motifs pour rejeter le Sauveur ; la chose va de soi.

Mais s'il est quelqu'un qui prenne cette question au sérieux et qui désire connaître la vérité, il n'a qu'à ouvrir l'Évangile et à écouter sa conscience. Que faut-il faire de Jésus ? Lui apporter chaque jour tes péchés, car lui seul peut les pardonner, parce qu'il les a expiés sur la croix. Que faut-il faire de Jésus ? Lui demander l'esprit et la force d'en haut, afin que tu puisses vivre d'une manière digne de l'Évangile et t'avancer joyeux, vers la patrie de la lumière, du bonheur et de la gloire. Que faut-il faire de Jésus ? lui dire ta souffrance et tes soucis, car il possède toute puissance dans le ciel et sur la terre ; il est Prince dans la maison de Dieu ; Dispensateur de ses biens ; sa bénédiction seule enrichit.

Je suis à toi ! Gloire à ton nom suprême
0 mon Sauveur ! je fléchis sous ta loi.
Je suis à toi ; je t'adore, je t'aime.
Je suis à toi, je suis à toi !

Voilà ce que tu dois faire de Jésus.

X. L'HOMME DE DOULEURS

Le peuple a choisi Barabbas. Alors Pilate essaie - dans l'espoir de sauver Jésus - un moyen, auquel il avait précédemment fait allusion. « Il le fait fouetter. » (Jean XIX, 1.) Il espère que la vue de son sang assouvira la haine de ses ennemis.

La flagellation, fréquemment employée chez les Romains, comme châtiment des malfaiteurs, était un supplice épouvantable, qui avait souvent amené la mort du condamné. Voilà le traitement que l'on fit subir au fils de Dieu.
Il n'est pas dit si les soldats s'acquittèrent de leur office barbare avec rudesse ou avec compassion. On ne peut toutefois attendre de grands ménagements de leur part, quand on les voit, animés d'une fureur diabolique, se moquer du Seigneur, lui donner des soufflets et lui cracher au visage.

« Alors les soldats l'emmenèrent dans l'intérieur du palais, c'est-à-dire au prétoire, et ils y assemblèrent toute la cohorte. » (Marc XV, 16.) Placé au milieu des soldats, le Seigneur est dépouillé de ses vêtements, attaché au poteau, battu de verges (Jean XIX, 1) - son sang coule, il est près de défaillir. Alors on le détache et l'on jette sur lui, non ses vêtements, mais un vieux manteau de pourpre. Un des soldats, apercevant dans la cour un buisson d'épines, court en cueillir les branches, il en fait une couronne qu'il place sur la tête du Seigneur, la frappant avec un roseau afin de la faire pénétrer dans les chairs. Puis les soldats fléchissent les genoux devant lui, se moquent de sa dignité royale et « le saluent en disant : Salut roi des juifs. Et ils lui frappaient la tête avec une canne, et ils crachaient contre lui, et se mettant à genoux, ils se prosternaient devant lui. » (Marc XV, 16-19.)

Et le Seigneur supporte ces monstrueuses et inhumaines cruautés sans se révolter ni se plaindre ! « Il est maltraité, il est affligé ; et il n'ouvre point la bouche ; comme un agneau mené à la boucherie, comme une brebis muette devant celui qui la tond, il n'ouvre point la bouche. » (Esaïe LIII, 7.) Après qu'ils l'ont ainsi tourmenté et défiguré, les soldats reconduisent Jésus dans le prétoire. Pilate, ému à la vue de cet homme couvert de sang, qu'il a injustement fait châtier, le présente au peuple en disant : « Voici, je vous l'amène dehors, afin que vous sachiez que je ne trouve aucun crime en lui. » (Jean XIX, 4.)

Que pourrions-nous ajouter à ce récit émouvant ? Contemplons et adorons en silence le Seigneur qui souffre pour nos péchés. « Il a été meurtri pour nos péchés et frappé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous apporte la paix est tombé sur lui, et par sa meurtrissure nous avons la guérison. » (Esaïe LIII, 5.)

Que cette image du Sauveur, couvert de sang et de meurtrissures, se présente à toi, quand le péché et le monde chercheront à te tenter et à t'entraîner sur le chemin de la désobéissance ! Qu'elle vienne te consoler quand les maux et les souffrances de la vie fondront sur toi ! et qu'elle t'apparaisse à la dernière heure, quand il te faudra suivre seul un chemin sombre et mystérieux, quand tous les appuis terrestres te feront défaut et que la crainte de la mort, la terreur de l'éternité te saisiront ! Lui seul, ton Sauveur qui a souffert pour toi, sera ton bâton et ta houlette, ta consolation et ton salut. (Ps. 23, 4.)

Cependant l'odieux moyen ordonné par Pilate a produit l'effet contraire. Le gouverneur est forcé de le reconnaître. Le peuple recommence à crier - « crucifie-le ! crucifie-le ! Pilate leur dit : Prenez-le vous-même et le crucifiez ; car je ne trouve aucun crime en lui. Les Juifs lui répondirent : Nous avons une loi, et selon notre loi il doit mourir, parce qu'il s'est fait Fils de Dieu. » (Jean XIX, 6, 7.)

Au milieu du tumulte, Pilate distingue un mot qui vient encore augmenter la crainte qu'il éprouve en présence du Seigneur : « Il s'est fait Fils de Dieu. » Le calme de Jésus, son caractère élevé, les paroles simples et sérieuses qu'il lui a adressées, tout cela, joint au rêve extraordinaire de sa femme, a déjà fait comprendre à Pilate qu'il se trouve en présence d'une individualité tout-à-fait exceptionnelle, Aussi, lorsqu'il apprend qu'il s'est donné pour le Fils de Dieu, il a peur - non des juifs - mais de Jésus, parce qu'il l'a fait lâchement maltraiter. Pilate connaissait sans doute les traditions qui avaient cours dans le monde païen, d'après lesquelles des fils de Dieu auraient vécu autrefois sur la terre. Cet homme extraordinaire serait-il l'un de ces êtres surnaturels ?

Pilate fait rappeler Jésus et, seul avec lui, lui demande : « D'où es-tu ? Mais Jésus ne lui fit aucune réponse. » (Jean XIX, 9.) Pourquoi ? Était-ce par compassion pour le pauvre et faible Pilate ? Ou plutôt une protestation contre l'injustice dont il venait d'être la victime ?

Ce silence irrite le gouverneur, car le coeur de l'homme est changeant, il passe promptement de la crainte à l'orgueil. « Alors Pilate lui dit : Tu ne me dis rien ? Ne sais-tu pas que j'ai le pouvoir de te faire crucifier et le pouvoir de te délivrer ? Jésus lui répondit : Tu n'aurais aucun pouvoir sur moi, s'il ne t'avait été donné d'en haut : c'est pourquoi celui qui m'a livré à toi est coupable d'un plus grand péché. » (Jean XIX, 10, 11.)

Pilate ne le sait que trop, lui seul doit décider du sort de Jésus. C'est en vain qu'il a reconnu son innocence - c'est en vain que, en témoignage de cette conviction, il se lave les mains publiquement, il ne parvient point à tranquilliser sa conscience.
Peut-être que, dans la suite, le souvenir de cet homme extraordinaire lui sera revenu plus d'une fois à la pensée et une voix secrète lui aura répété : « Tu tenais le pouvoir afin de protéger l'innocence et de faire respecter la justice, tu as commis un assassinat juridique. Tu as lâchement abusé de ton autorité. »

Les dernières paroles de Jésus à Pilate sont d'une beauté saisissante. Comme l'éclair brille dans la nuit sombre, elles font luire la vérité dans le coeur de ce païen : « Ton pouvoir vient d'en haut. Tu n'es qu'un misérable instrument dans la main d'un plus grand. »

Le Seigneur acceptait ses souffrances comme envoyées par son Père. La certitude que c'était lui qui décidait jusqu'aux plus petits détails de sa Passion, lui donnait la force de la supporter avec patience. Son exemple est un précieux encouragement pour nous.
Le poète a dit : « Tu es allé au ciel, Jésus, par la souffrance, et tu y conduis les tiens par le même chemin. » Cette perspective serait effrayante, si nous n'avions pas les mêmes consolations que le Seigneur. Les méchants ne peuvent nous faire de mal qu'autant que notre Père céleste le permet. Nos épreuves, la maladie, la pauvreté, la détresse, nous sont dispensées par la main d'un Dieu qui nous aime. « Les cheveux même de notre tête sont tous comptés. » (Matt. X, 30.) Puisse cette assurance devenir de plus en plus notre force et notre consolation !

Le crime de Pilate est certainement très grand. Mais un plus grand encore a été commis par le souverain sacrificateur, par le conseil et par le peuple d'Israël. Pourquoi ? Parce qu'ils avaient plus de connaissance, parce que c'est leur propre Messie, celui que tous regardaient comme un saint, qu'ils ont assassiné. « Il sera beaucoup redemandé à quiconque il aura été beaucoup donné ; et on exigera plus de celui à qui on a beaucoup confié. » (Luc XII, 48.)

Dans l'éternité, il sera fait une différence entre les récompenses accordées à la fidélité, aussi bien que dans les jugements prononcés contre l'infidélité. « Une étoile est différente d'une autre étoile par son éclat. » (I Cor XV, 41.) L'un régnera sur dix villes, un autre sur cinq. (Luc XIX, 16-20.)

Le plus grand péché, c'est le rejet conscient du Sauveur, le péché « contre le Saint-Esprit qui n'obtiendra le pardon, ni dans ce siècle ni dans celui qui est à venir. » (Matth. XII, 32.) Ce n'est pas le nombre plus ou moins grand de transgressions qui motiveront la condamnation, mais le degré de connaissance. Au grand jour du jugement, le Seigneur n'oubliera aucune circonstance atténuante, mais il ne négligera pas les aggravantes. Que chacun fasse son compte !

XI. LE JUGEMENT

« Depuis lors Pilate cherchait à le délivrer. » (Jean XIX, 12.) Chaque fois qu'il s'entretient seul avec Jésus, le gouverneur romain, convaincu de son innocence, désire le sauver; mais, dès qu'il se retrouve en présence de la foule ameutée et furieuse, sa crainte et sa faiblesse reprennent le dessus. La vue de Jésus ranime son courage, ses bons désirs, sa fidélité au devoir ; mais viennent les ennemis du Sauveur, et son énergie s'évanouit. Les dernières paroles du Christ, pleines de sérieux et de compassion, l'ont tellement impressionné qu'il tente un dernier effort, Il s'avance vers le peuple et lui propose encore une fois de mettre Jésus en liberté. (Marc XV, 9.)
Mais la multitude est lasse de ces indécisions. On n'accuse plus Jésus ; que pourrait-on inventer encore ? C'est Pilate qu'on attaque : « Si tu délivres cet homme, tu n'es pas ami de César, car quiconque se fait roi se déclare contre César. » (Jean XIX, 12.)

Certes Pilate ne s'attendait point à ce revirement. C'est le prendre par son côté faible. jusqu'à présent, c'était contre la méchanceté et la haine des pharisiens que sa conscience et son sentiment inné de la justice avaient à lutter. Maintenant c'est son intérêt personnel qui est en jeu. Il s'agit de sa place de gouverneur romain, de sa position, de sa réputation, de sa vie même ! on l'accuse de protéger un chef de parti, un révolutionnaire ! Il frémit à la pensée du méfiant et capricieux empereur Tibère, sous le gouvernement duquel plus d'un noble romain est déjà tombé, victime de la trahison et de la calomnie.

Le résultat final est facile à prévoir. Lorsqu'il ne courait aucun danger, Pilate n'avait pas eu le courage de prendre franchement le parti de Jésus et de lui rendre la liberté - maintenant que son existence et sa position sont menacées, il osera moins encore. « Pilate mène Jésus dehors, et s'assied sur son tribunal, au lieu appelé le Pavé, en hébreu Gabbatha » (Jean XIX, 13), pour prononcer la sentence qui va livrer le Saint à la croix, donner la victoire à la méchanceté et le couvrir lui-même de honte. Sa conscience tente un dernier effort que ce soit l'expression spontanée de sa pensée ou une parole prophétique - il s'écrie en montrant Jésus : « Voilà votre roi ! Les hurlements recommencent : Ôte-le, ôte-le, crucifie-le. Pilate leur dit : Crucifierai-je votre roi ? Les principaux sacrificateurs répondirent : Nous n'avons. point d'autre roi que César. » (Jean XIX, 14, 15.)

À l'ouïe de ces paroles, Pilate, terrorisé par la peur, se sent vaincu. « Il prit de l'eau et se lava les mains devant le peuple, en disant : je suis innocent du sang de ce juste, c'est à vous d'y penser. » Les juifs lui accordent volontiers cette mince satisfaction, ils en réclament pour eux-mêmes la terrible responsabilité et prononcent cette sinistre parole : « Que son sang retombe sur nous et nos enfants. » (Matt. XXVII, 24, 25,) Pilate fait un signe. La crucifixion va s'accomplir. (Jean XIX, 16.)

On se représente souvent Pilate comme un homme du monde blasé, froid, orgueilleux ; c'est ne tenir compte ni de sa position épouvantable, ni du terrible combat qui s'est livré dans sa conscience. Souvenons-nous qu'il était païen et fonctionnaire romain, et nous ne pourrons lui refuser notre sympathie, en voyant son intérêt pour Jésus et ses efforts pour le délivrer. Ne le jugeons pas d'après nos idées modernes. Deux buts dominaient toute sa vie : garder sa position et obtenir la faveur de son empereur - pour y parvenir il se serait vendu lui-même.
Est-il beaucoup d'hommes chrétiennement élevés qui se seraient conduits mieux que Pilate ? Il est facile de chanter :

Qu'on nous ôte nos biens,
Qu'on serre nos liens,
Que nous importe !
Ta grâce est la plus forte,
Et ton royaume est pour les tiens.

Mais autre chose est, quand le moment est venu, de résister à l'épreuve et de renoncer à tout pour l'amour de Christ. « Voilà votre roi ! » dit Pilate ; je ne pense pas que ce fût par ironie. Je suis plutôt enclin à répéter avec Salomon - « La réponse de la langue appartient à l'Éternel. » (Prov. XVI, 1.) Voilà votre roi ! Oui, Il est notre Roi. Sa puissance et sa gloire seront manifestées à toutes les créatures qui sont au ciel, sur la terre et sous la terre. Sa majesté, sa sainteté, sa sagesse, sont au-dessus de toute pensée ; il commande en maître aux éléments comme aux hommes et aux esprits. Il est grand, le seul grand et sa majesté royale se manifeste avec le plus d'éclat dans ses souffrances et à sa mort.

Les Juifs veulent avoir le dernier mot dans le tragique procès : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants ! » (Matth. XXVII, 25.) Cette parole fait frémir. Le jugement va commencer pour leur nation. Il durera des siècles. Trente-sept ans après, la sentence de malédiction s'accomplira par la destruction de Jérusalem ; les Romains, après en avoir fait le siège, la saccageront et la brûleront, ne laissant pierre sur pierre, et mettant en croix un si grand nombre de prisonniers que le bois manquera pour les pendre. Dès lors les juifs demeureront dispersés aux quatre vents des cieux, jusqu'à ce que le temps des gentils soit accompli, jusqu'au retour du Seigneur.

Le sang de Christ a été répandu. C'est le don le plus précieux que Dieu pouvait faire au monde. Mais, de même que « sa parole ne retourne pas à lui sans effet » (Esaïe LV, 11), Dieu nous redemandera ce sang. Il nous apporte la bénédiction ou la condamnation. « Il nous rachète de la vaine manière de vivre que nous avions héritée de nos pères. » (I Pier. I, 18.) « Il est une source ouverte pour le péché et pour la souillure. » (Zach. XIII, 1.) C'est avec son précieux sang que notre bien-aimé Seigneur Jésus-Christ a payé notre dette, qu'il nous a rachetés de la condamnation et de la mort éternelle. Ce sang ne cesse d'intercéder pour nous et de crier : grâce, pardon, Père, afin que, pour l'amour de son Fils bien-aimé, Dieu nous fasse grâce, à nous, pauvres et misérables pécheurs. Dieu ne recevra dans son sanctuaire que ceux qui seront marqués du sang de son Fils. Par son sang seulement, nous sommes rendus agréables à Dieu et délivrés du pouvoir de Satan.

Quant à ceux qui, connaissant l'Évangile, le laissent de côté et le méprisent, « ils se rendent coupables envers le corps et le sang du Seigneur » (I Cor. XI, 27), ils mettent le sceau à leur propre condamnation. « De quel plus grand supplice pensez-vous que sera jugé digne celui qui foulera aux pieds le Fils de Dieu, et qui tiendra pour profane le sang de l'Alliance ? » (Hébr. X, 29.)


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