SERMONS
SERMON IV
SUR LA PATIENCE DE DIEU.
Méprises-tu les richesses de
sa bonté, de sa patience et de son long
support, ne considérant pas que la
bonté de Dieu te convie à la
repentance ?
Rom. II. 4.
Dans ce passage de l'Épître aux
Romains, St. Paul s’adresse
particulièrement à ceux des
Israélites, qui étaient
demeurés dans la rébellion,
malgré les secours les plus
multipliés et les avertissements les plus
solennels. Mais cette question peut aussi à
bien juste titre vous être adressée,
à vous, que l’Éternel
prévient avec tant de bonté, et qui
cependant demeurez encore insensibles. Oui, vous
avez plus sujet que personne, de méditer sur
la patience de Dieu et sur le danger d’en
abuser. Méprises-tu les richesses de sa
bonté, de sa patience et de son long
support, ne considérant pas que la
bonté de Dieu te convie à la
repentance ?
- Ce texte nous appelle à considérer,
1°. la nature de la patience divine, 2°.
sa grandeur, 3°. son but, 4°. l’abus
que l’homme en fait trop souvent. Ce sera
là tout le sujet de cette instruction.
Prions, pour que la Parole sainte ne soit pas
annoncée en vain ! Prions, pour
qu’en entendant parler de la patience
céleste, quelques âmes, du moins, en
sentent le prix et en profitent pour se
convertir !
Prions aussi pour que cette méditation soit
utile aux âmes pieuses en leur rappelant
combien le Seigneur les a supportées et les
supporte encore chaque jour ! Amen !
I. Il ne faut pas avoir longtemps
contemplé le monde, pour
répéter avec l’Apôtre, que
ce monde est plongé dans le mal.
(1. Jean V. 19.) Si le nom de Dieu
n’en est pas absolument banni, ses lois
n’en sont pas moins foulées aux pieds,
ou mises en oubli par le plus grand nombre. On les
viole ouvertement, on les viole en secret, et le
plus souvent on se dirige d’après un
autre code et d’après d’autres
maximes. Cependant, Dieu ne frappe pas
immédiatement ces audacieux
transgresseurs ; ils les supporte. - À
quoi faut-il attribuer cette patience ?
Croirons-nous qu’il ne voit pas la
méchanceté et la corruption des
humains ? - Mais, comment ne la verrait-il
pas, celui qui nous a tous formés et
tirés du néant ? Nos
âmes ne sont-elles pas sans sa
main ?
(Job XII. 10.) Ne nous tient-il
pas serrés par derrière et par
devant ?
(Ps. CXXXIX. 5.) N’est-il pas
à nos côtés, en quelque lieu
que nous agissions ? Ne se tient-il pas
à la porte de notre coeur ? N’en
compte-t-il pas tous les battements ?
N’en juge-t-il pas tous les desseins ? Et
quel que soit le secret dont nous pensions
quelquefois nous environner, l’Éternel
n’est-il pas puissant pour mettre en
évidence les choses cachées dans les
ténèbres, et pour produire au jour
l’ombre de la mort ?
(Job XII. 22.)
- Oui, toutes choses sont nues et
entièrement découvertes, devant celui
à qui nous devons rendre compte :
(Heb. IV. 13.) son oeil est partout,
il démêle tout, rien ne lui
échappe, et avant même que nos plus
secrètes pensées soient
formées, il les connaît. Aucune des
iniquités qui se commettent, ne lui demeure
donc cachée ; et aussitôt
qu’elles sont commises, elles sont inscrites
dans son livre de mémorial.
Pour expliquer la patience de Dieu, dira-t-on
qu’il envisage le péché avec
indifférence ? - Non, non, il ne
l’envisage pas ainsi. Il dit
lui-même : qu’il a les yeux trop
purs pour voir le mal ;
(Habac. I. 13.) qu’il hait
les ouvriers d’iniquité, qu’il
s’irrite contre eux chaque jour,
(Ps. V. 6.
VII. 12.) et qu’il exercera
contre eux sa vengeance.
(2. Thess. I. 8.) - Qu’est-ce en
effet que le péché ? -
C’est une violation de la loi ;
c’est un outrage direct fait à la
souveraineté et à la majesté
du Dieu fort ; c’est une révolte
contre son gouvernement éternel : et
comment verrait-il cela avec
indifférence ? - Un monarque qui a fait
des lois et qui les a sanctionnées par une
proclamation solennelle, fermerait-il les yeux sur
leur violation ? Que deviendrait alors son
autorité ? Quel poids aurait
désormais sa parole ? Il ne lui
resterait qu’à descendre d’un
trône avili, et qu’à briser un
sceptre devenu sans force. Ce renversement qui ne
peut être admis dans un gouvernement humain,
ne peut pas l’être davantage dans le
gouvernement divin :
le Seigneur ne pourrait voir avec
indifférence le péché, sans se
dépouiller de sa vérité, de sa
sainteté et de sa justice.
Manquerait-il de pouvoir pour punir les
coupables ? - Il manquerait de pouvoir, celui
qui a étendu les hauteurs des cieux et
qui marche sur les profondeurs de la mer ; qui
parle au soleil, et il ne se lève
point ; qui tient les étoiles sous son
cachet ;
(Job IX. 7.8.) qui regarde la
terre, et elle tremble ; qui touche les
montagnes, et elles fument ;
(Ps. CIV. 32.) qui fait briller la
lumière dans les nuées, et qui les
balance ; qui envoie ses foudres, en sorte
qu’elles marchent et disent : nous
voici !
(Job XXXVII. 15. 16.
XXXVIII. 35) - N’a-t-il pas su
punir l’ancien monde, en l’engloutissant
dans les eaux ? N’a-t-il pas
balayé d’un balai de destruction
(Esaïe XIV. 23.) tant de villes
et de nations orgueilleuses, qui se croyaient en
sûreté au sein de leur puissance et de
leurs richesses ? N’a-t-il pas su
précipiter dans l’abîme les anges
rebelles, et les lier avec des chaînes
d’obscurité pour le jugement du grand
jour ?
(Jude 6.) - Et qu’est-ce qui
arrêterait son pouvoir ? - Ce ne sont ni
les distances, ni les ténèbres, ni la
multitude des coupables : l’univers est
à lui, et nous ne sommes devant ses yeux,
que comme un amas de vermisseaux : d’un
seul mot il peut nous détruire.
À quoi devons-nous donc son long
support ? - Ah ! c’est à sa
bonté envers nous. C’est cette
bonté seule qui retient son bras, et qui
arrête l’essor de sa justice prête
à exécuter la terrible
sentence !
Méprises-tu, dit le texte, les
richesses de sa bonté, de sa patience et de
sa longue attente ? - Ces mots,
bonté, patience, longue attente,
n’ont pas exactement la même
signification. La bonté de Dieu est
cet attribut général qui le porte
à vouloir le bien de ses créatures et
à le leur procurer. Quand cette bonté
se manifeste en pardonnant au pécheur, elle
prend le nom de clémence ou de
miséricorde. Quand elle se manifeste
en accordant du délai au coupable,
c’est la patience ; et cette
patience devient longue attente, quand
l’homme en a longtemps abusé en
persévérant dans le mal. - La
bonté de Dieu durera toujours, il ne peut
pas cesser de vouloir le bien de ses enfants ;
mais sa patience et sa longue attente doivent avoir
un terme. Christ nous les procure à cette
heure, par son intercession puissante ; elles
pourront nous être accordées encore
pendant une certaine mesure de temps ; mais
l’heure vient où la médiation du
Rédempteur finira ; alors la justice
aura son tour, la patience cessera de se
manifester, et le pécheur obstinément
rebelle recevra selon son train et selon le
fruit de ses oeuvres.
(Jer. XVII. 10)
II. Considérons maintenant la
grandeur de la patience de Dieu envers nous, ou ce
que l’Apôtre appelle les richesses
de cette patience.
Cette patience nous paraît grande, si nous
envisageons d’abord, Celui qui l’exerce
et ceux envers qui elle est exercée.
Qui est-ce qui use de support ? - C’est
le Seigneur, le Roi des Rois, le Maître de
toutes choses, l’Éternel. - Qui sont
ceux qu’il supporte ? - C’est nous,
misérables pécheurs. - Et que
sommes-nous devant lui ? - D’une
petitesse qui échappe à toutes nos
conceptions. L’insecte, qui rampe dans la
poussière, est bien peu de chose devant
l’homme qui peut à chaque instant le
fouler aux pieds : cependant, toutes les
générations humaines, passées,
présentes et futures, sont bien moins encore
devant le Dieu fort. Elles sont pour lui,
dit Esaïe, comme une goutte qui tombe
d’un sceau, et comme la menue poussière
d’une balance. Toutes les nations sont devant
ses yeux, comme rien, et il les tient pour moins
que rien, et que le néant.
(Esaïe XL. 15. 17.) Cependant,
ce sont ces êtres imperceptibles dans
l’univers, qui au lieu de demeurer dans une
humble dépendance de Celui de qui ils ont
tout reçu, osent s’élever contre
lui, secouer le frein de ses lois et se placer dans
l’attitude de la rébellion ! -
Quoi ! la rébellion dans un
monde ! que d’un mot de sa bouche, Dieu
peut anéantir ! La rébellion
chez des créatures auxquelles il a
donné la vie, et qui dans peu de jours
tomberont entre ses mains puissantes ! Et il
la souffre ! Et il la supporte ! - O
homme ! à cette pensée, ne
tomberais-tu pas la face contre terre, en
t’écriant : “Mon Dieu !
que tu es bon ! mon Dieu ! que ta
patience est incompréhensible et que tes
compassions sont par-dessus toutes tes
oeuvres !”
(Ps. CXLV. 9.)
Mais allons plus loin, M. F., et pour mieux
apprécier cette bonté divine, pensons
au nombre de nos péchés contre le
Seigneur. - Le nombre de nos
péchés ! Pesez ces paroles.
Laissent-elles dans votre esprit quelque
idée claire et
déterminée ? - Pas plus que
quand on parle du nombre des étoiles du
ciel, ou des grains de sable amoncelés au
bord des mers. Le nombre de nos
péchés ! L’imagination
s’y perd ; la tête s’y
trouble ; il y a là un
abîme ! - Pour nous rendre cette
vérité plus sensible, je suppose, M.
F., que vous formiez le projet de noter à la
fin de chaque jour les péchés dont
vous vous êtes rendus coupables pendant sa
durée ; soit les péchés
d’actions, soit ceux de paroles, soit ceux de
pensées. Certainement ce projet souffrirait
de grandes difficultés dans
l’exécution. Vous n’auriez jamais
assez de mémoire, pour faire ce compte
d’une manière un peu exacte. Il vous
échapperait toujours bien des
transgressions, malgré le désir que
vous auriez de les retracer à votre esprit.
Les mauvaises pensées, surtout, sont
vraiment innombrables. Mais enfin, je suppose que
vous fassiez cet essai, et que vous notiez ces
tristes souvenirs du mieux que vous le pouvez.
Représentez-vous le résultat
d’une semaine : Quel triste
dénombrement il formerait ! Comme il
serait déjà énorme !
Continuez cette épreuve pendant un mois,
pendant une année, si vous en avez la
patience et le courage. Quelle masse effrayante
sera alors accumulée ! Et que de
longues pages seront chargées de titres
d’accusation contre vous !
Mais encore, si par une méthode semblable,
vous parveniez à mettre devant vos yeux tous
les péchés de votre vie,
pourriez-vous les contempler sans un
frémissement d’horreur ? N’y
aurait-il pas dans un tel spectacle, de quoi
bouleverser l’âme la plus endurcie, et
la percer d’un glaive de condamnation jusque
dans ses derniers replis ? - Cependant, M. F.,
Dieu les a supportés tous ces
péchés ; il a usé de
patience envers nous ; depuis notre
première enfance, nos fautes se sont
accumulées, comme les eaux qui tombent des
nuées pour aller grossir
l’Océan ; une seule heure ne
s’est pas écoulée sans que nous
ayons provoqué le Seigneur : et nous
subsistons encore !
Parlerai-je de l’énormité des
péchés que nous avons commis ?
Certes, ce n’est pas seulement par des fautes
légères que nous avons offensé
le Seigneur, mais par la violation directe de ses
commandements les plus exprès. Pensez-y mes
chers auditeurs ! recueillez-vous en
sincérité devant Celui qui
connaît toutes choses, examinez-vous sur sa
loi, article par article, commandement
après commandement, ligne après
ligne :
(Esaïe XXVIII. 13.) quels
déplorables souvenirs, sortiront du fond de
vos consciences ! que de péchés
même que je n’oserais nommer dans ce
lieu, viendront grossir cet effroyable
compte ! - Oh ! oui ; il faut le
reconnaître, nous sommes extrêmement
coupables devant Dieu ; et loin d’avoir
quelque excuse pour atténuer nos
péchés, il semble que tout se
réunisse pour les aggraver.
Leur énormité n’est-elle pas
rendue plus grande, par les lumières que
nous avons reçues et par les instructions
salutaires qui ont retenti si souvent à nos
oreilles ? N’est-elle pas accrue, par les
secours puissants que Dieu n’a cessé de
nous offrir pour changer notre coeur, par les
tendres invitations qu’il nous a
adressées, par les trésors
d’amour que nous a manifestés
l’Évangile ? N’est-elle pas
accrue encore, par les autres bienfaits que nous
avons reçus du Seigneur, malgré notre
ingratitude ? bienfaits, comme
individus ; bienfaits, comme membres
d’une famille ; bienfaits, comme nation.
Dieu ne peut-il pas dire de nous comme autrefois de
son peuple ? Quand Israël était
jeune enfant, je l’aimai, et j’appelai
mon fils hors d’Égypte. Je lui ai
appris à marcher, je l’ai porté
dans mes bras, je l’ai attiré avec des
cordeaux d’humanité et avec des liens
d’amitié ; je lui ai
été comme ceux qui auraient
enlevé la bride de sa bouche pour lui
présenter de la nourriture.
(Osée XI. 1. 3. 4.) Quoi
donc ! tant de bienfaits n’avaient-ils
point de voix ? - Mais sans doute elle
n’était pas entendue, puisqu’on
répondait aux bénédictions par
de nouvelles offenses. Oh ! qu’il est
pénible de s’arrêter sur ces
choses, et de voir ainsi jusqu’au fond toutes
les misères de notre âme !
Qu’il est triste de penser que tant de
grâces, destinées à nous
enrichir à salut, ont été
paralysées par nos convoitises ! Nous
avons peine à supporter un tel spectacle, il
nous rebute, il nous inspire un dégoût
et une horreur profonde, malgré
l’indulgence que nous serions disposés
à avoir pour nous-mêmes.
- S’il s’agissait de quelqu’un de
nos semblables, à qui pendant longtemps nous
n’aurions cessé de faire du bien, et
qui ne l’aurait payé que par
l’indifférence ou le mépris,
nous ne pourrions retenir l’essor de notre
indignation : cependant, ce que nous ne
pourrions supporter de voir chez nos frères,
Dieu l’a supporté en nous ; il ne
nous a pas retranchés durant le cours de nos
iniquités ; il nous attend, il nous
traite avec douceur, il ne nous accable pas de sa
justice, mais pour briser notre coeur il
déploie à nos yeux toutes les
richesses de sa bonté et de sa patience.
Mais cette patience n’est pas exercée
seulement envers nous, M. C. F. ! ce
n’est pas cette ville seule qui est remplie de
transgresseurs ; ce n’est pas ce pays
seul ; le monde entier en est couvert ;
les peuples sont dès longtemps en
révolte déclarée ; les
siècles écoulés l’ont vue
partout, le siècle présent la voit
encore ; et le Seigneur l’a-t-il
oublié ? D’où vient,
qu’il n’est pas encore arrivé, ce
jour où les cieux passeront avec un bruit
sifflant de tempête, où les
éléments embrasés seront
dissous et la terre brûlée avec tout
ce qu’elle contient ? (2 Pierre III.
10.) - D’où vient ? - Mon
Dieu ! tu le sais, et nous l’avons appris
par ta Parole ; c’est que tu es
pitoyable, miséricordieux, lent à la
colère, abondant en gratuité,
(Ps. CIII. 8.) envers des
créatures que tu ne veux pas laisser
périr.
Et c’est pour cela, ô Dieu tout
bon ! que cette terre que nous habitons, cette
terre surchargée de crimes et de
pécheurs, continue encore sa course au
travers de l’immensité des cieux, que
ton soleil l’éclaire encore, et que
nous subsistons tous à cette
heure !
Adorez l’Éternel, ô
pécheurs ! Adorez le Dieu
clément, qui a la terreur à son
commandement,
(Nahum I. 2.) et qui cependant vous
supporte. Oui, venez prosternons-nous,
inclinons-nous devant ce Dieu
miséricordieux ! Mais n’oublions
pas le but de sa longue patience ; elle est
pour notre salut,
(2 Pierre III. 15.) dit un
Apôtre ; et le texte, ne
considères-tu pas, que la bonté de
Dieu te convie à la
repentance ?
III. D’abord, le support de Dieu convie
les pécheurs à la repentance, en leur
donnant le temps de se convertir. C’est une
chose bien précieuse, que ce temps qui nous
est accordé. Celui qui le consume en courant
après de misérables vanités,
montre qu’il sait bien peu quelle est sa
valeur et l’estime qu’il doit en
faire ; mais il le saura peut-être
à l’heure de la mort. Quand ce messager
terrible viendra frapper à la porte, et
qu’il faudra ouvrir sans retardement, le
malheureux pécheur apprendra ce que
c’est qu’une heure ou un jour. Il
s’écriera peut-être dans son
angoisse : “Encore quelques
moments ! encore un délai, avant ce
terrible passage ! Je vois ma vie ; je
reconnais ma longue erreur ; je veux revenir
en arrière et chercher ce salut que je
commence à entrevoir : Dieu
clément, suspends encore !”
Mais si la mesure de patience a été
écroulée jusqu’à la
dernière goutte, une voix lugubre sortira de
la conscience du misérable, pour lui
dire : “il est trop tard ; le
support est à son terme ; la
miséricorde est lassée, l’heure
est venue. ” - Apprenez, M. F., par le
spectacle de ces derniers moments de la vie,
à juger du prix que vous devez mettre
à ceux que Dieu vous donne maintenant.
Le premier effet de la patience est de donner
du temps, le second de montrer que le Seigneur
est disposé à faire grâce.
Quand un père a été longtemps
fatigué par les désordres de ses
enfants, et qu’il leur a dénoncé
un châtiment sévère, s’il
diffère de le mettre à
exécution, n’est-ce pas pour leur faire
sentir qu’il désire avoir sujet de leur
pardonner ? Hé bien !
pécheur qui m’écoutes !
Dieu a attendu longtemps avec toi ; il attend
encore ; et pourquoi ? - Ingrat !
n’est-ce pas pour te pardonner, et pour se
réconcilier avec son enfant ? Je
suis vivant, dit le Seigneur, que je ne veux pas la
mort du pécheur, mais sa conversion et sa
vie.
(Ezéch. XXXIII. 11.) Je
veux guérir leurs rebellions, je les aimerai
de bon coeur, et ma colère sera
détournée d’eux.
(Osée XIV. 4.) Venez
maintenant, et disputons nos droits : quand
vos péchés seraient rouges comme le
cramoisi, ils seront blanchis comme la neige.
(Esaïe I. 18.) Oh !
qu’il est doux pour les ministres du Seigneur,
d’avoir à répéter de
telles paroles !
Considérez encore, M. F., que le support de
Dieu, accompagné de sa Grâce, tend
à exciter en nous la repentance. Des
expériences fréquentes prouvent que
la sévérité et une justice
rigoureuse n’aboutissent le plus souvent
qu’à endurcir le pécheur. La vue
de la justice nous effraye sans doute, elle nous
étonne, nous ébranle ; mais elle
resserre le coeur, y comprime tous les sentiments
affectueux et tendres, et ne peut y faire
naître pour le Seigneur qu’une crainte
d’esclave. Mais la bonté qu’il
nous a manifestée dans
l’Évangile de son Fils, nous touche,
nous encourage ; la charité
incompréhensible qu’il y montre,
pénètre nos coeurs, les ouvre
jusqu’au fond pour recevoir les grâces
célestes. Et c’est lorsque nous avons
contemplé au pied de la croix ces attributs
adorables, que subjugués, vaincus, nous nous
humilions dans la poussière pour
déplorer notre long endurcissement et pour
commencer à aimer Dieu. Oh s’il y a une
âme qui ne soit pas
désespérément perdue, il faut
qu’elle soit touchée par les grandes
bontés du Seigneur ! Fais-moi
souvenir, et plaidons ensemble, dit-il dans sa
patience, déduis tes raisons pour te
justifier ;
(Esaïe XLIII. 26) ai-je
été un désert pour toi, ai-je
été une terre
ténébreuse ? D’où
vient donc que tu as dit, nous sommes nos
maîtres et nous ne viendrons plus à
toi ?
(Jer. II. 31.) Lève tes
yeux, regarde, tu as souillé cette terre par
tes impudicités et par ta malice ; tu
as un front de débauchée, tu
n’as point eu de honte ;
(Jér. III. 2.3.) cependant,
retourne-toi, rebelle ! car je ne veux point
faire tomber ma colère sur toi ;
(Jér. III. 12.)
dis-moi encore : Mon Père ! tu
es le conducteur de ma jeunesse. (Jér.
III. 4.) J’ai effacé tes forfaits
comme un brouillard, et tes péchés
comme une nuée épaisse ; reviens
à moi, car je t’ai racheté.
(Esaïe XLIV. 22.) Tel est le
langage que Dieu nous fait entendre, pour nous
manifester son support ; ô homme !
que lui répondras-tu ?
Mépriseras-tu les richesses de sa
bonté, de sa patience et de sa longue
attente ? C’est ce qu’il faut
examiner encore.
IV. Il faut l’avouer sans détour :
l’homme est disposé à abuser de
la patience de Dieu, comme de toutes les autres
bénédictions, et à tourner
à sa ruine ce qui lui avait
été accordé pour son salut.
Plongé dans un étourdissement
habituel, parce qu’il ne sent pas encore le
châtiment, il croit qu’il ne le sentira
jamais ; parce qu’il est
épargné aujourd’hui il croit
qu’il le sera demain, il ne prévoit pas
de terme à la patience, parce qu’il
n’en connaît pas la mesure. - Et quelle
en est la triste conséquence ? Nous
n’oserions presque pas la dire, tant elle est
honteuse pour notre nature, si nous ne la trouvions
pas formellement exprimée au livre de
l’Ecclésiaste : Parce que la
sentence contre les oeuvres mauvaises ne
s’exécute pas incontinent, à
cause de cela le coeur de l’homme est plein
d’envie de mal faire.
(Ecclés. VIII. 11.) -
Quoi ! parce que Dieu épargne
l’homme, l’homme se prévaut de
cette impunité pour faire le mal avec plus
d’audace ! Parce que le glaive ne frappe
pas incontinent, les humains osent le braver !
Certes, c’est là le mépris le
plus ouvert et le plus révoltant de la
miséricorde céleste.
Maintenant, ô vous qui
m’écoutez ! rentrez en
vous-mêmes, et considérez si vous
n’auriez pas ajouté à tous vos
autres torts, celui d’abuser ainsi de la
patience de Dieu envers vous ?
Réfléchissez-y sérieusement.
C’est à vous à lire dans vos
consciences ; pour nous, nous ne pouvons pas y
descendre. - Mais nous vous dirons du moins
ceci : c’est que puisque Dieu vous
accorde encore cette patience à cette heure,
il faut de deux choses l’une, ou que vous la
méprisiez comme les méchants dont
nous venons de parler, ou que vous en profitiez
pour vous convertir. Ne pas en user à salut,
serait comme si vous disiez : “Dieu a eu
son dessein en m’épargnant, mais je
n’en suivrai pas moins ma volonté. Ce
temps de délai m’est donné pour
mon bien, mais je l’emploierai pour mon mal.
” Nous aimons à bien espérer de
vous tous, M. C. F., mais nous sommes pourtant dans
une grande sollicitude, dans une vraie angoisse, en
pensant que peut-être beaucoup d’entre
vous seraient disposés, par illusion, par
attachement au péché, par quelque
détour subtil et funeste, à tourner
ainsi la grâce de Dieu en dissolution. Que
faudrait-il dire à ceux-là ? -
C’est que jamais danger ne fut plus grand que
celui auquel ils s’exposent, puisque la
patience, si longtemps méprisée, va
prendre fin.
- Au milieu de ses révélations,
Zacharie entendit la voix d’un ange qui
disait : Lève tes yeux et regarde. Et
il dit : Qu’est-ce ? Il lui
répondit : C’est un épha
qui sort, et c’est la mesure des
péchés du pays. Et voici une masse de
plomb que l’on portait, et une femme
était assise près de la mesure. Et il
dit : C’est la
méchanceté ; puis il la jeta au
milieu de l’épha, et mit la masse de
plomb sur l’ouverture.
(Zach. V. 5-8.) - L’avez-vous
compris, mes chers auditeurs ? Quand la
méchanceté a comblé la mesure,
la patience cesse, le dernier châtiment tombe
sur le coupable, et ce châtiment est comme
une masse de plomb, qui ne sera plus
ôtée. - Oui, il y a poids et poids, il
y a temps et temps ; après celui du
support, viendra celui d’une juste
colère pour ceux qui auront
méprisé jusqu'au bout le conseil de
Dieu. Oh ! prévenez ce moment terrible,
vous qui errez encore dans les sentiers du monde et
d’une sagesse trompeuse ! -
Pécheurs et pécheresses ! la
nuit vient, la mort avance à grands pas, les
scènes solennelles de
l’éternité se préparent.
Oui, la nuit vient, et avec elle le glaive de
vengeance. Hâtez-vous donc de saisir le
sceptre de miséricorde, qui vous est tendu
depuis si longtemps par le Sauveur. Craignez de
devenir des monuments de la sentence terrible
qu’il prononça jadis : je
m’en vais, vous me chercherez, et vous mourrez
dans vos péchés.
(Jean VIII. 21.) Il est encore
là, ce Sauveur, prêt à vous
recevoir dans son sein et à vous couvrir du
manteau de sa justice ; il est là plein
de douceur et de bonté ; il vous
dit : ne veux-tu pas venir à moi
pour avoir la vie ?
(Jean V. 40.)
Pauvre brebis fugitive ! il te poursuit pour
te ramener en sûreté au bercail ;
il ne s’est point lassé encore de te
chercher ; mais si tu le méprises plus
longtemps, alors il se retirera, il s’en ira
pour jamais, et tu mourras dans tes
péchés. - Hélas ! il
vous parle ce Fils adorable, ce Souverain Pasteur,
au moment où je vous parle
moi-même ; et c’est peut-être
pour la dernière fois que vous entendrez
l’appel de son amour. Ah ! profitez de
ces précieux moments ! allez,
hâtez-vous, et dites-lui du fond de vos
coeurs : Seigneur ! tu nous vois
effrayés et tremblants à la
pensée du danger, où nous a
précipités l’abus indigne de ta
patience. Hélas ! que serions-nous
devenus si tu nous eusses retranchés au
milieu de cette carrière criminelle !
Et que deviendrions-nous encore à cette
heure, s’il fallait paraître devant ton
trône sans t’avoir pour Avocat et pour
Médiateur ! Mais, grâces
t’en soient rendues ! ton soleil nous
éclaire encore et nous pouvons encore
chercher près de toi la
réconciliation et la paix. Aie pitié
de nous, ô Sauveur
miséricordieux ! Aie pitié de
nos âmes pécheresses ! Couvre-les
du manteau de ta justice, et donne-leur le repos
qui est le partage de tes enfants. Nous croyons,
Seigneur ! mais subviens à
notre faiblesse et à notre
incrédulité !
(Marc IX. 24.) Prends-nous à
toi ! Unis-nous à toi sans retour, et
que nous puissions bénir à jamais tes
miséricordes ! Donne-nous aussi une
abondante mesure de ton Esprit, pour que notre
conscience soit désormais digne de notre
vocation.
Que ton amour devienne le principe dominant de nos
affections, que ta vie soit notre modèle,
que le monde voie que nous t’avons connu, que
nous t’appartenons, et que notre
bourgeoisie est dans les cieux !
(Philipp. III. 20.) Amen !
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