Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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JEAN NISSOLLE
SON ÉVASION HORS DE FRANCE
À la suite de la Révocation de l'Édit de Nantes


III
EN PRISON A NÎMES

Le lendemain, nous nous embarquâmes sur l'Isère, et l'on nous conduisit au Saint-Esprit (1), où nous restâmes quinze jours. Ce ne fut pas sans être obligés d'essuyer plusieurs attaques de prêtres et de jésuites. Nous fûmes de là traduits à Nîmes, et après nous avoir ouïs plusieurs fois, on nous condamna aux galères, avec quatre autres prisonniers qu'on avait aussi amenés du Saint-Esprit. C'était Matthieu de Monramé (2), M. Daudé, bourgeois d'Alais (3) et deux proposants. Causse fit abjuration. Nous attendions de jour à autre que la chaîne passât pour nous conduire à Marseille aux galères (4). Cependant on nous garda longtemps, et tous les jours nous avions à soutenir les attaques d'une foule de prêtres, de jésuites et de missionnaires. Le fameux père Gaillard, jésuite, un des plus grands prédicateurs de l'ordre, y perdit ses soins comme les autres. Dieu nous fit la grâce de résister à tous leurs efforts.

M. Cheiron (5), ce fameux apostat, y vint aussi accompagné de M. de la Fare (6), du major et d'un gentilhomme. M. de la Fare nous demanda si nous ne voulions pas nous faire bons catholiques, « selon l'intention, dit-il, de notre bon prince ». Nous répondîmes que nous sacrifierions volontiers nos biens, nos personnes et notre propre vie pour le service de notre bon prince, mais que pour ce qui était de notre religion et de notre conscience, Dieu seul était le maître, et que nous espérions, avec son secours et son assistance, de lui être fidèles jusqu'à la mort. Il nous montra alors M. Cheiron, lequel, disait-il, avait une conscience et une âme à perdre aussi bien que nous. Celui-ci se mit sur les rangs à son tour. Il nous fit un long discours poli et fort étudié, Il voulait nous jeter de la poudre aux yeux et nous persuader qu'il n'y avait pas de différence essentielle entre la religion protestante et la romaine. Il nous dit que la transsubstantiation, le mérite des oeuvres, le purgatoire et le culte des images étaient les seuls articles qui nous séparaient, et prétendit nous prouver que sur ces articles ils étaient mieux fondés que nous. M. Matthieu de Monramé lui répondit : « Ce n'est pas là, Monsieur, ce que vous nous avez prêché. La parole de Dieu sera toujours notre règle, et non pas les chimères des hommes » - « Allons-nous en, dit alors M. de la Fare, laissons ces gens, ce sont des opiniâtres et des obstinés, avec lesquels il n'y a rien à faire. »

Cheiron le pria de le laisser encore un peu avec nous, si bien qu'il demeura seul. Il nous représenta l'horreur de notre prison, la boue, l'eau qui y coulait de tous côtés et une puanteur qu'on ne pouvait supporter. Nous lui répondîmes que nous étions prêts à souffrir même le dernier supplice, si Dieu nous y appelait. Il nous dit ensuite que ce ne fut pas sans beaucoup de peine qu'il se vit obligé de quitter une religion qu'il avait prêchée depuis si longtemps, pour en embrasser une autre qui lui avait toujours fait tant d'horreur ; que cependant, après l'avoir bien examinée, il avait trouvé qu'elle n'était point si horrible que les ministres le disaient ordinairement, puisque, de l'aveu des protestants, elle avait conservé les fondements de la religion chrétienne. Il ajouta qu'il avouait franchement que, s'il nous restait un seul temple en France où l'exercice fût permis, nous aurions raison de ne vouloir point changer, mais que, puisque nous n'avions plus ni temples ni ministres et qu'il était impossible de sortir du royaume, il fallait nécessairement obéir au roi, ou s'exposer à de rudes persécutions, et même à de rigoureux supplices.
M. Daudé, d'Alais, lui répondit que c'était par plusieurs tribulations qu'il nous fallait entrer dans le royaume des cieux, et que les souffrances étaient presque toujours une marque de la véritable Église.
Il dit qu'il fallait se désabuser, et nous allégua quelques exemples pour prouver qu'il y avait de certains temps auxquels il fallait que la bonne religion persécutât la mauvaise, et d'autres auxquels la mauvaise persécutât la bonne. « Ainsi, ajouta-t-il, le plus fort l'emporte ». Il se servit même du proverbe patois qui dit : « Au plus fort la peille ». Cela en fit rire quelques-uns, et scandalisa beaucoup les autres, de voir que cet homme se moquait ainsi de la religion, et la tournait en raillerie. On peut voir en passant l'estime que doivent faire les papistes de ces nouveaux convertis, qui font le plus de grimaces. Après cela, Cheiron sortit fort confus d'avoir si mal réussi (7).

Quelques jours après, nous vîmes arriver sept de nos frères du Haut-Languedoc, condamnés aux galères pour s'être trouvés dans des assemblées. On nous fit souper ensemble. Notre conversation pendant le repas tourna toute sur la piété et sur les souffrances auxquelles nous devions nous attendre de jour en jour pour la cause de l'Évangile. Tous me parurent pleins de zèle, et il n'y en eut aucun qui ne s'estimât fort heureux de ce que Dieu l'appelait à souffrir pour son nom. Nous connûmes bien le lendemain que leur coeur s'exprimait par leur bouche.

Ils entendirent le tambour, et ils s'imaginèrent qu'on assemblait des gens de guerre pour les exécuter. Ils furent d'autant plus confirmés dans cette pensée que M. Daudé, voulant les consoler et les avertir qu'ils devaient partir dans deux heures pour être transférés à Marseille, dit, s'adressant à un d'eux, nommé M. Arnal (8), de Lasalle, qu'ils devaient supporter avec soumission et avec patience tous les maux que Dieu leur envoyait, et qu'il ne doutait point, voyant les marques de leur piété et de leur zèle, que quand ils devraient être exposés, ce jour-là, au supplice, ils n'allassent à la mort avec joie et avec constance, et qu'il fallait toujours être prêt. M. Arnal crut qu'il lui annonçait la mort, et se tournant vers un de ses frères et lui tendant la main, lui dit en propres termes : « Courage, mon frère, il faut aller souper aujourd'hui avec Jésus-Christ. » L'autre répondit avec la même fermeté et sans la moindre émotion « Eh bien, dit-il, Dieu soit loué, sa volonté soit faite il nous fait une grande grâce de nous tirer de la misère et de la souffrance pour nous élever à la félicité éternelle. »

La femme de M. Arnal, qui était présente, entendit une partie de cette conversation ; elle dit à son mari qu'il y avait quelque chose de nouveau, et qu'il lui semblait d'avoir ouï qu'on lui annonçait la mort. « Oui, répondit-il, ma chère femme, il faut se séparer ». Ils s'embrassèrent alors tous deux avec des yeux secs, car les pauvres gens avaient le coeur serré. Je les détrompai l'un et l'autre, et dis à M. ArnaI qu'il n'avait pas bien entendu, qu'on lui avait seulement dit que, quand il faudrait mourir aujourd'hui, il devrait aller à la mort avec joie et résignation. Cela remit un peu cette pauvre femme, à qui le coeur commençait à manquer.

Il est sans doute que l'on peut regarder ces fidèles confesseurs comme de véritables martyrs, puisqu'ils avaient reçu avec joie la nouvelle de leur mort. Ils partirent le même jour, attachés à la chaîne, au nombre de dix-sept, avec un visage serein, et qui marquait la joie qu'ils avaient d'aller souffrir pour les intérêts de leur Sauveur. Toute la ville était presque dehors pour les voir partir, et pour leur faire part de leurs charités. Cependant M. de la Fare commandait aux soldats qui les conduisaient de frapper sur ces pauvres enchaînés, et sur ceux qui voulaient s'approcher de trop près, si bien qu'il fallut se contenter de les exhorter de loin à la patience, et de leur souhaiter la grâce et la bénédiction céleste.

Nous attendions tous les jours d'être conduits en galère avec les autres ; mais on nous dit qu'il était venu un ordre de la cour de nous exiler simplement, parce qu'on n'avait encore envoyé personne aux galères de ceux qui n'avaient pas fait abjuration. Il resta encore avec nous beaucoup de prisonniers. Le plus grand nombre était de ceux qu'on avait pris au Pont-de-Monvert (9) pour s'être assemblés. Après les avoir ouïs, on en condamna plusieurs à la question. On donna la géhenne à cinq hommes en un jour, et, deux jours après, à trois autres. On voulait leur faire découvrir ceux qui avaient assisté à ces assemblées, mais surtout ceux qui y avaient fait la fonction de ministres. Quelque maux qu'on leur fît souffrir, ils ne voulurent jamais déclarer qui que ce fût. Ils confessèrent seulement d'y avoir été ; ils dirent que c'était de nuit, et que leur esprit, occupé uniquement à la dévotion, ne leur avait pas permis de faire attention à personne.
Il y avait alors dans ces prisons plus de cent vingt personnes qu'on y retint fort longtemps, et parmi ce nombre des femmes de quatre-vingts ans, qui à peine pouvaient se soutenir.

On nous changea nous quatre, savoir le sieur Hourtet, Finiel, mon fils et moi, de la chambre où nous couchions, sous prétexte qu'on avait trouvé quelque pierre détachée de la muraille. On nous enfermait tous les soirs, après nous avoir fouillés fort exactement, dans un cachot sale et puant, et dans lequel couchaient ceux qui avaient commis les plus grands crimes. On y fit couler l'ordure des lieux, pour en rendre la puanteur plus insupportable. On nous faisait sortir tous les matins, mais quelquefois le sieur Hourtet et moi y passions la journée entière ; nous étions comme accoutumés à cette puanteur, et elle ne nous empêchait pas de faire nos dévotions avec une joie indicible. C'était particulièrement le dimanche et le mercredi que nous restions dans le cachot. Nous passions ces jours-là dans l'humiliation et dans le jeûne. Nous y chantions les louanges de Dieu à voix haute ; nous y faisions nos prières sans distraction, avec beaucoup de repos. Nous y lisions la Parole de Dieu et des sermons fort consolants, que quelques âmes charitables nous avaient prêtés. Plusieurs de nos frères nous imitèrent dans ces exercices pieux, entre autres M. Matthieu, M. Daudé et les deux proposants dont j'ai parlé.

Ces derniers écrivaient tous les jours des lettres d'exhortation à quantité de bonnes âmes de la ville qui avaient eu la faiblesse de signer. C'était pour les exhorter à tout quitter pour mettre leur conscience en repos, surtout à n'aller jamais à la messe, et à tout souffrir plutôt que de faire des actes de la religion romaine. La bénédiction de Dieu se répandit sur ces lettres. Ces bonnes gens nous venaient voir tous les jours en foule, et nous protestaient qu'ils s'exposeraient désormais à tout plutôt que de faire ce qu'on exigeait d'eux. Dieu leur a fait la grâce de les conserver dans ces heureuses dispositions ; il n'a pas permis qu'on les ait recherchés pour les visites qu'ils nous avaient rendues, et nous voyons aujourd'hui avec plaisir qu'un grand nombre sont sortis du royaume et se sont heureusement relevés de leurs chutes (10).

Une de ces lettres d'exhortation, que M. Matthieu écrivait aux demoiselles d'Audemar (11), prisonnières à Sommières, tomba entre les mains de M. le duc de Noailles ; il l'envoya incessamment à M. le juge criminel de Nîmes, avec ordre de mettre dans un cachot celui qui l'avait écrite. M. Matthieu ne désavoua point cette lettre ; il dit, au contraire que, dans cette occasion, il avait fait à autrui ce qu'il voudrait qu'on lui fît ; que non seulement il avait écrit cette lettre, mais encore beaucoup d'autres, qu'il ne s'en repentait point, qu'il en écrirait toujours tant qu'il aurait la liberté de le faire, et qu'enfin il croirait enfouir le talent que Dieu lui avait confié, s'il ne continuait d'écrire ces sortes de lettres aux pauvres membres de Jésus-Christ.

Le juge et quelques conseillers s'excusèrent sur l'ordre exprès de M. de Noailles, et lui firent des protestations d'amitié. Il n'y eut pas jusqu'au concierge qui ne lui fit compliment en l'enfermant dans le cachot. Nous lui dîmes qu'apparemment la mauvaise odeur du lieu le faisait beaucoup souffrir. Il nous répondit qu'en entrant il l'avait sentie, mais qu'il s'y était d'abord accoutumé. Il ajouta qu'on lui ferait plaisir de le laisser là, qu'il regardait cet endroit comme le lieu de son repos, puisqu'il y pouvait prier Dieu en liberté, y chanter ses louanges et lire sa sainte Parole. Il était ravi surtout, nous disait-il, de ce qu'il n'entendait point renier le saint nom de Dieu, ni prononcer des paroles déshonnêtes, comme il entendait lorsqu'il avait la liberté d'aller dans toutes les chambres de la prison. On le fit sortir de ce cachot, quatre ou cinq jours après. Il était fort aimé de tous. C'était un homme d'une droiture de coeur assurément peu commune, d'une sincérité admirable, et d'une douceur que rien n'était capable d'émouvoir. À son imitation, nous écrivîmes plusieurs lettres à nos familles : nous leur mandions des prières que nous avions composées, selon la circonstance du temps. Nous les exhortions à donner gloire à Dieu, à se relever de leurs chutes, et à s'exposer à tout souffrir pour mettre leur conscience en repos.

Il ne faut pas oublier de remarquer qu'on nous avait un jour enfermés dans un endroit où l'on dit la messe. Nous vîmes entrer tout d'un coup un de ces moines qui demeurent à Saint-Jean, avec M. de Bagars, ministre révolté de Saint-Félix (12). Ce moine nous aborda fort doucement, nous traita de frères, nous dit que nous étions tous chrétiens, qu'il n'y avait pas beaucoup de différence de nous à eux, puisque tous retenaient les points fondamentaux de la religion chrétienne. Il ajouta que nous ne devions point nous alarmer, qu'il ne venait pas pour nous inquiéter, qu'il nous priait de lui accorder un moment d'audience, qu'il voulait nous faire un petit discours, que même il ferait la prière comme nous le pratiquions, après la prédication, et qu'ainsi il ne doutait point que nous ne fussions dans le respect pendant la prière. Un de nous lui répondit que, pourvu qu'il ne s'adressât qu'à Dieu seul, nous ne manquerions pas d'être dans le respect qui est dû à cet Être souverain.

Il nous fit un méchant petit discours, dans lequel il prétendait prouver que les sentiments de l'Eglise romaine étant bien compris et ses mystères bien entendus, il n'y avait ni erreur dans sa doctrine, ni idolâtrie dans son culte, comme les protestants l'en accusent. Il s'efforça de nous montrer la conformité de son Église avec l'ancienne et fit tout ce qu'il put pour nous bien persuader sa religion. Il nous avertit sur la fin de son sermon qu'il allait faire la prière, comme il nous l'avait promis, et nous exhorta à être dans le respect. Nous ôtâmes le chapeau, et nous demeurâmes debout. Il commença par remercier Dieu de ce qu'il lui avait fait la grâce d'annoncer sa Parole, et le pria de la graver profondément dans nos coeurs. Il coupa court et dit d'abord l'Oraison dominicale, qu'il fit suivre de l'Ave Maria. Nous nous couvrîmes alors. Le fils de M. Nuis, conseiller, qui se trouva près du sieur Hourtet et de Finiel, leur fit sauter brusquement le chapeau de la tête, et leur dit d'un ton fort aigre : « Vous nous scandalisez ». Ils relevèrent leur chapeau et dirent tout haut qu'ils n'étaient pas de cette religion qui invoque les saints et les saintes, qu'ils ne pouvaient leur adresser aucune prière ; et que si on n'avait invoqué que Dieu seul, ils seraient demeurés dans le respect.

Après que notre moine eut expédié ses oraisons de la Vierge, ses litanies et son Credo, il vint à nous, et nous dit fort doucement que nous avions tort de les avoir ainsi scandalisés, puisque nous-mêmes lisions bien dans l'Évangile la Salutation angélique qu'il avait dite. Nous lui répondîmes qu'il était vrai, mais que pour ce qui était de l'invocation des saints, il n'y en avait aucune trace dans toute l'Écriture sainte, et qu'au contraire Dieu l'avait défendue fort expressément. Il nous quitta fort mal satisfait, et nous dit, en partant, que nous étions des entêtés et des opiniâtres, et que nous ne manquerions pas de nous faire des affaires.

Le fils de M. Nuis faisait toujours grand bruit ; il nous menaçait de dire à son père le peu de respect que nous avions témoigné ; mais M. Matthieu et M. Daudé lui représentèrent qu'il ne ferait pas bien, que nous étions gens résolus, et d'autant mieux que nous avions raison d'en avoir agi de cette manière. La résolution que nous témoignâmes produisit un bon effet ; car au lieu qu'on forçait à coups de bâton tous les prisonniers qui avaient fait abjuration d'entendre la messe, on nous faisait sortir de la chambre pour ne pas les scandaliser. Il se trouva un prisonnier, nommé Ricart, de Saint-Bauzille, qui, quoiqu'il eût fait abjuration, ne voulut jamais assister à la messe, quelque violence qu'on sût lui faire ; il soutint toujours qu'on l'avait surpris, qu'il avait fait abjuration pendant qu'il était fort malade, ne sachant ce qu'il faisait et qu'il prétendait mourir dans la religion réformée, dans laquelle il avait eu le bonheur de naître. La résolution qu'il témoigna fit qu'on ne l'obligea pas à entendre la messe. Je crois qu'il est à présent en Amérique. (13)

Quelque temps après, M. le juge criminel vint nous dire qu'il avait ordre de nous envoyer à Aiguesmortes, dans la tour de Constance. Il exhorta fort M. Matthieu à s'accommoder au temps, et lui dit qu'assurément nous ne pourrions subsister dans cette tour, à cause du mauvais air et de l'infection qui y régnaient. Il lui répondit que, puisque Dieu l'appelait à cela, il ne fallait pas résister à sa volonté ; que ce même Dieu qui avait créé toutes choses pourrait bien, s'il le trouvait bon, lui rendre cet air favorable pour la conservation de sa santé et de celle de ses frères compagnons de ses liens ; et qu'enfin si Dieu voulait l'affliger de maladie, il recevrait ce châtiment avec patience, sans murmurer et comme venant de sa part.


Table des matières


(1) Pont-Saint-Esprit, sur le Rhône.

(2) Henri de Matthieu de Monramé, avocat de Bordeaux, déporté aux colonies d'Amérique en 1687, mourut dans la traversée. Serres l'appelle le sieur Matthieu, et Issanchon lui attribue les qualités d'intendant et juge de la Duché de Duras (Un déporté pour la foi, pages 52 et 199). Comp. Bull. du prot. franç., t. VI, p. 382.

(3) Il périt aussi dans le naufrage de l'Espérance. Serres dit de lui : « Il était un des prisonniers qui avait resté longtemps à Aigues-Mortes, et qui avait souffert des longues et cruelles prisons. Il était paralytique de la moitié de son corps, et fut si malade dans le voyage qu'il fut aveugle pendant quelque temps ; ce ne fut que quelques jours avant le naufrage qu'il commençait à y revoir un peu. » (Un déporté, p. 80).

(4) On appelait la « chaîne », le cortège de forçats qu'on conduisait aux galères, enchaînés deux à deux, et reliés les uns aux autres par une longue chaîne. Ils traversaient à pied la France, et un grand nombre mouraient en chemin.

(5) Nissolle écrit Chailon. Il s'agit évidemment d'Elie Cheiron, pasteur à Nîmes, qui, le 22 septembre 1685, jour de l'entrée des dragons à Nîmes, fit un discours dans le temple de la Calade, qui se terminait par cet appel pathétique :
« Ah ! jurez que vous resterez fidèles à Jésus-Christ ». Et dans un élan unanime, l'auditoire se leva en criant : « Nous le jurons ». Hélas ! ce bel enthousiasme eut un lamentable lendemain. Dès le 4 octobre, Cheiron et son collègue Paulhan donnèrent l'exemple de l'apostasie, trop fidèlement suivis par la masse des protestants de Nîmes.
Le récit de Nissolle montre que l'on employa sans retard, Cheiron à essayer de convertir au catholicisme ses anciens coreligionnaires. Il dut s'acquitter avec une suffisante servilité de cette tâche répugnante, car il fut nommé premier consul de Nîmes par ordre du roi. Elie Cheiron vécut encore quelques années, en butte au mépris du peuple nîmois.

(6) Le marquis Charles-Auguste de la Fare, commandant des troupes dans le Bas-Languedoc.

(7) On voit par cette intervention, comme par celle de Bagars, mentionnée plus loin, que l'on essayait d'utiliser les pasteurs apostats pour amener leurs anciens coreligionnaires à abjurer. On voit aussi qu'ils se tiraient fort mal du métier de convertisseurs.

(8) Antoine Arnaud, du Cros, arrêté par les dragons près du col des Fosses (commune de Colognac) et condamné aux galères à Nîmes le 3 avril 1686. Mort à la peine le 9 mai suivant. - Le même jugement envoya aux galères Jacques Nadal, de Lasalle, Jean Vidal, de Colognac et Henri Roques, de Caderle.

(9) Ce sont les prisonniers arrêtés pour s'être assemblés entre Grizac et Cassagnas, à la lisière du bois d'Altefage, sur le versant sud du Bougés, le 2 mai 1686. - L'assemblée avait été présidée par le prédicant François DesgrouIx, dit Carny, qui fut envoyé aux galères avec plusieurs autres.

(10) La population protestante de Nîmes, terrorisée par les dragons, avait suivi le mauvais exemple de ses pasteurs Cheiron et Paulhan et avait fait acte apparent d'adhésion au catholicisme. Le témoignage de Nissolle montre que le repentir, chez plusieurs, suivit de près la chute.

(11) Les quatre demoiselles d'Audemar, de Nîmes, furent envoyées en 1687 des prisons de Sommières à l'hôpital de Valence, et finirent par succomber aux tourments du féroce d'Hérapine, la terreur des « opiniâtres » qu'on lui confiait pour les « convertir ».

(12) Louis de Bagars était originaire de Lasalle, dans les Cévennes. Il fit ses études théologiques à Genève, et fut pasteur à Alais, à Saint-Félix-de-Pallières et à Lasalle. À la Révocation de l'Édit de Nantes, il abjura « avec des circonstances particulièrement odieuses, dit la France protestante. La dernière fois qu'il était monté en chaire, il avait lancé l'anathème contre tous ceux à qui la persécution ferait renier le Seigneur, et le jour même il avait été le premier à le renier. Bien plus, il devint un des plus acharnés persécuteurs de ceux qui avaient refusé d'imiter sa lâcheté, et ou le vit, à la tête de détachements de soldats, pour suivre partout les assemblées religieuses. Quelques jeunes gens, pour venger leurs parents et leurs amis exécutés ou envoyés aux galères, allèrent l'attendre sur le pont de Vallongue et l'égorgèrent sans pitié. »

(13) Un François Ricard (ou Richard), de Saint-Bauzille d'Hérault, mourut de maladie pendant la traversée en allant en Amérique sur l'Espérance (Un déporté pour la foi, pages 64, 199). Issanchon dit qu'il était de Lasalle.

 

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