SERMONS
SERMON II
SUR LA CONDUITE DES HOMMES A L’ÉGARD DE
LA VÉRITÉ.
Et Pilate
lui dit : Qu’est-ce que la
vérité ? Et quand il eut dit
cela, il sortit...
Jean XVIII. 38.
Le premier besoin de tout homme qui
réfléchit, est de connaître la
vérité. Elle est le but de tous nos
raisonnements, la plus noble conquête de
notre intelligence, l’aliment destiné
par le Créateur à nourrir nos
âmes. Mais si toute vérité a
droit de nous intéresser, il en est une
pourtant qui doit fixer avant tout nos regards et
qu’il nous est d’une absolue
nécessité de connaître,
c’est la vérité
religieuse.
Nous ne sommes pas nés au hasard ; Dieu
s’est proposé un but en nous donnant la
vie ; sommes-nous sur le chemin qui y
conduit ? - Voilà ce qu’il nous
importe essentiellement de savoir, ce qu’il
nous est urgent d’éclaircir ;
voilà le point sur lequel il faut chercher
tout premièrement la vérité,
puisque de là dépend la
destinée de notre âme.
Telle est, M. F., la manière de voir droite
et raisonnable : - Est-ce la
nôtre ? La cherchons-nous, cette
vérité, à proportion de son
importance ? Au milieu de toutes nos
allées et de toutes nos venues, nous
donnons-nous surtout du mouvement pour parvenir
à connaître notre état moral
tel qu’il est ?
Entraînés rapidement vers la fin de
notre existence terrestre, sommes-nous sortis de
notre étourdissement et de notre sommeil
pour savoir si un asile nous est assuré dans
notre éternelle Patrie ?
Oh ! que l’homme est aveugle et
inconséquent ! comme il est oublieux de
sa destinée et de son vrai bonheur ! Il
peut s’occuper avec patience et
persévérance des moindres minuties de
la vie, et il sait à peine trouver quelques
moments pour s’occuper de la grande
question.
J’ai cru voir, M. F., l’image d’un
grand nombre d’entre vous dans ce que notre
texte nous rapporte touchant Pilate. Ce magistrat
coupable avait auprès de lui le Sauveur, le
Fils Éternel que Dieu avait envoyé
dans le monde pour rendre témoignage
à la vérité,
(Jean XVIII. 37.) et pour la faire
connaître aux hommes : Pilate apprend
que c’est là le grand but de la mission
de Jésus-Christ ; sur cela il lui
demande en passant quelle est cette
vérité qu’il est venu annoncer
à la terre, puis sans attendre la
réponse, il sort pour aller s’occuper
d’autres objets.
Cette conduite indique dans Pilate,
Ou le mépris de la vérité,
Ou beaucoup de mollesse et
d’inconséquence dans la manière
de la chercher,
Ou la peur de la vérité.
Il devient par-là, le type de trois
espèces de personnes qu’il est facile
de remarquer parmi nous et que nous
caractériserons successivement.
Et veuille le Dieu de vérité, que
cette médiation soit pour nous, une source
de retours sérieux sur nous-mêmes et
de résolutions salutaires, par
Jésus-Christ notre Seigneur ! Amen.
I. Supposons, M. F., un homme jeté
pour ses crimes dans une prison obscure, en
attendant le moment où il doit
paraître devant le Tribunal qui
décidera de son sort. Durant cette
captivité, il semble assez naturel
qu’il s’occupe de l’examen
qu’il va bientôt subir et des moyens
qu’il a, de fléchir son Juge et
d’éviter le supplice. Mais loin
d’en agir ainsi, il ne cherche
qu’à s’étourdir, à
se distraire avec ses compagnons et à
chasser l’idée importune du danger dans
lequel il se trouve. Il finit par oublier,
qu’il est dans une prison, qu’il est
coupable et qu’il a des moyens d’obtenir
grâce. Le temps de sa captivité
expire, les portes funestes s’ouvrent et le
criminel produit tout-à-coup au grand jour,
est appelé pour entendre son arrêt. -
Jugez, M. F., de son désespoir ; il
apprend que sa grâce était obtenue,
mais que faute de s’être humilié
dans le sentiment de ses crimes et d’avoir
recouru à la miséricorde dont on
voulait user envers lui, il est demeuré sous
la condamnation et n’a plus rien à
attendre que la mort.
M. F. ! bien des gens parmi nous sont aussi
imprudents que ce malheureux criminel. Nous sommes
tous condamnés pour nos fautes, et au
Tribunal de la Justice nous n’avons à
attendre qu’une sentence de perdition.
Dieu nous retient dans cette prison : -
Pourquoi ? - Pour que nous apprenions à
connaître et à sentir combien nous
sommes coupables devant lui, et que nous voyant
sans ressource quelconque, du côté de
nous-mêmes, nous allions à son Fils
Jésus, qui nous offre pardon et
miséricorde, qui a satisfait à tout,
qui a tout accompli, qui a porté tous nos
péchés sur sa croix et qui nous a
rouvert le chemin des cieux. Sentir jusqu’au
fond notre misère et le besoin que nous
avons de nous attacher uniquement à ce
Sauveur, c’est connaître la
vérité sur laquelle repose tout
l’Évangile, et c’est la
connaissance vivante de cette vérité
qui devient pour nous la base de notre salut et de
la régénération de notre
âme.
Maintenant, M. F., si je porte mes regards sur le
peuple qui m’environne, j’y vois une
foule de gens qui témoignent la plus grande
indifférence pour cette vérité
de laquelle dépend leur éternelle
destinée. Criminels enfermés dans
cette vallée obscure en attendant le grand
jour des rétributions, ils ne
s’embarrassent seulement pas de savoir
s’ils sont réellement coupables et
s’ils ont quelque danger à courir. Ils
vont, ils viennent, ils mangent, ils boivent, ils
s’occupent de leurs affaires temporelles, de
leur fortune, de leur prospérité ou
des moyens d’y parvenir ; ils forment des
projets pour le jour, pour le lendemain ; ils
se donnent beaucoup de peine pour s’environner
de distractions, de plaisirs, de choses
agréables ; ils
s’applaudissent eux-mêmes, quand ils
sont parvenus à s’étourdir et
à chasser l’ennui ; tout entiers
absorbés par les choses présentes,
ils semblent ne rien voir au-delà. -
Parlez-leur de la misère de l’homme, de
sa profonde corruption, de cette multitude de
fautes qui, commises chaque jour et
s’accumulant chaque jour, forment comme une
montagne terrible qui doit les séparer
à jamais de Dieu ; parlez-leur de la
nécessité de réfléchir
sérieusement sur leurs voies, d’ouvrir
les yeux à la vérité et
d’aller chercher un refuge pendant qu’il
en est temps encore : ils vous
écouteront peut-être, mais comme ils
vous écouteraient sur le sujet le plus
insignifiant et qui les toucherait le moins. - Si
nous pouvions les suivre dans
l’intérieur de leurs maisons, nous ne
les verrions pas réfléchir
d’avantage ; ils y rentrent
fatigués du mouvement extérieur, ils
y rentrent pour chercher du repos et non pas pour
se replier sur eux-mêmes : “Cela
est trop fatiguant, ” disent-ils, “cela
noircit l’esprit et l’on se rendrait
malheureux si l’on voulait s’appesantir
sur ces choses. ”
Cependant ils viennent quelquefois dans nos temples
et il semble que leur présence dans cette
enceinte annoncerait le désir de
connaître la vérité ; mais
ils y viennent pour satisfaire à une sorte
de décence, par habitude et non point avec
un désir vrai de s’éclairer sur
la grande affaire du salut.
Voilà toute une classe d’hommes, qui,
s’ils disent parfois : qu’est-ce
que la vérité ? ne le
demandent qu’avec dédain et sans se
soucier aucunement de la connaître.
Elle est à côté d’eux et
à leur portée ; il n’est
pas nécessaire de monter aux Cieux, ni de
passer au-delà des mers pour la
trouver ; non, elle est fort proche
(Deut. XXX. 12. 13. 14.) : il
suffit de vouloir réfléchir
sérieusement, de se recueillir, de
s’examiner devant le Seigneur, avec sa sainte
Loi pour flambeau ; il suffit de
désirer sincèrement de voir les
choses comme elles sont, et comme nous les faisons
voir l’Esprit de Dieu en dissipant toutes les
misérables illusions qui sans cesse nous
abusent. Mais il est des gens qui pour être
éclairés, ne sauraient faire un pas,
ne consentiraient pas à faire le sacrifice
de quelques heures de leur vie ; ils se
moquent de la vérité, ils veulent
obéir jusqu’à la fin à
leurs passions et à leurs caprices, et ils
se couvrent la tête d’un voile
épais, pour ne pas voir le chemin sur lequel
ils marchent et l’issue terrible à
laquelle il aboutit.
Grand Dieu ! voilà donc l’usage
que tant de gens font des secours que tu leur
donnes dans ta miséricorde ?
Voilà donc le fuit de toutes ces
grâces, de tous ces soins paternels et
tendres, dont ta Providence nous environne pour
nous conduire à la bienheureuse paix de tes
enfants ? - O mortels insouciants et
insensibles ! vous qui tournez à votre
ruine ce qui vous avait été
donné pour votre salut ! vous qui
méprisez la vérité et celui
qui est venu pour la révéler à
vos âmes ! pensez-y encore une
fois ; cette vérité
éternelle, et tous vos efforts ne sauraient
l’anéantir ; vous pouvez, il est
vrai, la dédaigner, mais non pas la changer.
Puisque vous ne voulez pas savoir ici-bas que vous
êtes misérables, pauvres, aveugles
et nus,
(Apoc. III. 17.) dans un état
de condamnation et de malédiction ;
vous le saurez au-delà du tombeau, et il
sera trop tard. - Vous entendrez alors le
mugissement de la tempête, et la croix de
Christ ne vous offrira plus un asile ; vous
verrez votre nudité, et le manteau de
Justice et de salut
(Esaïe LXI. 10.) ne sera plus
là pour vous couvrir ; vous verrez
votre souillure, et le sang que vous foulez
maintenant aux pieds ne sera plus là pour
vous purifier, et votre honte sera
éternelle. - Mon Dieu ! tant
d’indifférence me fait trembler ;
je n’ose penser au résultat d’un
oubli si funeste ; le souvenir des
déclarations solennelles de ta Parole, me
remplit d’angoisse et de frayeur.
Seigneur ! touche toi-même ces ingrats
qui t’oublient, et qu’ils partagent nos
transes sur leur sort !
II. Il en est d’autres parmi nous, M.
F., qui cherchent, il est vrai, la
vérité ; mais avec tant de
mollesse et avec si peu de suite, qu’ils
n’y arrivent jamais. Ils peuvent dire de temps
en temps comme Pilate, qu’est-ce que la
vérité ? mais tout en
faisant cette question, ils se laissent distraire
par le premier objet qui se présente, et
s’occupent bientôt d’autre chose.
Ici, M. F., je crains bien de pouvoir
m’adresser directement à un grand
nombre de ceux qui m’écoutent, et de
trouver tout autour de moi des exemples de ce que
j’avance.
Je parle à des gens qui reconnaissent en
général la nécessité de
faire intervenir la religion dans les affaires de
la vie et de ne pas aller au-devant du gouffre sans
savoir si l’on a un moyen de salut. Cependant,
mes chers auditeurs ! si l’on sent
vaguement le besoin de connaître la
vérité sur ce point : se
donne-t-on suffisamment de peine pour
l’atteindre ? Dites-le nous de bonne
foi.
Vous venez, par exemple, assez
régulièrement dans ce saint lieu avec
l’intention d’y chercher des impressions
salutaires et des directions sur les choses qui
tiennent à votre paix. Votre coeur
agité d’une sorte
d’inquiétude, mécontent de
lui-même, crie peut-être en secret
“Qu’est-ce que la
vérité ? où est-elle,
pour que je la connaisse ?” Les ministres
de Christ vous répondent de la part de leur
Maître ; “Rentrez en
vous-même, recueillez-vous dans la solitude,
sondez vos consciences, ne craignez pas de
connaître votre misère, demandez
à Dieu avec ardeur et
persévérance de vous la faire
connaître jusqu’au fond et de vous
conduire lui-même par son Esprit, à
celui qui est le Chemin, la Vérité
et la Vie
(Jean XIV. 6.)” Ce plan
n’est pas bien difficile à
suivre ; il s’agit seulement d’aller
à Dieu avec simplicité, avec le
désir d’être enseigné
de lui
(Jean VI. 45.) et de se voir tel que
l’on est.
Vous sortez de ce temple ; vous en sortez
peut-être avec quelque émotion,
quelque lueur de repentance, vous rentrez dans vos
demeures, quelques moments se passent, tout est
oublié ; c’est
comme si vous n’aviez rien entendu : la
voie vous a été ouverte pour
connaître votre état devant Dieu, mais
comme Pilate, vous vous détournez pour allez
vous occuper de toute autre chose.
Je ne dis pas que vous ne fassiez de temps en temps
chez vous, une prière, une bonne lecture.
Mais est-ce que vous les faites avec la soif de la
vérité, avec un parti bien pris de
tout faire pour y arriver ?
Hélas ! ne les faites-vous pas le plus
souvent pour la forme, pour l’acquit de votre
conscience, pour ne pas être chargés
de la terrible idée, que vous vivez sans
Dieu dans ce monde ? Apportez-vous dans ces
actes autre chose que de la mollesse et de la
tiédeur ; ou bien, est-ce qu’un
mouvement secret et irrésistible qui vous
pousse à résoudre la grande question,
“Suis-je en état de
salut ?”
Ah ! c’est une grande erreur, M. F., de
croire que ce soit assez pour être pieux et
chrétien, de venir chercher quelquefois des
émotions dans ce sanctuaire ;
c’est une grande erreur de s’imaginer
qu’une fréquentation
régulière du culte, quelques lectures
faites de loin en loin, quelques prières
répétées machinalement,
suffisent pour amener une âme à Christ
et pour l’enraciner en lui. Cela peut
prévenir une dégradation plus grande,
mais cela ne fait pas avancer et ne mène pas
au but. - Il faut une fois, lorsque le Seigneur
nous appelle, nous ébranle par sa Parole et
nous fait éprouver quelque inquiétude
secrète, quelque mouvement de componction
salutaire, prendre un parti vigoureux et
décisif, aller à Dieu dans
l’amertume de notre âme et lui dire
“Seigneur !
déchire toi-même le voile et
montre-moi la plaie !”
Alors le rayon de l’Esprit éternel
dissipe les ténèbres et
révèle la profondeur de
l’abîme ; par lui le Seigneur nous
fait voir clairement que le mal est attaché
à notre être, que nous sommes sous la
condamnation, que hors de Jésus il n’y
a point de salut pour nous ; la Bible toujours
mieux comprise achève d’opérer
cette conviction puissante ; il faut bien
alors que l’homme s’abatte et que la
victoire reste à Christ. Mais si l’on
ne prend pas ce parti décisif, alors on
reste ce que l’on a toujours
été ; on demeure flottant au
milieu des mêmes incertitudes ; un jour
on est bien disposé, le lendemain, Satan
reprend ses droits ; les mêmes chutes,
les mêmes faiblesses reviennent
périodiquement ; on parle quelquefois
du Sauveur, mais on n’est pas attaché
véritablement à lui, parce qu’on
n’a pas intérieurement le
témoignage sensible et assuré de ce
qu'on lui doit : en un mot on reste toute la
vie un homme demi-religieux, sans marche fixe, sans
élan pour les choses spirituelles et
invisibles, sans amour véritable dans le
coeur, du nombre de ces tièdes que le
Fils de Dieu vomira de sa bouche
(Apoc. III. 16.).
III. Enfin, M. F., parlons d’une
dernière classe de personnes qui agissent un
peu comme le Gouverneur Romain ; qui
demandent : Qu’est-ce que la
vérité ? mais qui en ont
peur et qui l’évitent.
Bien des gens, frappés de ce mouvement
universel qui annonce le réveil de la
piété au milieu de nous, voyant avec
étonnement les changements heureux que le
Seigneur opère dans son Église, ne
peuvent s’empêcher de partager
jusqu’à un certain point cette
inquiétude générale et de
soupçonner qu’eux aussi n’ont pas
connu encore toute la vérité. Ils ne
peuvent manquer de s’apercevoir que s’ils
ont eu jusqu'ici la religion de nom et
d’habitude, ils n’ont pas encore la
religion vivante et efficace, cette religion
du coeur, qui n’est donnée que par le
St. Esprit et qui change toute l’existence.
Au-delà du cercle étroit, monotone et
glacé dans lequel ils ont vécu si
longtemps, ils entrevoient une autre sphère
plus relevée, pleine de vie et de chaleur,
dans laquelle les relations de l’homme avec
Dieu sont celles d’un enfant qui sait ce
qu’il doit à son Père et qui met
son bonheur à l’aimer, une
sphère où l’on sait
apprécier à leur juste valeur les
vanités du monde, et où l’on
apprend à les fouler aux pieds pour
s’attacher au Rocher éternel et
à l’Évangile. Voilà ce
que bien des gens ne peuvent s’empêcher
d’entrevoir, et il leur est impossible de
méconnaître que cette sphère
est celle des vrais enfants de Dieu et des
rachetés de Jésus-Christ. Cette vue
excite un trouble secret, un vague désir de
connaître les mêmes choses,
d’être dans la même assurance, de
participer aux mêmes joies et de vivre ainsi
plus près du Seigneur. On demande
donc : Qu’est-ce que la
vérité ?
Nous répondons, selon
l’Évangile, que “cette
vérité consiste à
reconnaître notre état de
péché et de condamnation, à
renoncer à tout espoir venant de
nous-mêmes, à ne point
prétendre mériter quelque chose
devant Dieu par nos oeuvres toujours
souillées et à nous reposer avec une
confiance sans bornes sur le sacrifice et les
promesses du Sauveur. Qu’en prenant de la
sorte la voie de l’humiliation et de la foi,
comme nous l’ordonne l’Évangile,
nous commençons aussi à mener une vie
nouvelle, à nous soumettre aux commandements
du Seigneur et à porter des fruits à
sa gloire par l’Esprit de sainteté
qu’il communique abondamment à tous
ceux qui s’attendent à lui. ” -
Cette réponse est affligeante pour
l’homme charnel. - S’humilier et se
reconnaître sans excuse ! - Cela est
dure. - Ne point s’appuyer même sur le
peu de bien que l’on croit avoir fait ! -
Cela est plus dure encore. On ne peut pas se
résoudre à être sauvé
par grâce, à recevoir tout de Dieu et
à renoncer à tout mérite
propre ; l’orgueil humain souffre
à l’idée d’un tel
abaissement. Puis, le monde a bien des charmes, on
tient aux habitudes qu’on y a prises, à
la dissipation qu’il nous offre, à
l’encens dont il nourrit notre
amour-propre ; il serait dur de le quitter.
Qu’arrive-t-il donc ? - C’est que,
placé entre les deux sphères, celle
de l’austère vérité et
celle du mensonge flatteur ; on
s’arrête, on hésite, on craint
d’aller trop en avant ; on voudrait bien
obtenir les privilèges, mais ne pas faire
les sacrifices ; on ne se
sent pas le courage de traverser ce torrent
au-delà duquel est plantée la
croix ; et après quelques combats, on
finit le plus souvent par rester dans les campagnes
de Babylone.
Oh ! que nous voudrions, dans cette foule qui
nous environne, pouvoir démêler
quelqu’un de ces demi-chrétiens, encore
tiré des deux côtés et flottant
entre le monde et Dieu, pour lui dire :
“Prends courage, le Seigneur
t’appelle ; ne l’entends-tu pas
qu’il te dit : Je suis venu dans le
monde pour rendre témoignage à la
vérité ? ne sors donc pas de
sa présence, ne le laisse pas aller,
qu’il ne t’ait béni (
Gen. XXXII. 26.) en dissipant les
ténèbres qui couvrent ton âme
et en te faisant voir son salut. Ne crains pas
cette humiliation, par laquelle il te faut passer
pour arriver à la paix de
Jésus ; l’humiliation devant le
Seigneur, le renoncement à tout pour lui,
remplissent l’âme d’une joie
ineffable ; Jésus adoucit tout par le
baume de son amour. Prends courage ;
pourquoi regretter les vêtements
souillés et les lambeaux qui te
couvrent ; va recevoir la robe blanche des
mains de ton Sauveur. Et quant aux sacrifices,
lorsqu’une fois on aime, ils n’ont rien
de dur ni de pénible ; on les fait avec
plaisir et avec élan du coeur ; le
peuple de Christ est un peuple de franche
volonté
(Ps. CX. 3.) et non point un peuple
d’esclaves ; il a pour agir saintement le
plus grand de tous les mobiles, l’Esprit du
Fils qui le conduit, et qui le forme à aimer
Dieu.
C’est en te mêlant à cette foule
de disciples fidèles, que tu trouveras le
bonheur réel, cette douce confiance, cette
paix profonde, que personne ne donne que
Jésus, cette énergie, ce courage qui
triomphent de tous les obstacles et qui soutiennent
le fidèle jusqu’au terme, où il
est enfin couronné. ”
Vous tous à qui Dieu donne un sentiment
d’inquiétude secrète ! oui,
prenez courage ; écoutez celui qui a
dit : Si quelqu’un a soif, qu’il
vienne à moi et qu’il boive. Qui croit
en moi, des fleuves d’eau vive
découleront de lui, comme dit
l’Écriture
(Jean VIII. 37. 38.) Allez donc avec
confiance auprès de ce Sauveur qui vous
appelle et qui veut combler tous vos
désirs ; allez à lui, et vous
serez véritablement libres
(Jean VIII. 32. 36.).
Jusque-là vous n’aurez point de
paix ; non, point de paix, car quelle paix
pourrait-on avoir quand on est sous le joug du
péché et exposé à
toutes les effroyables conséquences que la
Loi de Dieu dénonce contre le
péché ! Ah ! si,
troublés et angoissés par le
sentiment de vos fautes multipliées,
épouvantés d’un avenir qui est
encore pour vous sans espoir, vous vous sentiez
enfin pressés de crier à
Jésus, comme l’aveugle de
l’Évangile : Seigneur Fils de
David, aie pitié de moi !
(Marc X. 47.) il ne vous
abandonnerait pas dans votre détresse ;
mais levant le voile qui jusqu’ici est
demeuré sur votre coeur, il vous montrerait
comme dans une vision céleste cette croix,
sur laquelle il a porté pour vous
l’opprobre et la malédiction ;
et à la vue de ses plaies
sanglantes, il vous semblerait entendre sa voix
murmurer doucement à vos oreilles :
“Mon fils ! tes péchés
te sont pardonnées. ”
(Matth. IX. 2.)
Pauvre âme ! tu comprendrais alors le
prix du sacrifice qui a été offert
sur Golgotha : tu ouvrirais les yeux à
la grande vérité de ta
rédemption éternelle, tu
reconnaîtrais dans Jésus ton Sauveur,
et comme un prisonnier à qui l’on vient
d’annoncer la fin de sa captivité
cruelle, tu te livrerais aux plus doux transports
de joie et te donnerais toute entière,
à ton divin Libérateur. Tu dirais,
pénétrée de reconnaissance et
d’humilité : “Je crois,
Seigneur ! je t’adore, je t’aime, je
veux vivre pour toi, rattacher tout à toi et
ne plus m’éloigner de cette croix,
où j’ai retrouvé la paix et
l’espérance ; oui, je ne suis plus
à moi-même, je t’appartiens
entièrement, à toi qui m’as
aimée, et qui as payé ma
rançon !”
O heureux moments, M. F., où une âme
apprend par expérience, ce que c’est
que de croire au Fils de Dieu ! Heureux
moments, où elle se sent
déchargée du poids de ses vieilles
chaînes, où l’Esprit saint
l’attache irrévocablement à son
Sauveur et lui donne un nouveau principe de
vie ! Alors cette âme trouve enfin un
doux repos après ses longues et terribles
angoisses ; alors elle s’ouvre à
une paix et à une joie que le monde ne
pouvait lui donner ; alors
elle contemple par la foi les brillantes
régions de l’éternité et
peut dire avec confiance : “Voilà
ma Patrie, voilà où mon Sauveur me
recevra, voilà où après avoir
brisé mes attaches grossières, il
consommera l’oeuvre de sa miséricorde,
en me faisant vivre à jamais avec
lui !” - Priez Dieu, mes chers
Frères ! que se soient-là vos
espérances et votre langage. Amen !
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