Commentaire sur
l'épître aux Romains
CHAPITRE
VII.
1-4.
NE
savez-vous pas, Mes frères, (
car je
parle à ceux qui entendent ce que c'est que
la Loi) que la loi exerce son pouvoir sur l'homme
durant tout le temps qu'il est en vise ? Car
la femme qui est sous la puissance d'un mari, est
liée à son mari par la Loi, tandis
qu'il est en vie ; mais si son mari
meurt, elle est délivrée de
la loi du mari. Le mari donc étant vivant,
si elle épouse un autre mari, elle sera
appelée
adultère ; mais son mari étant mort,
elle est délivrée de la Loi ;
tellement quelle ne sera point adultère si
elle épouse un autre mari.
Ainsi, mes frères, vous êtes
aussi morts à la Loi par le corps de
Christ, pour être à un
autre, savoir à celui qui est
ressuscité des morts, afin que nous
fructifions à Dieu.
L'apôtre dans le
chapitre précédent a répondu
à la principale objection que l'on pouvait
faire à la doctrine de la justification par
la foi seule. II a montré les relations
qu'elle avait avec la mort de Christ et la
grâce de Dieu, ainsi que les motifs qu'elle
fournissait pour la sainteté
personnelle ; dans le cours de son
épître, il a déclaré que
les fidèles n'étaient pas sous la
loi ; il expose maintenant sous quel rapport
cela a lieu et il prouve qu'ils ne sont plus sous
son pouvoir de condamnation, la punition qu'elle
établit ayant été
infligée et ayant été subie
par leur rédempteur qui est mort pour
eux.
Il montre encore, d'un autre coté, quel est
le but de la loi, comme règle de conduite
liée à l'évangile, comme un
moyen de les convaincre de péché et
de les amener à abandonner leur propre
justice et à placer toute leur confiance
dans la grâce et la miséricorde de
Dieu, qui donnent aux croyants la victoire par leur
Seigneur Jésus-Christ, en
même temps qu'ils reconnaissent l'excellence
de cette loi et qu'ils tâchent de se
conformer à ses préceptes, Il est
évident que dans toute cette discussion, il
ne s'agit pas de la loi cérémonielle
en particulier ou de la dispensation Mosaïque,
mais que tout ce qu'il dit doit être entendu
de la loi de Dieu, de cette loi d'obligation
éternelle, sous laquelle tous les hommes
étaient placés depuis la
création, et qui fut depuis solennellement
proclamée sur le Mont Sinaï, et
écrite dans les oracles vivants de Dieu.
Ceux auxquels l'Apôtre s'adresse
étaient des serviteurs de Dieu et
connaissaient la loi et ses obligations, c'est
pourquoi afin d'éclaircir ce qu'il avait
à dire sur ce sujet, il se sert de l'exemple
d'une femme et de son époux ; la femme
est soumise à son mari aussi longtemps qu'il
vit, de sorte que si, avant qu'il ne mourut, elle
se mariait à un autre, elle serait
adultère ; mais après qu'il est
mort, elle est libre de ses obligations et peut
légalement s'unir à un autre.
C'est de la même manière que les
relations établies entre la loi et le
croyant n'existent plus suivant sa force propre et
originaire. Fais ceci
et tu vivras : maudit soit quiconque a
péché, (1) Cette cessation de
l'effet de la loi a eu lieu par le sang de
Jésus-Christ, qui, même a porté
nos péchés en son corps sur le
bois. » (I. Pier. II. 24) Elle a eu lieu, lorsqu'ils ont
été unis à lui dans la
conformité de sa mort. Il a aussi
été dit que ceux qui sont morts sont
justifiés de leurs péchés, la
loi relativement à eux a eu son
exécution. lis
ont été mis à mort par la loi
dans le corps de Christ, (2)
La punition leur a été
infligée comme à des coupables, et on
ne peut pas les soumettre à des peines
ultérieures. En conséquence de cette
mort, les fidèles
sont légalement unis ou mariés, (3) à celui qui
est ressuscité des morts, à celui
avec lequel ils sont aussi ressuscités pour
porter des fruits à Dieu. Il est clair
d'après cela qu'aucune oeuvre n'est reconnue
comme bonne avant la conversion et l'union actuelle
avec Christ. Toutes les actions qui paraissent
bonnes, et que les hommes font avant cette
époque sont des oeuvres mortes qui
proviennent de l'amour-propre et de l'orgueil.
« Ceux qui sont en la chair ne peuvent
point plaire à Dieu. »
(Rom. VIII. 8) Et Jésus dit à ses
disciples : « Demeurez en moi et moi
en vous ; comme le sarment ne peut point de
lui-même, porter de fruit s'il ne demeure au
cep, vous ne le pouvez point, aussi si vous ne
demeurez en moi. » (Rom. XV. 4) Pour que les hommes fassent de
bonnes oeuvres, il faut qu'ils soient
créés en Jésus-Christ pour les
faire. (Eph. II. 10)
5-6.
Car quand nous étions en la
chair, les affections des péchés
étant excitées
par la
Loi,
avaient vigueur en nos
membres, pour fructifier à la mort.
Mais maintenant nous sommes délivrés
de la Loi, la Loi par laquelle nous
étions retenus étant morte ;
afin que nous servions Dieu en nouveauté
d'esprit, et non point en vieillesse de lettre.
L'Apôtre emploie ici le mot chair dans le sens qu'il a souvent dans le
Nouveau Testament, ainsi que dans ce chapitre et le
suivant, où il signifie la nature humaine
totalement corrompue que les hommes
reçoivent en naissant. Cette expression est,
dans ce sens, opposée à
esprit,
qui indique cette
nature nouvelle et sainte qui est
communiquée par l'esprit de Dieu dans la
régénération. C'est ainsi que
la chair et l'esprit sont opposés l'un
à l'autre dans l'épître aux
Galates, (Gal. V. 17) et on y voit que par les oeuvres de
la chair, on n'entend pas seulement les passions
déréglées du corps, et
l'action de s'y abandonner, mais encore tous les
vices qui n'ont point avec le corps de relation
sensible, tels que l'orgueil, la malice,
l'envie.
« Ce qui est né de la
chair » dit Jésus-Christ à
Nicodème, « est chair, et ce qui
est né de l'esprit est esprit. »
(Jean III. 6) Ces paroles de Notre-Seigneur
expriment, comme nous l'avons déjà
vu, avec exactitude la véritable raison sur
laquelle est fondée
la nécessité
d'une régénération, d'un
changement d'esprit, d'un nouveau coeur, ce qui est
répété aussi dans plusieurs
autres endroits de l'écriture ; la
corruption, la dépravation de l'homme en
général, ou sa nature comme corrompue
et pécheresse, sont appelées
la chair,
parce que cette
nature perverse appartient à
l'humanité ou à la race d'Adam. Les
hommes l'ont en eux-mêmes et ils l'ont par
leur naissance.
La nature de l'homme laissée à
elle-même, abandonnée de l'esprit de
Dieu, comme le fut l'homme lors de sa chute, n'a
dès lors aucun principe de sainteté
et est excessivement corrompue, entièrement
pervertie et dégradée ; ainsi le
mot chair,
qui signifie
homme, a pris dans l'écriture le
sens de l'homme comme il est en lui-même,
dans son état naturel d'avilissement et de
perdition ; d'un autre côté, le
mot esprit
a pris le sens d'un
principe saint et divin, ou d'une nature nouvelle,
parce qu'il ne vient pas de l'homme, mais de Dieu
qui le communique par une influence vive et
permanente de son esprit saint.
L'apôtre Pierre, en s'adressant aux
fidèles, leur dit qu'ils « ont
été faits participants de la nature
divine. » (II. Pier. I. 4) Ce que dit ici Paul, se rapporte
à son propre état avant qu'il fut
régénéré, et à
celui où se trouvaient les fidèles
auxquels il s'adresse avant d'avoir
été les objets de la même
régénération. Dans cette
situation, lorsqu'ils étaient
dans la
chair, les
désirs et les affections défendus par
la loi, se montraient avec force et agissant sur
toutes les facultés de leur nature
dépravée, les assujettissaient
à la mort par la sentence de la loi. Mais
depuis qu'ils étaient morts avec Christ,
depuis que le châtiment de leur
péché avait été subi
par lui, leurs premiers rapports avec la loi,
étaient dissous et ils étaient
affranchis du pouvoir de condamnation sous lequel
ils étaient avant leur union avec le
Sauveur.
L'amour de Dieu ayant été
répandu dans leurs coeurs, ils jouissaient
de tous les privilèges de la grâce de
la nouvelle alliance, ils étaient devenus
capables de servir Dieu, selon le sens spirituel
des préceptes de la loi, comme ses enfants,
avec une affection cordiale, avec reconnaissance,
sous l'influence du Saint-Esprit, avec cette nature
nouvelle et divine à laquelle ils ont eu
part, et non pas seulement avec l'observation
extérieure de la lettre de la loi.
Ainsi ils lui obéissaient librement et du
fond de leurs coeurs, et ne lui rendaient pas,
comme des esclaves, par la seule crainte de la
punition, une obéissance froide, contrainte,
affectée et purement extérieure.
7-8.
Que
dirions-nous donc ? la Loi est-elle
péché ? à Dieu ne
plaise ! au contraire, je n'ai point connu le
péché, sinon par la Loi
car je
n'eusse pas connu la convoitise, si la Loi n'eut
dit,
tu ne
convoiteras point. Mais le péché
ayant pris occasion par le commandement, a produit
en moi toute sorte de convoitise ; parce que
sans la Loi le péché est
mort.
Lorsque l'Apôtre dit que ceux à qui il
écrit, pendant qu'ils étaient sous
cette première disposition de la loi,
fais ceci et tu
vivras,
étaient sous la malédiction,
jusqu'à ce qu'ils fussent rachetés
par Christ, veut-il dire que la loi soit injuste ou
fautive ?
Qu'elle cause les péchés des hommes
ou du moins qu'elle empêche que leur
obéissance ne soit agréable à
Dieu ?
Il se contente, suivant sa coutume, de rejeter avec
force une telle idée. Il déclare que
bien loin qu'il en soit ainsi, la Loi et le
péché sont directement
opposés, puisque c'est la loi qui
découvre et condamne le péché,
il en rappelle là-dessus à sa propre
expérience. Il n'aurait point
été en garde contre la
culpabilité des convoitises, (4) si la loi n'avait
dit : tu ne
convoiteras point.
Il n'aurait pas
supposé qu'étant exempt de
l'adultère, du vol, et d'autres violations
de la loi, extérieures et grossières,
il fût cependant aussi criminel et aussi
exposé à la colère de Dieu,
pour le simple désir d'un plaisir illicite
ou d'un objet qui ne lui était pas
accordé.
Il n'aurait pas même ressenti l'action de ces
convoitises insatiables, si elles n'avaient eu
l'occasion de paraître par la
sévérité du commandement, car
c'est l'impatience des obstacles qu'il
éprouve qui donne au péché
l'occasion d'exciter toutes sortes de désirs
criminels, et sans la loi, le péché
ou la nature corrompue, ne rencontrant point
d'opposition, son opération n'aurait point
été aperçue. Il était
mort.
Le principe pécheur, quoique son existence
ne soit pas due à la loi, était dans
un état de mort ou de sommeil, et les
mêmes affections, les mêmes actions,
n'eussent point été destructives, si
la loi n'avait donné au péché
sa puissance de condamner : « La
puissance du péché c'est la
loi. » (I. Cor. XV. 56)
9-11.
Car
autrefois que j'étais sans la Loi, je
vivais ; mais quand le commandement est
venu,
le
péché a commencé à
revivre. Et moi je suis mort ; et le
commandement qui m'était ordonné
pour
être ma vie, a été
trouvé me tourner à mort. Car le
péché prenant
occasion du commandement, m'a
séduit, et par lui m'a mis à
mort.
Avant que Paul n'entendît le vrai sens de la
loi, il ignorait sa
spiritualité ; il était
seulement attentif à la lettre, et par
conséquent, n'avait aucune connaissance
exacte de sa corruption intérieure.
Il croyait que son coeur et sa conduite
étaient bons, et qu'il était dans un
état tel, qu'il était agréable
à Dieu. Mais lorsque sa conscience sentit le
poids du commandement, par la conviction que lui
donna l'Esprit saint, lorsqu'il connut la justice,
la sévérité et
l'étendue de ses dispositions, ses terrible
menaces, alors les convoitises de son coeur, qui
jusqu'alors avaient été endormies,
prirent une nouvelle activité, et chaque
effort qu'il tentait pour accomplir les
préceptes qui lui étaient
imposés, ne faisait que lui montrer
davantage quelle était son impuissance pour
y parvenir ; c'est ainsi que le
péché qui semblait mort renaquit,
avec de nouvelles forces, et lui mourut.
Toutes les espérances fondées,
sur ce qu'il était en lui-même,
étaient détruites, et il
découvrait qu'il était pécheur
et condamné par la loi, ainsi qu'il le dit
ailleurs. « Par la loi je suis mort
à la loi. »
(Gal. II. 19) De sorte que la loi
dont la promesse était que celui qui
l'observait vivait par elle, cette loi faite pour
des créatures saintes, et dont Paul, quoique
pécheur, attendait jadis la justification,
cette loi le soumettait à la mort et
occasionnait même un accroissement de
culpabilité en lui.
Le péché ou la dépravation de
la nature tombée, étant
opposés à la sainte
sévérité de la loi de Dieu, le
séduisait
(5) par ses
tromperies., l'engageait dans des transgressions,
et le soumettait à toute la puissance de sa
condamnation ; de sorte que le
péché l'avait mis à mort par
la loi.
12-14. La loi donc est
sainte,
et le commandement
est saint,
juste et bon. Ce
qui est bon, m'est-il devenu mortel ?
nullement ! mais le
péché, afin qu'il parût
péché, ma causé la mort par le bien
afin que le péché fût rendu par
le commandement excessivement péchant. Car
nous savons que la loi est spirituelle ; mais
je suis charnel,
vendu au
péché.
L'objection supposée dans le septième
verset étant complètement
résolue, et la loi se trouvant dans une
opposition directe avec le péché dont
elle augmente l'activité, qu'elle
découvre et qu'elle condamne, on doit
convenir qu'elle est sainte dans sa nature
et très éloignée de tout mal
moral, juste dans ses commandements,
n'exigeant tien que ce qui est dû à
Dieu et à notre prochain, et bonne
dans tous ses objets.
Mais on représente encore ici la même
question. Comment ce qui était bon en
soi-même, était-il la cause de la mort
de Paul ?
Il éloigne une telle supposition. C'est son
propre péché qui avait causé
sa mort ; la loi n'est point la cause
de ses péchés ; elle ne lui
fournit aucun prétexte pour offenser Dieu,
mais le péché en prend occasion
(6) pour le
faire.
De même que l'homme criminel se sert de la
patience et de la longue attente de Dieu, pour
aller plus avant dans sa rébellion contre
lui, de même le péché en le
soumettant à la mort en vertu d'une loi
juste, manifeste sa profonde malignité, sa
nature détestable et destructive.
Ce que l'Apôtre prouve ici, ne peut admettre
aucun doute. On savait bien que la loi était
spirituelle ; le Seigneur Jésus
lui-même, l'a expliquée comme ne
donnant pas seulement des règles pour la
conduite extérieure, mais comme
s'étendant à toutes les
pensées et à tous les désirs
du coeur.
(Matt. V. 28) Ainsi la loi prend
connaissance de toutes les choses tant du dedans
que du dehors, demandant une conformité
entière à l'excellence spirituelle
des perfections divines, et un état du coeur
qui soit approuvé par celui qui est
Esprit, et elle ne reconnaît pour bon que
ce qui est fait par les motifs les plus purs et les
plus excellents, par un amour parfait, et par
reconnaissance envers le Créateur.
En parlant de la lettre ou de la forme
extérieure de la loi, l'Apôtre dit
qu'il était sans reproche,
(PhiI. III. 6) ou même
que par rapport à sa conduite publique ou
à l'égard des hommes, il pouvait
affirmer qu'il avait vécu parmi les
fidèles, « saintement, justement
et sans reproche. »
(I. Thess. II. 10) Mais en s'occupant
comme il le fait ici, de ce qui est
intérieur, en se comparant avec la
règle très sainte, il se trouve
charnel et vendu pour commettre le
péché.
Sa nature était entièrement
opposée à la loi spirituelle, et
malgré la grâce qu'il avait obtenue,
il se trouvait encore bien loin de la perfection,
et, sous tous les rapports, incapable d'y
atteindre, quoiqu'il désirât ardemment
d'y parvenir. Il se voyait lui-même comme un
homme comparativement charnel, esclave, vendu
contre son gré
à un maître
odieux qui ne veut pas lui laisser les moyens
d'acquérir sa liberté. Un homme est
d'autant plus charnel qu'il accomplit moins
exactement la loi de Dieu. Dans ce verset, Paul,
parlant de ces combats intérieurs qui se
passaient en lui, et de son expérience comme
fidèle, change le temps passé en
présent ; et il continue ainsi,
jusqu'à la fin de ce même
chapitre.
15-20. Car je n'approuve point ce que je
fais,
puisque je ne fais
point ce que je veux, mais je fais ce que je hais. Or si
ce que je fais, je ne le veux point, je reconnais par cela même que la Loi est bonne. Maintenant
donc ce n'est plus moi qui fais cela ; mais
c'est le péché qui habite en moi. Car
je sais qu'en moi,
c'est-à-dire, en ma chair, il n'habite point de
bien ; vu que le vouloir est bien
attaché à moi, mais je ne trouve pas
le moyen d'accomplir le bien. Car je ne fais pas le
bien que je veux, mais je fais le mal que je ne
veux point. Or si je fais ce que je ne veux
point,
ce n'est plus moi
qui le fais,
mais
c'est
le
péché qui habite en
moi.
Le mauvais principe dont parle l'Apôtre
était si puissant et si actif en lui qu'il
le livrait à des volontés, à
des paroles, à des actions qu'il
n'approuvait pas ou qui même étaient
condamnés par son esprit
renouvelé.
Quoiqu'il désirât ardemment de rendre
une parfaite obéissance à la loi de
Dieu, et qu'il y fût entièrement
déterminé, cependant il se trouvait
toujours hors d'état de le faire et en
même temps qu'il détestait toutes les
espèces et tous les degrés de
péché, il trouvait impossible de
s'abstenir entièrement de les commettre.
Mais de tout cela il résultait clairement,
qu'il reconnaissait la bonté de la loi en
même temps qu'il était condamné
par elle.
Malgré la propension naturelle au mal qui
était si forte chez lui, le penchant
prédominant de son âme était
vers la sainteté ; c'était ce
que son jugement approuvait et dans les
pénibles combats qu'il avait à
soutenir contre ses inclinations, c'est là
le côté qu'il était
décidé à suivre. Aussi fait-il
une distinction entre les jugements et les
désirs de l'homme renouvelé et ceux
de sa nature corrompue.
À cause de ces derniers, il ne peut faire ce
qu'il veut, mais les premiers lui montrent qu'il
est conduit par l'esprit.
(Gal. V. 16. 17) II n'y a rien dans
cela, qui tende le moins du monde à
justifier ou à excuser le
péché. Au contraire, Paul en parle
dans tout ce passage avec la plus grande horreur,
mais tout ce qu'il dit tend à montrer que la
justification ne peut dans aucun cas être par
la loi.
(Gal. II. 21)
Il est évident par la limitation contenue
dans le
v. 18, en ma chair, que
l'Apôtre parle ici comme un croyant, et que
la grâce habitait en lui
aussi bien que le péché. Comme nous
l'avons déjà dit, et comme il sera
clairement prouvé dans le chapitre suivant,
il n'entend pas par le mot chair, le corps
matériel, comme étant distinct de
l'âme, mais la nature humaine en tant qu'elle
est perverse et corrompue, telle qu'elle est
dérivée d'Adam après sa chute,
et qui, bien qu'elle soit crucifiée dans le
croyant, n'est point encore entièrement
détruite, ne le sera complètement
qu'à la mort et lutte toujours contre
l'Esprit : En ma chair il n'habite rien de
bon.
Paul connaissait alors cette
vérité par l'expérience qu'il
n'avait pu faire avant sa conversion. Il avait cru
d'abord, qu'il y avait naturellement dans l'homme
quelque légère disposition au bien,
ou une capacité morale de parvenir à
la sainteté ; ensuite son
expérience, lui avait fait abandonner en
entier ces suppositions.
Comme régénéré, il
avait à la vérité une
volonté habituelle d'obéir à
la loi de Dieu, et d'accomplir le bien qu'elle
exigeait de lui, cependant sa nature corrompue s'y
opposait tellement qu'il ne pouvait faire tout
celui qu'il désirait habituellement, que
dans bien des occasions il ne pouvait atteindre ce
but et que souvent même il faisait en quelque
sorte ou à quelque degré, le mal
qu'il désirait habituellement
d'éviter.
Il est clair par là qu'il était
constamment déconcerté et
embarrassé dans l'exécution de ses
desseins vifs et persévérants pour
obéir à la loi de Dieu ; de
sorte cependant, que ce n'était pas
précisément lui-même comme
fidèle qui péchait, que
c'était la corruption naturelle, qui restait
en lui.
Cela est répété deux fois aux
versets
17 et
20 et dans les mêmes
paroles.
21-23. Je trouve donc cette loi au-dedans
de moi,
que quand je veux
faire le bien, le mal est attaché à
moi. Car je prends bien plaisir à la loi de
Dieu quant à l'homme intérieur. Mais
je vois dans mes membres une autre loi, qui combat
contre la loi de mon entendement, et qui me rend prisonnier à
la loi du péché, qui est dans mes membres.
En résultat, l'Apôtre trouve une loi,
un principe opérant fortement en lui, qui
était toujours présent et actif, pour
le retarder dans la carrière qu'il
parcourait. Cependant il n'était plus sous
son empire, puisqu'il prenait plaisir à la
loi de Dieu quant à l'homme
intérieur, (7)
Il était comme une nouvelle
créature, née à Dieu,
régénérée dans l'esprit
de son entendement, qui se plaît à la
loi de Dieu dans toute sa
spiritualité ; il ressentait
dans ses membres l'influence
d'un autre principe puissant, cette tendance au mal
qui caractérise le vieil homme, et qu'il
distingue ici de nouveau de son homme
intérieur et de sa nature renouvelée
qu'il désirait perfectionner.
C'est ce penchant naturel qui faisait une guerre
perpétuelle à l'oeuvre de la
grâce en son âme, la poussant à
ce qui est mal et tendant sans cesse à la
mettre sous le pouvoir du péché.
Rien ne démontre mieux l'état
déchu de l'homme et l'entière
corruption de sa nature, que cet état
continuel d'une guerre irréconciliable
qu'elle soutient, même dans les coeurs des
fidèles, contre la nature divine, dont par
la grâce de Dieu ils ont été
faits participants.
Après une peinture si vive du combat violent
qu'il y a entre la chair et l'esprit,
c'est-à-dire entre la nature primitive et
corrompue de l homme, et cette nature nouvelle
qu'il reçoit de Dieu, comment y a-t-il un
seul homme, parmi ceux qui prétendent croire
aux écritures, qui puisse affirmer que les
hommes sont nés purs, ou nier qu'ils
sont entièrement corrompus dès leur
origine ?
« Si la nature de l'homme est si mauvaise
que, dans ceux-là même qui sont
renouvelés dans l'esprit, non seulement elle
ne peut pas faire d'efforts vers le bien, mais
qu'au contraire, elle y combat contre les
impressions de la grâce, comment pourrait-on
supposer que dans ceux qui, loin d'être
régénérés, sont encore
les esclaves de Satan, il existe la moindre
tendance à des efforts ou à des
actions vertueuses ? »
Lorsque dans l'heure des
ténèbres, le prince de ce monde vint
attaquer le Rédempteur, il ne
possédait rien en lui
(Jean XIV. 20). II ne trouva point de
corruption sur laquelle ses tentations puissent
faire de l'effet ; mais quand il attaqua
l'apôtre Pierre, il trouva prise sur lui. Il
le vainquit au point de lui faire abandonner et
renier son maître malgré la plus ferme
et la plus sincère résolution, et il
serait entré en lui, aurait pris possession
de lui comme de Judas, si le Seigneur n'avait
prié pour que sa foi ne
défaillît point,
(8)
(Luc XXII. 3.
31. 32) Aussi Paul déclare
ailleurs que nous n'avons pas à combattre
contre la chair et le sang (que nous n'avons pas
seulement à résister à notre
nature corrompue, à
l'opposition du monde et ses habitudes
dépravées ), mais contre les
principautés, contre les puissances, contre
les seigneurs du monde, gouverneurs des
ténèbres de ce siècle, contre
les malices spirituelles qui sont dans les lieux
célestes. »
(Eph. VI. 12)
24-25. Ha ! misérable que je suis, qui
me délivrera du corps de cette mort ?
Je rends grâces à Dieu par
Jésus-Christ notre Seigneur. Je sers donc
moi-même de l'entendement à la loi de
Dieu,
mais de la chair,
à la loi du péché.
Trouvant en lui cette violente résistance,
sentant son esprit divisé par les deux
principes opposés de la nature et de la
grâce, mais entièrement
décidé sur le choix, l'Apôtre
s'écrie avec amertume, Qui me
délivrera du corps de cette mort ?
Ayant la triste certitude qu'il ne peut par
lui-même se relever, il se réfugie
dans la miséricorde de Dieu ; il se
jette dans les bras de son rédempteur,
« parce qu'il peut toutes choses en
Christ qui le fortifie,
(Phil. IV. 13) et qu'en lui, il est
plus que vainqueur.
(Rom. VIII. 37) Grâces à
Dieu, s'écrie-t-il, qui nous a donné
la victoire par Notre Seigneur Jésus-Christ.
(I. Cor. XV. 57)
Telle est la description exacte de l'état de
guerre que chaque chrétien éprouve
aussi longtemps qu'il est en son corps, et tel,
suivant la mesure de grâce qui lui a
été départie, est son langage
triomphant et les ferventes actions de grâces
qu'il rend à Dieu pour le moyen de salut qui
lui a été accordé par
Jésus-Christ, par qui il a des arrhes et de
sûres espérances d'une
délivrance finale qui sera complète,
et d'une victoire glorieuse qui terminera
l'état de guerre spirituelle qu'il a
soutenue.
Le combat que l'Apôtre décrit ici, le
plaisir que l'on trouve dans la loi de Dieu, et
l'accord du coeur avec les préceptes saints
et sévères de la loi, sont des choses
qui sont particulières aux
régénérés.
Ceux qui connaissent l'excellence de cette loi,
ceux qui portent toutes leurs vues à
l'obéissance envers Dieu, ceux qui ont la
faim et la soif de la justice, sentiront la force
du langage que l'Apôtre emploie ici ;
elle résulte du haut degré de
sanctification auquel il était parvenu, de
sa haine pour le péché et de sa
profonde humilité.
Ce combat était la plus pénible de
ses épreuves, au point que lui-même se
regardait comme misérable. La demeure du
péché en lui le retardait dans sa
carrière et tourmentait tellement les
inclinations saintes de l'homme spirituel, qu'il
comparait sa situation à celle de ces
personnes, qui, en punition de leurs crimes,
étaient enchaînées à un
cadavre et obligées de le traîner sans
cesse avec elles.
Si l'Apôtre n'avait pas été un
homme intègre, il n'aurait point
parlé de lui-même aussi
sincèrement qu'il le fait ici. Il aurait
fait comme plusieurs autres. Il aurait
présenté les choses, sous le point de
vue le plus favorable. Il n'aurait point
découvert entièrement son coeur, et
dans le temps que les églises l'admiraient,
il ne leur aurait point dévoilé ce
qui se passait en lui.
Nous voyons ici une simplicité et une
humilité réelles ; il n'y avait
plus en lui rien de Pharisien. Le Pharisien est
devenu Publicain.
La vérité se montre ; il
dit : y a-t-il un homme qui gémisse
sous un corps de pèche et de mort ? qui
en sondant son coeur trouve qu'en lui,
c'est-à-dire, en sa chair, il ne demeure
rien de bon ? Telle est ma situation,
ajoute-t-il, et si j'ai quelque chose dont je
puisse me glorifier, c'est en Jésus-Christ
et non en moi-même. « Qui est-ce
qui peut dire j'ai purifié mon coeur et je
suis net de mon péché.
(Prov. XX. 9) Certainement il n'y a
point d'homme juste sur la terre, qui agisse
toujours bien et qui ne pèche point.
(Eccl. VII. 20) Car nous
péchons tous en plusieurs
choses. »
(Jacq. III. 2)
La preuve que l'Apôtre parle depuis le
v. 7, de sa propre
expérience, et que son discours se rapporte
au temps écoule depuis sa conversion et
à l'époque où il
écrivait cette épître, la
preuve de ce fait est pleine et entière.
I. Dans ce passage Paul s'exprime à
la première personne plus de quarante
fois ; mais au lieu (alors) que du
7.e verset au 14.e, il employait le
passé, il parle ensuite de lui-même,
toujours au présent, sans donner aucune
indication qu'il ait l'intention de parler d'un
autre.
Son objet déclaré est de montrer que
la loi ne peut rien pour aucun pécheur (il a
déjà prouvé que tout homme
l'est) qu'elle ne peut ni le justifier, ni le
sanctifier, et que le fidèle en est toujours
convaincu.
Il affirme qu'à la fin il triomphe en
Christ, et cependant il déclare qu'il
continue à éprouver un état de
guerre intérieure, et il conclut en disant,
« je sers donc moi-même, de
l'entendement à la loi de Dieu, mais de la
chair la loi du
péché. »
On ne peut pas soupçonner qu'en disant
moi-même, il ait voulu parler d'un
autre, ni qu'il voulût ainsi affirmer qu'un
homme non converti pût servir la loi de Dieu
ou triompher en Christ.
II. Il fait contraster son premier
état avec celui où il est depuis
qu'il a connu le vrai sens de la loi. Il
déclare qu'autrefois il entretenait par
ignorance une haute opinion de sa
piété et de la sûreté de
l'état où il était :
« Autrefois que j'étais sans la
loi je vivais. » Nous voyons la
même vérité dans
d'autres parties de ses
écrits, où il parle de sa
sincérité, de son zèle
religieux, de son irréprochabilité
avant sa conversion,
(Act. XXVI. 4. 5-9.
Gal. I. 14.
Phil. III. 4-6) quoiqu'il ait
jugé depuis, que dans ce temps-là
même il était un blasphémateur,
un persécuteur, un oppresseur, de sorte
qu'après même qu'il fut devenu
apôtre, il s'appelle le chef des
pécheurs.
(I. Tim. I. 13.15)
Autrefois il était dans la chair,
n'ayant que sa nature originairement corrompue,
et qu'il appelle péché ; depuis,
quoique la chair ou le péché
demeurât en lui, il n'était plus sous
son empire, il ne marchait pas dans sa voie et
quoiqu'il le fatiguât beaucoup. La nouvelle
nature qu'il avait reçue prédominait
en lui ; et c'est pour cela qu'il
établit pleinement l'opposition qui est en
lui-même entre le vieil homme crucifié
à la vérité, mais non encore
détruit, et la nouvelle nature. C'est la
doctrine uniforme de toutes ses
épîtres et de toute l'écriture
dans la partie historique, aussi bien que dans
celle qui est dogmatique.
C'est conformément à elle et
d'après ce qu'il expose ici, qu'il exhorte
les Saints à Éphèse,
à chacun desquels il croyait que la
grâce avait été donnée,
à dépouiller le vieil homme,
(Eph. IV. 7.
22) et toutes les autres
exhortations qu'il adresse aux fidèles, sont
établies sur le même fondement.
III. Dans d'autres parties de ses
écrits, où il n'y a point de doute
que Paul ne parle de lui-même comme
apôtre, il se montre également
convaincu que le péché habite en lui,
et déclare exactement comme il le fait ici,
qu'il est mort par la loi.
(Gal. II. 19)
L'expression la plus énergique dont il se
serve ici, c'est qu'il est charnel, vendu au
péché, mais nous trouvons ailleurs,
qu'il applique le mot charnel, aux
saints, enfants en Christ, qui
étaient « appelés par Dieu
à la communion de son Fils, » et
qui devaient être « affermis jusque
à la fin, pour être,
irrépréhensibles dans la
journée de Notre Seigneur
Jésus-Christ.
(I. Cor. III. 1. 2.) »
IV. Il y a encore dans ce récit deux
circonstances qui seraient décisives quand
même il ne contiendrait rien de plus.
D'abord l'Apôtre affirme qu'il prend plaisir
de la loi de Dieu, quant à l'homme
intérieur. Mais se plaire dans cette loi
bonne, juste, sainte et spirituelle, haïr tout
mal, aimer tout bien, et être
profondément touché de ne pouvoir
effectuer ce bien que l'on chérit par-dessus
tout, c'est une chose qui est particulière
aux régénérés. Elle est
bien différente de ce que disait un
Païen : Je vois le bien, je l'approuve
et je fais le pire. C'est ce qu'un homme peut
dire sans avoir de repentance, et c'est ce que
beaucoup disent en effet. C'est ainsi qu'un autre
Païen, sentant son
esprit divisé entre l'ambition et les
plaisirs des sens, se plaignait d'avoir deux
âmes à la fois. Ces
déclarations d'ailleurs, annoncent un
état de l'âme, non-seulement
différent, mais totalement opposé
à celui dont parle l'Apôtre. Elles
contiennent une reconnaissance pleine et
entière de cet empire du
péché, dont la puissance est
éprouvée par tous ceux qui ne sont
point convertis.
Avant sa conversion, l'homme tout entier sert la
loi du péché, quelle que soit la
très faible opposition de sa conscience, de
la crainte et de la honte qu'il peut avoir,
jusqu'à ce que l'usurpateur soit à la
fin détrôné, et que la
grâce règne dans le coeur qui lui
était auparavant soumis. C'est alors et ce
n'est qu'alors que l'homme suit ce qui est bon, et
qu'il « prend plaisir à la loi de
Dieu quant à l'homme
intérieur. »
« Grand Dieu ! j'ai pris plaisir
à faire ta volonté, et ta loi, est
au-dedans de mes entrailles. »
(Ps. XL. 9) Se plaire dans la loi de
Dieu et le craindre, sont des choses
inséparables, et le Saint-Esprit appelle
bienheureux, ceux qui ont ce sentiment.
« Bienheureux est l'homme qui craint
l'Éternel et qui prend un plaisir singulier
à ses commandements. »
(Ps. CXII. 1)
C'est même par cette déclaration que
commence le livre des Psaumes.
« Bienheureux est l'homme qui ne vit
point suivant le conseil des méchants et qui
ne s'arrête pas dans la voie des
pécheurs, et qui ne s'assied pas au banc des
moqueurs, mais qui prend plaisir en la loi de
l'Éternel, et qui médite jour et nuit
en sa loi. »
(Ps. I. 1-2)
Ainsi tout homme qui prend plaisir à la loi
de Dieu est bienheureux, et qui oserait
affirmer qu'un homme non converti est
bienheureux ? La peinture que
l'Apôtre fait de son expérience
intérieure, est totalement inapplicable
à d'autres qu'aux croyants. Loin de se
plaire à cette loi de Dieu, dont le premier
commandement est : « Tu aimeras
Dieu de tout ton coeur ; »
l'affection de la chair est inimitié
contre Dieu, car elle ne se rend point
sujette à la loi de Dieu, et aussi ne
le peut-elle point.
(Rom. VIII. 7) Tel est l'état
de l'homme non converti.
V. L'autre circonstance qui prouve que cette
peinture expressive se rapporte à Paul,
apôtre, c'est qu'il n'en espère aucun
soulagement que par Jésus-Christ, et qu'il
s'exprime dans les mêmes termes qu'il emploie
en parlant aux Corinthiens, dans un passage
où il s'agit de lui-même, et de sa
renaissance avec eux pour l'immortalité
bienheureuse. « Grâces à
Dieu qui nous a donné la victoire par
Notre-Seigneur Jésus-Christ.
(I. Cor. XV. 57).
Cette expression serait-elle applicable à un
homme non converti ?
VI. Enfin, dans un autre endroit où
il parle de l'expérience des
chrétiens ; il affirme exactement les
mêmes choses que dans ce passage.
« La chair convoite contre l'esprit et
l'esprit contre la chair, et ces choses sont
opposées l'une à l'autre, tellement,
que vous ne faites pas les choses que vous
voudriez.
(Gal. V. 17)
Il est aisé de voir combien il était
convenable que l'auteur de cette
épître rapportât la propre
expérience en peignant les travaux du coeur
de l'homme et non sa conduite
extérieure ; rien n'était plus
propre à éclaircir sa doctrine sur la
culpabilité et la dépravation
humaine, sur l'universalité de la maladie
invétérée du
péché, que de voir qu'elles
étaient capables de s'opposer avec autant de
force aux principes de la vie nouvelle.
Sous ce point de vue, ce passage est parfaitement
d'accord avec le dessein que l'Apôtre s'est
proposé dans cette épître, et
en même temps la consolation qu'il trouve
dans la doctrine de Jésus-Christ,
démontre clairement que les peines
éprouvées dans les combats
intérieurs ne sont point incompatibles avec
la bienheureuse assurance de la vie
éternelle,
(9)
C'était sa jouissance habituelle, ainsi
qu'il le déclare en plusieurs endroits.
(II. Cor. V. 1. 5.
Phil. I. 23.
II. Tim. IV. 8)
L'exposition que l'Apôtre fait de son
état et ses plaintes sur la corruption qui
demeure en lui, correspondent parfaitement, d'un
côté avec les instructions que nous
donnent l'ancien Testament aussi bien que le
nouveau, relativement à la
piété et à la dévotion
envers Dieu, et de l'autre avec les fautes des plus
saints personnages qui faisaient des chutes,
commettaient des péchés, que
l'histoire nous rapporte en même temps
qu'elle rappelle leur horreur pour le mal.
« Je suis un homme vil.
(Job. XXXIX. 37 / -40: 4))
Hélas moi ! Car c'est fait de moi,
parce que je fuis un homme souillé des
lèvres.
(Es. VI. 5)
Mon âme est attachée à la
poudre.
(Ps. CXIX. 25)
Certainement je suis le plus
hébété de tous les hommes.
(Prov. XXX. 2)
Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme,
pécheur. »
(Luc. V. 8)
Le Seigneur dit aux apôtres Jacques et Jean,
vous ne savez quel esprit vous avez ;
(Luc. IX. 55) et peu après
qu'il eût dit à Pierre que ce
n'étaient ni la
chair ni le sang qui lui avaient
révélé ces choses, mais Dieu
lui-même, après lui avoir promis les
clefs du royaume des cieux, il lui fait la
réprimande la plus sévère que
l'Apôtre pût recevoir :
arrière de moi, Satan, tu m'es en
scandale, car tu ne comprends point
les choses qui sont de Dieu,
mais celles qui sont des hommes.
(Matt. XVI. 17-23)
En un mot, toutes les plaintes des saints sur le
pouvoir du péché, leurs vifs et
ardents désirs de la sainteté, dont
nous trouvons tant d'exemples dans
l'écriture, et surtout dans le livre des
Psaumes, coïncident parfaitement avec les
plaintes de Paul, et viennent de la même
cause : le plaisir qu'ils prennent à
la loi de Dieu, et la pénible conviction
qu'ils ont qu'il reste encore dans leur coeur bien
des choses qui ne sont pas conformes à cette
sainte règle. Cette humble confession et ces
profondes lamentations sont bien loin de la
disposition et de la conduite des esclaves
volontaires de leurs convoitises, et la
sincérité avec laquelle les croyants
les plus éminents par leur
piété, adoptent ce langage, montrent
combien il convient à leur sentiment vif de
l'horreur du péché et de leur propre
bassesse.
Ce passage est donc parfaitement convenable pour
consoler le fidèle qui
« connaît la plaie de son
coeur, »
(I. Rois. VIII. 38) au milieu de ces
rudes combats spirituels, inconnus à tout le
monde excepté à lui-même et au
scrutateur des coeurs. Il est quelques-uns de ces
croyants qui n'ayant point examiné avec
assez de soin ce passage, et étant
égarés par de fausses
interprétations, s'écartent du sens
naturel et craindraient d'appliquer ces paroles
à Paul, l'Apôtre de
Jésus-Christ. Lorsqu'ils l'auront
considéré sous le point de vue
convenable, ils béniront Dieu pour les
consolations et les instructions qu'il pourra leur
fournir, tandis que toute cette peinture, sous le
même aspect, ne sera que folie pour
ceux, qui, n'étant chrétiens que de
nom, ne peuvent point avoir fait de telles
expériences.
Nous voyons dans ce chapitre que les fidèles
sont affranchis de la condamnation de la loi, mais
qu'elle continue à être la
règle de leur devoir. Le Saint-Esprit s'en
sert afin de les convaincre qu'ils sont
pécheurs, et de les engager à
s'attacher au Seigneur Jésus, pour le pardon
de leurs offenses et leur entier affranchissement
du pouvoir du péché.
Plus un chrétien s'approche de la
ressemblance avec Christ, et plus ces vues sur le
salut l'affectent profondément, plus il sent
dans son âme la nécessité de
lui appliquer constamment le sang de
l'expiation : cette « source qui est
ouverte en faveur de la maison de David, et des
habitants de Jérusalem pour le
péché et pour, la
souillure. »
(Zach. XIII. 1) Ainsi plus un homme a
reçu de la grâce, plus il a aussi le
sentiment de sa propre indignité, de la
miséricorde libre de Dieu, et par
conséquent plus il aura
d'humilité.
L'accroissement de la grâce tend non
seulement à faire penser aux saints que leur
perversité est extrêmement grande, ce
qui est vrai, mais encore que la difformité
de la faute la plus légère, ou du
plus léger degré de
dépravation, est si grand, qu'elle l'emporte
de beaucoup sur la beauté du plus haut
degré de sainteté, qu'ils puissent
atteindre, ce qui est également vrai. Car le
moindre péché contre un Dieu infini,
a une qualité infiniment odieuse, et
infiniment horrible ; tandis que le plus haut
degré de sainteté dans une
créature, ne peut pas avoir une perfection
infinie.
Par conséquent sa beauté n'est rien
en comparaison de la difformité du
péché. Que le péché
soit infiniment haïssable, c'est ce que l'on
peut démontrer évidemment, parce que
le mal, l'iniquité, la difformité qui
sont en lui consistent dans la violation d'une
obligation, en étant, ou en faisant
autrement que l'on n'était obligé
d'être, ou de faire, et d'après
cela, l'iniquité de la violation est
d'autant plus grande que l'obligation à
laquelle on était soumis était plus
grande elle-même.
Or certainement l'obligation d'aimer ou d'honorer
un être, est d'autant plus grande, qu'il est
plus digne d'être aimé et
honoré. Nous sommes assurément
obligés d'aimer davantage ce qui est plus
aimable, que ce qui l'est moins ; et si un
être a le droit d'être infiniment
aimé de nous, notre obligation de l'aimer
est infiniment grande, et par conséquent ce
qui sera contraire à cet amour, sera
infiniment inique, odieux et horrible.
Plus un homme a reçu de lumières
spirituelles, plus donc il paraîtra à
ses propres yeux horrible et défiguré
par le péché, et moins ce qu'il a de
bonté lui paraîtra proportionné
à sa méchanceté. En
vérité elle est comme rien ;
elle est moins qu'une goutte d'eau dans
l'océan : car ce qui est fini ne peut
supporter de comparaison avec ce qui est
infini.
Plus il est éclairé de la
lumière spirituelle, mieux il voit les
choses sous leurs véritables rapports. C'est
ce qui prouve que l'effet de la grâce est
tel, que plus un fidèle en ressent l'effet
au milieu des restes de sa corruption, et moins il
trouve que sa sainteté et sa bonté
soient en proportion avec sa difformité, non
seulement sa difformité passée, mais
sa difformité actuelle, par les vices qui
paraissent encore dans son coeur, par les
défauts abominables de ses pensées
les plus hautes, de ses affections les meilleures,
et de ses actions les plus brillantes.
Aussi l'apôtre Paul, au milieu de toutes les
bénédictions qu'il avait
reçues, était forcé, lorsqu'il
considérait l'état de son coeur
devant Dieu, à s'écrier : O
misérable que je
suis !
Nous voyons encore dans ce chapitre, que si Paul
eut la conviction qu'il était un
pécheur condamné par la loi, ce
fut après que le Seigneur
Jésus, se fut révélé
à lui, car jusqu'alors, il était
juste à ses propres yeux. Il avait
vécu Pharisien, suivant la secte la plus
exacte de sa religion, il avait avancé dans
le Judaïsme plus que ceux de son âge,
étant le plus ardent zélateur des
traditions de ses pères ;
(Act. XXVI. 5.
Gal. I. 14) à cette
époque, il vivait sans la loi, ce qui
est opposé à la conviction pleine et
entière, qu'il était un
pécheur condamné par elle.
La conviction du péché est souvent
représentée comme le premier acte de
Dieu, lorsque par sa grâce il veut attirer le
pécheur à lui ; mais elle est
seulement une partie, ou plutôt un effet
immédiat de ce premier acte.
Il arrive, il est vrai, fréquemment qu'il a
une espèce de persuasion que l'on est
pécheur, qui ne venant pas de cette source
est seulement occasionnelle et temporaire, quoique,
pour un temps, elle puisse atteindre
profondément le coeur et déterminer
l'homme « à faire beaucoup de
choses, » comme Hérode
lorsqu'il entendait la prédication de
Jean.
Pour avoir une vraie conviction de son
péché, il faut d'abord que le
pécheur ait quelque idée convenable
de Dieu.
Une connaissance de sa nature et de sa gloire, est
le vrai fondement de tout : elle seule peut
produire une conviction salutaire du
péché, car comment pourrait-il
connaître vraiment ce qu'est le
péché, s'il ne savait contre qui il
l'a commis ?
(10)
Le péché peut être craint comme
dangereux, sans cette connaissance ; mais sa
nature et son démérite ne peuvent
être connus que par leur contraste avec la
sainteté, la majesté, la
bonté, la vérité de celui
contre qui il a été commis, et qui ne
manifeste qu'en Jésus-Christ la connaissance
de sa gloire.
(II. Cor. IV. 6)
Aucun moyen extérieur ne peut donner une
telle connaissance de Dieu, ou produire cette
conviction du péché sans le concours
de la lumière divine et le pouvoir du
Saint-Esprit sur l'âme. La conscience
naturelle peut être incitée à
faire naître quelques désirs, mais
s'ils ne sont pas fondés sur la connaissance
spirituelle des perfections de
Dieu, suivant la révélation qu'il en
a faite lui-même dans sa parole, ils
s'évanouiront tôt ou tard, et les
pécheurs retourneront à leurs
premières voies,
(II Pier. II. 20. 22) ou bien ils
tomberont dans une forme de piété,
fondée sur leur propre justice.
(Luc XVIII. 11)
Comme il y a dans la dispensation de
l'évangile, beaucoup de choses
différentes, qui peuvent opérer sur
les passions naturelles des hommes, les nombreuses
apostasies que nous voyons, doivent être des
sujets de douleur plutôt que
d'étonnement. Mais, comme nous voyons dans
le chapitre suivant, lorsque le Seigneur a
commencé une bonne oeuvre, il
l'achève, jusqu'à la journée
de Jésus-Christ ;
(Phil. I. 6) il garde les
fidèles par sa puissance, par la foi, afin
qu'ils obtiennent le salut.
(I. Pier. I. 5)
Les hommes peuvent être sous la crainte de la
condamnation et en même temps excessivement
opposés à recevoir les consolations
du glorieux évangile. Cela vient, non de
quelque défaut dans la grâce qu'il
révèle, ou dans le salut qu'il
apporte, non de ce que le pécheur est dans
un besoin, une détresse si grande qu'il n'a
pas complètement pourvu à son
rétablissement, mais de ce qu'il ne regarde
point la gloire de la grâce, qui règne
triomphante dans l'évangile, et le dessein
de Dieu, d'y pourvoir. Il désirerait de se
trouver désigné en quelque
manière, comme un objet convenable de la
miséricorde de Dieu, par de pieuses
dispositions et des affections
sanctifiées.
C'est là l'obstacle à sa consolation,
la grande cause de sa perplexité. En
d'autres termes, il est prêt à
craindre de n'être pas suffisamment
humilié sous le sentiment du
péché, de n'avoir pas assez d'horreur
pour lui ou de n'avoir pas ces fervents
désirs de Christ et de la sainteté
qu'il doit ressentir, avant d'avoir droit à
croire en lui pour le salut.
Ainsi le pécheur, lors même que sa
conscience est oppressée par le
péché, s'oppose à la vraie
grâce de Dieu, en désirant d'avoir
quelque mérite antérieur, qui lui
soit propre d'où il paraît que le
véritable renoncement à
soi-même que demande l'évangile, est
le sacrifice le plus pénible pour l'orgueil
humain,
Nous devons observer ici, que la profonde angoisse
qui naît de la crainte de l'enfer, n'est
demandée à personne avant d'avoir la
paix avec Dieu. Car cette angoisse n'appartient pas
aux préceptes de la loi, mais à sa
malédiction ; les profondes terreurs
d'une punition éternelle ne sont point une
partie de ce qui est demandé aux
pécheurs, mais sont une partie des peines
qui leur sont infligées. Il est à la
vérité, une tristesse
évangélique du péché
qui est un devoir pour nous ; elle
nous est ordonnée, et des
promesses y sont attachées : mais la
terreur légale, qui vient de. la
malédiction de la loi, et non de ses
préceptes, qui exprime le sentiment du
danger qui vient par la loi, plutôt
que celui de la peine d'avoir fait du mal contre
la loi, cette terreur n'est point une marque de
l'amour de Dieu, ni d'aucune sainte disposition. Un
pécheur réveillé, qui
désire d'avoir des alarmes de cette
espèce, est un homme qui cherche la
misère de l'incrédulité afin
d'obtenir la permission de croire.
Il y a donc de la différence entre la
terreur de la conscience et la conviction du
péché, et l'une des deux peut exister
sans l'autre. La crainte de la colère divine
peut-être excitée par une
prévoyance alarmante, par de vives
idées de la mort et du jugement qui doit la
suivre, par la conscience de quelque crime
grossier, dans la conduite extérieure, et on
peut ressentir cette crainte :
- sans avoir en vue la sainteté, la
spiritualité, et l'étendue de la loi
divine ;
- sans avoir la conviction de la justice des
malédictions qu'elle prononce comme peine
immuable et méritée de toute
transgression des commandements qu'elle
prescrit ;
- sans avoir le discernement de la cause et du
siège du péché qui a sa racine
dans le coeur perverti, dans la nature corrompue et
dans l'éloignement de la vie de
Dieu ;
- sans avoir la conviction qu'avait Paul de
l'impossibilité où il était de
le surmonter.
Ces caractères essentiels d'une vraie
conviction du péché, se trouvent
là où la conscience purifiée
par le sang de la propitiation qui annonce la paix,
est, malgré cette conviction,
délivrée des terreurs qui viennent de
la coulpe, et où l'esprit d'adoption
étant dans le coeur, rend le pécheur
capable de regarder Dieu comme un père
réconcilié avec lui, par celui
« qui a été fait
malédiction, pour lui ». C'est
seulement dans cette vue que l'on a par la foi, que
le pécheur peut acquérir la
conviction la plus intime du
péché ; attendu qu'il y voit le
plus effrayant développement de son
démérite, dans les souffrances de
celui « qui a été fait
péché pour nous, » en
même temps qu'il fait la découverte
glorieuse de la tendresse et de l'amour avec lequel
ce Dieu contre qui il a péché, a
établi un sacrifice pour ôter le
péché.
Toute vue de la nature du péché
obtenue autrement que dans la croix de Christ, tend
à éloigner d'un Dieu juste
l'âme coupable et à l'envelopper dans
les ténèbres du désespoir,
tandis que la vue qu'a le croyant de celui
« qu'il a percé », le
conduit au Père de toute miséricorde,
le place dans un état d'humiliation devant
le trône de la grâce, et l'oblige
à s'abhorrer
lui-même et à
renoncer à toute confiance en la chair.
Comme cette vraie conviction du
péché, commence avec la vie de la
foi, elle continue pendant toute la vie du croyant
et devient d'autant plus profonde, qu'il croit
davantage en la grâce et en la connaissance
de notre Seigneur et Sauveur
Jésus-Christ.
Dans ce chapitre et dans les
précédents, il est beaucoup
parlé de la Loi de Dieu. Dieu est le
législateur aussi bien que le
Créateur du monde, et sa loi découle
nécessairement des rapports qu'il a avec ses
créatures. Sa loi est une peinture de son
caractère, elle retrace sa sainteté,
sa justice et sa bonté, et en un mot, son
amour ; Car Dieu est amour.
(I. Jean IV. 8.
12. 16) Elle est comprise
toute entière dans le sommaire qu'en donna
le Seigneur Jésus en ces mots :
« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de
tout ton coeur et de toute ton âme et de
toute ta force et de toute ta pensée, et ton
prochain comme toi-même.
(Luc X. 27)
Ainsi l'accomplissement de la loi, c'est l'amour,
(Rom. XIII. 10) et « la fin
du commandement, c'est l'amour. »
(l. Tim. I. 5)
L'amour qui est demandé à la
créature par la loi, dans toute sa
puissance, dans toute son intensité, c'est
d'abord pour Dieu son Créateur, le grand
objet de l'amour.
La seconde partie du sommaire de la loi, loin de
contrarier ce but coïncide avec lui et en
découle, en ordonnant d'aimer notre
prochain, qui est ainsi que nous, une
créature de Dieu, et qui est aussi sous une
dispensation de miséricorde.
L'amour que nous devons avoir pour notre prochain,
doit être semblable à celui que nous
nous portons à nous-mêmes ; cela
nous montre que ce dernier amour ne doit point
être condamné, il est convenable et
nécessaire comme une partie de la loi de
notre création, qui nous ordonne de
considérer nos besoins et d'y pourvoir.
L'amour de nous-mêmes ne devient criminel que
lorsqu'il est excessif, et lorsqu'il aboutit
à l'homme au lieu d'aboutir à Dieu.
Ainsi cet amour de nous-mêmes, lorsqu'il est
convenablement réglé, devient la
mesure de celui que nous devons avoir pour les
autres, et doit être constamment en exercice
dans toutes les relations que nous avons avec eux,
et dans l'accomplissement de tous les devoirs qui
naissent de ces relations. C'est ainsi que nos
devoirs tant envers le Créateur, qu'envers
la créature, ne sont point contraires les
uns aux autres, maïs au contraire
dérivent de la même source, et suivent
la même voie qui est
l'amour.
Cette loi est sainte, elle est la parfaite
règle du droit. Elle est juste, elle
ordonne tout ce qui est équitable et
dû, et de rien de plus. Elle est bonne,
en elle-même et dans sa tendance, elle
est disposée pour maintenir
entièrement l'ordre, et pour établir
le plus haut degré de bonheur dont soient
capables ceux qui sont sous son pouvoir.
Elle doit être la loi de toute la
création intelligente. D'après sa
sainteté, sa justice et sa
bonté, rien de plus, ni rien de moins ne
peut être demandé à aucune
créature : la loi de
l'Éternel est parfaite ;
(Ps. XIX. 8) il n'y a rien qui
manque, ni qui excède, elle demande la
parfaite obéissance qui est essentielle
à la nature de toute loi, car aucune loi ne
peut dispenser de la plus petite partie de
l'obéissance qu'elle demande.
D'après la nature de la loi ainsi
déterminée, il est clair que toute
oeuvre de surérogation est impossible ;
car aucune créature dans l'univers, ne peut
aimer Dieu au-delà de sa force.
Cette loi est encore fortifiée par des
sanctions sans lesquelles elle serait un avis, et
non pas une loi, elles sont indispensables pour
conserver la dignité et l'autorité du
législateur et pour la rendre efficace.
« Maudit est quiconque ne
persévère pas dans toutes les choses
qui sont écrites au livre de la loi pour les
faire : et l'homme qui aura fait ces choses
vivra par elles. »
(Gal. III. 10. 12)
La récompense de l'obéissance aussi
bien que la punition de la transgression
dérivent l'une et l'autre du
caractère de Dieu.
Dieu est amour pour lui-même et pour ses
créatures.
Dieu doit s'aimer lui-même par-dessus tout et
infiniment ; étant l'objet
suprême de l'amour, et étant
infiniment digne d'être aimé.
Dieu est aussi amour pour ses créatures,
comme cela parait par la situation originaire
où elles se sont toutes trouvées au
commencement.
Les anges à leur création
étaient habitants des cieux où Dieu
manifeste sa présence.
(Esa. LXVI, 1) Ils y contemplaient la
gloire de Dieu et ils environnaient son
trône.
(Esa, VI. 2.
Apoc. V. 11)
Lorsque l'homme fut créé, le monde
fut disposé pour lui, il jouit de la
communion avec Dieu, et il avait été
prononcé que toutes les choses qui
l'entouraient étaient très
bonnes.
C'est de cette heureuse situation originaire,
qu'une partie des anges, et l'homme, sont
tombés par l'effet de la
désobéissance.
Ainsi ils ont rompu volontairement le lien parfait,
qui est l'amour, et par conséquent, le
malheur qui vient de leur rébellion contre
Dieu, n'est imputable qu'à
eux-mêmes.
Dieu qui est infini en toute perfection, dont
les yeux sont trop purs pour voir le mal,
(Hab. I. 13) devait
nécessairement punir le
péché ; le péché
qui est la violation de la loi d'amour,
sépare les créatures de Dieu, de
celui qui est la source de leur bonheur, et les
sépare, aussi les unes des autres, c'est une
rébellion contre son juste gouvernement, qui
tend à produire une confusion et une
misère universelles. Dès lors l'amour
de Dieu pour lui-même et pour toute chose qui
est bonne, sa sainteté qui le met dans une
opposition infinie avec le péché, et
sa justice qui rend à chacun ce qui lui est
dû, exigent que le péché soit
puni comme il le mérite.
Le grand artifice de l'ennemi de Dieu et des
hommes, consiste à les tromper sur ce que
demande la loi, et sur la certitude de la punition
qui doit suivre sa violation. Vous ne mourrez
nullement.
(Gen. III. 4) Tel est le mensonge par
lequel il ruina le monde. Dans cette occasion il se
cacha sous la forme d'un serpent, et il se cache
encore effectivement pour persuader ceux qu'il rend
captifs de sa volonté, qu'il n'a aucune
existence que dans l'imagination des hommes ou du
moins qu'il n'a aucun pouvoir pour les tenter.
C'est ainsi que ses victimes qui n'ont point la
conscience de l'être, dont plusieurs sont les
sages du monde, sont plus aisément
séduites par lui et entraînées
vers leur destruction éternelle; mais celui
qui le connaît et qui sait où il fait
son séjour, a averti les hommes de ses
pièges. « Il a été
meurtrier, dès le commencement, »
dit le Seigneur Jésus, « et il n'a
point persévéré dans la
vérité ; car la
vérité n'est point en lui, toutes les
fois qu'il profère le mensonge, il parle de
son propre fonds, car, il est menteur, et le
père du mensonge. »
(Jean VIII. 44)
L'atrocité d'une offense contre une loi,
et le degré de punition suivant la justice
doivent être en proportion de la justice et
de la bonté de la loi, et de la
dignité et de l'autorité du
législateur.
Le mal qu'il y a à violer la loi de Dieu,
peut être évalué d'après
la punition qui a été infligée
à la race humaine à cause d'un
seul péché
(Rom. V. 18). Ce fut l'entrée
de la mort spirituelle, temporelle et
éternelle, mais, par l'amour de Dieu, les
hommes furent placés aussitôt sous une
dispensation de miséricorde.
Les gouvernements humains étant imparfaits,
dispensent de la justice quand ils font
grâce, mais il ne peut en être de
même avec Dieu, qui, lorsqu'il montre sa
miséricorde, le fait d'accord
avec la justice. « Il
demeure fidèle, il ne se peut renier
soi-même. »
(II. Tim. II. 13) C'est pourquoi,
dans le plan du salut, la loi est maintenue dans
toute son autorité et dans toutes ses
sanctions. Le péché est puni, et en
même temps le pécheur est
sauvé.
L'autorité, la majesté et la
souveraineté de Dieu sont évidemment
intéressées à ce que les
menaces et les peines indiquées par la loi,
aient leur effet entier. L'inexécution des
lois humaines porte la confusion et le
désordre dans les familles et dans les
états, mais si les lois de Dieu
n'étaient point exécutées, ce
serait dans tout l'univers que la confusion et le
désordre absolus seraient introduits.
L'immuable sagesse, la justice et la
vérité de Dieu sont
intéressées dans l'exécution
de cette loi ; car faire une loi, indique une
inclination à continuer de la faire
observer, et quand un souverain donne une loi
à ses sujets, on peut dire en quelque
manière qu'il se l'impose à
lui-même, c'est-à-dire, que lorsqu'il
oblige ses sujets à obéir à
cette loi, il s'engage lui-même à en
maintenir l'autorité. La gloire même
de la bonté du législateur est
intéressée à cette
observation. La même raison qui l'a
déterminé à faire de bonnes
lois, doit le déterminer à conserver
leur autorité et à les mettre en
exécution.
Dans le gouvernement du monde, Dieu est à la
fois législateur et juge. Il n'en est pas
toujours de même dans les autres
gouvernements ; le législateur peut
être absent, et le juge peut dispenser de la
loi sans la faute du législateur. Lorsque le
juge n'exécute pas une loi, cette
inéxécution se
réfléchit sur le législateur,
et condamne ce qu'il a fait. Dans les lois des
hommes, qui sont toujours sujets à l'erreur,
c'est souvent un honneur de dispenser de la loi, en
considération d'événements qui
arrivent sans avoir été prévus
lorsque la loi fut faite. Mais ici, d'après
la sagesse infinie de Dieu, une chose semblable ne
peut point avoir lieu.
Le but de la loi de Dieu est un but d'une
importance ineffable ; infiniment au-dessus de
celui que se proposent les lois des hommes ;
son but immédiat est la sainteté et
la gloire de Dieu et le bonheur de ses
créatures. Le but de la loi morale est celui
de notre existence, le but de l'existence de toute
choses, celui de la création et de la
providence, celui de toutes les lois qui gouvernent
les cieux et la terre, le soleil, la lune et les
étoiles. La loi morale est la plus haute
loi ; c'est la loi donnée aux habitants
du monde, à toutes les créatures
raisonnables.
Chacun est convaincu qu'il est juste et
nécessaire que les
lois données au
soleil, à la lune et aux étoiles,
soient gardées jusqu'à la fin du
monde. Cependant, il n'est rien de moins
raisonnable que les objections des
incrédules contre les miracles de la bible,
considérés comme déviations de
ces lois.
Les miracles faits par Moïse, publiant la loi
morale, lorsque l'homme par sa perversité
l'avait oubliée ; ceux
opérés par Christ, en accomplissant
la loi, étaient de la plus grande
importance ; et dans ce cas, la suspension de
ces lois n'en était pas
précisément une violation, mais au
contraire les faisait servir à la plus haute
fin pour laquelle elles eussent été
établies.
Mais même les lois données aux
créatures inanimées sont tellement
maintenues qu'elles peuvent faire que les hommes
soient moins étonnés que Dieu
maintienne l'autorité de la loi morale, qui
est d'une importance infiniment plus grande.
Le royaume de Dieu gouverné par cette loi,
montre son importance ; elle est
incomparablement plus étendue que toute
autre. Si les lois d'un autre royaume
étaient suspendues, l'état tomberait
dans la confusion ; mais la confusion dans les
autres royaumes ne serait rien en comparaison de
celle du royaume de Dieu. Y maintenir l'ordre est
d'une importance infiniment plus haute, comme sa
durée est infiniment plus grande. Le royaume
de Dieu est par-dessus toutes choses
d'éternité en éternité,
Le gouvernement de Dieu est le gouvernement
suprême, Tous les autres lui sont fournis. Il
est bien plus important que la loi soit maintenue
dans le gouvernement suprême que dans ceux
qui lui sont subordonnés ; ce qu'il y a
de mal dans ceux-ci peut être
rectifié, c'est pourquoi dans le
gouvernement suprême, il est d'une importance
au-dessus de toute expression, qu'il y ait le plus
grand égard pour la justice ; de sorte
que les raisons que l'on peut avoir dans les autres
états pour dispenser de la loi, ne peuvent
exister dans le royaume de Dieu.
Christ a magnifié la loi et l'a rendue
honorable.
(Esa. XLII. 21)
Il lui a fait un honneur ineffable par
l'obéissance qu'il lui a rendue. Avant de
venir dans le monde, il était parfaitement
saint, mais cette sainteté ne pouvait point
être appelé proprement
obéissance. On pouvait dire aussi exactement
que la loi était conforme à lui,
qu'on pouvait dire qu'il était conforme
à la loi. II n'était point un membre
ou un sujet du royaume des cieux, il en
était le chef ; il agissait alors en
forme de Dieu, c'est-à-dire, comme souverain
du monde, et ensuite dans la forme d'un
serviteur ; comme il était vraiment
l'un, il était aussi
vraiment l'autre. Il avait été
assujetti à la loi, lorsqu'il était
né d'une femme. Sa sainteté
l'engageait auparavant à faire la loi et
à gouverner le monde par elle ; mais
alors c'était cette loi qui le gouvernait.
Sa sainteté et sa justice étaient
d'abord la sainteté de Dieu, et elles
devinrent ensuite l'obéissance d'un
homme.
Christ a magnifié la loi, et la rendue
honorable ; en tant qu'il lui a rendu une
obéissance complète jusqu'à la
mort sans tâche, et en tant que l'exemple de
son obéissance fut d'une influence
universelle, pour toute sorte de personnes et pour
toute espèce de devoirs.
C'était l'obéissance de la personne
la plus glorieuse qui put être assujettie
à la loi ; quoique chaque homme en
obéissant à la loi, l'honore autant
qu'il le peut par son obéissance, cependant
celle d'une personne, peut lui faire plus
d'honneur, que celle d'un autre.
Plus la personne qui obéit est honorable et
plus la loi est honorée. Il résulte
clairement de là que l'obéissance du
fils de Dieu dans notre nature, a plus
honoré la loi, que n'eût pu le faire
l'obéissance du genre humain tout entier. Il
a donné à chaque commandement de la
loi, à chaque devoir qu'elle imposait, plus
d'honneur qu'ils n'avaient reçu d'outrages
par la désobéissance de tous les
transgresseurs qui ont été au monde.
De sorte que s'il était possible que les
devoirs de la sainteté fussent plus
honorables dans un temps que dans l'autre, ils le
feraient assurément davantage, depuis que
celui qui est Dieu lui-même a rempli ces
devoirs et s'est acquitté des actes
d'obéissance dont nous sommes
chargés.
Lorsque d'autres sujets obéissent à
la loi, c'est leur propre honneur qui dérive
de cette obéissance, mais dans le cas dont
nous parlons ; c'était la loi qui
était honorée de l'obéissance
du souverain.
Son obéissance a magnifié la loi,
parce qu'elle était par un ordre divin et
solennel. Christ était choisi par Dieu,
oint, et élu pour cette fin. Il était
Jéhovah, qui était envoyé par
Jéhovah, pour naître sous la loi, et.
lorsque nous considérons que l'oeuvre la
plus étonnante de Dieu que nous puissions
concevoir est l'incarnation de son fils et sa vie
dans le monde, et que ces merveilles étaient
faites pour magnifier sa loi, nous verrons qu'il
est impossible d'avoir de trop hautes idées
de cet amour, et, si l'on peut parler ainsi, du
respect que Dieu a pour sa propre loi.
Christ a magnifié la loi en accomplissant
ses conditions pénales : Il a souffert
tout ce dont elle menaçait et tout ce
qui était
mérité par sa violation, il a
porté tout le poids du péché
et a ainsi donné une fin au
péché et à sa punition, pour
tous ceux qui ont part à sa
médiation, ainsi il a soutenu l'honneur de
la loi, et a montré qu'elle est sa force
pour infliger les punitions qu'elle a
annoncées.
Les souffrances de Christ ont été une
exécution réelle des peines
prononcées par la loi. La nature de la
rédemption aurait été
altérée, si Christ était venu
seulement pour expliquer la loi et non pour
l'accomplir, pour nous enseigner nos devoirs et non
pour expier nos péchés. Christ
pouvait nous enseigner nos devoirs sans prendre
notre nature, il nous les enseigne par les autres,
mais il acquitte nos péchés par
lui-même.
(Héb. l. 3) La loi avait
été donnée par Moïse,
mais accomplie seule par Christ ; la loi fut,
à la vérité, magnifiée
lorsque le Fils de Dieu resta un si long temps sur
la terre pour la publier et l'expliquer, mais son
exécution était une chose
entièrement différente.
Les souffrances de Christ étaient
l'exécution complète de la loi,
aucune autre punition qu'eussent souffert les
créatures, ne pourrait être
appelée ainsi. La loi fut proprement mise
à exécution, lorsque les menaces
qu'elle contenait furent accomplies ; ceux qui
sont dans l'enfer, ne peuvent jamais dire ce que
Jésus a dit sur la croix : Tout est
accompli. C'est de lui seulement que l'on a pu
dire, qu'il consumerait le péché
qu'il ferait propitiation pour l'iniquité,
(Dan. IX. 24) Il a ôté
la charge du péché qui conduisait la
mort.
(Héb. IX. 26) Aussi il
apparaîtra une seconde fois sans
péché à ceux qui l'attendent
à salut,
(Héb. IX. 28) ayant
déjà porté tout son poids.
Cela sert à magnifier la loi en montrant la
certitude de la menace qu'elle prononce, la
punition éternelle. La fin de
l'éternité ne peut jamais être
vue, mais cependant, lorsque Jésus-Christ a
supporté une punition équivalente
à une punition éternelle, c'est pour
nous une démonstration visible, de
l'éternité de la punition du
péché.
Cependant, lorsque Christ rendît une parfaite
obéissance à la loi, et souffrit les
peines qu'elle imposait, il n'affranchit pas son
peuple de l'obligation de lui obéir, mais de
sa malédiction.
Ainsi la loi demeure dans toute sa force, comme
règle de conduite, et les
transgressions dont on se rend coupable, ne peuvent
être expiées que par l'application
continuelle et l'efficace du sang de cette
oblation, qui a rendu parfaits pour toujours ceux
qui sont sanctifiés
(Héb. X. 14) et qui est
présenté dans les cieux par Christ,
le souverain sacrificateur.
(Héb. X.
12)
Tous les faux systèmes de christianisme,
dérogent à l'honneur de la loi. D'un
côté ils diminuent l'étendue de
ses demandes, de l'autre ils rabaissent
l'idée de sa sanction pénale.
C'est ainsi que l'ignorance de la nature de la
sainte loi. est la base de tous les faux
systèmes, et que la vérité
à cet égard, n'est défendue
avec exactitude par personne ; que par ceux
qui reconnaissent Jésus-Christ comme Dieu
manifesté en chair et venu pour accomplir la
loi, qui se reconnaissent eux-mêmes, comme
pécheurs par leur nature et par leur
conduite, sauvés par le lavement de la
régénération et le
renouvellement du Saint-Esprit, et qui, par
conséquent, sont ce qu'ils sont par la
grâce seule.
La loi de Dieu donnée par lui-même
sur le mont Sinaï dans une forme prohibitive,
à cause des inclinations des hommes aux
transgressions, frappa d'une telle terreur les
esprits des Israélites, qu'ils ne pouvaient
soutenir ce qui était ordonné,
(Héb. XII. 29) mais qu'au
contraire, ils s'éloignaient, se tenaient
à une grande distance et réclamaient
la médiation de Moïse ; et
bien loin que cette loi ait été
mitigée ou adoucie sous quelque rapport,
dans la nouvelle dispensation, elle est
expliquée dans toute son étendue et
sa spiritualité par Jésus-Christ
ainsi que par ses apôtres, et il est
montré qu'elle atteint toutes les
pensées du :coeur. La loi est
spirituelle.
(Rom. VII. 14)
Tous les chrétiens prennent plaisir
à la loi de Dieu quant à l'homme
intérieur, et en même temps qu'ils
admettent l'obligation de lui obéir
complètement, le sujet constant de leurs
plaintes, est que d'après leur
dépravation originaire, ils ne peuvent faire
les choses qu'ils désirent
(Rom. VIII 15-23), mais «
ils rendent » grâces à Dieu qui
leur a donné la victoire par leur Seigneur
Jésus-Christ.
« O combien j'aime ta loi ! Je courrai
par la voie de tes commandements, quand tu auras
mis mon coeur au large. L'horreur m'a saisi
à cause des méchants qui ont
abandonné ta loi.»
(Ps. CXIX. 97.
32.
53)
Plus les chrétiens connaîtront la
sainteté, la justice et la bonté de
la loi de Dieu , plus ils admireront son amour et
le prix de l'évangile de sa grâce par
laquelle ils sont délivrés de sa
malédiction, plus ils seront convaincus de
leur indignité, de l'impossibilité
où ils sont de subsister en présence
de Dieu, sans un médiateur d'une
dignité infinie, sans une obéissance
d'une perfection infinie, et sans une expiation
d'une infinie valeur.
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