Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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Lettres de Direction spirituelle inédites




À Antoine Blanc et aux Vaudois Du Piémont.

IX. – À Antoine Blanc
.

LA GRANDE OBLIGATION DE TOUT CHRÉTIEN. – CE QU’IL FAUT CONSIDÉRER AVANT DE SE MARIER. –
À PROPOS DE L ENTERREMENT D UN ENFANT.

Vars, 29 septembre 1825.

BIEN-AIMÉ FRÈRE EN JÉSUS-CHRIST,

... Il paraît que vous avez l'intention de venir à Briançon dans le courant de l'automne. Je désirerais bien en être informé un peu à l'avance afin de ne pas vous manquer comme la dernière fois.
Je suis bien aise que les Sermons de Nardin vous soient parvenus, je pense qu'ils vous font plaisir. C'est un livre basé et sur la doctrine évangélique la plus pure et sur l'expérience chrétienne la plus profonde et la plus simple (1). Si quelqu'un d'autre en souhaitait j'en aurais encore à votre service ; ils coûtent quinze francs l'exemplaire, pris à Guillestre. On pourrait aussi vous procurer des Sermons de Burder si vous en désirez, et d'autres traités religieux. Il faut semer avec discernement et économie, mais il faut semer et mettre la chandelle sur le chandelier, car si on attend que le vent ne souffle plus, on la tiendra toujours cachée et si on regarde toujours les nuées on ne sèmera jamais.

Si vous avez reçu, ou recevez, ma dernière, vous y trouverez quelques idées sur l'obligation imposée à tout chrétien de répandre autour de lui la lumière qui éclaire son âme, surtout si les ténèbres sont profondes aux environs. Au reste, je ne pense pas que ma lettre puisse être perdue et j'espère même qu'elle vous est parvenue à l'heure qu'il est. En tout cas, je vous répète que j'ai fait la commission relative à notre ami et que j'ai été très alarmé en apprenant qu'il était prêt à former d'autres liens, pauvre Paul ! Ah ! s'il savait quel enfer c'est que d'avoir une femme non régénérée, s'il avait vu et entendu les frères qui sont dans ce triste cas, il y regarderait de plus près, et y eût-il dix fois plus bonnes apparences, il s'en défierait toujours. Au nom de Dieu, au nom de son âme immortelle, conjurez-le d'attendre encore, de venir en France ; je peux lui répondre sur ma tête qu'il sera satisfait sous tous les rapports.

Guillestre, le 1er octobre.

Trouvant une occasion que je crois sûre, je me hâte de terminer ma lettre par une fidèle explication que je vous prie de communiquer à votre voisin Mr. le magister Meille : on lui a dit ici, à ce qu'il paraît, que j'avais refusé d'enterrer la petite de son neveu Michel, sous prétexte que j'étais pressé de partir et qu'on l'avait ensevelie sans moi une heure après mon départ. Ce bavardage ne vaudrait pas la peine d'être relevé, mais comme il tend à me faire accuser de négligence dans mes fonctions, je dois tenir à le réfuter.

C'est un pur mensonge : la petite était morte le samedi matin, j'arrive un peu après, je leur dis : il est bien fâcheux que j'aie convoqué l'assemblée pour demain à Freyssinières, j'aurais bien aimé rester pour cette sépulture, s'il était possible qu'elle se fit aujourd'hui ? On me répondit que cela ne se pouvait guère vu qu'elle était morte seulement à l'aube du jour. Là tout fut terminé et on n'en parla plus du tout. Je partis le même soir pour Pallon, et l'enterrement n'eut lieu que le dimanche ; or, on ne laisse pas en plan une assemblée convoquée, réunie à plus de deux lieues du pays pour enterrer un enfant d'un an.

Je vous salue à la hâte ainsi que tous nos amis, et votre famille.
Si quelqu'un venait en France, je suis en Queyras jusqu'à la Saint-Luc et, ce jour-là même de la foire, je serai à Guillestre, puis à Freyssinières, s'il plaît à Dieu.

Votre dévoué frère en J.-C."*



X. – À Madame Antoine Blanc.

LA VÉRITABLE FAMILLE DU CHRÉTIEN. –
COMMENT LE SEIGNEUR ENTRE EN MATIÈRE AVEC SES ENFANTS. –
LA MAIN QUI NOUS A BLESSÉS DOIT AUSSI NOUS GUÉRIR.

Arvieux, octobre 1825.

MADAME ET BIEN AIMÉE SOEUR EN JÉSUS-CHRIST,

Si nous étions du monde, nous parlerions comme le monde, c'est-à-dire que je débuterais par de grands compliments sur les honnêtetés dont vous m'avez comblé, et l'amitié que vous m'avez témoignée pendant le temps que j'ai passé chez vous. Mais comme chrétien, je dois vous dire que si je conserve un souvenir bien agréable de mon séjour à St-Jean, c'est principalement à cause de la grâce que le Seigneur vous a faite de recevoir sa parole avec promptitude ; car je ne perds pas de vue le but de ma vocation, qui est d'annoncer cette bonne parole. En conséquence, je ne puis considérer que sous ce rapport toutes nos relations, et tous ceux-là me sont étrangers qui n'écoutent pas l'Évangile. Hélas ! combien d'étrangers un citoyen du ciel trouve dans sa patrie, dans son église, et souvent même dans sa propre famille ! Mais si souvent ses proches lui sont étrangers, ceux qui étaient éloignés se sont rapprochés par le sang de Jésus (Ephés. Il : 13, 17, 19). Il trouve des frères, des soeurs, des pères, des mères, des fils et des filles cent fois plus qu'il en a perdu (Matth. XIX : 29), et partout où il rencontre un disciple de Jésus-Christ, il trouve un véritable ami. Peu lui importe qu'il soit blanc ou noir, civilisé ou sauvage, riche ou pauvre, savant ou ignorant : c'est une brebis du bon Berger, un racheté du même Sauveur !

Voilà, bien-aimée soeur, les liens qui m'attachent à vous et à tous ceux qui tendent au même but ; voilà la source de l'affection que je vous porte et de la joie
que j'aurai de vous revoir, s'il est possible. En attendant que j'aie cet avantage, je désire y suppléer de mon mieux par la présente, en vous parlant des mêmes choses dont je vous ai souvent entretenue pendant le peu de jours que j'ai passés près de vous.

Je ne peux pas, il est vrai, me faire une idée bien juste de vos sentiments et de votre état spirituel, mais je ne puis douter que le Seigneur ne vous ait réveillée de l'assoupissement naturel ou tout le monde est plongé, pour vous découvrir dans quelle misérable position nous sommes. C'est toujours par là que le Seigneur entre en matière avec ses enfants ; ces commencements sont souvent bien pénibles, et il serait très possible que vous n'en eussiez pas encore trouvé le bout ; mais, s'il en est ainsi, prenez patience ; il faut que tout ce venin sorte avant d'en être délivrée ; le grand médecin qui nous traite sait bien ce qui nous convient, et jusqu'à quel point il doit faire saigner la plaie de notre coeur. Ayons espérance en lui, et disons, comme David : Quand je t'invoque tu m'entends, quand il est temps tu me consoles (Ps. CXXXVIII). Seulement, prenez bien garde de ne pas chercher de soulagement loin du Seigneur, dans la distraction, la légèreté, en perdant de vue vos péchés et votre misère. Cette guérison-là est pire que la maladie : la main qui nous a blessés doit nous guérir (Osée VI : 1).

Quelque peine que nous éprouvions à nous approcher de Jésus, quelque crainte ou fausse honte qui nous retienne, faisons effort, et jetons-nous à ses pieds comme la Cananéenne ; n'attendons pas une repentance, une humilité, une ferveur qui ne viendra d'ailleurs que de lui, et que nous voudrions lui offrir de nous-mêmes, par un reste de propre justice cachée. Allons à lui tels que nous sommes : on ne saurait trop le répéter, ce mot dit tout ; oui, tels que nous sommes, avec notre esprit léger et distrait, notre coeur orgueilleux, hypocrite, endurci ; non, rien au monde ne doit nous éloigner de Jésus-Christ ; portons lui toutes nos misères, traînons à ses pieds tous nos ennemis spirituels ; sa glorieuse présence leur fera peur et nous en serons délivrés. Considérez que toute pensée, quelque divine et humble qu'elle paraisse, qui tend à nous tenir loin du Sauveur, est une tentation du malin.

Prenez donc courage, bien-aimée soeur, et cherchez incessamment ce bon Sauveur, ce pain de vie, cette source jaillissante en vie éternelle. Persévérez dans la prière, ne puissiez-vous que soupirer ou répéter avec le péager : Seigneur, aie pitié de moi, votre prière sera toujours écoutée ; priez donc, priez ; prosternez-vous aux pieds du Seigneur comme celle dont vous portez le nom ; il vous aime tout autant que la soeur de Lazare : il a souffert pour vous comme pour elle. Choisissez donc, comme elle, la bonne part ; personne ne vous l'ôtera ; oui, cherchez-le de tout votre coeur, ce bon Berger, qui vous cherche lui-même avec tant d'amour ; croyez à sa tendresse, à sa fidélité, heurtez à sa porte jusqu'à ce qu'il se lève pour vous donner le pain vivifiant (Luc XI : 5-18) ; ne vous relâchez point et bientôt, j'en suis sûr, vous trouverez le repos de votre âme ; vous éprouverez que le royaume de Dieu est paix, justice et joie par le Saint-Esprit (Rom. XIV : 17).

J'espère que vous ne tarderez pas à m'annoncer cette bonne nouvelle. S'il en était autrement, dites-le moi, et je tâcherai de vous faire découvrir, parmi cette fange, les traces des solides promesses... Exhortez votre soeur à prier, à lire, à fuir le train du monde ; édifiez-vous l'une l'autre, et, loin de vous laisser quelque autre avec vous. Que le Seigneur vous fortifie et vous garde en sa paix. Amen (2).

En janvier 1826, Antoine Blanc écrivit à son frère André : « Dites à tous les frères et soeurs de vos églises qu'ils prient pour leurs frères, les Vaudois des Vallées, dans les fâcheuses circonstances où ils se trouvent maintenant. Le Seigneur nous visite et veut nous éprouver, pour voir si nous avons reçu la semence en « bonne terre ou dans les lieux pierreux. »

« Les catéchismes scripturaires, ou listes de passages du Nouveau Testament, que M. Neff nous avait laissés, nous sont fort utiles, nous en avons fait plusieurs copies et plusieurs s'en servent. »

André Blanc faisant suivre cette lettre à Neff ajoute : « Je n'ai pu la lire sans verser des larmes, en voyant les grâces que le Seigneur répand sur ces pauvres Vaudois et surtout sur les membres de ma famille. Que Jésus soit avec eux, et les fasse triompher de la rage de leurs ennemis !
Si Christ est vraiment avec eux, ils seront victorieux. » ***



XI. – À Antoine Blanc.

LE SORT FINAL DE CEUX QUI N' AURONT PAS ENTENDU L ÉVANGILE. –
LA CURIOSITÉ INTELLECTUELLE. – LA PRÉDESTINATION.

Guillestre, 16 janvier 1826.

..... Jean Rostan m'a proposé, je crois de votre part, deux questions sur lesquelles il paraît que vous avez eu quelques discussions avec des théologiens. La première, si je ne me trompe, est : si l'efficace du sang de Christ s'étend sur des âmes qui n'ont point pu le connaître, tels que les enfants morts en bas âge, les païens et sauvages qui n'ont jamais ouï l'Évangile, etc...

Il y a ici deux questions : la question de droit et celle de fait. Celle de droit est soutenue par beaucoup de théologiens, tels que celui à qui vous avez eu à faire ; ils prétendent que ceux qui n'ont pu connaître, et par conséquent rejeter le sacrifice du Christ, doivent y avoir part ; ils ajoutent qu'il ne serait pas juste que Dieu les perdît, etc... – Voici, mon cher ami, ce qu'il faut leur répondre :

Si tous ceux qui n'ont jamais ouï parler du Sauveur doivent par cela même y avoir part, Dieu nous a donc rendu un bien mauvais service en nous faisant annoncer son Évangile, puisqu'il nous a mis par là dans le cas de le rejeter ou le négliger, donc d'encourir sa malédiction ; tandis que ceux qui ne l'ont pas ouï ne courent pas ce risque. Partant on fait très mal d'envoyer des Missionnaires aux païens, et les Apôtres eux-mêmes ont eu grand tort de porter l'Évangile où ils ont pu. Il eût été plus sage et plus charitable à Dieu de consommer son sacrifice secrètement, et de n'en jamais rien faire savoir aux hommes, qui se seraient alors trouvés sauvés en entrant dans l'éternité.

2° Cette proposition renferme une contradiction palpable, car vous dites d'un côté que le sacrifice de Christ doit s'étendre à eux, et de l'autre que Dieu ne serait pas juste, s'il les privait du salut. Mais si c'est une injustice de les perdre, ce n'est donc pas une grâce de les sauver, et alors qu'ont-ils besoin du sang de l'Agneau ? Et si Jésus-Christ a souffert pour eux, il a donc souffert injustement, s'il est injuste de les punir ? En deux mots : ils sont coupables et perdus de droit, ou ils ne le sont pas. S'ils le sont, Dieu n'est pas injuste en les laissant périr. S'ils ne le sont pas, ils n'ont que faire d'un Sauveur, et alors vous établissez deux manières d'être sauvé. Ce qui est évidemment contraire à tout l'Évangile (Jean X : 9 ; XIV : 6. Actes IV : 12. Rom. Il : 9, 12, 20, 22 ; V : 12, 21. Galates III : 14, 22, etc...). D'ailleurs, où établissez-vous une ligne de séparation entre ceux qui sont sauvés de droit, c'est-à-dire hors le Sauveur, et ceux qui auront besoin de lui ? À quel degré de lumière l'homme sait-il, ou est-il ignorant ? ou à quel âge l'enfant cessera-t-il d'avoir droit à la vie éternelle, et commencera-t-il à avoir besoin de la grâce ?

Pour moi, je conclus hardiment avec l'Écriture que la race humaine entière est plongée dans la rébellion, et que nous sommes tous de notre nature des enfants de colère. Qu'en conséquence, Dieu ne doit le salut à personne, que tout ce qui est né de la chair est chair, et ne peut ni aimer Dieu ni lui plaire (Jean III : 6. Rom. VIII : 7-8). On ne peut donc, sans blasphémer, dire en aucune manière que Dieu ne serait pas juste s'il refusait le salut à tel ou tel individu d'entre les fils d'Adam et même à tous.

Quant à la question de fait, savoir si Dieu dans sa miséricorde veut bien dans certains cas étendre l'efficace du sang de Christ sur des âmes qui n'ont pu, à cause de leurs circonstances, en entendre parler, et par conséquent croire en lui, tout chrétien sage doit suspendre son jugement et laisser les choses cachées à l'Éternel. Cependant, à ne consulter que l'Écriture, on serait plutôt porté à croire qu'il y a un seul moyen de participer à la grâce de Dieu en Jésus-Christ : la foi (Jean I : 12 ; III : 15, 16, 18, 36 ; V : 24 ; VI : 40, 45, 47 ; VIII : 24 ; IX : 25, 26, et toutes les épîtres, en particulier l'épître aux Romains). On ne peut avoir cette foi sans avoir entendu la prédication de l'Évangile, selon qu'il est écrit : la foi vient de l'ouïe et l'ouïe vient de la parole de Dieu, or comment croiront-ils s'ils n'en ont point entendu parler ? (Rom. X : 14, 17). D'ailleurs saint Paul parle des païens, et établit clairement que leur ignorance ne les justifie point, au contraire, il les déclare inexcusables, et dit que celui qui a péché sans la loi périra aussi sans la loi.

Quant aux petits enfants, nous sommes dans la plus complète ignorance. L'Écriture n'en dit pas un mot, et s'il est quelques passages allégués en leur faveur, j'ai de quoi les mettre bien au clair, et montrer qu'on n'en peut rien inférer. Ici paraît la sagesse de Dieu, qui n'a voulu nous enseigner que ce qui nous était nécessaire, et non contenter une vaine curiosité.

Sachons donc ignorer ce que nous ne devons pas savoir ; croyons que Dieu a pleinement le droit de bannir pour toujours de sa gloire toute la race humaine sans distinction (Rom. III : 22). Croyons que pour y avoir part, il faut être en Jésus-Christ, et que nul ne va au Père que par lui ; et, qu'en conséquence, il nous a accordé une grâce inappréciable, en nous faisant annoncer cette bonne nouvelle ; prions pour qu'elle soit annoncée à tous nos semblables, et faisons pour cela tout ce qui dépend de nous, et quant à ceux à qui il est impossible de la faire entendre, ne prononçons rien, et laissons-les au jugement de leur Créateur.

La seconde question que m'a proposée Jean Rostan est celle de la prédestination, que vous avez trouvée dans les ouvrages de Calvin et dont vous avez, dit-il, parlé à un pasteur. Cette doctrine, reçue par Calvin et par un grand nombre de savants et zélés théologiens, comme fondamentale et essentielle au salut, a été et est encore rejetée et combattue par beaucoup d'autres docteurs non moins éclairés et tout aussi fidèles, d'ou j'ai conclu qu'elle n'est pas essentielle, puisqu'on peut être sauvé et même travailler efficacement à l'oeuvre de Dieu sans la recevoir. Il est donc sage de s'en occuper le moins possible, parce qu'aussi bien vous n'en trouverez pas le fond, et qu'elle a dans le monde des conséquences fâcheuses, surtout quand on en parle à ceux qui n'ont pas encore une foi bien ferme. Ils disent naturellement : Eh bien, si je suis élu, je serai sauvé sans me donner tant de souci ; et si je ne le suis pas, c'est en vain que je ferais tous mes efforts.

Je vous conseille donc de laisser cette question complètement de côté, comme je le fais moi-même, car je n'ai jamais cru qu'il en résultât le moindre bien, et souvent, j'en ai vu arriver du mal ; car, outre celui qu'elle fait toujours au monde, elle excite, parmi les chrétiens, de longues et pénibles divisions, comme je l'ai vu en bien des endroits. Au reste, cela n'empêche nullement de prêcher le salut purement gratuit et de dire aux pêcheurs : si quelqu'un a soif, qu'il prenne de l'eau vive sans qu'elle lui coûte rien. Mais les bornes de cette lettre ne me permettent pas de m'étendre sur une question aussi épineuse, et que l'expérience du chrétien éclaircit mieux que tous les traités.
Que le Seigneur vous fortifie et vous réjouisse par sa grâce. *



XII. – À Antoine Blanc.

À PROPOS D’UN PROCÈS. – PRENEZ CONSEIL DU VÉRITABLE CONSEILLER.

Vars, 7e 4 juillet 1826.

... J'entends souvent parler de votre procès avec vos tantes (quoi qu'il soit toujours au crochet), et je crains bien que toute cette affaire soit finalement nuisible à votre paix spirituelle, car, par ici, elle brouille déjà la famille... De tout cela, je conclus que votre affaire sera longue, contestée et embrouillée, et je vous avoue que j'en suis bien peiné, à cause de l'affection sincère que j'ai pour vous tous.

Je ne sais pas jusqu'à quel point la raideur et la présomption favorable, (c'est-à-dire l'assurance de gain que vous pouvez y mettre) sera avantageuse...
Il me semble que vous feriez bien de réfléchir avec impartialité, ce qui est certainement difficile à l'homme, mais qui ne doit pas être impossible à un chrétien. Prenez en tout ceci conseil, non de la chair et du sang, non de la partie irritable et orgueilleuse de votre coeur, mais du véritable conseiller, de l'Esprit de vie, de sagesse et de paix, qui doit présider à toutes nos actions et même à toutes nos pensées. Rappelez-vous votre sainte vocation et dirigez-vous en conséquence.
Saluez votre chère épouse, votre bonne maman et toute la famille.

Votre dévoué frère en J.C. **


Table des matières

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1. Jean-Frédéric Nardin (1687-1728), destiné contre son gré à la magistrature, par ses parents, ne trouva pas de place à la Faculté de Droit de Tubingue. Il vit dans ces circonstances une invitation providentielle à embrasser le saint ministère, et obtint enfin la permission d'étudier la théologie. Nardin subit fortement l'influence de Spener et de Francke de Halle. À une orthodoxie pétrifiée, ces hommes s'efforçaient de substituer une foi plus intime et une vie religieuse plus intense. Ils réveillaient les âmes par des collegia piefatis ou mufua colloquia, dans lesquels les laïques prenaient la parole aussi bien que les pasteurs, et où l'on insistait sur la nécessité de la conversion et de la nouvelle naissance.

Nardin fut appelé à desservir l'église d'Héricourt (Haute-Saône), mais son zèle lui suscita de nombreux adversaires. Il jugeait en effet sans ménagement les membres du troupeau qui ne fréquentaient pas les réunions d'édification mutuelle. Il attaquait l'impiété du monde jusque dans ses derniers retranchements, couvrant de confusion les pasteurs relâchés.

Il fut destitué, accusé de « singularité, de piétisme et de fanatisme ». Destitué puis réhabilité, il mourut à quarante-et-un ans. Après sa mort, on publia ses sermons sous ce titre :
La prédication évangélique ou sermons pour les dimanches et les fêtes principales, qui eut cinq éditions, la cinquième en 1910.

Ces sermons, d'une très grande simplicité, ne visaient ni à l'éloquence, ni à l'élégance de la forme, mais ils édifièrent bien des âmes puisqu'ils furent réédités à cinq reprises.
On comprend que Neff devait particulièrement apprécier Nardin. N'eurent-ils pas mêmes méthodes et même doctrine 
?
2. Lettre extraite de : Aimé Marchand : Félix Neff missionnaire et prédicateur. (Thèse de Montauban, 1868), p. 34.

 

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