Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LA VIE DE JOHN ET DE BETTY STAM





CHAPITRE VII

Fidèles dans les petites choses

Jusqu'au moment de leur mariage, un an plus tard, les jeunes gens ne se revirent plus. Lui, avait remonté le fleuve Yangtsé, par vapeur, jusqu'à Anking, où il était entré à l'école de Langue pour apprendre le chinois. Il s'y trouvait une trentaine d'étudiants.

De son côté, la jeune fille avait enfin gagné Fowyang, en compagnie de M. et Mme Glittenberg, nommés à ce poste. Le voyage, depuis Shanghaï, s'était accompli en chemin de fer, d'abord, puis en autobus. Il avait duré plusieurs jours. M. et Mme Hamilton, les seuls étrangers demeurant dans la ville, donnèrent aux voyageurs la plus cordiale des bienvenues. Quelques jours plus tard, Betty écrivait :

« ... John est au sud-est d'Anhwei, et moi, au nord-ouest. L'immense fleuve Yangtsé coule entre nos deux districts, qui offrent comme terrain et végétation des oppositions très marquées. Là-bas, on mange du riz ; ici, on nous sert des nouilles. Au sud, ce sont des champs de riz verdoyants ; ici, des champs de blé brûlés et desséchés. Et, tandis que nos plateaux sont tout ce qu'il y a de plus uniforme, la contrée méridionale est agréablement coupée de collines et de vallées. »

Cependant, dans ce pays du Nord, d'apparence si desséché, Dieu répandait d'abondantes bénédictions spirituelles. L'oeuvre missionnaire qui, depuis assez longtemps, semblait végéter, avait commencé de s'étendre après 1925, au cours des années troublées qui suivirent. En 1927, après l'expulsion des étrangers, l'oeuvre d'évangélisation avait été poursuivie uniquement par des Chinois. Ceux-ci montrèrent beaucoup de zèle ; et, malgré les dangers que faisait courir le parti Communiste, et son opposition aux chrétiens, ils rendirent un très courageux témoignage, sur lequel reposa la bénédiction divine. Aussi, quand les missionnaires Costerus et Hamilton purent retourner dans leur champ d'activité, s'attendant à n'y trouver que des ruines, des chrétiens découragés et dispersés, quel ne fut pas leur étonnement en constatant que Dieu avait fait son oeuvre merveilleuse dans tout le district de Fowyang.

Dans la ville même, il y avait une congrégation de deux cent cinquante membres, et, chaque dimanche, le service habituel était suivi d'une réunion d'Activité Chrétienne pour les jeunes. Après quoi [le dimanche qui suivit le retour des missionnaires], il y eut un service de baptêmes : onze hommes et quinze femmes rendirent publiquement témoignage à Christ. Puis ce fut le service de Sainte Cène auquel quelque quatre-vingts personnes prirent part avec une joie débordante. C'étaient des gens qui tous avaient passé par de grandes tribulations.

Dans un autre centre d'activité missionnaire, plus au Nord-Ouest, où la persécution avait également sévi, les chrétiens étaient devenus comme de flamme, et leur témoignage avait été béni pour la conversion des indifférents et celle des incrédules. Là, soixante et onze personnes des deux sexes, avaient été instruites des vérités chrétiennes. Après examen, les missionnaires les admirent au baptême.

« La manière dont elles répondirent aux questions que je leur posai, écrivit M. Costerus, me révéla leur connaissance merveilleuse des Écritures et du chemin du salut. »

L'esprit du Réveil soufflait sur tout le district ; les chrétiens se réunissaient entre eux, chaque semaine, pour l'adoration et la louange. Une veuve fidèle avait été un instrument de bénédiction pour les convertis de son milieu ; elle les avait réunis chez elle, régulièrement, et quelques-uns dirigeaient déjà des services le dimanche. Cependant, un grand nombre de jeunes avaient besoin d'être instruits, et les missionnaires étaient débordés par la tâche. Au sujet de deux villages et des groupements de chrétiens qui s'y trouvaient, M. Costerus écrivait :

« Ceux qui, dans ces villages, se sont tournés vers le christianisme, ne savent en définitive que peu de chose, hors chanter et prier... Mais le Seigneur agit au milieu d'eux. On parle d'eux, en les qualifiant de brebis sauvages, mais s'il en est ainsi, c'est parce qu'il n'y a personne qui s'occupe de les instruire... »

Il est facile de s'imaginer la reconnaissance et la joie des missionnaires qui avaient pu, enfin, retourner dans leur champ d'activité. Les Glittenberg remplacèrent les Hamilton dont le temps de congé était arrivé. Betty Scott et sa compagne Katie Dodd furent désignées pour l'École de filles, où la directrice, Miss Nancy Rodgers, leur donna la plus chaude des bienvenues.

Cette année-là, des centaines de chrétiens se réunirent à Fowyang pour la Conférence d'automne, espérant d'y recevoir de grandes bénédictions. Miss Rodgers, après un temps d'absence, revint aussi à cette occasion.

« Nous avons été heureuses de la revoir, écrit Betty, et la joie des Chinoises étaient sans bornes. Elle ramenait avec elle de Süancheng une Miss Chiang, qui prit la parole dans plusieurs réunions. Beaucoup de chrétiens étaient venus de la campagne, et il devait y avoir au moins huit cents auditeurs, car l'église était absolument bondée... »

À l'occasion de cette Conférence, quatre-vingt-deux baptêmes furent célébrés, et parmi ceux-ci, il y eut le baptême d'un vieillard de plus de quatre-vingts ans. C'est au sujet de ce vieillard que Mme Glittenberg écrivit ce qui suit :
Quand, après le baptême, il retourna à la maison, le fils dont l'inconduite l'avait fait beaucoup souffrir, vint lui dire :

« Maintenant, il n'est plus possible que nous vivions tous deux dans la même maison ! » Il se considérait comme trop profondément enlisé dans le péché pour pouvoir espérer d'être sauvé. Mais le père le persuada d'accepter qu'on priât pour lui. Des anciens de l'église se rendirent alors chez ce vieillard, à sa requête et à celle de son fils. Ils lui parlèrent, ils prièrent avec lui, et le fils trouva la paix et la joie du pardon en Jésus ; il saisit le salut. »

Comment continuer à s'occuper de leçons quand il y avait tant d'occasions précieuses d'annoncer le Sauveur ! D'ailleurs, Betty et sa compagne, Miss Dodd, n'avaient pas attendu la Conférence pour commencer des visites dans la ville elle-même, et pour entreprendre, aux alentours, une tournée d'évangélisation. Pour Betty, c'était là une expérience toute nouvelle ; et voici l'extrait d'une lettre qu'elle écrivit à son frère à cette occasion :

« Anwhei est la région la plus plate qu'on puisse imaginer. C'est presque comme l'Océan quand il est tout à fait calme. Ici et là, un bouquet d'arbres et quelques maisons qu'on ne peut voir de loin, car les maisons sont faites de boue, et les arbres sont tellement couverts de poussière - comme le reste - que tout se confond. Parfois, ce qui nous signale une maison, ce sont les paquets de piments rouges suspendus aux murs pour y sécher. Cela, et les persimmons, arbres dont les feuilles changent de couleur, de sorte que chacune d'elles a une teinte différente : orange, rouge, verte, voilà les seules taches coloriées du paysage. Partout, les gens étaient occupés à la récolte des patates (sortes de pommes de terre sucrées, aux teintes rose-gris), qu'ils retiraient de ce qui paraissait être un amas de poussière. Un petit âne passe-t-il sur la route en trottant ? Il soulève des nuages de poussière qu'on aperçoit à plusieurs kilomètres de distance. Parfois, nous longions le fleuve qui semblait presque bleu, et qui, en cet endroit, s'est ouvert un lit au milieu de rochers abrupts.

« Les hommes de notre ricksha (1) allaient lentement. La route était très mauvaise, et les pneus des roues n'étaient pas neufs, ni à air comprimé. On les avait entourés de bandages, et les hommes s'arrêtaient de temps à autre pour les examiner et les nettoyer, craignant de nouvelles déchirures.

« Vers 2 h. 30 nous nous arrêtâmes pour le dîner Ce n'était pas un endroit pour villégiatures, mais un village où se tenaient les marchés : on y venait de tous les environs, et parfois de très loin. Hommes, femmes, enfants étaient là avec leurs denrées, marchands et marchandises couverts de mouches. Quand celles-ci nous aperçurent, elles virent rouge probablement ! et se précipitèrent sur nous. Ainsi firent les gens. Nous nous retirâmes dans la petite cour intérieure d'une auberge, construite en boue. Là, nous fûmes suivis par la foule qui se précipitait sur nous, comme si nous avions été des balles de rugby. Notre hôtesse essaya de chasser les curieux, disant à haute et forte voix que nous n'étions que des êtres humains comme eux. Mais eux, continuaient de se faufiler dans tous les recoins imaginables formant plusieurs rangées tout autour de nous. »

« Cependant, l'hôtesse, bien décidée à préserver ses clientes des empiétements de la curiosité, dans la mesure du possible, s'excusa d'avoir à les conduire dans une cour intérieure d'où elle les fit passer dans une autre chambre de pisé.

« Là, fermant la porte sur nous, elle nous laissa avec notre repas et nos baguettes dans une obscurité presque complète, si bien que nous ne pouvions savoir si nous mangions aussi des mouches. Cependant, ceux qui avaient pu pénétrer à notre suite étaient aussi enfermés ; nous apercevions leurs yeux brillants ; sans doute nous étions pour eux le plus passionnant des spectacles ! Tout le temps, nous n'avions cessé de distribuer des traités, et la femme de la Bible qui nous accompagnait donnait elle-même toutes les explications nécessaires.

« Le soir venu, nous nous arrêtâmes dans un autre village où se trouvaient quelques chrétiens, et un lieu de culte. Ces braves gens n'étaient pas plus propres que les autres, mais ils se montrèrent si affectueux, si aimables ! Ils nous apportèrent de l'eau chaude, des cacahuètes bouillies, et bien d'autres choses. Pour la nuit, nous nous installâmes dans la mansarde, au-dessus de la petite chapelle. Katie, ennuyée par les rats, descendit sa literie par l'échelle, et s'installa sur des bancs dans la chapelle. Quant à moi, je me débattis avec de plus petites choses que les rats, aïe ! »

« Le lendemain, nous arrivions à Yingshan, ville plus importante, et dont nous aperçûmes les remparts de très loin. Aucun missionnaire n'a jamais vécu ici, que je sache. La maison de la mission n'est pas située dans les rues principales ; une ravissante porte en forme de lune donne accès sur la cour intérieure. La propriété est habitée par un évangéliste chinois et sa famille. Partout, séchant au soleil, des navets et des chevrettes (sorte de grosse crevette d'eau douce). Sur chacune d'elles, des collections de mouches... »

Cet avant-poste n'était pas situé dans la région où s'étaient produites de nombreuses conversions ; et on espérait qu'avant longtemps, Betty et sa compagne pourraient s'y installer pour s'occuper des femmes et des enfants. Betty Scott se réjouissait beaucoup à cette perspective.

« Cette ville me semble extrêmement bien choisie pour notre future activité, écrivit la jeune missionnaire. Jusqu'ici, presque rien n'a été fait parmi les femmes, et le petit nombre de celles qui ont entendu quelque chose de l'Évangile désirent ardemment apprendre à lire pour étudier la Bible. De façon ou d'autre, leurs coeurs ont été préparés. Il en va de même des enfants. Garçons et filles de l'école, et même ceux qui ne savent pas lire, rayonnent de joie à la pensée que nous devons revenir pour les instruire. Ils sont venus en foule, tout le temps que nous avons été là, et nous leur avons enseigné tous les versets de tous les cantiques chinois que nous connaissions nous-mêmes. Ils les répétaient des centaines de fois, pour s'assurer de les bien savoir...

« Quelques-uns des tout petits étaient vraiment délicieux ils étaient si candides, si affectueux, pas encore contaminés par le mal... Comme leurs yeux brillaient ! Ici, personne en retard pour l'École du Dimanche ; personne non plus qui, l'école terminée, se précipite pour aller à la maison. Ils allaient chez eux pour manger, mais pas tous à la fois. L'évangéliste eut trois services, et l'après-midi une réunion spéciale pour enfants, de sorte qu'il y eut foule toute la journée. Les enfants n'avaient rien d'impertinent ni d'effronté. Ils étaient intéressés et enthousiasmés. Nous avons fait une abondante distribution de traités. Quant à Miss Liu, elle se multipliait pour évangéliser les femmes, allant de groupe en groupe. Il y avait de quoi perdre la tête. Tous désirent que nous revenions vivre avec eux, afin de leur enseigner la Bible. »

C'était là un voyage épuisant pour les jeunes missionnaires qui n'étaient pas encore accoutumées au milieu : langage, nourriture, grandes foules ; tout cela était nouveau pour elles. Mais elles se trouvaient si heureuses d'être enfin en pleine activité, même momentanée !

À son fiancé, la jeune fille écrit :

« Oh John, si vous aviez vu cette affluence de gens, hier, après notre arrivée ! Ils pénétraient dans la chapelle, dans, la cour, dans notre chambre, partout ! Et, dans cette foule, il y avait les plus délicieuses jeunes filles qu'on puisse voir, de très nombreuses femmes, des étudiants, des enfants. Nous avons donné notre provision de traités, et notre « femme de la Bible » ne cessait de parler aux uns ou aux autres. Katie et moi nous nous sommes aussi essayées à dire quelques mots. À un moment nous avions un auditoire de cinquante à soixante personnes, et les gens ne cessaient pas d'aller et venir, Nous les avons tous invités à venir aux services du dimanche.. Comme il nous tarde de pouvoir commencer des cours bibliques pour les jeunes filles qui ont une certaine instruction, et d'autres réunions pour les femmes et les enfants !

« Ce matin, l'évangéliste nous a conduites dans les maisons où se trouvent des chrétiens, et chez ceux qui désirent se faire instruire. Oh que de travail à faire ! Pensez à cela Il n'y a jamais eu de missionnaire à demeure, en cette ville : ni homme, ni femme ! Et je crois bien qu'à l'exception de Mrs. Ferguson, on n'y avait point vu de femme de race blanche jusqu'à notre visite. Or, c'est une grande ville, tout entourée de remparts. »

Ce n'est pas sans quelque inquiétude que John Stam suivait en pensée sa fiancée, dans un district que parcouraient encore quelques bandes de brigands. Inquiétude que justifia, peu après ce voyage, un pénible incident.

La plus jeune enfant des Glittenberg, un délicieux bébé, tomba gravement malade. C'était la dysenterie. La seule chance de salut semblait être de gagner l'hôpital le plus proche. Mme Glittenberg entreprit donc le long voyage en autobus, avec la petite Loïs ; voyage qui, normalement, dure un jour. Malheureusement, une bande de soldats déserteurs arrêta la voiture ; tous les voyageurs reçurent l'ordre de descendre sans prendre leurs bagages. En vain, Mme Glittenberg supplia qu'on voulût bien lui laisser le petit sac contenant la médecine pour l'enfant et quelques objets nécessaires. On le lui refusa. Sans doute était-ce quelque chose de précieux puisqu'elle insistait pour le garder. Puis il fallut beaucoup de temps pour trouver un « ricksha » afin de pouvoir continuer le voyage. Mme Glittenberg avait heureusement un peu d'argent cousu dans sa robe, et elle put payer la dépense supplémentaire. Mais les délais, la fatigue, le froid, dépassèrent l'endurance du bébé, qui mourut à l'hôpital. Au sujet de ce deuil, survenu au mois de novembre, et de l'esprit de soumission chrétienne des parents, Betty écrivait quelques jours plus tard :

« Ici, dans cette Oeuvre il faut tout remettre à Dieu, les enfants y compris, et avoir l'intime conviction qu'Il dirige toutes choses pour le mieux et selon sa volonté. »

Quelques semaines plus tard, le 11 décembre, nouvelle alerte. C'était à la station missionnaire, cette fois. Voici ce que Betty écrivit alors à son fiancé, à propos de cette affaire :

« 11 décembre 1932.

« Aujourd'hui, je ne suis pas allée à l'église et, vers midi, je me rendis chez les Glittenberg pour le déjeuner. Milton est malade depuis la mort du bébé. Il semble que ce soit la rougeole. Mrs. Glittenberg était restée près de lui, et les autres étaient au temple, excepté le cuisinier, revenu un peu plus tôt pour libérer notre vieux concierge.

« À 2 heures de l'après-midi, le service n'était pas encore terminé, deux soldats se présentèrent et commencèrent à s'installer. Le cuisinier leur fit probablement quelques observations ; ils le battirent. Celui-ci courut alors jusqu'à l'église pour appeler le concierge, et Mr. Wang qui enseigne à l'école des filles. Entre temps, j'étais allée parler aux soldats, leur expliquant que les locaux étaient occupés par une pension de jeunes filles, par des missionnaires et quelques autres personnes, voulant leur faire entendre par là qu'il n'y avait point de chambres libres pour eux. Malgré cela, il était évident qu'ils n'entendaient pas se retirer, et j'avais déjà averti Mrs. Glittenberg quand le cuisinier revint avec notre concierge et Mr. Wang. Le service se terminait et nos jeunes filles rentrèrent à leur tour. Peu après, survenaient deux compagnies de soldats (environ 60 hommes) qui s'installèrent dans les classes après en avoir enlevé tables et pupitres qu'ils empilèrent dans la cour. Vous pouvez imaginer la situation.

« Naturellement, il n'est pas convenable que des soldats s'emparent ainsi de locaux ; même si Nancy Rodgers et les élèves restaient au second, il était à craindre que les uns ou les autres se permissent quelque incursion aux étages supérieurs. Que faire ? Mr. Glittenberg était allé chercher les enfants à Shanghaï, pour les fêtes de Noël ; le pasteur faisait une tournée de prédications, et Mr. Ho venait de rentrer avec la tente, après une série de réunions d'évangélisation. Poliment, mais avec fermeté, Mr. Ho expliqua la situation, essayant d'obtenir le retrait de la troupe.

« Je me rendis alors jusqu'à notre petit logement, près du temple, pour voir s'il n'avait pas aussi été envahi par les soldats. Tout était calme de ce côté-là. Comme je revenais, je dépassai Mr. Ho qui arrivait près du Yamen, la demeure du résident chargé du district. Il allait s'adresser au grand chef, qu'il rencontra près de sa porte. Celui-ci se montra très aimable ; il écouta Mr. Ho, et promit qu'avant la nuit les hommes auraient quitté des locaux qui, manifestement, ne leur convenaient point.

« À ce moment-là, les soldats avaient commencé de se promener un peu partout : dans la cuisine, au second, etc... Aussi, avec quelle joie nous entendîmes Mr. Ho nous dire les résultats de sa démarche. Cependant, nous continuâmes à prier. Les gens peuvent revenir sur leurs promesses, et trouver des excuses s'ils le désirent. Tandis que nous priions, un coup de sifflet strident retentit ; aussitôt, les soldats sortirent et s'alignèrent sur deux rangs qui allaient presque de notre porte jusqu'au portail extérieur sur la rue. Et, en bon ordre, tous quittèrent les bâtiments de la Mission.

« Alors, Mr. Ho, Mr. Wang, l'instituteur, le concierge, le charpentier, le petit chevrier, le cuisinier, les pensionnaires et nous aussi, tous, ébahis, joyeux et reconnaissants, nous remerciâmes Dieu à plusieurs reprises, comme vous pouvez le comprendre... »

En commentant ces incidents, John Stam écrivait à ses parents :

« Je suis tout particulièrement heureux que Betty prenne ces choses si calmement. Mais ces détails vous aideront à comprendre la situation et à prier pour elle et pour nous deux quand nous aurons notre poste missionnaire. On ne sait jamais ce qui peut arriver ; mais nous savons que l'Éternel Dieu règne. Sur toutes choses, ne vous faites point de souci à notre endroit. »

Puis il transcrit un poème qu'il vient de recevoir, et que lui a envoyé le professeur Scott ; poème inspiré par la mort d'un missionnaire, assassiné par des soldats irréguliers, lesquels se livraient au brigandage ; il s'agit du missionnaire J.-W. Winson. Comme les brigands le menaçaient de leurs armes, lui demandant s'il avait peur, il répondit : « Non ! Si vous me tuez, je vais droit au ciel ! » Aussitôt, les brigands le mirent à mort (2). Et en terminant sa lettre, John Stam écrivait :

« Nous pouvons bénir Dieu qui jusqu'ici nous a gardés. Si nous devions aussi mourir pour lui, nous jouirions ainsi beaucoup plus tôt des joies de la Présence du Sauveur, et nous aurions moins longtemps à combattre contre le péché et Satan. Aujourd'hui continuons à louer Celui duquel découlent toutes les bénédictions. »

À Anking, où il étudie le chinois, le jeune missionnaire fait l'expérience des secours de Dieu en réponse à la prière. La langue lui semble difficile ; cependant ses lettres expriment la joie et la confiance en Dieu. La fidélité dans les petites choses, qui l'avait déjà caractérisée en son jeune âge, est encore plus évidente maintenant, par la manière dont il s'acquitte de son emploi du temps, et la façon dont il fait chaque chose. Il remarque que sa santé s'améliore, du fait qu'il se lève de très bonne heure et qu'il prend de l'exercice physique. Les étudiants pouvaient difficilement sortir. On craignait que ce groupement de jeunes n'attirât l'attention, qu'il n'excitât la méfiance et ne provoquât quelques rumeurs dans la ville. Aussi fallait-il y remédier par de nombreux exercices à l'intérieur du collège... John eut la joie de passer ses examens de langue chinoise après quelques mois d'étude :

« Hourrah ! écrivit-il le 18 mars 1932. Ce matin, j'ai terminé le dernier de mes trois examens... Que le Seigneur soit béni, car il m'a aidé, ce dont j'ai en le très vif sentiment... Mercredi, je passe l'oral qui consiste en une lecture de passages donnés, et une conversation avec le pasteur, lequel n'est pas l'un de nos professeurs habituels. Dimanche, c'est moi qui ferai le culte en chinois ; le texte choisi est Jean 5: 15-23. Je suis heureux que le sujet proposé ne soit pas plus abstrait... »

« 25 mars 1932.

« Quand, à notre arrivée ici, nous avons lu ce que disait Hudson Taylor, à propos de jeunes gens qui avaient pu prêcher en chinois au bout de six mois, nous avons souri. Eh bien ! exactement cinq mois et un jour après mon arrivée, j'ai pu donner une première méditation ! Que Dieu en soit loué !

« J'imagine que les réunions d'évangélisation à Paterson m'ont rendu un très grand service, et j'en recueille aujourd'hui les fruits. Quelle joie d'avoir pu parler et présenter en langue chinoise quelques idées que, manifestement, les auditeurs ont comprises. Comme je ne me sentais pas encore capable de prier, j'ai demandé au pasteur de le faire à ma place. Or, celui-ci dans ses requêtes, a touché aux divers points de mon message. Donc, il l'avait compris, même s'il l'a répété pour ceux qui, peut-être, n'avaient pas tout saisi. »

On attendait à Anking la visite du directeur général de la Mission pour examiner avec lui les besoins de l'Oeuvre missionnaire, et attribuer aux jeunes leurs champs d'activité respectifs. Comme la C.I.M. travaille dans quinze provinces de la Chine proprement dite et dans les pays vassaux, et que les besoins ici et là sont très divers, il y a bien des questions a examiner en corrélation avec la désignation des postes qui doivent recevoir du renfort sans délai. Pour les jeunes missionnaires, ce sont des heures solennelles. Tout l'hiver, ils ont prié, pour les sphères respectives d'activité qui leur seront dévolues. Déjà, ils savent quelque chose de l'oeuvre missionnaire et de ses difficultés ; et le Directeur a pris soin d'avoir une conversation particulière avec chacun d'eux. M. Hoste arriva un lundi, et il commença aussitôt ses entretiens avec les élèves.

« C'est le mardi seulement que j'ai été appelé, écrit John Stam. Mr. Hoste, un peu enrhumé, gardait le lit. Je ne crois pas que j'oublierai jamais les instants que j'ai eus en tête à tête avec lui. Quand on aperçoit Mr. Hoste dans les circonstances ordinaires, sa tête massive, sa manière de se tenir parfaitement droit, sa barbe en pointe, tout indique qu'il a été officier. Lorsqu'il est au lit, soutenu par des coussins, l'impression qu'il donne est différente. Alors, il ressemble plutôt à un patriarche fatigué, prêt à déposer le fardeau, qu'à un soldat. En le voyant, j'ai songé à Jacob appuyé sur son bâton, et donnant sa bénédiction à ses fils.

« À peine étais-je là depuis quelques minutes qu'il se mit à prier pour moi, pour Betty (cela, entre parenthèses, à ma grande joie), pour la Mission en général, pour l'Eglise indigène, pour d'autres oeuvres missionnaires, cela dura un quart d'heure, vingt minutes. Je ne puis m'empêcher de penser que ce n'était plus là une simple requête pour que Dieu bénisse nos délibérations. Probablement, oubliant ma présence, et que j'étais là pour l'attribution d'un champ d'activité, il s'était laissé aller à la chose la plus importante l'intercession.

« Ensuite, il me donna des conseils extrêmement utiles sur tous les points essentiels, ne le faisant pas du tout d'un ton directorial, mais de la façon la plus humble. Enfin, après une heure de prière et d'entretien, la question de ma nomination fut abordée, et je fus désigné pour le poste missionnaire de Süancheng, où se trouvent déjà Mr. et Mrs. Birch, de l'Amérique du Nord. Là, je les aiderai, tout en continuant à étudier. Ensuite, peut-être ouvrira-t-on une nouvelle station missionnaire à T'singteh. Si je ne vais pas dans le Sinkiang, j'aurai donc, probablement, le privilège d'ouvrir un nouveau pays à l'évangélisation...

« Je ne connais pas Süancheng, je ne puis donc pas vous en parler. Il s'y trouve, je crois, une église importante. Ce poste est situé au sud-ouest de la province, dans la région montagneuse qui est, paraît-il, fort belle. »

Le moment des adieux arriva. Les jeunes missionnaires se séparèrent, chacun allant dans la direction qui lui avait été assignée.

L'un d'eux écrivit au sujet de John Stam :

« Je ne cesserai pas de bénir Dieu de l'avoir connu. Son développement spirituel était certainement supérieur à celui des autres élèves à Anking. C'était une joie que de parler avec lui ou de travailler avec lui. Il semblait toujours au-dessus des difficultés et des ennuis parce qu'il les remettait à Dieu. Et son exemple amena plusieurs d'entre nous à être plus fidèles dans la prière. En tout cas, c'est ce qui eut lieu pour moi. »

Un autre étudiant qui, depuis l'Amérique, avait voyagé avec Stam, écrivit aussi :

« Humainement parlant, John a été comme l'épine dorsale de la vie spirituelle à Anking, cet hiver. Il semblait connaître Christ de façon plus intime et plus pratique que nous autres. Lorsque je me sentais découragé, il m'aidait à retrouver la joie du Seigneur. Quelques mois après que nous nous fûmes séparés à Anking, il m'écrivit une lettre affectueuse, où il me signalait et me reprochait certaines choses. Cette lettre, je la garde comme un trésor, et je la relis souvent avec profit. Ni avant, ni depuis, je n'ai reçu de reproches qui fussent plus véritablement selon l'esprit de Galates 6 : 1 ; pour cette lettre, je loue le Seigneur. La vie spirituelle de John était rayonnante et contagieuse. Il semblait qu'il fût toujours en contact avec la source de la puissance : Jésus-Christ Lui-même. »


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(1) Petite charrette à deux roues, tirée par un homme.

(2) Ce poème a été traduit par M. le pasteur B. Saillens. Il est donné à la page 114.

 

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