Contes du
Dimanche
Récits
allégoriques
Noël dans le Phare.
PRÈS avoir, pendant soixante ans,
navigué sur toutes les mers, le vieux marin
a pris sa retraite, une retraite active : il
est devenu gardien de phare. Il est maintenant
à l'abri des tempêtes, car la tour
lumineuse qu'il habite est fermement assise sur les
rochers, et bâtie de pierres et de mortier
qui défient l'assaut des vagues. Lorsque,
ses lampes allumées et soigneusement mises
en état, le vieillard redescend l'escalier
en spirale pour s'asseoir dans sa cabine du
rez-de-chaussée, ce n'est pas sans une
profonde impression de bien-être qu'il
s'assied devant sa petite table pour fumer sa pipe
en lisant un bon livre, tandis qu'au dehors le vent
fait rage, et que l'écume des flots vient
rejaillir jusque sur les vitres de sa casemate.
Ah ! c'est qu'il en a vu, le
père Mathurin ! Que de nuits de
Noël se sont passées pour lui sous des
cieux sans étoiles, dans la colère
des éléments conjurés contre
une frêle coque de noix ! Il n'y a pas
que les flots qui sachent de lugubres
histoires : les vieux matelots aussi
pourraient en raconter ! Et il ne faudrait pas
beaucoup taquiner le bonhomme pour qu'il en
commençât une, qui serait suivie d'une
autre .... Le difficile, peut-être, serait de
l'arrêter.
La plus terrible nuit que j'aie passée de
ma vie, ce fut, nous disait-il un jour, une nuit de
Noël, il y a vingt ans ou à peu
près ; j'étais
déjà un des anciens de
l'équipage. On était sur un vapeur,
retour de la Plata ; l'Argentine était
un beau navire, avec une centaine de passagers de
première classe et autant d'entrepont. Nous
étions dans la Manche depuis la veille, nous
avions passé la pointe de Barfleur, et les
feux du Havre étaient en vue, malgré
la brume. Il soufflait un terrible vent du noroit
qui nous poussait plus vite que nous n'aurions
voulu ; mais les transatlantiques, vous savez,
ça se moque du
vent ; nos deux cheminées crachaient
dans la nuit la flamme et la fumée, et la
sirène hurlait de temps en temps comme pour
défier la tempête. Les passagers
n'étaient pas à la noce, pour
sûr ; mais nous autres, en roulant sur
le pont pour la manoeuvre, nous nous disions
tranquillement : c'est le dernier coup ;
demain, on fera la fête en famille ; le
plancher des vaches n'est pas loin....
Voilà-t-il pas que, tout à
coup, le feu se met au navire !
On a prétendu que l'imprudence
d'un chauffeur en avait été
cause ; le fait est que le feu s'était
mis dans les soutes, et qu'il n'y avait nul moyen
de l'éteindre ; il dévorait les
entrailles du vaisseau ; en un rien de temps,
toutes les constructions intérieures :
cabines, salons, cloisons, planchers, tout
s'effondrait. Le pont brûlait sous nos pieds.
Et pendant ce temps, la tempête
augmentait ; le navire, n'étant plus
gouverné, courait sur le dos des lames comme
un brûlot gigantesque ; sûrement,
nous allions être brisés contre les
rochers de la côte, si nous n'étions
pas brûlés auparavant....
Et pendant ce temps-là, le beau
phare de la Hève nous regardait de son grand
oeil clignotant.... Là, tout près,
était la vie, ici, la mort, et quelle
mort !...
Déjà les flammes sortaient
par toutes les ouvertures, et le
pont devenait intenable. Le capitaine donna l'ordre
de mettre les chaloupes à la mer.
Vous dire le désespoir,
l'affolement des passagers sortis en toute
hâte de leurs couchettes sans avoir eu le
temps de se vêtir ni de rien emporter, c'est
impossible. Il y avait là des
généraux comme on en trouve beaucoup
là-bas, dans ces pays américains,
avec des noms qui n'en finissent plus et des
moustaches idem : je vous assure qu'ils
n'étaient pas fiers, ni eux ni mesdames
leurs épouses ! Il y avait des braves
gens qui se tenaient les mains, maris, femmes,
enfants ; ça vous fendait le coeur....
le plus triste, c'était une troupe de jeunes
filles, des danseuses qu'on disait, revenant de
faire là-bas une tournée
théâtrale. Elles avaient amusé
tout le monde pendant la traversée, dansant,
riant et chantant sur le pont pendant toute la
journée.... À cette heure, elles
étaient là, folles de peur, se
tordant les mains, implorant chacun de nous :
« Sauvez-nous ! Sauvez-nous !
nous ne voulons pas mourir ! Nous paierons ce
qu'il faudra ! » Ah, bien oui !
Il s'agissait bien d'argent ! À ce
moment-là, voyez-vous, pas un de nous ne se
fût seulement baissé pour ramasser un
sac de louis d'or.
On mit donc les chaloupes à flot,
et le sauvetage commença. On embarqua
d'abord les femmes et les enfants, puis les
hommes.... Quand tout fut plein,
il y avait encore du monde à bord : le
capitaine, moi et deux ou trois camarades.
- Enfants, nous dit le capitaine,
sauvez-vous si vous pouvez ; vous avez fait
votre devoir ; moi je reste sur mon
navire.
Il n'y avait rien à
répondre : c'était vrai qu'il
n'y avait plus rien à faire, et que, dans
quelques instants, le navire allait
sombrer....
Je m'attachai autour du corps une
ceinture de sauvetage ; mes camarades en
firent autant et nous nous jetâmes à
l'eau, après avoir serré la main du
capitaine.
Je nageai vigoureusement.... Entre deux
vagues, je vis dans les flammes grandissantes, une
vieille femme, cramponnée à un
tronçon de mât. D'où
sortait-elle ? Probablement, on ne l'avait pas
aperçue, en embarquant les passagers. Elle
était restée seule, le capitaine
lui-même avait disparu.... Peut-être
avait-il voulu échapper aux flammes en se
jetant à l'eau, lui aussi.
Quoi qu'il en soit, je vis distinctement
cette vieille femme, qui tenait un livre à
la main et chantait ! Oui, elle
chantait ! Sa voix me parvenait dans les
accalmies du vent ; cette pauvre voix
chevrotante prenait à certains mots une
force extraordinaire, je les entendais nettement:
O Dieu, Rocher de mon Salut....
Ah ! qu'elle me parut grande, cette vieille
femme ! je revis, en pensée, en un seul
instant, les généraux, les grandes
dames, les jolies danseuses, tous se tordant les
mains, implorant le secours, effondrés,
affolés, anéantis - et je leur
comparais la vieille femme, chantant dans son livre
à la lueur des flammes.... D'où lui
vient ce courage ? me demandai-je.
Jésus, mon espoir et ma
vie !
sembla-t-elle me répondre en un dernier
cri. Le navire s'enfonça tout à
coup : plus rien ! En même temps,
une vague énorme m'emporta, me roula, je
perdis connaissance :
« Jésus ! »
criai-je pourtant à ce moment suprême,
où toutes les fautes de ma vie
passèrent devant moi. Ce mot vint de
lui-même sur mes lèvres, bien que je
ne l'eusse jamais prononcé auparavant. Je
connaissais vaguement l'histoire du Sauveur, mais
n'y avais jamais donné mon attention
jusqu'à ce que la vieille femme m'eût
fait entrevoir la puissance de ce nom qu'elle
chantait en mourant.
Au matin, on me ramassa, tout
glacé et meurtri, sur la plage, au-dessous
de la Hève. On me crut mort, comme les
autres, car pas une chaloupe n'était
arrivée au port ! J'étais le
seul survivant de l'Argentine.
Voilà pourquoi vous me voyez
occupé à lire mon livre. J'ai voulu
savoir quelle était la religion de la
vieille femme, et je l'ai trouvée dans ce
livre, qui est la Bible. J'y ai appris que Dieu
pardonne les pécheurs comme moi, et qu'Il a
donné son Fils au monde pour le sauver.
Ah ! si je pouvais chaque soir, en allumant
mon phare, faire briller aux yeux du monde entier
la lumière de l'amour divin !
- Comme un phare, sur la plage,
- Perçant l'ombre de la nuit,
- L'amour de Dieu dans l'orage
- Cherche l'homme et le conduit.
Ainsi chanta le vieux matelot de sa voix
fêlée, tandis qu'au dehors rugissait
la tourmente en cette sombre nuit de Noël.
Histoire du Jour de l'An.
I
' ÉTAIS en chemin de fer, le jour de l'an
189.... c'était un jour terne et
froid ; un de ces jours d'hiver où il
semble que le ciel et la terre se confondent dans
une grisaille mélancolique et
désespérante. Le soleil paresseux
s'était à peine levé, puis,
jugeant que son intervention n'était pas
utile à grand'chose, il s'apprêtait
à se recoucher, sans que personne y
prît garde, tant la différence entre
le jour et la nuit était peu
sensible.
Je voyageais seul, ce qui est toujours
ennuyeux par un jour de fête. Pour comble de
malheur, arrivé à la station de N....
où je devais changer de train, j'appris que
la correspondance venait de partir : j'en
avais pour deux heures à attendre le train
suivant.
Deux heures dans une gare, où il
n'y avait rien à voir,
rien à faire ! Mettez-vous à ma
place, gens heureux qui, en ce beau jour de l'an,
mangez des bonbons autour du feu, et pour qui les
heures passent, légères et rapides,
dans les joies de la famille !
Comme je m'ennuyais ferme dans la salle
d'attente des premières, malgré le
feu clair qui brillait dans la cheminée et
faisait son possible pour me réjouir, le
chef de gare entra et vint s'asseoir près de
moi. Je le regardai sa figure était
avenante, pleine de bonne humeur
« Étrange chef de
gare, » pensai-je.
- Monsieur, me dit-il, le temps vous
parait long sans doute à attendre le
train ?
- Long ? c'est-à-dire qu'il
est interminable ! Il n'y a qu'à moi,
d'ailleurs, que ces choses arrivent : voyager
un jour de l'an et manquer le train
encore !
- Bah.... bah ! vous n'en mourrez
pas. Et si vous voulez, puisque nous n'avons rien
de mieux à faire, je vais vous raconter une
histoire.
- Une histoire vraie ?
- Vraie, Je vous l'affirme, puisque
c'est ici qu'elle s'est passée.
- Allez-y, dis-je joyeusement, tout en
félicitant à part moi la Compagnie
d'avoir à son service un chef de gare d'une
espèce pareille.
II
- C'était, il y a deux ans, au jour de
l'an. La Compagnie avait organisé, je ne
sais plus pourquoi, un train de plaisir pour Z....
Le train était bondé quand il arriva
ici. Cependant, nous avions des voyageurs à
faire partir par ce train-là, et je donnai
l'ordre aux employés de les caser n'importe
où ; l'essentiel était qu'ils
partissent et qu'il n'y eût pas de
retard.
J'allais siffler pour le départ,
lorsqu'un homme d'équipe arrive
essoufflé :
- Monsieur, il y a un voyageur de
première qui est presque fou : il veut
absolument vous parler, et je crois que vous ferez
bien d'aller y voir.
J'allai vers le compartiment
indiqué. Le voyageur en question passait la
tête par la portière et me regardait
venir, rouge de colère :
- C'est une indignité, me
cria-t-il. Je vais me plaindre à la
Compagnie !
- Et de quoi donc ? lui
demandai-je.
- De quoi ? j'ai payé pour
voyager en première avec tous les conforts
et les agréments de cette classe ; et
vos employés font, par votre ordre, entrer
dans mon compartiment quatre misérables
gamines qui, sont sales, ont des
confitures plein les mains, et vont certainement
faire le diable à quatre quand je serai seul
avec elles. Je ne souffrirai pas cela,
monsieur !
Je regardai les « quatre
misérables gamines. »
C'étaient des petites filles, dont
l'aînée avait dix ans à peine,
et la plus jeune deux ou trois. Par quelles
circonstances ces enfants étaient-elles
là et voyageaient-elles toutes seules ?
Je n'eus pas le temps d'approfondir la
question ; mais j'ouvris la portière,
et prenant la plus petite par la main, je leur
dis :
- Allons, mes enfants, venez, ne
dérangeons pas ce monsieur plus longtemps.
Je vais vous caser ailleurs.
Le vieux monsieur se rassit et nous le
laissâmes. J'ouvris la portière d'un
compartiment où se trouvaient une jeune
femme et son mari.
- Seriez-vous fâchée,
madame, demandai-je, si ces enfants voyageaient
avec vous ? Je ne sais vraiment où les
placer.
- Entrez, mes petites, dit la bonne dame
avec empressement. Soyez tranquille, monsieur, nous
les ferons descendre à destination, et nous
veillerons sur elles.
Je la remerciai et me hâtai de
donner mon coup de sifflet.
III
Au cours de ce même hiver, je vis entrer
dans mon bureau un voyageur qui m'interpella
brusquement :
- Ne me reconnaissez-vous pas,
monsieur ? me demanda-t-il.
Je fis appel à tous mes
souvenirs ; mais cette physionomie
m'était absolument inconnue.
- Excusez-moi, monsieur,
répondis-je ; je vois tant de gens ici
chaque jour qu'il m'est difficile de me
rappeler :
- Mais vous devez avoir gardé
souvenir de moi, répéta-t-il avec
insistance.
Je continuai à fouiller dans ma
pauvre cervelle afin de découvrir lequel de
mes bienfaiteurs ou de mes protecteurs je pourrais
avoir devant les yeux.
- Hélas ! monsieur, je suis
obligé de confesser que je n'ai pas
l'honneur de vous reconnaître.
- Quoi ! ne vous rappelez-vous
pas
ce misérable voyageur de première
classe qui vous a injurié parce qu'on lui
avait donné quatre petits enfants pour
compagnons de route ? Ah ! monsieur, si
vous avez oublié, moi, je me souviens !
Comment ai-je pu être si
brutal, si absurdement inhumain ? Nuit et
jour, la vision de ces petits abandonnés me
hante....
En parlant ainsi, mon interlocuteur, que
j'avais enfin reconnu, paraissait
profondément ému ; sa voix
tremblait, ses yeux devenaient brillants.
- Je suis venu, monsieur le chef de
gare, pour vous prier de m'aider à
réparer ma sottise, ou plutôt ma
méchanceté. Avez-vous eu des
nouvelles de ces enfants ?
- Non, monsieur, répondis-je. Ils
ont dû arriver sains et saufs à leur
destination, car autrement je l'aurais su.
- Et savez-vous leur
adresse ?
- Non, j'ignore absolument qui ils sont,
et je ne me rappelle même pas l'endroit
où ils allaient.
- Ah ! s'écria le voyageur,
toujours plus ému, trop tard ! C'est
toujours comme cela.... Monsieur le chef de gare,
je vous demande pardon pour ma brutalité de
l'autre hiver.
- Oh ! répondis-je, n'en
parlons plus, ça va bien.
- Non, non, il faut que j'aie votre
pardon. Donnez-moi votre main, là. Je me
suis conduit indignement, voyez-vous, et je n'aurai
de repos que lorsque j'aurai réparé
ma faute. Mais je vois bien qu'il est trop
tard !
IV
Juste à ce moment, un homme
d'équipe entra dans mon bureau.
- Venez vite, monsieur ! une
femme
morte dans le train !
Nous nous empressâmes, le voyageur
et moi. Dans un compartiment de troisième,
une pauvre femme, toute blanche et raide,
était étendue sur la banquette. Ses
quatre petits enfants l'entouraient en
pleurant :
- Maman est morte, maman est
morte ! sanglotait
l'aînée.
Mon voyageur se précipita dans le
compartiment. Il prit le pouls de la
mère :
- Grâce à Dieu, elle n'est
pas morte, dit-il au bout d'un instant. C'est la
fatigue, l'inanition.... Emportons-la, monsieur le
chef.... Venez, mes enfants ! Dieu merci,
voici une occasion de réparer ma
faute !
Ce disant, il prenait la jeune femme par
les épaules, tandis que je lui prenais les
pieds.... Le fardeau n'était pas lourd....
Nous la portâmes dans la salle d'attente des
premières, suivis des quatre petits.
- Tenez, vous, dit l'étranger
à l'un de mes employés, voilà
de l'argent, allez au buffet, apportez du
café, du lait, des biscuits, du poulet, du
bouillon.... de tout.... pour ces petits et pour
leur mère ! Allez,
dépêchez-vous !... Merci, mon
Dieu! répétait-il tout bas de temps
en temps. Je puis au moins réparer ma
faute.
La pauvre femme ouvrit les
yeux :
- Qu'est-ce qui est arrivé ?
demanda-t-elle faiblement.
- Ça va bien, ça va bien,
madame, ne vous dérangez pas ; dormez
tranquille. Vos enfants sont là, tous
contents.
En effet, les quatre petits
dévoraient les bonnes choses qu'on leur
avait apportées du buffet. Le vieux monsieur
prit dans sa main maladroite une tasse pleine de
lait et voulut l'approcher lui-même des
lèvres de la pauvre femme ; il
répétait sans cesse tout bas :
« Merci, mon Dieu,
merci ! »
Bientôt la mère fut
réconfortée comme les enfants. Elle
n'était pas malade, mais le froid l'avait
saisie, et la faim aidant, elle s'était
trouvée mal.
Le vieux monsieur, avec beaucoup de
délicatesse, lui fit raconter son histoire.
Elle était la femme d'un pauvre mineur qui
était allé à M.... pour
chercher du travail. Il en avait trouvé, et
il avait envoyé de
là-bas un mandat-poste à sa femme
pour qu'elle vînt le rejoindre avec les
enfants. Le mandat-poste avait juste suffi à
payer les dettes criardes et les billets de chemin
de fer : il lui était resté
quelques sous pour acheter du pain qu'elle avait
donné aux enfants avant de partir. Elle
n'avait rien pris depuis la veille :
- Mais ce ne sera rien, dit-elle
courageusement, je vais rejoindre Louis tout
à l'heure, et nous serons heureux, puisque
mon Louis a du travail !
Le voyageur ne dissimulait même
plus ses larmes.
- Pauvre madame Louis, disait-il. Soyez
tranquille, on prendra soin de vous. Je vais
télégraphier à votre mari pour
lui expliquer votre retard, et dans quelques heures
vous l'aurez rejoint. Ayez bon courage, Dieu ne
vous abandonnera pas !
C'était au tour de Mme Louis de
remercier Dieu.
Enfin l'heure du départ arriva
pour elle et ses enfants. Le voyageur la mit dans
son compartiment ; il entassa des friandises
sur les genoux des quatre petits, et tirant
quelques pièces d'or de sa poche il les mit
dans la main de la bonne femme.
- Prenez, prenez, madame, vous en aurez
besoin, en arrivant là-bas. Un de ces jours,
j'irai vous voir.
Et comme la pauvre femme se confondait
en remerciements :
- Remerciez Dieu, madame Louis. Moi, je
ne suis rien.... moins que rien....
Le train partit.
- Pour que mon histoire fût
vraiment romanesque, ajouta le chef de gare, il
faudrait que les quatre enfants fussent les
mêmes dans les deux occasions. Il n'en est
rien. Je n'ai jamais entendu parler des autres.
Ceux-ci, avec leur mère, n'avaient rien de
commun avec les premiers.
- Qu'est-ce que cela fait ? lui
répondis-je. Votre histoire est très
belle, je vous remercie de me l'avoir
racontée. Grâce à vous, mes
deux heures d'attente ont passé sans que je
m'en aperçoive. Je vais écrire ce
récit et je vous l'enverrai. Puisse-t-il
produire dans les coeurs égoïstes un
changement pareil à celui qui s'est produit
chez votre vieux voyageur !
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