MÉDITATIONS EN MARGE DE L'ÉVANGILE SELON SAINT LUC
LA BREBIS
PERDUE
LUC, XV, 1 à 10.
Ce jour-là ce n'étaient pas
particulièrement les infirmes et les malades qui
entouraient Jésus, mais les péagers, les gens
de mauvaise vie... Était-ce en Judée, en
Galilée, dans Jéricho, la ville aux grandes
palmes, ou à Capernaüm, la cité marchande
où s'arrêtaient les caravanes, peu importe.
Nous Imaginons facilement le tableau : les gens de plaisir
et d'argent, foule tapageuse et vulgaire, ayant
pactisé avec l'envahisseur. D'autre part les
pharisiens, gens distingués pleins de décorum,
ironiques, méprisants. Mais aujourd'hui nous leur
savons gré, à ces adversaires constants du
Sauveur, puisque leurs critiques, (ils « grommelaient
», dit une traduction catholique) Lui donnent
l'occasion de raconter trois paraboles qui sont trois joyaux
dans l'écrin de l'Évangile.
La brebis perdue... Avec le chapitre X de Saint
Jean, elle est dans toutes les mémoires et
profondément inscrite dans le coeur des
chrétiens. Dans le désert où il
s'égarait, où demain il s'égarera
peut-être encore, chacun d'entre nous a
été cherché par le Bon Berger et
tendrement ramené au bercail. Ce qui me frappe
aujourd'hui c'est la joie des anges dans le ciel. Par le
Sauveur et avec Lui, ils savent le prix infini des
âmes, Tandis que les pharisiens moqueurs ne voyaient
que ces pécheurs entourant le Maître, les anges
se penchant là-haut, discernaient sous les figures
fardées des femmes ou les mains crochues des
agioteurs, des êtres affamés de pureté,
de justice, de dévouement, des âmes
précieuses, humiliées de leur
péché, ces âmes que le Fils de l'homme
est venu chercher, sauver, transformer. Chaque fois que
l'une d'entre elles s'ouvre à Lui, se repent,
écoute l'appel divin, le ciel tressaille
d'allégresse et les esprits bienheureux chantent le
cantique de l'Agneau.
En y songeant, la maison du Père nous
paraît plus proche, et plus merveilleux cet amour qui
en est la loi suprême et s'est
incarné en Celui qui est venu nous
montrer le chemin de cette maison. L'Église de
Jésus-Christ doit aussi connaître toujours
mieux la joie des anges à la conversion des
pécheurs. Comme le dit Calvin : « C'est bien
raison que nous, qui y avons même intérêt
qu'eux, leur tenions compagnie en cette réjouissance
».
.
L'ENFANT
PRODIGUE
LUC, XV, 11 à 24.
Au Tonkin, il y a quarante ans environ. Dans un poste
militaire de la haute région, près de la
frontière de Chine, une salle d'école, un
soir. Des bancs, des tables, des lampes à
pétrole qu'entoure l'essaim des insectes et des
moustiques, la porte ouverte sur la nuit mystérieuse,
la forêt vierge toute proche, des montagnes à
peine explorées et que visitent encore les Pavillons
noirs. L'auditoire de soldats de la Légion
étrangère et de l'infanterie coloniale est
attentif, sérieux, nombreux. Le jeune aumônier
vêtu de blanc avait peut-être sagement
préparé un sermon, mais quand il voit devant
lui ces figures viriles, dont beaucoup portent la marque de
vies tourmentées, il prend tout simplement son
Nouveau Testament et lit en la commentant la parabole de
l'enfant prodigue. Sa parole est sans éloquence, et
encore inexpérimentée, mais c'est un appel
direct d'homme à homme. Et l'Évangile est
là dans sa simplicité qui dépasse
infiniment tous les discours de la sagesse humaine,
l'Évangile qui, sur la terre lointaine, a un accent
puissant et fort et qui. est en toute réalité
le seul message qui doive être apporté à
ces déracinés. Une prière fervente,
l'Oraison dominicale, récitée par beaucoup, un
chant de cantique, la bénédiction.
Une femme qui s'était glissée dans
le fond de la salle et accompagnait la prédication de
sa prière silencieuse, attend son mari près de
la porte. Un soldat vient à elle et la salue
respectueusement.
« Me reconnaissez-vous, Madame ? Je suis le
fils de M. Un Tel (un nom très honorablement connu
dans le monde catholique de ma ville natale). Ce qu'a dit M.
l'aumônier est fait pour moi. J'ai eu une jeunesse
mauvaise et débauchée, J'ai dû fuir la
maison paternelle; je suis à la Légion. Mais
ce soir J'ai le désir intense du pardon de mon
père. M. le Pasteur 'pourrait-il lui écrire ?
»
L'aumônier a rejoint sa femme; c'est lui
qui répond à ce légionnaire. Oui,
dès le lendemain il écrira au père (la
réponse vint plus tard, pleine de
miséricorde); puis mettant sa main sur
l'épaule du garçon, il lui parle longuement du
Père Céleste qui l'attend et dont aujourd'hui
les bras se sont ouverts pour lui.
Quand, plus tard, le pasteur et sa jeune femme
s'agenouillèrent pour leur prière commune,
leurs coeurs débordaient de reconnaissance et
d'émotion. Le Sauveur! L'amour du Père! ces
mots prenaient pour eux plus de puissance et d'ardente
vérité.
Cette histoire s'est renouvelée plusieurs
fois sous des formes diverses dans ce pays lointain
où tant de jeunesses désaxées
cherchaient un refuge. Elle est de tous les temps et peut
s'accomplir en tous lieux. C'est le drame de
l'humanité perdue, et retrouvée par Dieu,
quelle contient.
.
LE FILS
AÎNÉ
LUC, XV, 25 à 32.
- Mon Père, depuis mon enfance tu m'as pris dans
ta maison, et depuis ma jeunesse l'ai essayé de te
servir. Pourtant, regarde, ma vie religieuse est
restée médiocre. Je sais si mai faire rayonner
la lumière que tu as mise dans mon coeur; ma joie est
faible, intermittente; ma foi, ma charité manquent de
puissance et d'ardeur. Voici mon frère qui t'a
longtemps oublié et à qui tu viens d'accorder
ton pardon et ton salut. je m'associe
à ta joie, mon Père, mais je m'étonne
de voir des grâces spirituelles répandues sur
lui avec tant d'abondance, tandis que ma piété
reste si pauvre, si sèche, et que je sais si mai
rendre témoignage à ton amour.
- Mon enfant, j'ai été avec toi
tout au long du chemin de ta vie et mon trésor t'a
été constamment ouvert. Pourquoi n'as-tu pas
su y puiser davantage? Tu parles de sécheresse, elle
est dans ton coeur. Il s'y est formé comme une
accoutumance, une cuirasse d'habitude et
d'indifférence qui t'empêche de saisir la
plénitude de la joie que le veux te donner.
Ton frère a vécu longtemps dans les
ténèbres, il a connu mieux que toi les affres
du remords. Il était perdu,
irrémédiablement perdu, semblait-il, et
maintenant il est retrouvé, il est avec nous, dans la
maison. Comprends-tu ce que cela veut dire et ne peux-tu pas
t'oublier toi-même, ne plus penser à ta
médiocrité pour ne regarder qu'à lui et
vivre de son bonheur ? Tu as beaucoup reçu
spirituellement; compte les bienfaits de ton Dieu, ne
t'appesantis pas sur ton passé, mais va de l'avant,
mon enfant, avec cette force que je t'ai donnée. Si
d'autres te devancent sur la route, que ton coeur en
bondisse d'allégresse! Il y a encore tant d'enfants
prodigues éloignés de moi. Au lieu de te
désoler de ta pauvreté et de tes
déficits, va vers eux, aime-les, prie pour eux,
dis-leur que je les attends.
- Mon Père, que ton règne vienne,
que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
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L'ÉCONOME
INFIDÈLE
LUC,
XVI, 1 à 18.
La plus mystérieuse, la plus étrange des
paraboles; Luc est seul à la rapporter. On en a
donné beaucoup d'interprétations diverses et
même parfois tendancieuses, surtout à cause du
verset 9.
Telle qu'elle est, dans sa forme paradoxale,
cette similitude nous paraît
comporter pour nous plusieurs enseignements. Tout d'abord
Jésus a loué la prudence des enfants du
siècle et au verset
10 Il parle de la fidélité dans
les petites choses « et dans « les richesses
Injustes ».
Il y a parmi nous souvent une tendance à
négliger ce genre de fidélité. Des
chrétiens très idéalistes regardent de
haut les choses de la terre et oublient ainsi de mettre en
pratique leur Idéal dans le détail de la vie
quotidienne. La conscience scrupuleuse en toute chose,
l'exactitude dans le travail, dans la correspondance, dans
l'administration des biens qui nous sont confiés,
l'entière loyauté dans toutes les transactions
de l'existence, sont une manière simple,
cachée, mais véritable, d'être
fidèle à l'esprit de
Jésus-Christ.
Et les richesses injustes? « le Mammon
injuste », dit le grec ? Le Sauveur nous indique ici
que nos possessions ne nous sont que prêtées,
quelles qu'elles soient, Notre position à
l'égard de Dieu est semblable à celle de
l'économe vis-à-vis de son Maître.
« Tout vient de Toi et nous recevons de ta main ce que
nous t'offrons », disait le roi David à
l'Éternel. Le verset
12 de notre chapitre nous aide à
trouver la lumière. « Si vous n'avez pas
été fidèles dans ce qui est à
autrui, qui vous confiera ce qui est à vous ? »
Le vrai sens de la propriété nous est ici
montré. Ce qui nous appartient dans le domaine
matériel, intellectuel, de l'affection, nous est
prêté pour que fidèlement nous puissions
donner à autrui, faire part à d'autres de nos
richesses, partager avec joie et ainsi nous garder de cette
avarice qui, fille de l'égoïsme, peut toujours
se cacher dans nos coeurs.
Ce dont nous sommes les possesseurs
attitrés, ce sont les richesses véritables,
cet amour que Dieu répand sur les siens et qui
devient dans les âmes amour du prochain,
charité, dévouement. « Héritiers
de Dieu, cohéritiers de Christ », disait
l'apôtre Paul.
« Ce qui est à vous : le Sauveur par
ce mot remarquable nous ouvre une perspective Inattendue sur
l'état des enfants de Dieu dans le ciel où
tout ce qu'ils possèdent sera parfaitement identique
à leur être et les fera grandir
éternellement dans la connaissance et l'amour de
Dieu. » (Bonnet.)
.
LE MAUVAIS RICHE ET
LAZARE
LUC, XVI, 19 à 31.
Est-ce une parabole, est-ce une histoire
véritable? Jésus a-t-il rencontré sur
son chemin le malheureux Lazare malade, attendant à
la porte du riche l'aumône de quelques croûtes
de pain ?
Nous, nous l'avons jadis vu, homme
déguenillé, femme dans la misère,
enfant bleui de froid, à la porte d'un restaurant
à la mode ou d'un lieu de plaisir, regardant
s'arrêter les autos luxueuses et entrer les oisifs...
Peut-être hélas! un jour, l'un de ces pauvres
a-t-il, avec envie, contemplé, à travers la
vitre de notre maison familiale, notre repas confortable et
joyeux. Tous les soirs, dans nos grandes villes, une foule
d'errants ne savent où dormir, et il y a
d'infâmes taudis où parents et enfants
s'entassent dans un manque d'hygiène et une
effrayante promiscuité.
Même dans la mort, en apparence,
l'inégalité continue. En grande pompe le riche
s'en va à sa dernière demeure sous des
couronnes de fleurs; et j'ai dans le souvenir l'infinie
tristesse de certains misérables enterrements, dans
la fosse commune d'une de nos grands cimetières, avec
la hâte des croque-morts et l'absence de tout
cortège d'amis derrière le pauvre
cercueil,
Là-haut, le réveil dans la maison
du Père. Jésus n'a certes jamais voulu dire
que la pauvreté fût un brevet qui y donnait
accès, ni que la richesse d'ici-bas en fermât
la porte à ceux qui la possédaient, Le riche
de la parabole était un égoïste sans
coeur et probablement Lazare acceptait son épreuve
comme job (à qui il ressemble) avec courage, patience
et fol.
La richesse avec tout ce qu'elle comporte de
facilités de vie, de flatteries, de nonchalance,
d'ignorance de la souffrance d'autrui, est un piège,
une tentation souvent terrible. « Ne me donne ni
pauvreté ni richesse », dit le livre des
Proverbes, accorde-moi le pain qui m'est nécessaire,
» Même au point de vue humain,
c'est la parole de la sagesse. Mais bénis soient ceux
et celles qui, dans tant de milieux et de domaines divers,
prennent à coeur de panser les plaies des Lazares
modernes et de lutter pied à pied contre la
misère.
Quant au tableau de l'éternité que
Jésus nous donne à la fin de cette histoire,
il est Imagé à la manière
hébraïque pour être mieux compris des
auditeurs du Sauveur. Ce qu'il met surtout en lumière
c'est la nécessité de la repentance et de la
foi pour échapper à la condamnation, et
l'urgence d'écouter dès aujourd'hui le message
de Dieu, tel qu'il nous est présenté.
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EXHORTATIONS DIVERSES
LUC, XVII, 1 à 10.
Qu'est-ce que le scandale ? C'est la réaction
suscitée dans les âmes par une parole ou un
spectacle mauvais qui les trouble et les déconcerte.
Pourquoi Jésus a-t-il dit : « il est impossible
qu'il n'arrive pas des scandales »; ce que Matthieu
exprime encore plus fortement en disant : « Il est
nécessaire qu'il arrive des scandales »
?
C'est là un des mystères de Dieu.
La lutte entre Lui et Satan est commencée depuis les
origines de notre monde. Calvin écrit à ce
sujet : « Il faut tenir pour résolu que les
hommes soient sujets à scandales afin d'exercer la
foi des siens et de séparer les hypocrites comme la
balle et la paille d'avec le bon blé. Sur cela si
quelqu'un murmure et se plaint que c'est une chose absurde
que le Seigneur lâche la bride à Satan afin
qu'il machine la ruine et la perdition des hommes, je
réponds que notre devoir est de parler et de penser
en toute révérence des secrets conseils de
Dieu desquels ceci en est un. »
Mais a dit le Seigneur : « Malheur à
celui par qui le scandale arrive! » Plus loin Il parle
« d'un seul de ces petits qui peuvent être
scandalisés », avec une grande
sévérité pour ceux qui les
scandalisent, L'enfant de Dieu peut librement agir selon sa
conscience, se moquer du qu'en dira-t-on;
mais il doit, d'autre part, veiller sur sa conduite et
s'assurer que sa liberté même ne soit pas, pour
d'autres, une occasion de chute, une tentation, un mauvais
exemple; s'abstenir de ce qu'il pourrait peut-être
personnellement faire sans Inconvénient, mais qui
entraînerait d'autres plus faibles à agir comme
lui à leur détriment. Dans le grand scandale
actuel, devant le large fleuve d'iniquité qui inonde
la terre, que Dieu revête ses enfants de sagesse, de
prudence, de sincérité, de pureté, afin
qu'ils donnent au monde l'exemple de la
vérité.
Et l'exemple de l'amour aussi! Trop souvent les
chrétiens ont par leurs désunions, leurs
rancunes, scandalise ceux qui les regardaient vivre, Ils
n'ont pas toujours su pardonner. Le vrai pardon, sans
arrière-pensée, celui qui ne revient pas sur
les offenses du passé, mais qui dit au repentir :
« c'est fini, c'est oublié, ta faute est
effacée », est la meilleure prédication,
un don de Dieu, le fruit de la foi. Les apôtres le
sentaient. quand Jésus leur a parlé de ce
pardon, ils ont dit : « Augmente-nous la foi! »
Elle seule peut s'emparer de la puissance de Dieu et dans
les coeurs accomplir des miracles.
Se garder pur, aimer, pardonner, croire... Le
serviteur accomplit ainsi l'oeuvre de son Maître.
Peut-être pense-t-il alors qu'il peut se
féliciter, se glorifier! Dans une courte parabole
Jésus lui montre qu'il n'est qu'un serviteur inutile,
ne méritant aucune louange particulière,
n'ayant rien fait de remarquable. Les plus grands saints
n'ont comme les plus misérables pécheurs,
aucun droit devant Dieu. Tout est un don gratuit de la
miséricorde divine. Saint Paul, le grand
apôtre, le savait bien quand Il écrivait aux
Romains : « C'est de Lui et par Lui et pour Lui que
sont toutes choses! À Lui soit la gloire dans tous
les siècles! »
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INGRATITUDE ET
RECONNAISSANCE
LUC, XVII, 11 à 19.
Pendant sa vie terrestre Jésus a-t-il très
souvent rencontré la reconnaissance ? Parmi tous les
malades qu'il a guéris, les gens qu'il a nourris,
ceux qu'Il a consolés, enseignés, combien y en
a-t-il qui aient su Lui témoigner leur gratitude
?
Sur le chemin de Jérusalem, pendant un
voyage qui sera pour Lui le dernier, Il est appelé
par dix lépreux. La lèpre était
à l'état endémique en Palestine et la
loi de Moïse ordonnait à ceux qui en
étaient atteints de vivre à part, faisant leur
demeure hors des villes et des villages et signalant leur
présence sur les routes par le cri : « Impur!
Impur! » Existence terrible, coupée de la vie
sociale, familiale, normale... Cette épreuve,
pensaient les Juifs, était la punition de grands
péchés. Aussi quelle espérance
étreignait le coeur de ces dix malheureux quand ils
firent appel au Sauveur! Nous admirons leur foi et leur
obéissance. Tout de suite, sur le conseil de
Jésus, ils se mettent en chemin pour aller selon la
prescription de la loi
(Lévitique XIV) se montrer aux
prêtres qui seuls pouvaient constater la
guérison et après purification leur permettre
de rentrer dans l'existence commune.
Comment est-il possible qu'un seul sur les dix
(un Samaritain) ait pensé, se voyant guéri,
à revenir se jeter aux pieds du Sauveur et rendre
gloire à Dieu ? La reconnaissance, ce sentiment si
doux, si naturel, si bienfaisant, ne remplissait-il pas
leurs coeurs à tous?
Ne jetons pas trop vite l'anathème
à ces ingrats. Laissons la lumière de Dieu
inonder nos coeurs et regardons en nous-mêmes.
Joinville raconte que, discutant avec Saint Louis sur la
lèpre, celui-ci lui avait dit : « Vous devez
savoir, qu'il n'y a nulle si laide mazelerie (lèpre)
que d'être en., péché mortel. »
Dieu nous a délivrés d'un mal plus tenace,
plus effrayant que celui des lépreux sur le chemin de
Jérusalem. Il veut chaque jour
nous en guérir, comme à nouveau, nous
purifier, nous sanctifier. À cette grâce
Infinie qui est Sa grâce, il en ajoute d'autres. Tout
ce qui nous entoure, tout ce qui peut mettre sur notre
sentier de la lumière et des fleurs (affections,
travail, santé, etc ... ), tout vient de Lui et nous
ne saurions compter ses bienfaits sans adorer comme nous le
conseille le cantique. Le faisons-nous constamment ? N'y
a-t-il pas oubli, négligence, ingratitude de notre
part, parfois même murmure, et le chant de
reconnaissance est-il toujours sur nos lèvres
?
Ingratitude vis-à-vis de Dieu, ingratitude
aussi vis-à-vis de nos compagnons de route.
L'égoïsme et l'orgueil enflent
démesurément à nos yeux le peu que nous
pouvons faire pour eux et nous empêchent de discerner
tout ce qu'ils font pour nous. Oh! la douceur de
l'humilité qui reçoit à genoux les
grâces divines et avec un épanouissement
merveilleux de l'âme les bienfaits, les services du
prochain. Soeur de la reconnaissance, elles se tendent la
main et illuminent ensemble les coeurs qui les accueillent.
La vie est meilleure à cause d'elles.
Seigneur Jésus, donne-nous aujourd'hui de
nous joindre au seul lépreux, à
l'étranger qui revint te rendre grâces et de
nous prosterner à tes pieds en glorifiant Dieu.
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LE ROYAUME DE
DIEU
LUC, XVII, 20 à 37.
Le royaume de Dieu! Ce terme que le Sauveur emploie
souvent a dans sa bouche des significations diverses. Dans
les paraboles du grain de sénevé et du levain,
le Seigneur parle de son Église à qui Il donne
ce titre glorieux de Royaume de Dieu qu'elle doit
posséder un jour. Dans le récit d'aujourd'hui,
à la question d'un Pharisien demandant quand ce
Royaume viendrait, Jésus répond : « Il
est là. Il est au milieu de vous, ou : au dedans de
vous », selon les traductions.
Autour du Maître, le petit groupe des
disciples constitue déjà
l'Église, mais ce à quoi Jésus fait
allusion dans ce passage, c'est à ce règne de
Dieu dans les âmes qui se sont données à
Lui, à cette réalité mystérieuse
que les yeux ne peuvent encore contempler, mais qui, pour
ceux à qui Dieu a fait la grâce de se
révéler et qui ont accepté sa
domination, transforme toute l'existence. Le règne de
Dieu, c'est Marie assise aux pieds du Sauveur, c'est
Lévi quittant ses péages, Jean et Jacques la
barque de leur père. C'est Pierre disant : « Tu
es le Christ, le saint de Dieu. » Demain ce sera Paul
sur le chemin de Damas...
Mais ce royaume qui s'étend dans les
âmes, le Sauveur le dira à Pilate : « Il
n'est pas de ce monde », Roi de la terre, le Fils de
l'homme l'est en espérance. Il le sera autrement
quand son jour viendra. Alors Il brillera comme
l'éclair d'un côté du ciel à
l'autre et tous le connaîtront comme tel.
Les hommes ne pensent pas beaucoup, ne pensent
pas assez à cet avènement du Fils de Dieu.
L'Église elle-même l'a trop souvent
oublié. Qui sait si nos épreuves actuelles,
secouant notre torpeur, n'ont pas pour but de nous faire
lever les yeux dans l'attente. Jésus parle à
ses disciples des gens de Sodome qui, dans la
tranquillité d'une vie facile, ne songeaient pas au
jugement de Dieu. Hier nous vivions peut-être ainsi,
comme la plaine toute calme et endormie sous le soleil de
midi avant l'orage. Celui-ci a fondu brusquement sur nous et
nous comprenons maintenant qu'il nous faut faire « bon
guet sans prendre une heure d'assurance », comme dit
Calvin.
Sera-ce demain que notre Seigneur viendra? ou
dans longtemps quand la terre aura connu encore d'autres
convulsions ? Peu importe, Il viendra, veillons!
« Où sera-ce ? » demandaient les
disciples. « Les aigles s'assembleront où sera
le corps, répond le Seigneur. Là où le
paraîtrai mes serviteurs me reconnaîtront. je
leur en ferai la grâce s'ils s'attendent à moi
et je les rassemblerai autour de moi. »
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