LES SEPT
PAROLES
JÉSUS-CHRIST SUR LA
CROIX
SIXIÈME MÉDITATION.
Et quand
Jésus eut pris le vinaigre, il dit :
« Tout est
accompli. » - Jean XIX, 30.
Tout est accompli... N'est-ce qu'un mot
prononcé par un homme sur une croix,
après qu'il a dit : J'ai soif,
et qu'on lui a donné à boire
du vinaigre ? Mais cet homme qui est
sur une croix, c'est le Fils unique de
Dieu, et ce vinaigre qu'on lui donne
à boire, c'est l'accomplissement d'un
oracle de Dieu, un des derniers d'une longue
suite d'oracles, le dernier qui dût
s'accomplir avant la mort de Jésus.
Surtout ce qui est accompli, c'est
l'oeuvre de Jésus, oeuvre telle,
qu'il n'y en a jamais eu, et qu'il n'y en aura
jamais de pareille. Cette oeuvre, c'est ce
baptême de sang, dont il avait
dit : Je dois être baptisé
d'un baptême, et combien ne suis-je pas
pressé qu'il
s'accomplisse ?
Maintenant, voici l'heure où
s'accomplit ce baptême, l'heure pour
laquelle il est venu, où il peut
s'écrier, où il s'écrie :
Tout est accompli.
Voilà, sans doute, des paroles qui ouvrent
une perspective immense, et pour ainsi dire,
infinie. Mais quand de ce vaste tableau, nous ne
ferions qu'esquisser quelques traits, la Bible en
main, la Bible que nous avons méditée
pour vous avec prières, ne
célébrerions-nous pas bien ainsi ces
saints jours, anniversaires des souffrances de
notre divin Chef, de notre bon ami, de notre
frère, de notre tout ? Ne
travaillerons-nous pas ainsi avec succès,
sous le regard de Dieu, les yeux, les mains et le
coeur élevés vers lui, à nous
préparer à cette Cène qui nous
retrace la grande oeuvre de Christ, et qui
est pour nous un signe et un sceau du salut qu'il
nous a acquis, si nous la célébrons
avec foi, vraiment en mémoire de
lui ?
Veuille, Seigneur, être avec nous par ton
Saint-Esprit et accomplir toi-même ton
oeuvre dans nos coeurs !
Amen.
I.
Tout est accompli. Ainsi lisons-nous dans
nos Bibles en langues françaises. Ainsi
sommes-nous accoutumés à prononcer
cette parole du Sauveur. Il y a mot à mot
dans l'original : C'est accompli, ou
c'est fini. Toutefois, le sens est
bien : tout est accompli. Que de
choses, en effet, se sont accomplies sur la
croix, et celles qui ne le sont pas encore ne
peuvent l'être, qu'en vertu de ce qui est
déjà accompli sur la
croix.
Jésus-Christ a accompli d'abord
toutes les figures, tous les types, toutes les
prophéties de l'Ancien Testament qui se
rapportaient au Messie. Il est venu, dit-il
lui-même, accomplir la Loi et les
Prophètes. Il les a accomplis
dans sa vie ; il doit encore les
accomplir dans sa mort.
Nous ne pouvons entrer dans tous les
détails ; nous nous bornerons à
quelques traits principaux. Il a accompli ce
qui était figuré par l'Agneau de
Pâque. Christ notre Pâque a
été immolé pour nous, dit
St.-Paul. Nouvel Isaac, de lui il a
été dit : Le Père n'a
point épargné son propre Fils,
et comme Isaac monte Morija,
Jésus gravit Golgotha
chargé du bois du sacrifice.
Comme le serpent d'airain, il est
élevé pour nous guérir
de la morsure de l'ancien serpent ;
postérité de la femme, il
écrasa la tête du serpent et
celui-ci le blessa au talon.
Jésus aussi a été
apprécié à trente
pièces d'argent comme l'avait
annoncé Zacharie. Et David, non plus, n'a
pas chanté en vain les souffrances de
ce Christ, en même temps son
Seigneur et son Fils.
Ces trente pièces ont été
comptées à l'un des douze,
à celui qui mangeait le pain de
Jésus, et qui a levé le talon
contre lui, et elles ont été
jetées dans le temple et ont servi
à acheter le champ d'un potier.
Ajoutons à ces prophéties celles
dont nous avons rappelé l'accomplissement
dans notre précédente
méditation, celle en particulier que
Jésus accomplit quand il dit :
J'ai soif, et qu'on lui donna du
vinaigre.
Méditons aussi, chers frères, au
pied de sa croix plantée entre celles de
deux criminels, méditons ce
LIIIe chapitre d'Esaïe, qui
semble avoir été écrit en
Golgotha, tant on y voit clairement Jésus,
dans cet homme de douleur, méprisé
comme le dernier des hommes, mis au rang des
malfaiteurs.
Tout est accompli, les types, les
prophéties, tout cela est
accompli.
Sur la croix Jésus accomplit
aussi son obéissance
à la volonté de son Père et
à ses décrets éternels.
Agneau déjà immolé avant la
création du monde, il dit en entrant dans le
monde : Ta loi est au-dedans de moi. Je viens
faire ce qui est écrit de moi dans le livre
de la Loi. Tu n'as point voulu de sacrifice,
ni d'ablation pour le péché, mais tu
m'as formé un corps.
Ce n'est pas assez que pendant toute sa vie,
sa nourriture ait été de
faire la volonté de celui qui l'a
envoyé, il faut qu'il donne ce
corps que Dieu lui a formé, qu'il
donne sa chair pour la vie du monde. C'est le
commandement qu'il a reçu de son
Père. Afin qu'on sache, dit-il
à ses disciples, dans la chambre haute,
après le souper de la Pâque,
afin qu'on sache que j'aime le Père et
que je fais ce qu'il m'a commandé...
Levez-vous ; partons d'ici.
Où va-t-il ? En
Gethsémané.
Là, s'il dit d'abord :
Père ! éloigne cette coupe de
moi, il ajoute bientôt : Que ta
volonté soit faite, et non la mienne. Ne
boirais-je pas la coupe que le Père m'a
donnée à boire ? Cette
coupe, il l'épuise sur la
croix ; cette volonté, il
l'accomplit sur la croix, dans toute son
étendue, dans toute sa rigueur. Il s'est
rendu obéissant jusqu'à la mort,
même jusqu'à la mort de la croix.
Son obéissance est accomplie.
Cela encore est
accompli.
Sa charité encore est accomplie sur
la croix. Sans doute, déjà il est
venu au monde par charité. Vous
connaissez, dit St.-Paul, la
charité du Seigneur Jésus-Christ, qui
étant riche, s'est fait pauvre pour nous. Il
est venu chercher et sauver ce qui était
perdu.
Sans doute sa charité a
été l'oeuvre de toute sa vie, et
pour faire passer toute sa charité
devant vous, il faudrait vous raconter toute
la vie de celui qui allait de lieu en lieu
faisant du bien, d'auprès duquel nul ne
se retirait sans avoir été
appelé au salut, averti, encouragé ou
repris, en même temps que consolé,
soulagé ou guéri dans son corps.
Mais sa charité n'est pas encore
accomplie, son amour n'a pas encore
été assez grand, car, dit-il
lui-même : Il n'y a pas de plus grand
amour que de donner sa vie pour ses amis.
Pour ses amis... il eût pu dire pour ses
ennemis, et son Apôtre le dit, son
Apôtre, son serviteur, que
presse la charité de Christ. Nous
étions ennemis de Dieu, dit St.-Paul, et
pour nous, ennemis de son Père,
les siens par conséquent, il s'est
laissé clouer sur une croix, et sur cette
croix, tandis que son corps est torturé, et
son âme serrée d'une tristesse
indicible, il prie pour ceux qui l'ont suspendu
à la croix, il ouvre le Ciel à un
malfaiteur crucifié
à ses côtés. Mais que ces
traits particuliers de la charité de notre
Maître, ne nous distraient pas de sa
charité universelle, de sa charité
pour tous. Il faut, dit-il, que le Fils
de l'homme soit élevé, afin que
quiconque croit en lui ne périsse point,
mais qu'il ait la vie éternelle. Quand
j'aurai été élevé,
j'attirerai tous les hommes à moi,
parole bien digne d'avoir été
conservée par le disciple que
Jésus aimait, et qui avait
été couché près de
son sein, ce St.-Jean qui écrit
aussi : En ceci, nous avons connu la
charité, c'est qu'il a donné sa vie
pour nous. Sur la croix est accomplie la
charité de Jésus-Christ. Cela encore
est accompli.
Mais pourquoi accomplit-Il ainsi sur une
croix sa charité et son obéissance
à la volonté de son
Père ? Ceux qu'il appelle ses amis,
ceux que, d'après son Apôtre, nous
avons appelés ses ennemis, sont tous
des pécheurs, des transgresseurs de la loi
de Dieu, de cette loi dont il est
écrit : Maudit est quiconque ne
persévère pas dans toutes les paroles
qui sont écrites au livre de la Loi pour les
accomplir. Il fallait donc que Jésus les
accomplît pour nous, afin que nous ne
fussions pas maudits. Et ce n'était
pas assez qu'il accomplit la Loi dans sa vie
toute sainte, lui qu'on ne
pouvait convaincre de péché,
et dans la bouche duquel il ne s'est
jamais trouvé aucune fraude. Le
salaire du péché c'est la mort.
Nous avons mérité la
mort ; il faut qu'il souffre la
mort. Quant à nous, c'est de la mort
éternelle qu'il s'agit. Lui, Fils unique
de Dieu, il ne doit ni ne peut souffrir la mort
éternelle ; mais avec la mort
temporelle, il faut qu'en quelques heures,
s'amassent sur sa tête toutes les angoisses,
toute la colère de Dieu, toute la
malédiction que les pécheurs ont
méritée, et qu'ils mériteront
dans tous les siècles. Ainsi l'enseigne la
Parole de Dieu : Celui qui n'avait pas
connu le péché, Dieu l'a fait
être péché pour nous.
Mystère insondable, et qui s'est
accompli sur la croix. Là, la
justice et la paix, la justice inflexible de
Dieu, et la paix que, dans sa
miséricorde, il veut accorder aux
pécheurs, mais que, dans sa justice,
il ne peut leur accorder, si quelqu'un ne paye
pour eux ; la justice et la paix se sont
embrassées. Ce baiser sanglant s'est
donné en Golgotha, et nous en avons, si nous
osons dire ainsi, nous en avons entendu le
retentissement dans cette parole :
Eloï ! Eloï ! Lama
Sabachthani ! La justice de Dieu est
satisfaite ; sa miséricorde est
satisfaite. Ainsi sont accomplies à la fois
les exigences de la Loi, et les
exigences de la charité de Dieu. Cela encore
est accompli.
Et par conséquent, et maintenant notre salut
est accompli. Dieu a trouvé pour nous une
rédemption éternelle. Il n'y a
maintenant plus de condamnation pour ceux qui sont
en Jésus-Christ. Qui accusera les
élus de Dieu ? Dieu est celui qui
justifie. Qui condamnera ? Christ est celui
qui est mort, qui est ressuscité, qui s'est
assis à la droite de Dieu, et qui
prie pour nous ; et s'il a fallu
qu'ainsi il ressuscitât, qu'ainsi il
s'assît à la droite de Dieu, et
qu'il prie encore, pour qui prie-t-il, pour
qui est-il ressuscité, sinon pour
ceux pour lesquels il est mort et en
vertu de ce qu'il est mort pour
eux ?
Son sacrifice, c'est toujours là la grande
grâce, la première grâce
du Dieu de qui nous recevons grâce sur
grâce. Celui qui n'a pas
épargné son propre Fils, mais qui l'a
livré pour nous tous, ne nous donnera-t-il
pas toutes choses avec lui ?
C'est pour cela que St.-Paul ne veut savoir
que Jésus-Christ et Jésus-Christ
crucifié. C'est que sur la croix, notre
salut est accompli ; tout est
accompli.
II.
Tout est accompli par Jésus ;
ne reste-t-il rien à faire ?
L'Évangile, je ne dis pas la Loi, mais
l'Évangile, est plein de préceptes,
d'exhortations. Que peuvent signifier les
préceptes, les exhortations si tout est
accompli ?
Mes frères, tout est accompli
pour nous, et cependant tout n'est pas
accompli en nous.
Il n'y a, disions-nous tout à l'heure
d'après St.-Paul, il n'y a maintenant
plus de condamnation pour ceux qui sont en
Jésus-Christ. Il faut donc être
en Jésus-Christ ; et d'abord par la
foi.
Le salut est accompli, mais il faut saisir
le salut, saisir la vie éternelle,
comme le dit aussi St.-Paul. Il faut chercher
le salut ; puis il faut l'accepter par la
foi.
Nous avons une âme qui a besoin de salut, de
pardon, de sanctification, de vie.
Nous avons une âme à
sauver ; et dans un sens
différent de celui du Seigneur, mais vrai,
parce qu'il est conforme à toute la doctrine
du Seigneur, Celui qui voudra sauver son
âme, la perdra ; oui, celui qui
voudra la sauver lui-même la
perdra.
Nous imaginerons-nous pouvoir la sauver
nous-mêmes ? Croirons-nous
faire notre salut, acheter notre
salut par nos oeuvres ?
Mais quelque nombre d'oeuvres que nous fassions,
nous n'en ferons jamais plus que ce qui
nous est commandé ; nous serons
donc toujours des serviteurs inutiles.
Encore, si nous faisions tout ce qui nous
est commandé ; mais nous ne le
faisons pas, et nous ne le ferons pas ; et
même le Maître a dit : Hors de
moi, vous ne pouvez rien faire.
Non, rien, absolument rien. Nous
ne pouvons donc faire de bonnes oeuvres,
qu'en Christ, rien hors de lui.
Nous ne pouvons pas faire de bonnes oeuvres, pour
être sauvés ; nous ne pouvons
faire de bonnes oeuvres qu'en tant que nous sommes
sauvés par Christ, par celui qui a tout
accompli, qui a accompli sur la croix le
salut des siens. Mais aussi, si le salut est
accompli par lui, en son sang, sur la croix,
dès lors, il n'y a point de salut
à attendre, point de salut en aucun
autre, aucun autre nom sous le ciel, qui ait
été donné aux hommes, par
lequel nous devions être sauvés. Il ne
reste plus de sacrifice pour le
péché. Comment donc
échapperons-nous, si nous
négligeons un si grand salut ?
Y aurait-il parmi nous quelqu'un, qui fût
dans l'ignorance, dans l'incertitude à cet
égard, dans l'erreur,
selon nous, ou plutôt selon la Parole de
Dieu ? nous le conjurons, comme du pied de la
croix, d'y penser sérieusement, de se
reconnaître un pauvre pécheur perdu,
condamné, maudit, sans le sacrifice
accompli sur la croix, ne pouvant être
sauvé que par le sang de la croix ; et
nous appuyons notre exhortation sur le même
motif que St.-Paul : Nous vous supplions au
nom de Jésus-Christ, de vous
réconcilier avec Dieu ; car celui qui
n'avait point connu le péché, Dieu
l'a fait être péché, afin que
nous devinssions justice devant Dieu par lui. Celle
justice, est-il écrit, s'obtient par
la foi.
Celui qui a dit sur la croix : Tout est
accompli, n'a parlé que pour ceux qui
croient en son nom.
Pour ceux qui ne croient pas en lui,
rien n'est accompli que leur condamnation.
Celui qui ne croit pas est déjà
condamné, parce qu'il n'a pas cru au nom du
Fils unique de Dieu. Celui qui croit au Fils a la
vie éternelle. Celui qui ne croit pas au
Fils n'aura point la vie, mais la colère de
Dieu demeure sur lui.
Crois donc, qui que tu sois, si tu n'y crois
pas encore, crois au Seigneur Jésus
pour être sauvé.
Mais si, grâce à Dieu, nous n'en
sommes plus à ce point, si nous avons cru
à l'Évangile et au
nom du Fils unique de
Dieu, pour être sauvés,
n'avons-nous plus rien à
faire ?
Nous le répétons : Tout
est accompli pour nous, mais tout n'est
pas accompli en nous.
Il n'y a maintenant point de condamnation pour
ceux qui sont en Jésus-Christ ;
mais ceux-là, dit St.-Paul, ne
marchent pas selon la chair, mais selon l'Esprit,
et le même Apôtre écrit aux
fidèles : Puisque nous avons de
telles promesses, purifions-nous de toute souillure
de la chair et de l'esprit, et accomplissons notre
sanctification dans la crainte de Dieu.
Nous avons des souillures dont nous
devons nous purifier ou nous conserver purs,
il est un Esprit selon lequel nous devons
marcher, c'est-à-dire agir,
vivre ; nous avons une sanctification
à accomplir, nous avons une
tâche à accomplir, et pour
cette tâche, à faire des efforts, et
nous sommes appelés à faire des
progrès dans cette sanctification et
dans ces efforts.
Il faut laisser les choses qui sont
derrière nous, et nous avancer vers celles
qui sont devant nous, vers le but et le
prix de la vocation céleste de Dieu en
Jésus-Christ. Eh ! ne nous y
sentirons-nous pas appelés, ne nous y
sentirons-nous pas poussés avec force, en
face de la croix de Christ, de celui qui n'eut
point de repos, qu'il n'eût accompli
l'oeuvre que son
Père lui avait donnée à
faire, de celui qui nous a aimés,
et qui ayant droit à tout notre amour,
nous demande pour son service ces efforts, ce
travail, que nous ne nous lassons pas de faire pour
ceux qui nous aiment, et que nous aimons ici-bas.
Oui, puisque nous avons de telles promesses,
celles que Jésus a faites, ou
plutôt déjà accomplies
sur la croix en faveur de ceux qui croient en
lui, purifions-nous de toute souillure de la
chair et de l'esprit et accomplissons notre
sanctification dans la crainte de Dieu, d'un
Dieu qui a inscrit sur la croix de son Fils, son
horreur pour le péché et pour la
souillure en même temps que son amour
pour les pécheurs, d'un Dieu auquel nous
devons craindre par dessus tout de
déplaire, auquel nous devons désirer
de plaire et de montrer notre reconnaissance et
notre amour par notre obéissance, par notre
zèle pour la sanctification et
pour les bonnes oeuvres.
Voilà, chrétien, voilà, cher
frère ou chère soeur, ce qu'il te
reste à accomplir.
Mais, dis-tu, qui est suffisant pour ces
choses ? L'esprit est prompt, mais la
chair est faible, et l'esprit aussi
participe à la faiblesse de la
chair. Eh bien ! veux-tu raffermir les
mains tremblantes et les genoux déjoints
et faire à tes
pieds un chemin droit ? Veux-tu
reprendre courage, et avec ce courage aller en
avant vers le but ? Veux-tu
rejeter tout fardeau et le péché
qui nous enveloppe si aisément ? Aie
les yeux sur Jésus, le Chef et le
Consommateur de la foi, qui a souffert la
croix.
Regarde à cette croix, où il a
accompli ton salut ; il y a accompli
aussi ta sanctification ; car, dit
Saint-Paul, par une seule oblation, il a
accompli pour toujours ceux qui sont
sanctifiés.
C'est, en conséquence, aux mêmes
personnes, qu'il est dit : Vous avez
été lavés ; vous avez
été justifiés... et vous avez
été sanctifiés, au nom du
Seigneur Jésus, et par l'Esprit de notre
Dieu.
Regarde au ciel, regarde au Père ;
(ne craignons pas de répéter les
bonnes promesses de. sa Parole). Celui qui
n'a pas épargné son propre
Fils, mais qui l'a livré pour nous tous, ne
nous donnera-t-il pas toutes choses avec
lui ?
Oui ; il te donnera, cher
frère, chère soeur, si tu le
demandes, il te donnera son Esprit, qui,
selon la belle, la douce parole d'un Apôtre,
soulage de sa part nos faiblesses, prend sa
part de notre fardeau, sa grâce te
suffira, sa force s'accomplira dans ton
infirmité. Tu pourras tout en
Christ qui te fortifie, en Christ qui s'est
écrié sur la croix : Tout est
accompli. Tu accompliras ce qu'il te
commande ; non
pas moi, diras-tu toutefois avec St.-Paul,
dans une grande humilité, et dans une
humilité d'autant plus grande, qu'il t'aura
été donné de faire plus de
choses ; non pas moi, mais la grâce
de Dieu qui est en moi. Ce ne sera pas sans
beaucoup de gémissements, beaucoup de
luttes, beaucoup de combats, et non plus sans
beaucoup de prières. Ce ne sera pas non
plus, hélas ! sans quelques chutes dont
il faudra te relever douloureusement, en pleurant
comme St.-Pierre ; mais tu verras, tu sentiras
ton Sauveur, qui te tend la main ; et puis, tu
sais qu'il reste un repos pour le peuple de
Dieu. Arrivé à la fin du train
de guerre assigné à l'homme sur la
terre, tu pourras dire en Christ et par
Christ : Tout est accompli, et enfin,
et surtout arrivé au repos
même, dire encore par lui, et avec lui
à jamais : Tout est
accompli.
St.-Jean nous dit qu'après ces mots,
Jésus ayant baissé la tête,
rendit l'esprit. Un autre
Évangéliste nous rapporte une
septième et dernière parole du
Sauveur, qu'il nous reste à vous expliquer,
et ce sera pour une autrefois, dans une autre
méditation, si le Seigneur le permet. Mais
avant de finir celle-ci, en nous
répétant cette parole : Tout
est accompli. ne nous
dirons-nous point : II est une chose que nous
n'aurons jamais accomplie, moins que toute
autre peut-être, tant que nous serons dans
ce corps, c'est d'aimer celui qui nous a
tant aimés.
Vous connaissez sans doute, chers et
bien-aimés, une belle pensée, une
belle parole de St.-Paul : Ne soyez
redevables à personne, si ce n'est de vous
aimer les uns les autres,
c'est-à-dire : Quoi que vous
puissiez faire et que vous fassiez, il est un point
sur lequel vous serez toujours redevables,
toujours en arrière de ce que vous
devez, c'est l'amour que vous devez avoir
les uns pour les autres, puisque nous devons
nous aimer comme Christ nous a
aimés ; et comment devons-nous donc
aimer Christ lui-même !
Là-dessus ne sommes-nous pas tous, ne
sommes-nous pas toujours en arrière,
toujours redevables ?
Ah ! que nous sommes froids, chers
frères, ou tièdes, si vous
l'aimez mieux, si ce n'est pas pis encore, en face
et au pied de sa croix ! Sommes-nous donc des
créatures aimées de l'amour le plus
tendre, de l'amour d'un Dieu ? Sommes-nous des
pécheurs arrachés par cet amour
à la condamnation, à la mort
éternelle ?
Ayons le courage de le dire à
lui-même, à celui qui peut nous
changer. Seigneur ! comme
celui qui te disait : Je crois ;
subviens à mon
incrédulité ; moi je te
dis : « Je t'aime ; subviens
à mon indifférence, à ma
tiédeur. »
Oui, Seigneur, nous t'aimons encore, ou nous
t'aimons déjà ; puisque nous
sentons, et nous en gémissons, que nous ne
t'aimons pas assez, que nous ne t'aimons pas comme
nous le devrions, comme nous le voudrions.
Répands ton amour dans nos coeurs par le
St.-Esprit.
Tu sais, Seigneur, que tout n'est pas
accompli en nous. Tu as dit à ton
Père : Que ma joie soit accomplie en
eux. Eh bien ! Seigneur, pour accomplir
en nous ta joie, accomplis en nous ta
volonté ; accomplis en nous ton
règne ; accomplis en nous ton
amour, accomplis en nous tout ce qui
t'est agréable. Que ta charité
nous presse enfin, et nous donne de ne plus
vivre pour nous-mêmes, mais pour toi,
cher et bon Sauveur, qui es mort et
ressuscité pour nous !
O quand est-ce qu'ainsi nous pourrons dire, et
mieux encore, quand est-ce que toi, Seigneur,
qui sais toutes choses, tu pourras dire
de nous : Tout est accompli !
Amen.
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