Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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(Notre confession de foi: ici)
Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



FRANK THOMAS
SA VIE - SON OEUVRE



CHAPITRE III
MARIAGE. DÉBUTS DANS LE PASTORAT.

 Avant de poursuivre cette étude, il est important de se poser quelques questions touchant la vie spirituelle de Frank Thomas. On peut certifier qu'au moment où nous en sommes parvenus dans notre récit, il était un croyant affermi, et que si le doute venait encore parfois l'effleurer, ce n'était que fortuitement, car pour le fond, il avait passé par la conversion et il était sûr de son salut.
À cet égard, ce passage est caractéristique :

S'il était permis à celui qui écrit ces lignes d'apporter ici un témoignage personnel, il devrait avouer que ce qui le fit autrefois douter de Dieu et de Christ pendant ses études, ce ne fut pas avant tout la science avec toutes les objections qu'elle soulève contre le christianisme, mais l'orgueil de cette science qui lui faisait considérer les autres, moins instruits que lui, comme inférieurs et restés croyants parce qu'ils n'étaient pas capables de penser leur foi. Dieu se retira de lui, Dieu devint de moins en moins réel et vivant dans son coeur et le Christ avec lui, dans la mesure même où le moi orgueilleux triompha, jusqu'au jour où, profondément angoissé, il supplia ce Dieu d'avoir pitié de lui, et dans la mesure même où l'orgueil diminua dans ce coeur brisé et humilié, le Dieu de sainteté en reprit possession (1).

Mais nulle part nous n'avons trouvé la mention d'une crise par lui traversée, d'un moment décisif où il aurait passé des ténèbres à la lumière, comme ce fut le cas pour beaucoup de croyants anciens et modernes, saint Augustin, Luther, Pascal, Wesley, William Booth et tant d'autres. Ce que nous savons cependant c'est qu'à l'époque de ses fiançailles, il était hésitant et songeait plutôt au professorat qu'au pastorat et que ce fut sa fiancée, qui, militante et enthousiaste et ayant passé par une crise de conversion « classique », lui déclara qu'elle n'épouserait qu'un pasteur. Cela le décida à se remettre entièrement entre les mains de Dieu, ce qui eut pour résultat d'affermir, peut-être même de susciter sa vocation.

D'autre part, dans ses discours, il a fait de nombreuses allusions à la conversion soudaine, explosive, illuminant subitement une âme, tel ce passage :

L'entends-tu, lecteur bien-aimé que je ne connais pas et qui cherches encore le pardon et la paix ? Jésus-Christ a tout accompli pour toi et au moment où tu lis ces lignes, si tu t'arrêtes pour te recueillir, ne fût-ce qu'un instant, en lui demandant de te pardonner tes péchés, tu es autorisé à te croire pardonné, justifié, sauvé, à l'instant même, sans que tu aies fait autre chose que de déposer ton fardeau au pied du crucifié. Christ est un si parfait Sauveur que, grâce à lui et à son sacrifice, tu peux, même devant le Dieu saint, espérer paraître un jour, pur, irrépréhensible, si tu t'es laissé purifier par son sang (2).

Il y a là un problème, et peut-être sera-t-il résolu par le passage suivant extrait d'une lettre de Frank Thomas à sa fiancée :

Erlangen, 25 juillet 1886.

Il y a des natures qui, comme Pierre et Paul, sont amenées subitement de la mort à la vie, comme par un éclair rapide qui traverse leur âme en y laissant des traces éternelles ; il y en a d'autres qui, comme Jean ne s'approprient que peu à peu la vérité de l'Évangile ; mais si leur développement se fait lentement peut-être même très lentement, il n'en est que plus solide pour cela ; de même il y a dans la nature des fleurs qui deviennent belles très vite, aux premiers rayons du printemps, elles ne durent pas Si longtemps et sont en général moins belles que celles qui fleurissent lentement, pour lesquelles il faut une longue action du soleil.

Évidemment c'est à lui qu'il fait allusion en parlant de l'apôtre Jean. Élevé dans un milieu chrétien, sa foi se développa lentement mais sûrement.

Le mariage de Louisa Poulin et de Frank Thomas eut lieu à Genève le 8 mars 1887, et le jeune époux ayant été appelé comme suffragant à l'église nationale de Rougemont, le nouveau couple partit immédiatement pour le Pays-d'En-Haut.

Faut-il le dire ? Frank Thomas eut quelque regret de ne pouvoir faire un voyage de noce en Italie, dont il avait dès longtemps caressé le projet, tandis que sa femme qui brûlait d'impatience de se consacrer entièrement au service de Dieu fut ravie de cette aubaine. Enfin, elle allait pouvoir se mettre au travail.
D'ailleurs, aller à Rougemont en ces temps reculés constituait un véritable voyage. On n'y accédait pas rapidement comme aujourd'hui. Il fallait d'abord se rendre en chemin de fer à Bulle, de là on prenait une diligence qui vous conduisait à destination en passant par Château-d'Oex ; cela prenait toute la journée, et l'on se sentait fort loin de Genève dans ces parages montagneux.

On se représente ce joyeux exode à deux, alors que le printemps débutait dans la plaine mais que l'hiver régnait encore dans la montagne. Peut-être même la neige couvrait-elle la contrée quand ces heureux mortels y arrivèrent.
Ils logèrent dans une petite pension située non loin de la place principale « chez tante Rose » où ronflait un vaste poële en faïence.

Pour Frank Thomas qui avait toujours aimé la montagne, ces débuts durent être presque une fête... quel plaisir de se trouver dans cette vallée pittoresque dominée par des champs et des bois de sapins, dans ce riant village, parmi cette population bienveillante !
Puis quel attrait dans le temple paroissial si ancien, où les appels du pasteur réveillaient des voûtes séculaires ! En effet, l'église de Rougemont, dédiée à saint Nicolas, évêque de Myre, fut construite vers l'an 1080 par les moines de Cluny. Elle est d'un style roman très pur, et ressemble, en moins grand, à celle de Romainmôtier. Elle passa en 1555 au protestantisme, lorsque Rougemont fut abandonné aux cantons de Berne et de Fribourg (3). À l'heure qu'il est on se souvient encore avec émotion, dans ce village, de Frank Thomas et de son épouse et lorsqu'il y revint, par la suite, en tournée de prédications, il y rencontra l'accueil le plus enthousiaste. Voici quelques souvenirs de cette courte période rassemblés par Mme Thomas elle-même :

Quelle joie de voir ce cher mari s'enflammer pour la cause du Maître, devenir pressant, et insistant pour lui gagner des âmes, et cette belle jeunesse du Pays-d'En-Haut le suivant par monts et par vaux pour l'entendre et l'entendre encore, et les réunions en plein air..., et les courses de la jeunesse.... et les enterrements qui sont des occasions merveilleuses d'appel !...

Le syndic Cottier me disait : N'en faites pas tant, vous vous abîmerez la santé. Et tante Rose, chez qui nous logions, nous réveillait chaque matin à six heures en criant : « la bascule ! , la bascule ! » (4), car elle nous chauffait depuis le corridor et le bon grand poêle faisait de notre chambre un paradis, tandis qu'au dehors la neige ne s'arrêtait pas de tomber.


À ces souvenirs s'ajoutent ceux d'une ancienne paroissienne devenue une fidèle collaboratrice.

C'est en 1887 que M. Frank Thomas est venu à Rougemont comme suffragant, après la mort de notre pasteur, M. Émile Bovon. M. Thomas fut pour nous un rayon de soleil, nous n'avions pas pensé qu'il put y avoir un apôtre du Christ aussi puissant. Immédiatement après son arrivée il s'est trouvé entouré d'une foule de jeunes gens et de jeunes filles. C'était à se demander comment ce miracle s'était produit.

M. Thomas avait une façon touchante d'attirer les âmes, il nous parlait avec tant d'amour ! Nous n'avions pas été habitués à cette chaude sympathie. Quel plaisir pour nous de l'entourer ; nous le suivions partout dans ses réunions. Il faut connaître Rougemont pour savoir combien de hameaux se rattachent à la commune. Il ne fallait pas faire de jaloux ! Dans chaque endroit on lui offrait une chambre ou une salle d'école pour tenir sa réunion ; les jeunes, les adultes se laissaient gagner par sa chaude éloquence. Tous ceux qui ont eu le privilège de l'entendre en ont gardé un souvenir ému.

Je dois ajouter que Mme Thomas a été une compagne rêvée pour son mari et pour son ministère ; elle avait la foi chrétienne que doit avoir une femme de pasteur. Quand M. Thomas s'occupait des jeunes gens, elle s'occupait des jeunes filles. Elle était si jolie et mignonne, nous nous disputions le privilège d'être assis à côté d'elle. Pour ma part, j'ai gardé un souvenir ineffaçable de ces chers « pasteurs », leur influence a été une sauvegarde pour toute ma vie.
M. Thomas a fondé, à Rougemont, les unions chrétiennes de jeunes gens et de jeunes files ainsi que la Croix-Bleue.


Le séjour à Rougemont ne devait pas se prolonger longtemps, car au bout de quelques semaines, Frank Thomas étant appelé comme suffragant à l'Eglise nationale de Mézières, il dut quitter le Pays-d'En-Haut et sa population attachante, vibrante, émotive, pour se rendre dans le Gros de Vaud.

Mézières est un long village situé à 850 m. d'altitude environ sur l'un des plateaux du Jorat. C'est donc déjà la montagne. Ce plateau est coupé de bois de sapins, planté de vergers, de champs de blé et de pommes de terre, La vue s'étend sur le canton de Fribourg et le Moléson : paysage austère, aux vastes horizons, aux lignes sobres, avec de grandes étendues de ciel, paysage qui n'a pas la grâce et l'éclat de ceux des bords du Léman, mais qui ne manque cependant pas de charme. Les maisons de Mézières sont cossues, elles respirent l'aisance, le temple situé au centre du village, est un vieil édifice bernois de forme arrondie, décoré à l'intérieur des armes d'anciennes familles bernoises. Il est vaste et peut contenir un très nombreux auditoire. Tout auprès s'élève la cure, datant du 17e siècle, avenante avec ses volets verts et blancs. Devant la maison s'étend un jardinet et, derrière, une cour d'entrée ombragée d'un vieux marronnier. Les pièces sont spacieuses, le salon boisé de gris est confortable et le cabinet de travail, un peu en retrait, regarde le Moléson. C'est là que le jeune suffragant s'installa en avril 1887. Dès octobre de la même année, il devint pasteur en charge de la paroisse et il y resta en tout quatre ans et demi.

Si Mézières n'est pas aussi éloigné des centres que Rougemont, ce village n'était cependant pas alors relié à Lausanne comme il l'est aujourd'hui par le chemin de fer de Moudon, et il fallait plusieurs heures de voiture pour y accéder. Mais au moment où le jeune couple Thomas s'y établit, les rigueurs de l'hiver étaient passées, le printemps commençait à poindre.

La paroisse de Mézières est très étendue et comprend, outre le village principal, plusieurs hameaux dispersés dans la campagne environnante. Sitôt installé, le nouveau pasteur se met au travail. Quel rude labeur ! C'était vraiment une terre en friche à laquelle il s'attaquait ; il lui fallut piocher, labourer, semer, sans relâche pour voir enfin se lever la moisson et savourer la joie de récolter de beaux épis. Mais ceux qui l'avaient appelés à cette tâche ne s'étaient pas trompés, car il était bien l'homme capable de l'accomplir.

On pourrait se figurer que les habitants d'un village de montagne assez éloigné de la ville, tel que l'était alors Mézières, auraient été à l'abri de certaines tentations. Hélas ! il n'en était rien, et le nouveau pasteur eut à faire de pénibles découvertes. Si ici et là il trouvait parmi eux de belles âmes, ouvertes aux vérités éternelles et marchant de l'avant, en revanche l'ensemble de la population ne s'intéressait guère aux choses spirituelles et la jeunesse, en particulier, était frivole. Frank Thomas et sa femme souffrent profondément de cet état de choses, si contraire à leur idéal. Ils organisent des soirées récréatives et des courses pour la jeunesse, afin de la détourner de l'auberge et des bals ; ils fondent une Union chrétienne de jeunes gens et une de jeunes filles, une section de Croix-Bleue. Et voici que le niveau moral de la jeunesse s'élève, que des âmes se convertissent, que des réconciliations s'opèrent.
Mais tout cela ne se fait pas sans luttes et sans difficultés. Si une partie de la population est favorable au « nouveau pasteur » il en est une autre qui se trouve fort mécontente d'être dérangée dans ses habitudes et qui lui en veut à mort des réformes qu'il tente d'opérer dans le village. Selon les propres paroles de l'un d'eux, on trouve M. le ministre un peu trop « mômier ». Toutes sortes d'avanies lui sont faites afin de le décourager : on tend des cordes au travers du chemin qui le ramène le soir au logis, on l'enferme dans la salle des conférences et il doit en sortir par la fenêtre ; Mme Thomas elle-même n'échappe pas à ces persécutions et un soir que son mari est absent, de mauvais plaisants lui dépêchent à la cure un ivrogne pour l'effrayer. Mais rien n'arrête les deux apôtres, et la persécution ne fait que redoubler leur zèle. Les pasteurs du voisinage s'alarment, ils conseillent à leur nouveau collègue de songer à son successeur et de ne pas lui préparer trop de travail, mais en même temps ils admirent son courage et son activité. C'est sans doute à cette période de sa vie qu'il a fait allusion dans le passage suivant :

Jamais je n'oublierai le mot que m'adressa un collègue aimé, lorsque j'étais jeune pasteur, il y a bien des années ; je lui avais raconté mes déceptions, je lui avais dit comment, arrivé plein de zèle dans ma paroisse, je n'avais pas été compris et j'avais soulevé contre moi une opposition qui m'attristait profondément : « Cher ami, me dit-il, prenez bien garde, vous risquez de compromettre complètement votre influence si vous laissez l'amertume s'établir et grandir dans votre coeur. Si j'ai un conseil à vous donner, c'est de la combattre de toutes vos forces et sans tarder ». Ce frère avait raison ; il avait mis le doigt sur une plaie cachée au fond de mon coeur et dont je me doutais à peine ; en me parlant avec tant de franchise en même temps que d'affection, il m'avait aidé à remporter la victoire (5).

Nous pouvons nous figurer ce jeune pasteur passant la matinée dans son cabinet de travail et, durant toute l'après-midi, s'en allant par monts et par vaux visiter ses paroissiens. Nous l'évoquons, traversant les prés fleuris au printemps, longeant en été les champs de blé qui ondulent au vent, admirant en automne les arbres chargés de fruits et les couleurs ardentes des feuillages, enfin brassant la neige en hiver. Nous le voyons s'arrêter auprès des ouvriers de la terre et leur parler avec bonté et intelligence de leurs travaux et... de leur âme. Et tandis que se succèdent les saisons, les semences spirituelles sont jetées, elles lèvent, elles mûrissent et la récolte se fait. Ne sont-ce pas peut-être les souvenirs de Mézières qui ont inspiré ces lignes à Frank Thomas ?

Il en est d'autres, enfin, moins nombreux, qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour ouïr, et qui, par suite de goûts acquis ou innés, perçoivent dans la nature une exubérance de vie, dont les autres n'avaient aucune idée. Ils voient non plus des couleurs seulement, mais de splendides tableaux aux délicates nuances, ils entendent non pas des sons avant tout mais des accords superbes : le murmure du ruisseau, le bruissement des feuilles nouvelles, le soupir mélancolique du vent dans les grands arbres de la forêt, le gazouillement, parfois assourdissant, des oiseaux, tout est vivant pour eux, intensément vivant. La nature a une âme, une âme qui palpite et eux, les privilégiés, ils la sentent palpiter, ils communient pour ainsi dire avec elle, ils renaissent à son contact, entraînés qu'ils sont par la résurrection du printemps (6).

On se le représente aussi prêchant dimanche après dimanche dans le temple de Mézières, y attirant une assistance toujours plus nombreuse et prenant conscience des forces qui sont en lui, des dons qu'il a reçus dont il ne se rendait lui-même peut-être pas encore bien compte. Ce fut une période d'apprentissage qui devait le préparer aux grandes luttes de l'avenir.

Mais tout ceci ne représente qu'un côté de son existence, car parallèlement à sa vie extérieure, sa vie de famille se développe. Son union avec sa femme devient toujours plus élevée, toujours plus profonde ; leur mutuelle compréhension va grandissant et ils réalisent chaque jour mieux que c'est bien Dieu qui les a réunis. Mme Thomas s'associe à tout ce que fait son mari, elle lui sert en particulier de lectrice, car il ne faut pas l'oublier, quelque surchargé qu'ait été le ministère de Frank Thomas, il a su garder du temps pour la lecture, estimant qu'un pasteur, pour connaître son époque, et pouvoir influer sur les gens de son temps, doit se tenir au courant de ce qui paraît.
Puis ils ont la joie de saluer la naissance de trois beaux garçons, Auguste (1888), William (1889), Robert (1890). Il est aisé de se figurer tout le travail que représente dans un jeune ménage dont la situation est modeste, l'arrivée coup sur coup de trois enfants. Mais quelle joie, quelle source nouvelle d'expérience !

Les visites du dehors s'annoncent aussi ! C'est d'abord la famille des époux qui vient jouir de leur bonheur, puis de nombreux amis. Le livre d'hôte de la cure est à cet égard très suggestif. Chacun y laisse soit une pensée, soit un verset de la Bible, soit une poésie. Relevons-y deux inscriptions assez caractéristiques qui donnent une idée des hautes inspirations et des travaux pratiques qui s'alliaient à la cure de Mézières :

... Je crois à la communion des saints.
Souvenir du 27 septembre 1887.
GASTON FROMMEL.


C'est une belle perspective
De grand matin
Que des gens qui font la lessive
Dans le lointain.
12 novembre 1887
E. ROSSIER.

La vie à la cure de Mézières est pleinement heureuse, elle est riche d'affection, de travaux, de bonheur donné et reçu.


Table des matières


1 Questions vitales, t. II, p. 186.

2 Questions vitales, t. II, p. 293.

3 La Restauration du temple de Rougemont a été achevée en 1926.

4 Terme populaire qui signifie la clé du poêle.

5 Bonne Nouvelle, 25 avril 1915, p. 340.

6 Bonne Nouvelle, t. I, p. 50.

 

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