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écrit: TA PAROLE EST LA VERITE (Jean 17.17) Cela me suffit... |
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écrit: TA PAROLE EST LA VERITE (Jean 17.17) Cela me suffit... |
HISTOIRE DES MARTYRS PERSÉCUTÉS ET MIS Á MORTpour la vérité de l'ÉvangileLA
DERNIÈRE
PERSÉCUTION, ET FOMENTÉE
ET CONTINUÉE PAR LES PAPES CONTRE
L'ÉGLISE CHRÉTIENNE,
DANS L'ESPACE DE QUELQUES CENTAINES D'ANNÉES.
LA
persécution des Papes accompagne celle des Turcs. Elle est d'autant
plus dangereuse, qu'elle est venue à l'impourvu (à
l'improviste),
& d'autant plus cruelle, qu'elle est exercée par ceux qui
devaient être les plus paisibles & les plus sincères dans
la foi Chrétienne, & qui veulent être réputés (reconnus)
les plus saints dans
l'Église, comme prétendant que
Christ leur a donné toute puissance sur l'Église, & qu'ils
peuvent tailler...
dans
les
affaires de la religion à leur plaisir, & qu'ils sont les chefs
& pasteurs de l'Église universelle. Car il n'y a personne
qui ne sache (connaisse)
bien les
vanteries du Pape &
de
ses esclaves.
Mais
il a été montré par une infinité d'écrits, que les choses sont
autres (différentes)
non
seulement quant à la foi & la religion, mais aussi touchant
l'Église, sur laquelle ils veulent dominer tyranniquement.
Il
y a une grande différence entre l'ancienne Église Romaine & ses
premiers Évêques, & l'Église Romaine d'aujourd'hui avec ses
Papes & Cardinaux.
Les anciens Évêques de Rome
depuis l'an 70. jusqu'à Constantin le grand environ l'an 214.
ont été au nombre de 32. tous Prêcheurs & Ministres de
l'Église de Jésus Christ, & s'étant fidèlement portés en
leur charge, ont enduré la mort, pour l'amour du Seigneur
JÉSUS-CHRIST, &
de
son Évangile. Ils n'ont pas
dominé à la mode des Princes de ce monde; ils n'avaient point de
Cour à Rome, ni un conseil de Cardinaux, ils
n'avaient
nulle garde, ni rien de ce que les Papes ont accoutumé d'avoir
aujourd'hui. QUANT
au nom de Pape, il n'a été seulement attribué à l'Évêque de
Rome, mais aussi aux Évêques des autres pays. Car Aurèle & S.
Cyprien à Carthage, S. Ambroise à Milan, & d'autres qui ont été
Évêques ailleurs, étaient aussi
appelés Papes.
S.
Jérôme appelle Pape S. Augustin, Évêque d'Hyppone en Afrique.
Pape
signifie père, en la langue de Syracuse, comme Suidas (1) le
témoigne. Car, comme S. Paul dit aussi, les Ministres de l'Église
doivent être comme des
pères fidèles du peuple.
Néanmoins,
ce titre de siège Apostolique a été attribué aussi à d'autres
Églises, comme à l'Église de Jérusalem & d'Antioche.
Siège,
ici, n'est pas à dire un siège royal, mais une chaire où l'on
prêche. Car les Anciennes Églises, sièges Apostoliques, ont acquis
ce nom à cause de la doctrine Apostolique, simplement
parce
que les Apôtres ont prêché dans
ces lieux-là; de ces Églises Apostoliques, la doctrine des Apôtres
a été portée dans
des Églises
proches,
& lointaines aussi.
Il
ne faut pas que les lieux, d'où la prédication & la doctrine
Apostolique sont bannies, se vantent d'être encore
des
sièges Apostoliques quoiqu'ils
l'aient été il
y a
plusieurs années. Car S. Jean dit qu'il y a un siège de Satan,
Apoc.
2. 13.
MILLE
ans s'étaient écoulés depuis le temps des Apôtres jusqu'à Henry
4. Alors l'Église commença sa troisième période, & changea sa
doctrine, sa discipline & sa forme
de gouvernement,
en choses nouvelles & toutes contraires.
Le
premier âge de l'Église durant les premiers 500. ans fut d'autant
plus entier & pur qu'il approchait plus près des Apôtres
&
de leurs disciples. Et quoiqu'elle ait eu de
terribles combats
contre les Païens & les hérétiques... la
victoire lui
est toujours demeurée, parce que la pure doctrine
était son
appui, & qu'elle était fortifiée par les exemples de ceux qui
confessaient le Nom de Christ, & par
d'autres qui
portaient constamment les difficultés & les ennuis des
bannissements ainsi que le tourment des plus cruels
supplices:
tellement que les erreurs ne pouvaient subsister ni tenir coup parmi
telles tempêtes.
Sur
le déclin de cet âge, elle fut entachée de quelques vices
introduits par la superstition du menu peuple, & par l'erreur
de
quelques doctes (érudits)
personnages. Depuis, ces
vices s'accrurent à cause des courses (des
allées et venues)
des nations étrangères,
qui
vinrent
accourant de divers endroits, lors que l'Empire d'Orient commença à
se déchirer; c'est
alors la discipline ancienne
s'affaiblit, les superstitions commencèrent à prendre pied & de
ce nombre furent la Moinerie, les vœux, le célibat, la vénération
des saints & autres traditions humaines semblables, dont les
semences commencèrent à prendre racine, & à bouter dehors
peu à peu, quelque temps après le Concile de Nicée.
L'autorité
de ce Concile fut toujours en vigueur, parce
que
beaucoup d'excellents personnages qui s'y trouvèrent avaient
maintenu les principaux points de la doctrine Chrétienne contre les
hérésies; une partie d'entre eux avaient souffert
la
persécution pour sceller la vérité de la religion Chrétienne.
Au
reste, quoiqu'on eût fait dans
ce Concile quelques
décrets touchant le gouvernement des Églises: comme par
exemple
que l'Évêque d'Alexandrie serait surintendant des Églises
d'Afrique, celui d'Antioche de celles d'Asie, celui de Rome de celles
d'Europe & que les Évêques seraient créés par les voisins,
toutefois on ne dressa point une police mondaine, ni ne donna
l'autorité & la puissance à un seul
des Évêques
pour commander à tous les autres.
Ainsi
ces décrets ne furent pas faits pour être tenus
comme
articles de foi: mais comme ce sont articles hors la parole de Dieu,
lesquels se changent avec le temps, ils ont pris fin avec les Églises
d'alors, si bien qu'ils n'appartiennent pas
à
l'Église, laquelle n'est point assujettie à des doctrines, des
inventions & des lois humaines, ni obligée de garder en tout
temps & en tous lieux une même police
extérieure, mais
est liée seulement à la parole de Dieu.
En
ce temps il n'était point loisible à l'Évêque de Rome ou
d'Antioche, ou d'Alexandrie, d'assigner & d'assembler les
Conciles, ou de charger les autres Églises de
nouvelles
cérémonies; encore moins de dresser des nouveaux articles de foi,
ou d'introduire un service de Dieu contraire à celui que lui même
requiert: mais la seule parole de Dieu avait toute autorité, comme
il apparaît par les décrets & les
déterminations de
quelques Conciles Chrétiens qui ont été tenus après celui de
Nicée, comme le premier Concile de Constantinople où l'hérésie
d'Eunomius fut condamnée, celui d'Ephèse contre Nestorius, celui de
Chalcédoine contre Eutyches, & quelques autres depuis.
Or
combien que les Conciles tenus après les premiers susnommés aient
retenu la sainte doctrine touchant les articles de foi, toutefois ils
ont donné trop d'autorités aux lois & traditions humaines,
&
ils se sont laissés gagner par
la superstition qui
commençait à lever la tête.
Pour
exemple, le Concile de Laodicée condamna à bon droit les Novatiens,
mais il a blâmé sans raison les laïcs qui se remarient pour la
seconde fois.
Le
Concile Mileuitain, où se trouva S. Augustin qui
maintint très bien la doctrine du péché originel, de la grâce, &
de
la justification; mais qui conferme (ratifie)
très mal (à
tort)
la superstitieuse opinion touchant les vœux.
Le
Concile d'Ancyre permit aux Diacres de se marier; depuis, celui de
Carthage le leur défendit.
Voilà
comment peu à peu la superstition s'avança, au
fur et à
mesure que les traditions humaines furent plus estimées
&
proposées dans l'Église que les lois de Dieu. APRÈS
ce premier âge, survint le second, qui augmenta & ratifia
les erreurs & les superstitions que le premier avait laissés,
puis,
par succession du temps on
s'éloigna encore davantage de la règle des saintes Écritures, tant
et
si bien
que finalement l'amas des superstitions & des erreurs accabla &
éteignit
entièrement la lumière de la pure doctrine.
Il
advint que plusieurs peuples Barbares, comme les
Goths, les
Lombards & leurs associés, se jetèrent sur
l'Italie. Alors
les bonnes lettres (saintes
Écritures) furent ensevelies, les Églises demeurèrent
désertes; et ce qui est pire, c'est que ces
Barbares,
possesseurs de l'Italie, apportèrent avec eux, ou
reçurent
aisément beaucoup de superstitions, tellement, que bientôt
les abus se multiplièrent grandement.
Les
persécutions du premier âge avaient engendré les Hermitages &
les Moineries. Puis après survinrent les horribles dissipations de
l'Empire, & les confusions introduites par les nations étranges
(étrangères).
Les
gens paisibles,
chargés de femmes & d'enfants, en contemplant l'Italie ainsi
déchirée, & jugeant que c'était un heur (bonheur)
singulier d'être éloigné des gouvernements publics pour demeurer
en quelque désert sans famille, sans enfants, pour ne point voir les
saccagements des villes, & la désolation du pays, ils
estimaient heureuse la condition de ces Moines qui jouissaient de si
grand repos.
Cela
donna grand lustre (une
lumière
nouvelle) sur l'opinion du célibat,
& mit les
Moines en tel crédit, que plusieurs commencèrent à désirer &
à chercher les lieux solitaires.
D'avantage
les hommes, qui sont Barbares &
farouches
de leur naturel, ont en admiration les cérémonies nouvelles qui ont
l'apparence de la
Religion & quelques accointances avec Dieu.
Ce
n'est donc pas merveille (étonnant)
si les Moineries se multiplièrent alors, & si chacun se laissa
persuader qu'une telle manière de vivre (qui éteignit finalement la
lumière de l'Évangile touchant la vraie foi & les bonnes
oeuvres) était fort excellente.
Alors
que ces fondements de méchantes superstitions eurent été
posés
de si bonne heure, & qu'avec le temps ils furent affermis
&
appuyés (gravés)
dans
l'esprit des hommes, survint l'autorité publique du Pape Grégoire
le grand, lequel monta sur le siège Papal en
l'an 593.
Il
établit le service & l'invocation des Saints, &
commanda que
l'on dédiât des temples & chapelles aux os & autels de
ces derniers.
Outre
cela, il fit valoir la fausse opinion de la moinerie, des traditions
humaines contraires à la parole de Dieu, des satisfactions
Canoniques, des vœux, du célibat, le joug duquel il imposa aux
diacres de Sicile, qui jusqu'alors avaient eu licence (la
permission) de se marier dans tous les degrés
Ecclésiastiques, suivant la coutume de l'Église Grecque & les
décrets des anciens Conciles.
En
ce même temps naquit l'opinion de l'oblation (l'offrande)
du corps & du sang de Jésus Christ pour les morts. De cela
procéda une horrible profanation du Sacrement; Grégoire prît
occasion de mettre en avant cette opinion, à cause de quelques
fantômes qui apparurent alors.
Ces
erreurs établies & reçues par autorité publique troublèrent
merveilleusement (extrêmement)
l'Église, & polluèrent d'abus & d'idolâtries étranges
(étrangères
à) la pure
doctrine de la justice qu'ont les fidèles devant Dieu, soit
la vraie invocation qui doit être fondée sur nôtre Seigneur &
unique Médiateur Jésus Christ Fils de Dieu, item la doctrine &
le vrai usage des Sacrements.
Pour
le dire en un mot, les Papes abolirent entièrement la doctrine de la
foi en Dieu par une fausse persuasion des traditions humaines; ils
ensevelirent la promesse de l'Évangile touchant les bénéfices
gratuits de nôtre seul Médiateur & Sauveur Jésus Christ Fils
de Dieu, sous le méchant blasphème du mérite des oeuvres &
services des hommes, & sous l'intercession &
l'assistance des
Saints.
ENVIRON
200. ans après la nativité de Jésus Christ, le pape Victor,
premier du nom, avait été si hardi d'imposer de
nouvelles
lois aux Églises d'Orient, & de menacer
d'excommunication
ceux qui ne les voudraient recevoir, qu'Irénée, Évêque de Lyon,
disciple de Polycarpe, s'opposa vivement à ce Victor.
Depuis
l'on observa le décret du Concile de Nicée approuvé par l'autorité
de Constantin le Grand, jusqu'au temps des Empereurs Maurice &
Phocas: car alors un certain Jean, Patriarche de Constantinople,
renommé à cause d'une humilité feinte qu'il avait montrée pendant
qu'il était moine, sorti de son cloître par ruse pour être Évêque,
au lieu de se contenter de sa charge & de
sa
dignité, il
voulut se
faire un
nom & devenir
Évêque universel de toutes les Églises quoique
Pelage second & Grégoire le Grand s'opposassent à ce glorieux,
toutefois il fut favorisé par l'Empereur Maurice.
Or
après que Maurice eût été tué, Phocas qui l'avait fait mourir
craignant que l'Italie ne se révoltât de l'obéissance des
Empereurs Grecs, se servit des Papes pour la retenir en devoir,
&
donna ce titre d'Évêque universel à Grégoire , lequel avait tonné
& tempêté contre ce nom: l'effet montra qu'en détestant le mot
il avait ardemment désiré la chose même, vu qu'il usurpa la
primauté & la
domination sur les Églises qui n'étaient aucunement de sa charge.
Vrai est que quelque temps avant l'Empire de Maurice , Zosime &
Gélase Évêques
de Rome avaient
débattu de la primauté avec les Évêques de Grèce &
d'Afrique, mais tout cela s'était évanoui.
Après
Grégoire, l'Évêque de Ravenne s'attribua le même titre, lorsque
les Goths ravagèrent l'Italie, prenant & saccageant
Rome, & que Valentinien le jeune établit le siège de l'Empire à
Ravenne, y envoya des Exarques qui fortifièrent cette ville pour
être la capitale de l'Italie.
Mais
après que Valentinien eût été tué &
que
Grégoire fut mort, ce même combat recommença entre l'Évêque de
Rome & de Constantinople, au temps de Boniface troisième,
&
fut plus âpre qu'auparavant.
Sur
ce, Phocas prît la connaissance du différent, & en jugea
tellement qu'il fut dit que l'Évêque de Rome serait appelé Évêque
universel. Depuis il advînt que les Églises d'Orient furent ruinées
par les Mahumétistes (Mahométans):
les Évêques de Rome se voyant lors à cheval commencèrent à se
faire valoir, du consentement, avec l'aide
& le support
des peuples barbares qu'ils avaient amiellés (endormis
par des paroles mielleuses) & par superstitions;
ils
s'associèrent à eux pour se maintenir par ce
moyen; ils
firent en dépit des autres Évêques, spécialement des Grecs, qui
s'y opposaient.
TELS
furent les commencements de la Monarchie Papistique en l’Église.
Et par telles pratiques les Papes s'attribuèrent, & occupèrent
la primauté par-dessus les Évêques, se servant des occasions
qu'apportèrent les ruines des Églises orientales, & les
superstitions & les idolâtries des Occidentales, pour
cette
raison les nouveaux peuples... s'y
adonnaient fort
avidement & faisaient profession avec une
ardeur & une
obstination incroyable. C'est
ainsi
que les Évêques de Rome devinrent
des
Monarques. Quoique
l'ambition les sollicitait de passer outre (d'aller
plus loin),
toutefois, au
commencement ils n'osèrent pas manier toutes les affaires de
l’Église à leur fantaisie, ni commander tyranniquement aux autres
Évêques, &
prescrire
des lois ou imposer des charges, encore moins entreprirent ils
d'envahir les droits des Empereurs : d'autant qu'ils étaient tenus
par l'opposition & résistance des autres Évêques, & par
l'autorité & la
puissance des Empereurs, qui depuis Charlemagne & à l'exemple
de
leurs devanciers, créaient (nommaient)
les Papes & les Évêques, déposaient ceux qui faisaient des
choses indignes de leurs charges, & y en établissaient
d'autres;
ils
assignaient les Synodes, & ne permettaient pas
aux Papes de les convoquer, ni d'y penser en (d'y
agir avec l')
autorité royale ou seigneuriale, ni faire chose quelconque sans
l'autorité & le
consentement des Empereurs & des autres Évêques.
Souuentesfois
(bien
souvent)
les Empereurs assignaient & assemblaient des Conciles en
Allemagne & en Italie, sans en demander l'avis ni le faire
savoir
aux Papes: tant s'en fallait qu'ils fussent demandés
pour y venir faire les maîtres.
OR
combien que cette sujétion (soumission)
grevât (lésât)
&
mît les Papes en peine (de fait, ils firent tout leur possible
s'en défaire), toutefois les Empereurs, sachant bien pour quelles
raisons Charlemagne avait dressé cet ordre dès le commencement,
&
pourquoi il l'avait muni de lois spéciales,
qui avaient été
renouvelées & maintenues avec les armes par ses successeurs,
voyant aussi les machinations des Papes, & jusqu'où ils
s'avanceraient, si on leur donnait la liberté & la licence
(permission)
qu'ils
poursuivaient si chaudement: item combien il importait au repos
&
à la conservation de l’Église & de l'Empire que les Papes
fussent sujets & justiciables des Empereurs; c'est
ainsi
qu'ils empêchèrent les Papes jusques au temps de l'Empereur Henry
quatrième, de secouer leur joug, pour parvenir au
but auquel
ils tendaient depuis si longtemps.
Au
reste, nonobstant (malgré)
que les erreurs, les
superstitions, les
abus
&
les idolâtries
fussent en telle vogue en ce temps-là, malgré
que la lumière de la
vérité était éteinte dans
la plupart des pays où l'on faisait profession de la Chrétienté,
il y eut toujours plusieurs doctes (savants)
& bons personnages, surtout au commencement de ce second âge
jusques à trois cent ans après, dans
les Églises
Grecques & Latines, lesquelles enseignèrent purement la
doctrine
des principaux points de la Religion. Jean
l'Écossais fut du temps de Louis le Débonnaire. Comme il
interprétait le livre de la hiérarchie de Denis & taxait
d'erreur déjà
reçut dans
l’Église de l'oblation (l'offrande)
de la Cène du Seigneur pour les vivants et pour les morts, ses
auditeurs le tuèrent à coups de poinçons.
Voilà
quels furent les temps du deuxième âge de l’Église. S'ENSUIVIT
puis après le troisième âge (de l'Église), qui commença au
temps de ce Henry quatrième, &
alors
que
prît fin
la demie période de l'Empire depuis Charlemagne jusques alors.
Cet
âge changea merveilleusement (affreusement)
les
affaires de l'Empire & de l'Église: car dès lors fut confermée
(renforcée)
la tyrannie des idolâtries &
des superstitions
contre le règne, c'est-à-dire contre la doctrine, le
service & l'invocation du Fils de Dieu; la nouvelle puissance
des
Papes, abolissant la juste & légitime autorité des Empereurs,
fut lors établie.
Outre
les idolâtries & les superstitions du
second âge, il
fut introduit dans l'Église le service du dieu
Maozim (2),
lequel fut adoré au lieu du vrai Dieu, & a
tiré à sa
foi les yeux & les cœurs de tout le monde.
Sitôt
que ce Dieu commença à se montrer dans les processions
&
à la Messe, la parole de Dieu commença à se
taire, ce dieu
haussa (éleva)
en dignité
les Ecclésiastiques, amplifia la puissance, accrût les richesses,
&
fortifia le royaume des Papes.
Ce
dieu remplit de Moineries la Chrétienté, & y logea d'infinies
troupes de Moines, qui pour de l'argent vendirent à quiconque en
voudrait acheter le sacrifice quotidien de la Messe, &
leurs
autres oeuvres. Ils
étaient
en garnison pour la garde du royaume Papistique, d'où ils ne
cessèrent d'inventer, de jour à autre, force géhennes (de
tourments)
pour les consciences, pour les retenir en prison attachées par les
illusions d'idolâtrie, & enferrées par les liens des inventions
&
des traditions
humaines.
Dans
cette prison,
il était plus malaisé (difficile)
de subsister contre ces tourments de conscience procédant
(provenant)
de la frayeur que donnaient les commandements des hommes, que s'il
eût fallu être déchirés en pièces.
Par
la suite, les moineries devinrent démesurément riches par
tels
(ce
genre de) trafics.
C'est alors que naquit une nouvelle sorte de
docteurs qui
abolirent presque entièrement la doctrine contenue dans les
livres des Prophètes & des
Apôtres touchant le
péché, la loi, la justification, les bonnes oeuvres &, par de
nouvelles impositions (règlements) du
tout contraires à la règle & au fondement de la religion
Chrétienne, fardèrent & maintinrent les abus, les
erreurs, les
idolâtries, &
le
trafic des pardons du Pape. La
majesté & la
dignité de l'Empire ébranlées & presque renversée par les
Papes, fut alors
abattue & les Papes firent tant que non seulement ils
secouèrent
le joug des Empereurs, mais aussi usurpèrent les droits impériaux,
spécialement dans
l'élection des Papes, des
Évêques & dans
la convocation des Conciles. Puis ils mirent le pied sur la gorge des
Empereurs, &
les
pressèrent & les foulèrent cruellement, si
bien qu'il
s'ensuivit un établissement de nouvelle monarchie sur toute la
Chrétienté; bref, il y eut un entier changement dans
l'Empire & dans
l'Allemagne.
La
première pratique des Papes, qui plusieurs
fois auparavant avaient essayé (mais en vain & mal à propos) de
rompre la loi qui donne puissance aux Empereurs sur le Pape &
sur
les Évêques, fut de chercher quelque prétexte pour allumer les
guerres civiles, désunir les Princes d'Allemagne, &
les
bander contre l'Empereur.
Ayant
gagné sur ce point, mis l'Allemagne en troubles,
dissipé,
ébranlé & rompu les forces de l'Empereur par la conspiration de
ceux de Saxe, ils commencèrent à demander tout ouvertement
l'abolition de cette loi.
Finalement
après que les Allemands se furent entretués, que les principales
maisons eurent été exterminées, les anciennes lois & les
mœurs abolies, l'autorité des Empereurs entièrement mise bas, les
Papes usurpèrent le droit de créer les Évêques de Rome, &
d'ailleurs établirent un Sénat ou collège de Cardinaux qui
éliraient les Papes, & commanderaient non seulement aux
Évêques,
mais aussi aux Princes & Rois Chrétiens, manieraient la
religion
& les affaires d'état à leur poste & selon que leur
profit
& leur dignité le requerraient, donneraient
&
ôteraient les Évêchés & les royaumes à qui
bon leur
semblerait. Les
Empereurs & autres Rois Chrétiens devinrent alors
les laquais
des Papes, & leur servirent de corps de garde pour maintenir
leur
tyrannie à l'encontre de tous les
ennemis qui la voudraient assaillir (l'agresser,
la dénoncer)
au dehors par la force & les armes découvertes: de
même
pour aviser &
procurer
(faire
en sorte)
qu'elle demeurât dans
son entier, pour maîtriser les consciences & qu'aussi
que chacun se tienne prêt pour courir sus à
tous ceux que
les Papes voudraient exterminer. Outre cette audace, qui accrût
(augmenta),
à cause des
guerres civiles de l'Allemagne, l'impudence des Papes qui
fut
si débordée (grande)
&
si détestable, qu'ils s'emparèrent de l'autorité
& du
nom de Dieu, & d'une puissance qu'ils prétendirent leur avoir
été donnée par Jésus Christ, pour exercer une tyrannie horrible,
& telle que jamais elle ne fut autant
ressentie
dans l'ordre Ecclésiastique. Ils
agissaient avec un
orgueil diabolique, comme les paroles du Pape Alexandre, qui mit le
pied sur la tête de l'Empereur Frédéric, le montrent évidemment.
Tel
fut l'état du troisième âge de l'Église & de l'empire.
Quoique plusieurs excellents personnages aient
condamné &
combattu de vive voix & par écrit cette tyrannie pendant
qu'elle
a duré, toutefois elle demeura appuyée sur sa propre force &
sur la folle dévotion des pauvres abusés & cela
jusqu'au
temps de Martin Luther: car jusqu'alors la monarchie de l'Église
Romaine avait subsisté l'espace de cinq cents ans.
Du
temps de l'Empereur Lothaire, successeur de Henri cinquième, fils de
Henri quatrième, vécut Gratien, qui ramassa en un volume les
décrets des Papes, combien qu'aucuns disent qu'avant Gratien il y
avait un semblable livre entre les mains des hommes, recueilli par un
certain Burkard, Évêque de Wormes.
Gratien
mêla parmi ces décrets quelques fragments de canons des anciens
Conciles, spécialement ceux qui lui semblaient plus convenables pour
agrandir & élever la dignité de la hiérarchie Romaine. Il y
fourra aussi les constitutions nouvelles, accommodées à l'état de
son temps: mais quant aux bonnes lois qui maintenaient la discipline
& l'Église primitive en sa splendeur, il changea tout cela en
batelages (rémunérations
d'ecclésiastiques).
Ce
ramas (cet
assemblage)
de Gratien fut cause que de là en avant (par
la suite)
les Papes se donnèrent licence, sans mesure quelconque, pour dresser
& entasser décret sur décret. Par de
tels artifices, ils
changèrent ce qu'ils voulurent dans
la doctrine céleste & dans les
lois civiles, & selon leur avis (conception)
ils
se fortifièrent ainsi
contre toute puissance céleste & terrienne. Ce qui engendra de
grands débats dans
les Églises
& les
gouvernements politiques.
Alors
était en grande vogue l'étude du droit civil, à quoi les Italiens
& les
Allemands s'adonnaient de grande affection, selon que le naturel de
l'homme est fort ami de choses nouvelles, & semblait que cet
établissement de lois, qui munissait &
armait
les Empereurs, menaçait la tyrannie des Papes, laquelle ne faisait
(comme on dit) que sortir de terre, & n'avait pas encore pris
racine.
Afin
donc de prévenir de bonne heure les dangers qui pouvaient environner
la Papauté, si le droit civil avait le dessus, on commença à
magnifier l'autorité des canons, & la préférer aux lois
Romaines, alléguant que ces canons traitaient des choses
ecclésiastiques & que l'Église était en plus grande autorité,
ayant la puissance de modifier & déterminer des choses civiles.
Pour
cette raison,
on commença à dresser des lois, qui dérogeaient en quelque sorte
au droit civil, comme étant corrigé & limité par l'autorité
de l'Église. Et d'autant que ce nouveau droit & ces nouvelles
lois avaient besoin de nouveaux protecteurs, on vit incontinent
naître deux sortes de gens, à savoir les Canonistes &
Scholastiques.
Les
Canonistes prennent charge de maintenir la hiérarchie & la
tyrannie Papale par le droit Canon, ce qu'ils exécutèrent aussi
vivement que les docteurs en droit civil soutenèrent, par l'Écriture
& par les lois Romaines, la puissance de l'Empereur.
Les
Scholastiques inventèrent une nouvelle doctrine, pour attirer &
ensorceler par des
erreurs &
des
superstitions
les écrits des hommes afin qu'étant enlacés dans ces erreurs ils
se continssent (restent) dans
l'obéissance du siège Romain.
Ce
que la doctrine scolastique a fait, ç'a été de fouler aux pieds
&
d'éteindre ce qui restait de pureté et de clarté dans
la
doctrine céleste, touchant la Loi, l'Évangile, le péché, la
grâce, la foi, la justification devant Dieu, le droit usage des
Sacrements, la vraie invocation du Nom de Dieu, & les bonnes
oeuvres. Car autant que l'on ne pouvait maintenir les erreurs &
les abus reçus par la coutume, introduits ou
approuvés par
les Papes, en les examinant à la règle de la parole de Dieu, on
délaissa cette parole pour chercher d'autres appuis.
Sous
l'empire de Frédéric premier, Pierre Lombard, maître des
sentences, réduisit en quatre livres les fondements de la doctrine
scholastique, & depuis toute cette racaille de sophistes
& de
moines fut tellement occupée à gloser & à
commenter ces
livres, que la sainte Bible s'évanouit presque entièrement de leurs
mains & de leurs esprits; & en chaires des docteurs
& des
prêcheurs, au lieu du Nom de Jésus Christ & de saint Paul, on
n'oyait (entendait)
parler
d'autre chose que du maître des sentences.
Thomas
d'Aquin & Lescot ses commentateurs, écrivains comme à l'envie
l'un de l'autre qui serait le plus subtil, remplirent l'Église de
tant de questions ineptes, méchantes & inexplicables,
corrompirent &
polluèrent
tellement la philosophie, qu'ils contraignirent leurs successeurs,
comme Guillaume Occam & d'autres, d'inventer & de
suivre des opinions contraires. De là sortirent de nombreux
conflits, que la lumière de la parole de Dieu a finalement écartés
& fait évanouir.
Or
cette doctrine, amassée de quelques partages de l'Écriture sainte,
détournée de leur vrai sens & confondue avec les disputes
(débats
contradictoires)
morales, naturelles & surnaturelles d'Aristote & de
Platon,
mal entendus & dépravés aussi en quelques endroits, item des
constitutions des Papes, fut enveloppée de difficultés
inexplicables. Tout ce que l'on pouvait apprendre là c'était
d'avoir l'exposition de quelques commandements de la Loi, ou plutôt
c'était lire un discours sur la philosophie morale selon la façon
des philosophes.
Au
reste, elle abolit la doctrine de l'Évangile, anéantissant la
certitude de la promesse & de la foi, & déboutant le
seul
Médiateur. En somme, elle fut entièrement accommodée à la
tyrannie des Papes, & aux superstitions qui régnaient alors,
&
qui ont continué depuis.
Elle
est fondée sur des propositions fausses & méchantes, à savoir
que les décrets des Papes & tout ce qu'ils approuvent,
& ce
qu'ils changent dans
la doctrine ou dans
les
anciennes cérémonies, sont de droit & commandement divin,
quoiqu'ils
soient contraires à la règle de la parole de Dieu: car telles
constitutions (disent-ils) sont valables à cause de l'autorité de
l'Église qui ne peut errer, &
que
c'est une grande impiété de la
contredire, notamment cette Église qui a l'Évêque de Rome pour
chef.
Mais
pour connaître mieux cette doctrine des Scholastiques, il faut lire
leurs livres imprimés, qui font tellement rougir plusieurs qui s'en
servent contre la vérité, qu'ils les condamneraient les premiers,
s'ils n'avaient d'autres armes pour se
défendre.
Cette
doctrine en somme contient ce magnifique consentement que les
docteurs Papistiques font sonner si haut dans
leurs livres & leurs
sermons, voulant que ce soit la règle selon laquelle on dresse
&
plie
toutes ordonnances dans
l'Église, & que toutes opinions &
expositions
soient rapportées là & examinées par elle: en quoi ils se
montrent si aveuglément obstinés, qu'ils aiment mieux rejeter les
témoignages de l'Écriture sainte & des purs théologiens de
l'Église primitive, que quitter un seul point de la doctrine de
leurs Scholastiques, tant ils ont peur que le royaume Papistique,
appuyé & fondé sur de
tels décrets, ne s'ébranle & trébuche. Au
reste, cette nouvelle doctrine du droit canon &
des
Scholastiques engendra des envies très ambitieuses & de
terribles estrifs (querelles)
entre les jurisconsultes, les théolagastres ou Scholastiques, &
les Canonistes.
De
là sortirent diverses factions, tellement qu'en
fin de compte
la Chrétienté fut divisée, les uns adhérant aux Empereurs, sous
le nom de Gibellins, les autres tenant le parti des Papes, &
s'appelant
Guelphes. Dès
lors, ce
fut à courir sus les uns aux autres avec une haine irréconciliable,
se surprendre, défaire (détruire)
& s'entretuer
par toutes sortes de séditions, de violences, de saccagements &
de cruautés
du tout étranges & incroyables. Or
si quelqu'un demande: D'où vient que les Papes ont ainsi mis le pied
sur la gorge aux Empereurs & pourquoi de
tels grands Princes n'ont pas
brisé la tyrannie démesurée des Papes, lors qu'elle était encore
faible & aisée à rompre: item, pour quelle raison ils ont
souffert que l'Église & l'état public fussent réduits dans
une telle
injuste & abominable servitude?
Je
réponds
que
les Empereurs se sont laissés abattre, non point par crainte, ni par
faute de cœur, ni pour l'appréhension des dangers, encore que ç'ait
été un mal horrible de voir ruiner l'empire, meurtrir leurs
fidèles sujets, & perdre tant de vaillants seigneurs &
gentilshommes; mais ils furent vaincus par
l'opinion (la
conception)
de la religion, qui dominait puissamment dans
les cœurs
ensorcelés de superstition & des erreurs d'alors déjà fort
enracinés au monde.
De
tout temps, cette considération a eu un merveilleux crédit envers
ceux qui ont quelque conscience, de quelque source que procède la
religion, & quelques fondements qu'elle puisse avoir, moyennant
qu'elle ait apparence de religion, & paisse les yeux &
les
cœurs de quelque sentiment de divinité: ce que nous voyons avoir
merveilleusement aiguillonné & fléchi les Païens mêmes.
Ainsi
donc, l'opinion (la
conception)
de la religion renversa ces bons
Princes, & il
n'y eut autre moyen de les abattre qu'en leur faisant croire
assurément que tout ce que les Papes proposaient &
entreprenaient était saint, & légitime, & réglé selon
la
volonté de Dieu révélée dans les saintes Écritures.
C'était
le titre à l'aveu par lequel toutes choses se
faisaient, &
on estimait faire (commettre)
un grand péché de s'opposer un tant soit peu à
cela. Puis
après, cette persuasion haussa (augmenta)
davantage l'audace & l'impudence des Papes, qui
profitèrent
de l'occasion pour machiner &
mettre en avant des
conseils, dont s'ensuivit la ruine de l'Église & de l'empire.
Pour
cette raison, les yeux du peuple étant aveuglés par de
fausses
& méchantes superstitions, les Princes étaient contraints
d'endurer les outrages des Papes. ... il ne se trouvait presque
personne qui osait dire un seul mot, ni découvrir l'impiété des
ordonnances Papistiques, sinon (à
moins) qu'on eût envie de perdre sa tête.
En
ce temps-là, à savoir environ douze cent ans après la nativité de
Jésus Christ, naquirent en l'Église plusieurs ordres de moines,
pestes publiques & destructeurs de la vraie religion, de la
doctrine Chrétienne, & des sciences libérales.
Deux
de ces ordres, faisant profession de suivre la règle de Saint
Bernard, furent néanmoins fort différents en lois, cérémonies &
manière de vivre.
Les
uns s'appelaient les pauvres de Lyon, les autres humbles d'Italie.
Ces pauvres de Lyon vivaient parmi les autres hommes, prêchaient
&
exposaient les Écritures; les humbles d'Italie méprisaient les
richesses, vivaient d'aumônes & se vantaient d'être imitateurs
des Apôtres.
Les
Papes condamnèrent ces deux ordres; puis comme la superstition est
fertile, & une erreur en engendre d'autres, survinrent de
nouveaux ordres, qui sous une apparence vaine & déguisée,
ravirent tellement le monde, qu'en moins de rien ils commencèrent à
multiplier & s'étendre dans
tant d'endroits, qu'ils remplirent tout l'Occident en peu d'années.
Leurs
principaux fondateurs furent François & Dominique. François
était Italien d'une ville nommée Assise, dans le
Duché de
Spolète; Dominique était Espagnol.
Les
Carmes vinrent d'Asie en Europe, se vantant d'être descendus du mont
Carmel, &
furent
amenés par un certain Albert, Patriarche de Jérusalem.
Les
Augustins naquirent en France par le moyen de Guillaume, Duc
d'Aquitaine & Comte de Poitou, lequel les établit, afin de
suivre la doctrine & la façon de vivre de Saint Augustin , dont
ils portaient le nom: comme les moines Grecs nommés Calogeres (mot
corrompu & composé de deux mots Grecs qui signifient beau père)
se disent suivre la règle de S. Basile. Peut-être
que l'intention des fondateurs de ces ordres n'était pas mauvaise.
Car je pense qu'ils voulaient appuyer la discipline de l'Église,
laquelle allait en décadence, & voulaient ramener les choses à
quelque état plus étroitement réglé, parce
que les chapitres des chanoines & les autres couvents étaient
diffamés à
cause
de leur
gourmandise, leur
paillardise,
& autres telles dissolutions; l'étude de la
Théologie était anéantie, &
les
Ecclésiastiques s'arrêtaient après la pompe des grands du monde,
&
aux gouvernements politiques. Premièrement,
ils falsifièrent la doctrine touchant le péché, & ne dirent
rien des ténèbres qui sont dans
l'intelligence & des vices en la volonté; puis ils firent
croire
que le mal qui reste dans
les
régénérés
n'est pas péché répugnant à la Loi de Dieu.
Quant
à la Loi de Dieu, ils la transformèrent entièrement en
philosophie, qui parle seulement de la conduite de nôtre vie devant
les hommes, & maintenèrent que l'on pouvait satisfaire la Loi
de
Dieu par cette discipline civile, c'est à dire par les
oeuvres extérieures & un tel quel (avec
l') effort de la volonté, quoiqu'il
reste des ténèbres
dans l'intelligence, & plusieurs
mauvaises inclinations
dans la volonté & dans le
cœur.
Aussi
soutinrent-ils que ces ténèbres & ces
inclinations
mauvaises n'étaient point des péchés.
De
là ils tirèrent d'autres fausses conséquences, par lesquelles ils
effacèrent la promesse de l'Évangile, & tout le bénéfice de
Jésus Christ; car ils enseignèrent que les hommes étaient justes
devant Dieu, c'est à dire agréables à Dieu pour l'amour (en
raison) de leurs oeuvres, au lieu de dire que nous sommes
réputés justes par grâce, pour l'amour de Christ nôtre Médiateur
appréhendé par foi, qui est la doctrine annoncée continuellement
dans l'Église de Dieu par les Prophètes
& les
Apôtres.
Bien
plus encore, ils confondirent la Loi avec l'Évangile, disant
qu'il y avait triple Loi, à savoir: Naturelle,
Mosaïque &
Evangélique.
Et
c'est pour cela qu'ils maintenèrent que
l'homme satisfaisait
à la justice de Dieu. Leur folie les transporta jusqu'à
inventer d'autres oeuvres & un nouveau service de Dieu; ils
préférèrent en tout & partout leurs inventions aux oeuvres
commandées dans la Loi; puis, pour de l'argent,
firent part
de leurs oeuvres à ceux qui voulurent en acheter.
Quelles
absurdités ont-ils forgées touchant leur état de perfection?
Finalement,
leur impudence parvînt jusque là, à prêcher que la
moinerie était une manière de vivre établie pour mériter le
pardon des péchés & la justice devant Dieu;
que c'était
un état de perfection, plus excellent sans comparaison avec
toutes les autres sortes de vocations ordonnées de Dieu.
De
plus, ils furent si sots de vouloir contrefaire les cérémonies
légales, qu'ils
voulurent avoir dans
l'Église Chrétienne un souverain Pontife sur
terre, des Sacrificateurs, de semblables sacrificatures, sacrifices
&
cérémonies que les Mosaïques (selon
la loi Mosaïque).
Mais
combien de disputes (débats
contradictoires) inexplicables ont-ils obscurci &
brouillé
la doctrine de la repentance? de combien
d'horribles tourments
ont-ils bourelé (tourmenté)
les consciences?
Premièrement,
elles ont été chargées de la confession & enveloppées des
cordeaux du dénombrement des péchés. Ces
erreurs en engendrèrent d'autres
& firent croître de nouvelles
erreurs,
pleines de mensonges, d'impiété &
de
blasphèmes, contre Dieu; des
erreurs
touchant les vœux des moines, l'application de la Messe pour les
vivants et pour les morts, les pèlerinages dans
les
temples des saints, les pardons, le purgatoire, & d'autres
semblables supersticieuses observations d'oeuvres vaines, de
différence de viandes, de jours, d'habillements, d'images, de vœux,
de processions, de jeûnes & d'autres
traditions humaines, lesquelles accablaient les consciences, les
remplissant d'horreur & de crainte, &
les
étranglaient d'infinis cordeaux dont il ne faudrait d'autres témoins
que les moines & les prêtres, &
tels
autres inventeurs de nouveaux supplices d'âmes.
Si
les Papes étaient embesognés (affairés,
occupés) à établir leur tyrannie spirituelle pour
persécuter cruellement... la vérité de l'Évangile, ils ne
l'étaient pas moins à augmenter & affermir la domination
temporelle & la domination sur les pays
qu'ils avaient
usurpés aux Empereurs, Rois & princes
terriens, afin de
tenir tout le monde sous leurs pieds.
Quels
horribles tumultes (agitations)
le Pape Grégoire septième ne mit-il pas en route
contre
l'Empereur Henri quatrième?
Le
Pape Urbain second, successeur de Grégoire, duquel il avait été un
diligent disciple, fut auteur de la Guerre des Chrétiens contre les
Sarrasins, au Concile de Clermont, ainsi qu'il en a été parlé
ci-devant.
Le
Pape Pascal deuxième incita Henri cinquième contre son propre père
Henri quatrième, qu'il excommunia par trois diverses fois, &
fit
tant et si bien que les trois Évêques de Mayence,
de Cologne
& de Wormes, dépouillèrent le bon Empereur... dans son palais
d'Ingelheim, de ses ornements impériaux, & en ornèrent son fils
Henri cinquième.
Albert
Krantz (4) décrit
cette histoire tragique au chapitre vingtième du cinquième livre de
son histoire de Saxe. Ce
même Pascal fit une
infinie de
maux à l'Empereur Henri cinquième, & fut cause (fut
responsable)
de faire répandre beaucoup de sang, seulement à cause de la
collation (l'affectation)
& l'investiture des Prélatures (dignités
ecclésiastiques)
&
des prébendes
(revenus),
desquelles l'Empereur avait disposé jusques à ce temps-là; mais le
Pape voulait lui arracher cette puissance des mains: ce qu'il ne
pouvait faire alors; Calixte deuxième s'attacha alors
à l'Empereur, & ne cessa de
le tourmenter
jusqu'à ce
qu'il eût en ses mains cette puissance. Mais
ce ne fut pas encore assez. Car les Papes qui suivirent les susdits
(ceux
qui viennent d'être nommés),
furent aussi les
successeurs de leurs méchancetés pour
persécuter les Empereurs. Car ils s'opposèrent à eux de plus en
plus, &
ne
cessèrent avec leurs excommunications, séditions, guerres, fausses,
déloyales & continuelles pratiques, jusques à tant (jusqu'au
point) qu'ils
lassèrent les Empereurs &
les
oppressèrent en haussant (plaçant)
leur siège au-dessus
d'eux, tant et
si bien
qu'ils acquirent une souveraine puissance sur tous.
Que
celui
qui
veut avoir une plus
ample connaissance de ces choses, lise l'histoire de l'Empereur
Frédéric Barberousse, &
ce
que firent contre lui les Papes Adrien quatrième & Alexandre
troisième, lequel, par
une arrogance extrême, lui mit le pied sur la gorge; sans
compter
ce que le Pape Célestin quatrième commit contre l'Empereur Henri
cinquième; et de quel orgueil, menace & violence usa le Pape
Innocent troisième, homme téméraire & superbe (orgueilleux),
contre l'Empereur Philippe.
Tout
l'esprit des Papes en ce temps-là fut occupé à brasser les guerres
par lesquelles ils maintenaient leur tyrannie
contre les
Empereurs, ce qu'ils ont continué durant l'espace
de 200.
ans.
Mais
à peine l'Empereur fut-il arrivé en Chypre, que le
Pape se
saisit de l'Apouille, laquelle il avait désirée depuis
si
longtemps, & parce qu'après le retour de l'Empereur il ne
pouvait la retenir par force, il s'aida d'une nouvelle foudre
d'excommunication forgée & aiguisée en ce Concile de Latran,
par laquelle il darda contre l'Empereur pour
le chasser au
loin, comme nous le dirons ci-après.
Le
même Grégoire fît recueillir, par un certain Raymond de Barcelone,
les constitutions décrétales, dont il environna & étreignit
tellement comme de chaînes d'aimant, cette hiérarchie Romaine,
qu'elle ne pouvait branler ni tomber à qu'il ce pensait. Cela fut
fait environ l'an 1233.
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Table des
matières |
1)
Lexicographe grec, probablement du onzième siècle. 2)
Mot hébreu (voir Daniel,
XI, 38)
qui signifie «des forteresses, “et
qui s'applique, sans doute, à Jupiter Capilolin qu'adorait Antiochus
Épiphane. Ce mot a été pris à tort pour un nom propre par les
Septante et la Vulgate: ‘Deum
autem Maozim venerabitur.’
Goulart, empruntant cette fausse traduction, a vu, dans ce dieu, le
type de celui que, dans la messe et dans les processions, on honore
avec de l'or et de l'argent. |
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